La ville du XVIIIe siècle est un espace
privilégié d'observation des évolutions de la vie sociale de la noblesse.
Sous l'influence conjuguée d'une pression démographique croissante1 et d'une
mainmise royale plus ferme que jamais, le visage des cités modernes s'est
profondément transformé. La mise en place de nouveaux équilibres a modifié
les règles du jeu social et politique. Les élites municipales
traditionnelles subissent la concurrence des “parvenus” mais
également d'une noblesse qui s'urbanise massivement et s'adapte aux modes
de vie citadins tout en y imposant sa marque.
La culture et les pratiques sociales des
élites nobiliaires, forgées dans la “cage dorée” de
Versailles, se transportent à la ville, et si Paris a été le laboratoire de
cette translation, au XVIIIe siècle la plupart des villes de province se
conforment à ce modèle, à tel point que la civilité classique devient
“urbanité”. Glissement sémantique qui porte témoignage de
l'emprise du cadre urbain sur les formes des relations sociales.
Au contact des citadins, la noblesse s'est
ouverte à de nouvelles formes de sociabilité qu'elle a tenté de dominer et
qui ont renforcé à certains égards sa cohésion. Dans la confrontation
quotidienne avec les autres composantes de la société urbaine, elle a dû
affirmer son identité et affûter les moyens de la défendre, dont l'esprit
de caste n'est que la partie la plus visible.
La ville, comme théâtre, permet de mettre
à jour les lignes de tension qui traversent la société sans toujours
recouper les clivages identifiés au travers de l'imaginaire des trois
ordres. Les conflits, les scandales, font apparaître la multiplicité des
appartenances nobiliaires et l'importance des réseaux de relations dans le
fonctionnement interne de la noblesse.
De telles évolutions conduisent à
s'interroger, dans le cadre d'une réflexion sur l'interaction entre ville
et solidarité, sur une éventuelle réorganisation des solidarités
nobiliaires dans le contexte urbain.
La Provence présente de ce point de vue
une configuration bien particulière du fait du dédoublement de la fonction
de ville capitale entre deux centres urbains distinct : Marseille et Aix.
Elle abrite en outre le port d'attache de la flotte de Méditerranée
(Toulon) qui se distingue nettement du réseau de villes modestes de
l'intérieur du pays. Autant de situations qui créent des conditions
différenciées pour l'expression des solidarités nobiliaires.
I. La ville : un pôle d'agrégation
L'attraction urbaine agit sur la noblesse
en Provence comme ailleurs, et se manifeste par une présence nobiliaire
dans la plupart des villes. Dans une province qui compte officiellement 35
“villes” 2
, on ne trouve cependant des gentilshommes en nombre significatif que
dans les plus importantes, et leur part dans la population totale est loin
d'être constante. C'est que le choix de la résidence urbaine reflète à la
fois la hiérarchie des fortunes et la variété des conditions.
La physionomie sociale des cités,
profondément affectée par la proportion et la qualité de la noblesse qui y
réside, présente différentes situations qui sont plus ou moins favorables à
la constitution d'un groupe nobiliaire solidaire, c'est-à-dire
interdépendant et porté à l'entraide.
Visage des cités provençales
La sociologie urbaine de la Provence
laisse entrevoir de grandes disparités. Le contraste le plus frappant
oppose Marseille, la ville du négoce et Aix, la“cité du sang bleu” 3, qui
présentent des structures sociales profondément divergentes.
Le port méditerranéen, contrairement aux
autres grandes villes du royaume, n'est pas dominé par l'aristocratie, mais
par un groupe de négociants parfois fort riches qui ne semblent guère se
soucier de noblesse. Au contraire, Aix se caractérise par une forte
proportion de familles nobles4,
qui tiennent dans le creux de leur main le fonctionnement politique et
économique de la ville.
Dans le premier cas, la dynamique
commerciale l'emporte sur les modèles de réussite traditionnels, au point
que les élites urbaines ne manifestent pas de désir particulier d'entrer
dans les rangs du second ordre5.
La ville se contente de son rôle de capitale économique, et même se
détourne de l'arrière-pays au profit d'une ouverture très large sur la
Méditerranée.
Capitale politique, siège de Parlement et
d'Intendance, Aix étend son influence à l'ensemble de la province par le
biais des puissantes familles qui en ont fait leur lieu de résidence
privilégié. La ville vit au rythme des sessions parlementaires et des
affaires politiques et religieuses qui agitent le monde des robins.
La troisième ville de Provence offre
également un visage particulier. En effet, le port de Toulon abrite un
grand nombre d'officiers de marine en résidence plus ou moins prolongée et
“qui comptent pour beaucoup dans le tissu nobiliaire” 6 de la société
urbaine. Les familles nobles sont proportionnellement plus nombreuses que
partout ailleurs et cependant participent moins qu'à Aix à la vie interne
de la cité. Cela tient sans doute à la part importante d'étrangers venant
des autres provinces pour servir le roi7.
Au-delà de ces concentrations urbaines
importantes8,
les “principales villes de Provence” sont en Provence
orientale, “Draguignan, Brignolles, Saint Maximin, Grasse, Vence,
Antibes, Antrevaux, (…), Yeres et Castellane ” 9.
