Premier ministre
Rapport au Premier ministre
Année 2005
Mission interministérielle
de vigilance et de lutte
contre les dérives sectaires
- MIVILUDES -
SOMMAIRE
11 â Protection des mineurs face Ă lâemprise sectaire
12 â Les risques induits par les pratiques de soins
et de guérisons dans les groupes à caractÚre sectaire 27
13 â Risques sectaires et pratiques dâintelligence
économique : un enjeu de sécurité 60
14 â Humanitaire dâurgence et dĂ©rives sectaires 69
II - ACTIVITĂS
21 â Bilan des propositions du rapport 2004
22 â ActivitĂ© administrative des ministĂšres
Justice (83), Affaires étrangÚres (92), Intérieur (94), Défense
(97), Economie et Finances (103),
Education nationale (106), Jeunesse et Sports (114),
Affaires sociales et Santé (116).
23 â ActivitĂ© administrative des services dĂ©concentrĂ©s
de lâEtat
24 â ActivitĂ© dâinformation et de formation
ANNEXES
2
LE MOT DU PRESIDENT
Le présent rapport marque le dixiÚme anniversaire de la
douloureuse affaire de lâ
Ordre du temple solaire
qui a provoqué la
prise de conscience, par lâensemble de lâopinion publique française,
de la dangerositĂ© que pouvaient revĂȘtir des activitĂ©s en apparence
anodines lorsquâelles Ă©taient encadrĂ©es par des hommes et des femmes
dénués de scrupules et ayant perdu tout sens commun.
Pendant les dix années écoulées, le gouvernement français a
considéré de son devoir de garantir la sûreté des citoyens en faisant
preuve dâune grande vigilance, en alertant le public sur les risques
sectaires et en luttant contre les agissements délictueux.
LâObservatoire interministĂ©riel des sectes en 1996, la Mission
interministérielle de lutte contre les sectes en 1998 et, depuis le 28
novembre 2002, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte
contre les dĂ©rives sectaires, ont eu pour fonction dâanalyser le
phĂ©nomĂšne, dâen suivre les Ă©volutions et de fournir au gouvernement
ainsi quâau Parlement, toutes informations nĂ©cessaires afin que soient
assurés la protection des personnes, le libre exercice des libertés
individuelles et la dĂ©fense de la dignitĂ© des ĂȘtres humains, dans le plus
strict respect de la liberté de conscience et de pensée.
Le Parlement sâest montrĂ© extrĂȘmement attentif Ă ces
questions, et cela, de maniĂšre trĂšs consensuelle. Le vif intĂ©rĂȘt
manifesté en ce domaine par la représentation nationale a toujours
constitué, pour les gouvernements successifs, à la fois un
encouragement en mĂȘme temps quâun signe fort de la lĂ©gitimitĂ© de
3
son action contre les dérives sectaires et les atteintes inacceptables aux
droits de lâhomme quâelles induisent. Lâadoption en 2001 de la loi dite
« About-Picard » du nom du sĂ©nateur et de la dĂ©putĂ©e qui lâont
défendue devant leurs pairs, a constitué une remarquable avancée
juridique dans la lutte contre le dĂ©lit dâabus frauduleux de lâĂ©tat de
faiblesse ainsi quâun bel exemple dâunanimitĂ© citoyenne.
La MIVILUDES, Ă lâĂ©coute des victimes et de leurs familles
,
dresse aujourdâhui un constat inquiĂ©tant des dommages provoquĂ©s par
lâemprise exercĂ©e par des personnes ou des organisations se
conduisant en maßtres à penser. De telles dérives se produisent dans
tous les secteurs de la vie sociale, soins et santé, formation continue et
soutien scolaire, sports et activités culturelles, groupes ésotériques ou
mystiques⊠Elle relÚve que de nouveaux organismes apparaissent
presque chaque jour, sans quâaucun point du territoire ne soit Ă©pargnĂ©,
ces micro-structures étant souvent beaucoup plus difficiles à cerner
que les grandes organisations bien connues.
Il ne sâagit nullement de tracer un tableau apocalyptique de la
situation, mais de se convaincre quâil existe de vraies et bonnes
raisons de ne pas renoncer à la lutte contre les dérives sectaires, au
motif fallacieux que cela porterait atteinte à la liberté de conscience ou
aux libertés religieuses.