La présence nobiliaire dans ces villes
n'est pas négligeable, comme à Grasse et Draguignan où l'on trouve une
vingtaine de familles10,
mais les conditions locales et les caractères de ces familles influent pour
beaucoup sur la mise en place de groupes de solidarité à fondement
nobiliaire.
Sociologie urbaine et solidarités de groupes
L'impact de la sociologie urbaine sur les
relations intra-nobiliaires est incontestable et notamment en ce qui
concerne la constitution de groupes de solidarité. En effet, les familles
nobles n'adoptent pas les mêmes comportements selon qu'elles sont
nombreuses et dominantes, ou rares et au pouvoir limité. D'autre part, la
composition même de la noblesse définit un type de relation avec le reste
des composantes de la société urbaine.
Toutes les conditions sont réunies à
Toulon pour favoriser l'existence d'un groupe nobiliaire étroitement soudé.
L'exercice commun de fonctions militaires et la composante étrangère
importante explique un certain repli des gentilshommes sur eux-mêmes et
l'existence d'une ligne de démarcation très nette entre eux et les membres
du Tiers État. Cette coupure est encore aggravée par leur faible
implication dans la vie politique de la cité et leur participation très
limitée à la gestion des affaires communales11.
À Aix, en revanche, où la noblesse très
nombreuse est solidement ancrée, la solidarité du groupe nobiliaire repose
davantage sur un effort commun de domination de la ville, voire de la
province.
Dans le cas de villes plus modestes comme
Grasse ou Draguignan, le groupe des nobles est plus limité, mais peut
constituer une élite dirigeante à l'échelle de la communauté, tout en étant
davantage perméable aux échanges avec les élites roturières, dont ils ne
sont pas si éloignés du fait de leur origine et de leur mode de vie. En
effet, avec la diminution du nombre d'habitants, les contrastes de fortune
et de puissance ont tendance à s'atténuer entre nobles et roturiers. Cela
tient au fait que les familles de quelque considération ont à la fois les
moyens et la volonté de s'installer dans les centres urbains les plus
conformes à leurs besoins.
Il semble donc au premier abord que la
noblesse se constitue plus facilement en groupe de solidarité fermé et
exclusif lorsqu'elle est nombreuse, et que la faiblesse de sa
représentation la conduit au contraire à s'ouvrir aux autres éléments de la
société urbaine. La solidarité de groupe, qui est une solidarité de type
horizontal, repose sur le partage d'une identité commune qui permet à
chacun de se reconnaître dans les personnes de sa condition et de se
différencier du reste des habitants de la cité.
II. Identité et solidarité
Le poids de la reconnaissance identitaire
dans la mise en œuvre de solidarités spécifiquement nobiliaires se
manifeste au travers de deux types d'attitudes contradictoires. La
sociabilité urbaine, dominée par les modèles aristocratiques permet à la
fois de développer des solidarités ouvertes, coopérantes avec les autres
élites urbaines, et conduit inévitablement au rejet et au mépris des
membres du Tiers État.
Au contraire des rares seigneurs résidant
exclusivement sur leurs terres et dont la vie sociale se limite à quelques
visites de voisins, d'amis ou de gentilshommes de passage, la noblesse
urbanisée partage un cadre de vie commun qui tend à renforcer les liens et
le sentiment d'une appartenance collective. La sociabilité aristocratique
favorise ainsi la mise en place d'un sentiment de solidarité de groupe,
dont les membres sont les acteurs de la “bonne société”. Une
société choisie, où ne pénètre pas qui veut, mais une société relativement
ouverte à condition d'en maîtriser les règles. Le gentilhomme ne peut
s'adonner à aucune tâche mécanique ou vile.
En revanche, il doit employer son loisir à
des activités valorisantes telles que :
la guerre, la chasse, le jeu, la danse,
la culture de l'esprit, le conseil du roi, la mise en valeur des domaines” 12.
La bourgeoisie urbaine tend fortement à
imiter et à mettre en pratique ces valeurs, qui correspondent à la marque
d'une supériorité sociale à laquelle elle aspire. Vivre noblement consiste
certes à ne pas exercer d'activité dégradante, mais au XVIIIe siècle il
s'agit plus que jamais de mener une vie sociale intense. La ville offre de
ce point de vue des occasions multipliées de distractions et de rencontres.
C'est à Paris, bien sûr, que la
sociabilité urbaine est la plus riche. Les jeunes gens en particulier font
grand cas de la capitale. Mademoiselle de Ricard Brégançon, épouse du
vicomte de Narbonne ne parle que de “très beau bal” 13 et
d'amusements lorsqu'elle décrit ses occupations à sa mère. De même, le
marquis de Villeneuve-Trans écrivant à l'abbé de Trans qui séjourne à Paris
lui conseille : “amusez-vous bien mon cher frère et profitez des
agréments de la capitale” 14.
Les occasions de se distraire sont plus
rares en Provence, mais on se reçoit également, et les spectacles font bien
souvent salle comble, même si les villes tardent à se doter de lieux de
représentation et que nombre de gentilshommes ayant goûté aux plaisirs de
la capitale les trouvent bien fades et sans attraits15.
Mémorialistes et chroniqueurs affirment
que la promenade est au début du siècle une des rares distractions de la
bonne société provençale, sur le Cours à Aix, ou sur la place du marché, à
Draguignan. Elle offre l'occasion aux élites urbaines de se rencontrer mais
aussi de se montrer et de s'évaluer. Avec l'arrivée du maréchal de Villars,
gouverneur de la province, les bals et le jeu font leur apparition et ne
vont plus cesser d'occuper les soirées de la haute société aixoise16.
Mais c'est Marseille qui est souvent
décrite comme la ville de la fête et quelque peu de la débauche17. La vie
culturelle est assez médiocre, et se borne à quelques concerts et à la
comédie tandis que la vie intellectuelle reproduit avec un léger décalage
le modèle parisien : salons, académies puis loges maçonniques18 se
développent dans la deuxième moitié du siècle. Enfin, les gentilshommes
provençaux ne dédaignent pas de se mêler au Tiers Etat au sein des
confréries de pénitents19.
Il arrive ainsi que le groupe nobiliaire
s'élargisse aux “plus apparens”, aux élites bourgeoises qui
partagent ses loisirs. Toutes ces activités ont pour particularité de
brasser, dans une certaine mesure la noblesse et les autres groupes sociaux
et de favoriser une certaine fusion des élites. De nouvelles alliances se
constituent, permettant à des familles illustres mais ruinées de “fumer
leurs terres” grâce à une dot bourgeoise. Quelques roturiers sont
anoblis, mais il s'agit de cas exceptionnels, souvent des avocats brillants
ayant accédé à la fonction d'assesseur dans le cas d'Aix.
La solidarité comme obligation : les lois de la civilité
Le fait de noblesse constitue le fondement
d'une identité dont il est difficile de nier l'existence, même si elle
demeure confuse. Les aristocrates ont développé des stratégies complexes de
reconnaissance et de distinction sociale afin de tenir à distance roturiers
et faux nobles.
En contrepartie, l'appartenance au second
ordre ouvre droit à toutes sortes de privilèges et d'égards dont
l'inscription dans le fonctionnement de la monarchie n'est qu'un aspect.
Les règles de la civilité reposent sur l'idée qu'il faut rendre à chacun ce
qui lui est dû, et que les personnes de condition sont obligées entre
elles. Les gentilshommes se font donc un devoir de porter secours à leurs
semblables lorsqu'ils les trouvent en difficulté. Ils prennent leur
défense, leur offrent spontanément de l'aide, ou simplement de la compagnie
même s'ils ne les connaissent pas personnellement20.
Plus que de solidarité, il s'agit ici de
civilité. La connaissance et le respect de ces codes de comportement
permettent de renforcer le sentiment d'appartenance de la noblesse ou au
contraire d'identifier ceux qui prétendent s'y agréger sans en présenter
les caractères indispensables. Les relations entre la noblesse et les
élites bourgeoises trouvent ainsi leurs limites dans le repli identitaire
qui caractérise l'aristocratie du siècle des Lumières.
“ Entre 1500 et 1700, le tissu
communautaire des sociétés urbaines françaises se déchire ” 21 et cette
évolution ne fait que s'accentuer au siècle suivant. La ville porte les
stigmates de la rupture des liens entre les notables et le peuple, entre
les aristocrates et les élites roturières.
La distinction entre nobles et roturiers
se marque dans l'espace urbain qui développe une ségrégation spatiale. Les
opérations immobilières de la deuxième moitié du XVIIIe siècle permettent
d'ajouter à la ségrégation verticale une ségrégation par quartiers. Les
îlots neufs sont investis par les plus opulents et les plus distingués.
À Aix, il faut avoir son adresse “sur
le cour” 22
ou dans le quartier Mazarine, même s'il existe une“polynucléarité”
de l'habitat nobiliaire dans cette ville23,
à Toulon la noblesse militaire s'installe de préférence dans le quartier St
Roch, à Draguignan elle se concentre autour de la place du marché, mais son
faible nombre la conduit à se rapprocher plus facilement des plus apparents
et notamment des familles consulaires.
En fait, plus encore que dans l'habitat,
c'est dans les attitudes que se lit le mépris de la noblesse pour les
classes inférieures comme le montre une description des promenades aixoises
:
“Le cours devint le rendez-vous et la
promenade journalière des habitants d'Aix. Les familles nobles et les
parlementaires… s'y montraient dans leurs carrosses… et il faut le dire,
lorsque quelques uns de leurs membres paraissaient à pied ils avaient grand
soin de ne point se mêler avec la bourgeoisie, encore moins avec les gens
de palais et les marchands. (…)” 24
.
Même dans les loges maçonniques et les
confréries de pénitents, dont l'aspect égalitaire est mis en avant, la
noblesse tient le haut du pavé et évite de se compromettre dans une société
trop mêlée25.
Le sentiment d'une supériorité naturelle
du second ordre conduit parfois à des comportements de violence à l'égard
du monde roturier, menu peuple et bourgeois confondus dans le même mépris.