On ne rappellera jamais trop quâau sein de la RĂ©publique
Française, berceau des droits de lâhomme et de la tolĂ©rance, les
principes de laïcité, auxquels nous sommes attachés, nous
commandent de ne jamais juger du contenu des croyances, de nâen
interdire aucune mais de nâen labelliser aucune. Cela nâimplique pas
pour autant que le champ soit laissé libre à ceux qui méprisent les
fondements du pacte républicain et de ses lois.
A partir de lâinstant oĂč des victimes sont signalĂ©es, oĂč des
dommages sont constatĂ©s de mĂȘme que lorsquâil est portĂ© atteinte Ă
lâordre public ou aux lois de la RĂ©publique, lâEtat ne peut pas se
borner Ă ĂȘtre un observateur passif.
Or on voit sâagiter, sous couvert dâassociations créées sous le
régime de la loi de 1901, des organisations qui sont les porte-parole
virulents de groupes dont les méthodes et les agissements justifient
une vigilance particuliĂšre de lâĂtat, groupes dont lâimage, souvent
sĂ©rieusement dĂ©gradĂ©e dans lâopinion publique française ou
4
internationale, leur interdit tout accĂšs Ă une communication efficace.
Ces associations harcÚlent les pouvoirs publics ou leurs représentants,
elles mettent en cause les élus de la Nation, elles attaquent en justice
les associations de défense des personnes contre les emprises
sectaires, elles pratiquent la désinformation et cela, avec la plus
évidente mauvaise foi.
Les principes fondateurs de la République et ceux qui les
dĂ©fendent ne doivent pas plier devant un humanisme de façade, mĂȘme
si les critiques ou les accusations portĂ©es contre lâaction des pouvoirs
publics obligent la France Ă devoir expliquer les motivations de sa
politique sur la scĂšne internationale.
Les premiĂšres questions qui se posent, Ă ce stade, sont de
savoir qui se trouve réellement derriÚre ces attaques et à qui elles
profitent.
Le dĂ©bat est essentiel en dĂ©mocratie et il est naturel quâil
dĂ©passe, aujourdâhui, les frontiĂšres de notre pays. Le choix de la
France, en matiÚre de protection des personnes contre les dérives
sectaires, est de ne pas répondre aux excÚs constatés par une
intransigeance sans recul moral ou intellectuel. Mais parce que les
dommages causés aux victimes et à leurs familles, sont inacceptables,
lâEtat doit ĂȘtre ferme dans sa volontĂ© de voir sanctionner tous
agissements relevant de lâemprise mentale. Il nâest pas en guerre
contre leurs auteurs et il nâa donc recours, pour ce faire, quâĂ des
moyens légaux et trÚs visibles.
Câest la raison pour laquelle le gouvernement et le Parlement
ont toujours veillé à la transparence totale des dispositions préventives
adoptées par les services publics, tandis que les faits susceptibles de
constituer des infractions pĂ©nales sont systĂ©matiquement soumis Ă
lâautoritĂ© judiciaire.
Le mĂȘme souci nâanime pas certaines associations faux-nez
dâune ou de plusieurs multinationales de la dĂ©rive sectaire ou de
lâabus frauduleux de faiblesse mentale, qui nâhĂ©sitent pas Ă employer
dans leur objet social des termes aussi nobles que « spiritualité » ou
« conscience ». Il sâagit lĂ dâune grave tromperie qui peut abuser aussi
bien les citoyens que les instances internationales. On est alors en
droit de sâinterroger sur la loyautĂ© de leurs promoteurs ainsi que sur la
légitimité des buts réellement poursuivis.
5
Dans le registre de la séduction, certaines organisations
sectaires prĂŽnent, par exemple, la lutte contre la toxicomanie, le refus
de la violence ou la dĂ©fense des droits de lâenfant. Avant dâexercer la
moindre critique Ă lâencontre de la gĂ©nĂ©rositĂ© ainsi affichĂ©e, lâĂtat va
devoir apporter la preuve que ce beau langage est un leurre et quâil
dissimule une volonté de prosélytisme et de mise en situation de
dĂ©pendance ou dâemprise mentale.