C'est le cas des turbulences de la jeunesse, à l'égard de laquelle les
aristocrates provençaux manifestent une grande tolérance et qu'ils
n'hésitent pas à protéger des foudres de la justice royale ou de la
vindicte populaire. En effet, qu'ils soient gardes de la Marine ou oisifs
débauchés, les jeunes gens coupables de crimes parfois sanglants
bénéficient de l'indulgence de leurs juges, presque toujours nobles et
souvent leurs parents ou alliés, à la seule condition qu'ils n'aient pas
enfreint les codes de l'honneur et souvent même s'ils l'ont fait.
Les bourgeois de Toulon souffrent
régulièrement des impertinences des gardes de la marine qui les
brutalisent, n'épargnant pas même les femmes. Autrement plus cruelle est
l'affaire des “roués de la Torse”, qui auraient, selon un
chroniqueur, pendu un paysan par jeu au retour d'une partie de débauche, et
qui ne furent pas plus inquiétés, l'affaire ayant été étouffée,“plus de
cent familles distinguées risquant de se trouver éclaboussées” 26.
Quant au président d'Entrecasteaux, son
crime fut un des grands scandales du XVIIIe siècle provençal, puisqu'il
avait assassiné sa femme, elle aussi issue d'une des plus respectables
familles de l'aristocratie provençale. Cet assassinat choqua profondément
la bonne société aixoise, surtout les femmes et le Parlement le condamna à
mort. Il fut donc roué, mais en effigie, car un parent bien informé l'avait
engagé à la fuite. Ces différentes affaires, fort différentes quant à la
forme, font apparaître une constante prétention de la noblesse à régler
elle-même les conflits qui la traversent.
Les aristocrates se défendent de leurs
éventuels ennemis communs mais avant tout de l'ingérence des autres corps
de la société dans des domaines qu'ils considèrent réservés. Ils semblent
prêts pour cela à faire preuve d'une grande cohésion dans le silence et la
complicité avec des coupables qu'ils refusent de condamner. Au-dessus de la
loi commune, ou à côté d'elle, la noblesse prétend n'obéir qu'aux lois de
l'honneur dont elle se veut l'arbitre exclusif. La conscience identitaire
qui produit un certain nombre d'actes de solidarité s'alimente du mépris
pour tout ce qui se trouve inexorablement rejeté hors de la sphère
nobiliaire.
Ainsi cohabitent des solidarités
conquérantes, ouvertes, et des solidarités de repli. L'affaire du marquis
d'Entrecasteaux fait néanmoins apparaître l'existence d'intérêts divergents
au sein du groupe nobiliaire, ne serait-ce qu'entre la famille de
l'assassin et celle de la victime. La solidarité comme phénomène de groupe
repose sur le partage d'une identité commune, et ne peut résister à
l'émergence de différences. C'est pourquoi elle ne peut rendre compte de
l'ensemble complexe des liens qui existent à l'intérieur du second ordre et
qui sont loin de se limiter à l'appartenance nobiliaire.
III. Solidarité de groupe, solidarités de réseaux
L'idée séduisante, confirmée par un
certain nombre de discours et de comportements, qu'il existe une solidarité
globale de la noblesse, comme solidarité d'ordre, de groupe, doit être, en
effet, largement nuancée. Certes la noblesse se montre capable de faire
front lorsqu'elle se sent mise en cause dans ses prérogatives.
Mais ce type de solidarité n'a été
véritablement tangible que dans les moments de tension extrême qui ont
menacé ou remis en cause l'existence même de la noblesse, dont il est
indéniable qu'elle s'appuyait sur un sentiment identitaire profond. C'est
pourquoi la noblesse ne peut faire l'économie d'une insertion plus subtile
dans le tissu social de la ville, traversé de lignes de tensions qui ne
sont pas seulement celles l'opposant à la roture.
Le monde urbain d'Ancien Régime est un
monde de hiérarchies, et même la noblesse, qui se plait à cultiver un idéal
égalitaire n'échappe pas, bien au contraire, aux distinctions de rang et de
fortune. Les solidarités verticales, du type clientéliste, se sont
recomposées autour du phénomène urbain, utilisant la ville comme un relais
dans l'inextricable écheveau des relations sociales.
En tant que lieu de pouvoir, la ville joue
un rôle central dans la sollicitation des divers réseaux d'amitié, et
d'entraide. La monarchie a su accaparer à son profit une part croissante
des liens de clientèle, prenant le relais des fidélités féodales et la mise
en place de représentants du pouvoir royal dans les provinces a permis de
concentrer sur leur personne les efforts d'intégration de la noblesse
locale, qui en se liant à eux, espère se lier davantage au souverain.
En Provence, la ville d'Aix abrite les
principales institutions de la province ainsi que les agents de la
monarchie. L'intendant des Galois de la Tour évoque très justement la
complexité de la situation provençale dans une lettre au chancelier
Lamoignon :
“J'habite une province très difficile où
différents intérêts sont à ménager. Je suis environné d'autorités ; un
gouverneur, vous le connaissez ; un archevêque à la tête de la province,
d'un caractère minutieux et qui ne sait jamais se prêter à rien ; un
Parlement, une Cour des Comptes, tout cela dans une même ville” 27.
Il n'existe donc pas de personnage unique
et dominant qui pourrait apparaître comme le représentant des intérêts du
groupe nobiliaire. Toutes les autorités énumérées par l'intendant de La
Tour sont sollicitées, à des degrés divers, par l'aristocratie locale qui
les considère comme ses intercesseurs auprès du pouvoir royal. Chacun
dispose en outre de pouvoirs importants pour intervenir dans les affaires
locales sans devoir faire appel à une décision royale. Des réseaux se
constituent donc autour de chacun d'entre eux, en fonction des affinités,
des liens de parenté et des dépendances économiques ou de toutes sortes.
Contrairement à ce que M. de La Tour
semble insinuer, l'intendant est cependant durant toute cette période un
personnage clé dont les attributions, considérables, sont renforcées par le
cumul de l'office de premier président du Parlement. Il est certain que le
commissaire départi ne se limite pas à son rôle d'agent de la monarchie.
Comme l'archevêque et le gouverneur, il entretient des relations très
complexes avec la bonne société. Ces personnages, parfois provençaux, sont
en outre tous issus de la noblesse et sont donc intimement liés à de
nombreuses familles locales28.
L'étendue de leurs compétences et leur influence à la cour leur permettent
de se constituer une clientèle importante. En retour, une bonne insertion
peut leur procurer le soutien des élites locales. Exilé en 1771,
l'intendant de La Tour est rétabli dans ses fonctions en 1775 en partie
grâce à l'appui des notables provençaux29.
D'autre part leur fidélité à la royauté
n'interdit pas une certaine solidarité avec la noblesse en particulier en
ce qui concerne la défense des intérêts de la province. La double fonction
des intendants Lebret et Galois de La Tour les conduit à adopter une
position ambiguë, notamment lorsque leur compagnie s'oppose au pouvoir
royal.
Médiateur, en temps de crise, l'intendant
de La Tour prend cependant clairement le parti du Parlement en plusieurs
occasions30.
L'abbé de Coriolis, dans son Traité sur l'administration du comté de
Provence, rend d'ailleurs hommage à son attitude en ces termes :
“Félicitons-nous dans ce moment de
n'avoir à présenter à nos lecteurs que les vertus d'un Commissaire départi,
qui, depuis plusieurs années, n'est heureux que de notre bonheur et ne
respire que pour la conservation pure et intacte d'une constitution dont il
connaît le prix.”
L'intendant assume donc, avec plus ou
moins de bonheur, une triple fonction : il fait appliquer les décisions
royales, il patronne la noblesse locale et il défend les droits du
Parlement.
Le pouvoir des intermédiaires locaux
paraît cependant trop limité à certains nobles provençaux qui, pour accéder
plus directement au roi, choisissent des intercesseurs parisiens, familiers
du monarque et de ses ministres. Le rôle joué par les villes dans la
constitution de réseaux de clientèle semble donc proportionnel à la
quantité et à la qualité des aristocrates qui y résident.
Dans les villes plus modestes, la
monarchie dispose également de représentants, dont les plus puissants sont
les subdélégués de l'intendant. Ces derniers, plus encore que leur maître,
se trouvent dans une position ambiguë. Les subdélégués comptent sur leur
bonne insertion dans le milieu local pour connaître et contrôler leur
ressort, et eux-mêmes espèrent par l'importance de leur charge asseoir leur
influence et obtenir la reconnaissance de leurs services par la royauté.
Clivages et lignes de tension
Au-delà d'une identité à la fois vague et
incontournable renforcée par un cadre de vie commun, la solidarité
nobiliaire se pratique en réseaux qui vont parfois jusqu'à s'identifier et
se constituer en partis, en fonction de lignes de partage déterminées par
des événements catalyseurs. Les aristocrates sont parfaitement conscients
des distinctions de rang et des hiérarchies à l'intérieur de leur ordre.
Ils n'ignorent pas non plus les rivalités de groupes : ancienne et nouvelle
noblesse, robe et épée, courtisans et gentilshommes campagnards, partisans
et adversaires du pouvoir royal…
Les moments de crise sont les plus
révélateurs car ils mettent en lumière des liens de solidarité qui
jusque-là demeuraient sous-jacents. Lors des différentes affaires qui
ponctuent le XVIIIe siècle provençal, chacun prend parti pour les clans et
opinions qui s'affrontent, en fonction de ses propres jugements mais
également des liens de dépendance et de solidarité qui le font tenir de tel
ou tel groupe.
Les grands débats théologico-politiques
qui ponctuent le siècle des Lumières permettent de prendre la mesure des
divergences de ce corps. La province tout entière s'émeut des refus de
sacrements, de la mise en cause de la compagnie de Jésus et surtout de
l'affaire la Cadière dont le retentissement dépassera même les frontières
du royaume. Ces divers épisodes donnèrent lieu à des procédures par-devant
le Parlement de Provence et firent apparaître l'existence de deux
“partis” en son sein. Les Robins, sans être véritablement jansénistes,
sont sensibles au richérisme et se montrent traditionnellement gallicans.
Mais cette conception des rapports entre l'Eglise, la monarchie et la
société civile ne fait pas l'unanimité.
L'intendant de La Tour s'en inquiète au
moment de l'affaire des Jésuites :
“La fermentation est ici très vive et je
vois avec douleur qu'il en résultera dans le Parlement une division dont
les suites seront funestes.” 31
Il existe au sein du Parlement un groupe
minoritaire et néanmoins puissant qui se définit lui-même comme le
“parti des évêques” et qui prend régulièrement position en faveur de
l'ultramontanisme et de ses chantres32.