Les pseudo-associations de défense des libertés publiques
mettent toujours en avant les prétendues activités charismatiques des
organisations sectaires, pour discrĂ©diter lâaction des pouvoirs publics,
déployant alors des efforts considérables et coûteux pour paralyser
lâaction des services susceptibles de dĂ©jouer leurs manĆuvres. Les
unes et les autres ne reculent ni devant lâinvective, ni devant la mise
en cause personnelle ou lâintimidation, ni devant le procĂšs dâintention.
Ceux qui plaident, au nom de la liberté de conscience, pour la
reconnaissance de ces « minoritĂ©s de conviction » ont-ils songĂ© quâils
apportent ainsi un semblant de respectabilité et de crédibilité à des
personnes ou à des groupes pour qui le sacré vient loin derriÚre le
profit ? Ont-ils mesuré les souffrances endurées par les victimes des
dérives sectaires ?
De tout temps, le détournement sémantique a été pratiqué
avec talent et efficacité par les organisations qui avaient des visées
totalisantes. Se cacher derriĂšre le droit au libre arbitre pour mettre la
main sur les consciences constitue Ă leurs yeux une suprĂȘme habiletĂ©.
Les groupes sectaires ne font pas exception Ă cette rĂšgle. Mais ils
doivent savoir que sâils peuvent berner quelques esprits, ici ou lĂ , ou
mĂȘme bĂ©nĂ©ficier de complicitĂ©s de circonstance, cela ne suffira pas
pour que lâEtat relĂąche sa garde.
Un exercice Ă©quitable des libertĂ©s individuelles passe dâabord
par un droit imprescriptible Ă la sĂ»retĂ© et la libertĂ© nâest pleinement
vĂ©cue que dans le respect absolu du principe dâĂ©galitĂ©. Le maĂźtre, le
gourou auquel le disciple doit entiÚre obéissance se joue de cette rÚgle.
Que vaut un défenseur de la liberté dont le mode de
fonctionnement Ă©rigĂ© en systĂšme repose sur lâaliĂ©nation des esprits et
des biens ?
6
Quelle place reste-t-il pour la fraternité ?
Quand lâesprit de fraternitĂ©, ciment de notre contrat social, est
bafoué, il ne subsiste que quelques mots vides de sens, utilisés au prix
dâune copieuse dose de cynisme. Mais il reste surtout des enfants
humiliés, des victimes détruites et des familles déchirées à jamais.
Câest pourquoi, en 2006, grĂące au soutien des services de
lâĂtat, en liaison avec les collectivitĂ©s territoriales et avec le concours
du monde associatif, la MIVILUDES poursuivra, sous le contrĂŽle
démocratique du Parlement, sa tùche au service de la défense des plus
faibles, avec conscience et détermination, dans le strict respect des
lois.
Jean-Michel ROULET
Préfet, Président de la MIVILUDES
7
INTRODUCTION
LâactualitĂ© rĂ©cente confirme, sâil en est besoin, toute lâacuitĂ©
de la menace sectaire dans notre pays, une menace qui sait sâadapter
en permanence tant à la demande, usant à cet égard avec intelligence
des nouveaux moyens de communication quâĂ lâĂ©volution des mesures
adoptĂ©es par les pouvoirs publics, en mettant toute en Ćuvre pour
passer à travers les mailles du filet législatif.
Trois domaines sont apparus comme particuliĂšrement
préoccupants ces derniers temps :
La nĂ©cessitĂ© de protĂ©ger les mineurs face Ă âlâemprise sectaire
qui peut sâexercer sur eux, soit par lâintermĂ©diaire de parents membres
dâorganisations dĂ©viantes, soit directement dans la mesure oĂč ils
constituent en tant que tels une cible pour certains mouvements.
Les dommages causĂ©s sur le psychisme dâenfants ou
dâadolescents sont souvent irrĂ©mĂ©diables et le caractĂšre odieux de
lâexploitation de leur vulnĂ©rabilitĂ© doit constituer, pour tous les
services en charge de la protection de lâenfance, un motif de
détermination sans faille dans la vigilance et la lutte contre les dérives
sectaires qui visent cette population.
Lâenfant est sujet de droit et non objet de droit.
8
Lâengouement pour les «
alter-médecines
»
, multiformes,
mais qui ont pour point commun de ne bĂ©nĂ©ficier dâaucune validation
scientifique, dâĂȘtre exercĂ©es dans la plupart des cas par des
« thĂ©rapeutes » autoproclamĂ©s et dâaboutir Ă terme Ă un refus pur et
simple des soins médicaux traditionnels.