Des lignes de tension apparaissent donc au sein de la noblesse provençale,
révélant au-delà de l'apparente cohésion de ce corps, la prépondérance des
intérêts particuliers et familiaux sur un éventuel esprit de caste.
D'autre part, l'indulgence dont la
noblesse provençale fait preuve à l'égard de ses membres les plus
turbulents ne veut pas dire indifférence, et la bonne société provençale se
montre très attentive aux faits et gestes de chacun. Elle prend donc
également parti à propos d'affaires au caractère nettement plus privé qui
mettent en jeu ses membres.
Sarah Maza33 a montré
de façon très subtile en quoi les causes célèbres peuvent révéler les
tensions internes de la société de la fin de l'Ancien Régime. Le procès qui
oppose dans les années 1774-1777 le duc de Richelieu à la dame de
Saint-Vincent permet ainsi de mesurer la prégnance des rivalités qui
opposent les parlementaires et les ducs et pairs. La haute robe parisienne
s'est montrée relativement sévère avec le duc qui avait joué un rôle
important dans la crise parlementaire de 1770 et dont elle trouvait là un
moyen de se venger.
Plus surprenant et plus significatif
encore, la famille de Julie de Villeneuve, dame de Saint-Vincent, édite un
mémoire virulent pour prendre sa défense, alors que son père l'avait fait
enfermer dans un couvent quelques années plus tôt en raison de son
inconduite. La rancœur accumulée contre le complice du chancelier Maupeou
peut ainsi s'exprimer tout en offrant l'occasion à une famille
parlementaire respectable de rétablir son honneur bafoué, non par une femme
faible et frivole, mais par un homme qui abuse de sa puissance34.
La famille, solidarité primordiale et ultime
Les mésaventures de la dame de
Saint-Vincent prouvent également que la solidarité nobiliaire peut parfois
se retourner contre certains aristocrates jugés indésirables, dont les
éclats rejaillissent sur l'honneur de la famille et du groupe tout entier.
En effet, si la noblesse prétend encore au siècle des Lumières échapper aux
règles de la morale commune et ne devoir rendre compte qu'à l'assemblée
informelle de ses pairs, elle ne manque pas de mettre tout en œuvre pour se
débarrasser de ses membres les plus encombrants. La tolérance trouve ses
limites là où le noble déviant met en péril l'identité commune. L'intendant
accorde des lettres de cachet aux maris trompés et plus encore aux pères
indignés par la conduite de leurs enfants. Les turpitudes peuvent être
collectives et discrètes (comme dans l'affaire de la Torse), mais beaucoup
moins facilement individuelles et publiques.
Les scandales qui éclatent à intervalle
régulier mobilisent l'opinion et occupent les conversations de la bonne
société. Les nobles s'affrontent également dans des procès et n'hésitent
pas, par le biais de leurs avocats, à prendre à partie le “public”
en éditant pamphlets et mémoires. Ils tentent de se rallier des partisans,
de convaincre parents et amis du bien fondé de leurs prétentions,
d'influencer les juges. La bonne société se déchire, les familles se
disputent âprement les héritages, les époux se séparent et chacun doit
choisir son camp.
La ville devient alors le théâtre
d'affrontements dont les rebondissements passionnent un public de plus en
plus étendu. Les aristocrates envoient aux nouvelles leurs domestiques ou
leurs hommes de confiance, quand ils ne se déplacent pas eux-mêmes pour
avoir le plaisir d'en informer leurs amis35.
Remède à l'ennui, aliment pour la conversation mondaine, certes, mais la
dimension politique n'est pas absente de cette attention constante.
Néanmoins les affrontements recoupent plus ou moins largement des tensions
et des conflits d'intérêts entre familles concurrentes ou à l'intérieur
même des familles.
Le système de la fidélité, sur lequel
repose toute la monarchie d'Ancien Régime, valorise et tend à mettre en
œuvre des solidarités de réseaux plutôt que des solidarités d'ordre ou de
corps. C'est du moins ce qui apparaît lorsque l'on observe les
manifestations de la solidarité nobiliaire dans l'ancienne Provence. Ce fut
le cas pour les “roués de la Torse”, ce fut le cas pour le marquis
d'Entrecasteaux et ce fut le cas pour bien des jeunes aristocrates ayant
enfreint les lois ou s'étant attiré des ennuis et des inimitiés. Ce n'est
qu'exceptionnellement qu'une solidarité familiale masque une solidarité de
corps et non l'inverse, comme le montre l'affaire de Saint-Vincent.
La ville, lieu de pouvoir et de
sociabilité, a contribué au XVIIIe siècle à forger une culture spécifique
aux élites urbaines nettement dominées par la noblesse. Le modèle curial
s'est diffusé à l'échelle des provinces, renforçant le sentiment d'une
identité commune et cependant les différences n'ont pas été abolies ni les
conflits désamorcés. La civilité française, qui atteint l'apogée de son
raffinement au siècle des Lumières, s'épanouit dans le milieu nobiliaire
urbain, mais se fissure déjà de l'intérieur dans la mesure où ses
injonctions au respect de l'ordre et de la hiérarchie se heurtent aux
ambitions familiales et individuelles.
La noblesse urbaine apparaît solidaire
face aux attaques extérieures, qu'elles soient celles des roturiers ou du
pouvoir, et cependant elle accorde davantage d'importance à ce qui la
divise qu'à ce qui la rassemble, chacun jouant le jeu de la mondanité
d'abord pour obtenir une reconnaissance et s'élever.
Cette approche des solidarités nobiliaires
en milieu urbain nous conduit à nous interroger sur la pertinence même du
terme de“solidarité” pour qualifier les relations intra-nobiliaires.
Certes les pratiques sociales aristocratiques se fondent sur la mise en
œuvre de réseaux reposant sur les liens de parenté, d'alliance et d'amitié
qui se construisent et se renforcent par une sociabilité distinctive, mais
il n'est pas certain que ces modes de fonctionnement aient été perçus par
ceux qui les utilisaient comme l'expression d'une solidarité. Il s'agit là
d'une notion qui semble, en ce qui concerne la noblesse, si ce n'est
anachronique, du moins déplacée36.
Les valeurs qui sous-tendent ce que nous
interprétons comme des actes de solidarité trouvent leur origine dans une
conception spécifique des relations interpersonnelles. Les règles de
l'honneur et les codes de la bienséance commandent les comportements de la
noblesse et les justifient. Dans la mesure où l'on considère que la
solidarité consiste pour l'essentiel à “vouloir le bien d'autrui” 37, le
discours qui entoure les actes solidaires des gentilshommes provençaux ne
correspond pas à un tel état d'esprit mais se situe davantage du point de
vue d'un savoir-vivre ou de l'honneur. Ils s'entraident avant tout pour
préserver et faire prospérer une lignée, un nom dont ils se sentent
collectivement responsables, pour défendre la dignité et les privilèges
d'un corps dont ils font partie.
Parler de solidarité à propos de la
noblesse d'Ancien Régime n'est concevable que dans la mesure où l'on prend
le parti de considérer cette dernière comme un“lien anthropologique
fondamental” 38,
constitutif du social. Il apparaît alors que l'urbanisation de la noblesse
et la modification du rôle et des fonctions des villes ont effectivement
polarisé les réseaux nobiliaires autour des centres urbains, sans toutefois
éliminer des modes de fonctionnement plus traditionnel.
1
- Ce propos est à nuancer fortement en ce qui concerne la Provence qui, en
dépit d'une tendance à la croissance démographique similaire à celle que
connaît l'ensemble du royaume jusqu'aux années 1775, subit une crise
violente avec la peste de 1720, et la conjoncture démographique à nouveau
favorable ne lui permet parfois que de combler le déficit (c'est le cas
d'Aix et de Toulon).
2
- D'après le “Mémoire pour l'instruction du duc de Bourgogne” de
l'intendant Lebret (1698), publié par F.-X. Emmanuelli, L'intendance de
Provence à la fin du XVIIe siècle, Paris, Bibliothèque Nationale, 1980,
p 384 : il s'agit des villes représentées à l'assemblée des communautés de
Provence.
3
- E. Le Roy Ladurie (dir.), La ville des temps modernes, de la
Renaissance aux Lumières, Paris, Le Seuil, 1998, p 393.
4
- Les nobles représentent 3% des chefs de famille de la ville d'Aix et
seulement 1% à Marseille.
5
- C. Carrière, Négociants marseillais au XVIIIe siècle, Institut
historique de Provence, Marseille, 1973 : seulement 9,5 % des mariages de
négociants se font dans le monde nobiliaire et seulement 4,5 % d'entre eux
sont nobles, ce qui constitue une exception par rapport aux autres grandes
cités portuaires et marchandes du royaume.
6
- E. Le Roy Ladurie (dir.), op. cit., p 400 : “ A Toulon, 9 % des 5
000 chefs de famille de la ville sont nobles ”.
7
- M. Agulhon (dir.), Histoire de Toulon, Toulouse, Privat, 1980 :
15 % des officiers présents à Toulon sont natifs de la ville, 30 % viennent
de Provence et 55 % d'autres provinces littorales.
8
- Aix et Toulon comptent un peu moins de 30 000 habitants et Marseille
entre 75 et 110 000, au XVIIIe siècle.
9
- D'après le “ Mémoire pour l'instruction du duc de Bourgogne ” de
l'intendant Lebret (1698), publié par F.-X. Emmanuelli, L'intendance de
Provence à la fin du XVIIe siècle, Paris, Bibliothèque Nationale, 1980,
p 381.
10
- M. Agulhon, La vie sociale en Provence intérieure au lendemain de la
Révolution, p 90 : les nobles apparaissant comme chefs de famille dans
le futur Var sont “45 à Toulon, où la Marine royale suffit à l'expliquer,
20 à Grasse, 18 à Draguignan, 9 à Brignoles, 6 à Aups et à Fréjus, 5 à
Hyères et à Lorgues, 4 à Antibes (…) 12 dans 6 communes où il y a 2
familles et 21 dans 21 communes où il y a une famille”.
11
- M. Agulhon (dir.), Histoire de Toulon, op. cit., p 161 : Toulon
était “ la seule ville peut-être en Provence où il semble bien que noblesse
et Tiers État aient été franchement séparés ”.