Quâil sâagisse de sectes guĂ©risseuses Ă vocation spirituelle ou
de praticiens gourous, créateurs de leur propre méthode ou franchisée
par les fondateurs de doctrines ou de thĂ©ories mises en Ćuvre dans
plusieurs pays, lâoffre est trĂšs large et elle est donc de nature Ă sĂ©duire
tous les types de demande.
Bien que lâengagement dans le processus soit ici le plus
souvent Ă lâinitiative de ceux qui deviendront les victimes, il nâen reste
pas moins que, câest la vulnĂ©rabilitĂ© potentielle de ces personnes
quâexploitent sans scrupules des experts en manipulation mentale.
Aussi, grave est le fait quâon est en prĂ©sence dâun vĂ©ritable
mouvement qui érige en dogme une philosophie qui nie en bloc tous
les progrÚs de la science et de la médecine auxquels les plus grands
savants du monde ont vouĂ© leur vie depuis deux siĂšcles. Câest pour
lâhumanitĂ© un vĂ©ritable pas en arriĂšre.
De grandes organisations sectaires multinationales ayant, au-
delĂ de leur volontĂ© dâemprise sur leurs adeptes, une vision planĂ©taire
de leur propre avenir, sâintĂ©ressent de plus en plus aux enjeux
Ă©conomiques internationaux et cherchent Ă sâintroduire
au cĆur des
entreprises les plus performantes ou les plus sensibles
.
Il est du devoir de lâEtat de participer Ă la sensibilisation des
acteurs économiques concernés en leur fournissant tous les éléments
dâapprĂ©ciation et dâanalyse des risques dâattaques auxquels ils peuvent
ĂȘtre confrontĂ©s ainsi que des vulnĂ©rabilitĂ©s des structures ou des
personnes, en ce domaine.
Enfin,
lâaide humanitaire dâurgence
est en pleine expansion,
en raison de la médiatisation des grandes catastrophes naturelles ou
des troubles qui peuvent survenir ça et là . Ce secteur a le double
avantage pour les organisations sectaires de contribuer Ă polir leur
image humaniste tout en procédant à un fort prosélytisme et de leur
permettre de recueillir des fonds.
9
AprĂšs avoir procĂ©dĂ© Ă lâanalyse de ces quatre volets oĂč se
manifestent de nombreuses dérives sectaires, le présent rapport dresse
un bref bilan des propositions qui avaient été retenues dans le rapport
2004 et il relate lâactivitĂ© quotidienne des services de lâEtat en 2005,
quâil sâagisse des administrations centrales des ministĂšres ou de leurs
services déconcentrés.
Il dĂ©crit les actions de formation et dâinformation conduite par
la MIVILUDES ou par les ministĂšres avec le concours de cette
derniĂšre et il fait un point rapide de lâactualitĂ© associative.
Enfin, le lecteur trouvera dans les annexes des extraits de
quelques questions que les parlementaires ont posés au gouvernement
sur le thÚme des dérives sectaires en 2005 ainsi que quelques
exemples significatifs de signalement reçus au cours de lâannĂ©e
écoulée par la MIVILUDES.
Un rapport annuel ne peut ĂȘtre exhaustif. Câest pourquoi il
doit sâanalyser comme le prolongement des rapports publiĂ©s les
années précédentes.
Tous ces documents ont été placés en ligne sur le site Internet
de la MIVILUDES : www.miviludes.gouv.fr
10
1
Ăšre
PARTIE
ANALYSES
11
1-1
PROTECTION DES MINEURS
FACE A LâEMPRISE SECTAIRE
Aucun rapport de la MIVILUDES ou de la MILS
1
nâĂ©chappe
au compte-rendu du suivi des mineurs. Pourtant cette année, il a été
dĂ©cidĂ© de donner Ă ce point plus dâampleur. Les raisons en sont
multiples.
La nĂ©cessaire vigilance de lâEtat
La premiĂšre raison est celle qui lĂ©gitime lâaction de lâEtat en
matiÚre de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires : lorsque
lâenfant est soumis Ă des parents sous emprise, qui peut le protĂ©ger, si
ce nâest lâEtat ? Lorsquâun enfant est abusĂ© sexuellement, maltraitĂ©,
affamĂ©, qui peut le sauver, si ce nâest la Justice ? Lorsquâun enfant
connaßt une éducation carencée, intellectuellement, physiquement ou
affectivement, comment espĂ©rer quâil puisse devenir un citoyen libre ?
Comment prĂ©server son autonomie ? Sa capacitĂ© dâapprendre ? Sa joie
dâĂȘtre enfant ?
Lâenfant cible
La seconde raison qui motive lâintĂ©rĂȘt portĂ© par la Mission
interministĂ©rielle Ă la situation des enfants est quâils sont bien souvent
la cible des groupes.
Il peut ĂȘtre manipulĂ© tout petit, voire avant sa naissance
comme le pratique la
Fraternité blanche universelle
(F.B.U). Ce
groupe privilégie la
Grande Famille
qui se prolonge Ă travers tous les
cycles de réincarnation :
« Si vous voulez devenir invulnérable, ne
sortez pas de cette forteresse puissante, indestructible qu'est la
Fraternité blanche universelle. »,
disait le MaĂźtre AĂŻvanhov. Les
enfants ont un deuxiĂšme pĂšre, le MaĂźtre, qui optimise lâĂ©nergie et le
karma des fĆtus. Ainsi pris en charge, ils deviennent pleinement
humains, sans médecins, sans prisons ⊠Comme toujours dans les
groupes sectaires, lâavenir est parfait. Cette
galvanoplastie spirituelle
1
Mission interministérielle de lutte contre les sectes (MILS) qui précéda la
MIVILUDES dâoctobre 1998 Ă novembre 2002.
12
est prĂ©conisĂ©e par lâ
Association nationale pour l'éducation parentale
(ANEP). Dâautres groupes veillent Ă la naissance des tous petits. Au
sein de la
Soka GakkaĂŻ
, les adeptes se marient entre eux. Cela se
nomme :
« faire un couple pour Kozen Rufu »
, ce qui signifie la
cellule familiale sert de relais pour la propagation de la doctrine. Dans
les faits, les conjoints passent peu de temps ensemble si lâon excepte
la pratique commune de la priĂšre (une Ă trois heures par jour).
Lâenfant nâest pas au centre des prĂ©occupations de ses parents, car les
heures de priÚres et les réunions laissent peu de temps aux adultes.
Quand les enfants se plaignent, la consigne est alors de dire :
« Ta
mÚre fait tous les jours quelque chose pour les autres, pour la société.
[âŠ] Votre mĂšre vous aime, mes enfants, câest pourquoi elle fait
chaque jour des activités »
2
. Lâattachement aux parents devient une
attitude négative et égoïste. Pour Ikeda
3
, le fondateur du mouvement,
« lâidĂ©al est dâĂ©lever vos enfants pour quâils chĂ©rissent notre
organisation. Avec cet esprit, les enfants se développeront
remarquablement ».
La
Soka GakkaĂŻ
a formé des groupes de jeunesse,
puisque
« la jeunesse a le pouvoir de créer le futur. Naturellement, la
source fondamentale de cette capacité réside dans notre foi et dans la
loi mystique elle-mĂȘme [âŠ]. Celui qui nâentraĂźne pas son corps et son
esprit lorsquâil est jeune, verra dans bien des cas sa dĂ©termination et
ses idĂ©aux dĂ©truits dans les derniĂšres annĂ©es de sa vie. Il nâest pas
rare quâen dĂ©finitive sa vie soit un Ă©chec dans tous les domaines. [âŠ]
Mon plus profond désir, ma priÚre est que vous chérissiez votre vie,
que vous ayez une fort croyance dans le
« Gohonzon »,
et que vous ne
vous écartiez jamais du chemin de la foi et du chemin de
« Kozen
Rufu »
4
.
Certains, dans leur omniscience de gourou, inventent des
recettes miracle pour les régimes des bébés. On connaissait déjà les
talents trÚs nombreux de Ron Hubbard. Il se fait aussi spécialiste de la
petite enfance, refusant lâallaitement maternel et le lait maternisĂ© au
profit dâun « plus » de protĂ©ines dĂšs le 2
Ăšme
jour et jusquâĂ 3 ans : des
biberons faits avec de lâeau dâorge, du lait pasteurisĂ© et du sirop de
sucre âŠ
5
.