12
- A. Jouanna, Le devoir de révolte. La noblesse française et la
gestation de l'Etat moderne, 1559-1661, Paris, Fayard, 1989, p. 21.
13
- AD Var, 1 J 190, lettres de Madame de Narbonne à sa mère, la marquise de
Ricard de Brégançon.
14
- A. D. Var, 16 J 31, lettre du 25 avril 1784.
15
- Le comte de Vence, cité par Roux-Alpheran, Les rues d'Aix, t.2, p
435 :
“Dans Aix l'ennui dès le lundi
Vous mène jusqu'au samedi…”.
16
- A. Babeau, Le maréchal de Villars, gouverneur de Provence, Paris,
Didot, 1892. Honoré-Armand de Villard réside en Provence de 1734 à 1770.
17
- F.-X. Emmanuelli, Vivre à Marseille sous l'Ancien Régime, Paris,
Perrin, 1999, p 176 et 225.
La plupart des voyageurs confirment
cette réputation, notamment Casanova, en 1760 : “Il n'y a pas de ville en
France où le libertinage des filles soit poussé plus loin qu'à Marseille”.
18
- P. Masson, La Provence au XVIIIe siècle, Paris, Hachette, 1936,
t.2 , p 448 : La première loge est fondée à Marseille en 1751.
19
- M. Agulhon, Pénitents et francs-maçons dans l'ancienne Provence,
Paris, Fayard, 1968, p 143-160.
20
- À titre d'exemple, nous pouvons citer une anecdote des Mémoires du
comte de Forbin, (Paris, Mercure de France, 1993, p 61-62) : “J'avais
couru environ deux postes lorsque la nuit nous surprit par un brouillard
très froid et si épais qu'on n'y voyait rien du tout. (…) Enfin après bien
des peines, nous arrivâmes devant la maison d'un paysan qui, surpris et
tout effrayé de nous voir chez lui si tard et par un si mauvais temps, nous
ferma la porte au nez (…) il ouvrit enfin” (…) “si vous voulez me suivre,
continua-t-il, je vous conduirai chez un honnête gentilhomme huguenot qui
loge à deux cent pas d'ici” (…) “nous arrivâmes sur les onze heures du soir
chez ce gentilhomme, qui en effet me reçut fort gracieusement ”.
21
- E. Le Roy Ladurie (dir.), op. cit., p 177.
22
- M. Cubells, La Provence des Lumières. Les parlementaires d'Aix au
XVIIIe siècle, Paris, Maloine, 1984, p 314 : 80 familles nobles
vivaient à proximité du Cour au XVIIIe siècle.
23
- M. Figeac, “ Les nobles, acteurs du paysage urbain (fin XVIIe - fin
XVIIIe siècle) ”, Cahiers de la Méditerranée, n°59, décembre
1999, p 51.
24
- Roux Alphéran, cité par M. Vovelle, Histoire d'Aix-en-Provence,
Aix-en-Provence, Édisud, 1977.
25
- Voir à ce propos M. Agulhon, Pénitents et francs-maçons dans
l'ancienne Provence, Paris, Fayard, 1968.
26
- M. Vovelle, op. cit., p 226.
27
- A. D. Bouches-du-Rhône, C 4334, lettre de l'Intendant de La Tour à
Lamoignon.
28
- P. Masson, La Provence au XVIIIe siècle, Paris, Hachette, 1936,
t.2, p 305 : se succédèrent à l'archevëché d'Aix Charles-Gaspard-Guillaume
de Vintimille du Luc (1708-1729) et Jean-Baptiste-Antoine de
Brancas-Céreste (1729-1770) tous deux provençaux.
29
- M. Cubells, op. cit., p.228.
30
- F.-X. Emmanuelli, Pouvoir royal et vie régionale en Provence au
déclin de la monarchie, Service de reproduction des thèses, Université
de Lille III, Lille, 1974, p. 230.
31
- Lettre du 17 mars 1762, cité par F.-X. Emmanuelli, op. cit.,
p.244.
32
- M. Cubells, op. cit..
33
- S. Maza, Vies privées, affaires publiques. Les causes célèbres de la
France pré-révolutionnaire, Paris, Fayard, 1997.
34
- S. Maza, op. cit., p 131-143.
35
- Musée Arbaud (Aix), 315 A 13, fonds d'Albertas, lettres de M. Vernet au
marquis d'Albertas datées des 6, 9, 13, 17 et 20 juin 1784, racontant le
procès de M. d'Entrecasteaux.
36
- Nous retrouvons sur ce point G. Chaussinand-Nogaret, La noblesse au
XVIIIe siècle, Bruxelles, Complexe, 1984, p 69 : “ Ce sentiment de
singularité dont ma théorie biologique de la supériorité séminale est une
composante est, en fin de compte, le plus solide ciment d'unité, sinon de
solidarité (notion qui se développera dans le malheur révolutionnaire)… ”.
37
- J. Chevalier, D. Cochart et alii, La solidarité : un sentiment
républicain ?, Paris, PUF, 1992.
38
- L. Baslé, cité par J. Chevalier et D. Cochart, op. cit., p. 7.