Le discours de Sri Mataji, la MĂšre du groupe
Sahaja Yoga
, est
lui aussi édifiant.
« Nâimporte qui peut faire un enfant - mĂȘme un
2
DaĂŻsaku Ikeda,
TroisiÚme millénaire
, 1999
3
Ibid.
4
Directives du président Ikeda sur la jeunesse,
Daily guidance
, vol. 3
5
Bébés en bonne santé,
L. Ron Hubbard,
LâAuditeur
n°6.
13
chien peut faire un enfant
[âŠ].
Aussi crĂ©er un enfant nâest pas une
chose extraordinaire⊠ce que vous avez Ă faire, câest de constater que
vous avez un enfant, vous en avez juste la charge, comme vous avez la
charge de « tous » les enfants de Sahaja yogi, pas seulement les vÎtres
[âŠ]
Dire mes enfants ne vous aidera en rien, au contraire. Cela va
vous enchaßner « totalement »
[âŠ]
Dâabord, vous avez renoncĂ© Ă
votre famille, renoncĂ© Ă vos enfants, renoncĂ© Ă tout, vous ĂȘtes parvenu
à cette extrémité ; maintenant vous y retournez.
[âŠ]
Nous, ce que
nous comprenons, câest que nos relations et nos identifications doivent
ĂȘtre complĂštement abandonnĂ©es
6
»
.
« Pour les cinq premiÚres années,
tous les parents doivent ĂȘtres extrĂȘmement stricts avec les enfants.
[âŠ]
Si lâenfant essaie de prendre des libertĂ©s avec vous et sâil est
effrontĂ© et nâĂ©coute pas, veuillez donner cet enfant Ă quelque autre
sahaja yogi
7
».
« Donnez alors lâenfant Ă une autre, une autre femme
sâoccupe alors de lâenfant, lâenfant devient alors la propriĂ©tĂ© de tout
le monde, non votre propriété
8
». «Vous devez juste accomplir vÎtre
tĂąche comme si vous Ă©tiez dĂ©positaire de lâenfant, et seulement
dĂ©positaire. Mais vous ne devez pas vous attachez Ă lui : câest mon
travail, vous devez me le laisser.
[âŠ]
Ces enfants sont les miens, pas
les vĂŽtres.
9
»
De tels discours expliquent peut-ĂȘtre pourquoi des tous
petits sont envoyés trÚs loin de leurs parents, dans des ashrams de
Sahaja Yoga
. En Belgique, une plainte a été déposée par une grand-
mÚre dont les deux petits-enfants ont été envoyés dans les écoles de
Sahaja Yoga
: le garçon de 5 ans a été envoyé en République tchÚque
et la fille de 7 ans Ă lâĂ©cole de Dharamsala en Inde. Lâavocat de la
plaignante dénonce une
« situation dâenfants en danger et un non
respect de lâobligation scolaire »
10
.
En région parisienne, en 2004, une
enfant de 4 ans dont les parents sont suisses, vivant en France depuis
un an et demi, est envoyée en République tchÚque pour un séjour de
trois mois. Au dĂ©part, elle devait ĂȘtre envoyĂ©e dans un ashram en
Italie, mais les autorités italiennes ont refusé. Un signalement a été fait
au procureur de la RĂ©publique par le directeur de lâĂ©cole internationale
oĂč elle Ă©tait scolarisĂ©e. A Nantes, une petite fille de 4 ans est partie Ă
Rome en 2003. Sa mÚre, enseignante en congé de maternité au
moment des faits, Ă©tait mariĂ©e Ă un Indien rencontrĂ© Ă lâAshram de
Sahaya Yoga
en Inde. Elle est revenue en France au bout dâun mois et
demi. Mais son départ en Inde est toujours programmé. Ces affaires
6
Londres, 22 juin 1984
7
Hounslow, 1984
8
Vienne, 1986
9
ChĂąteau de MesniĂšres-en-Bray, 6 mai 1984.
10
Le Soir
, 4 janvier 2005
14
posent le problÚme des enfants quittant le territoire français vers des
pays qui nâont pas signĂ© de conventions internationales.
A lâĂ©vidence, lâenfant est au cĆur des prĂ©occupations des
dirigeants sectaires : il reprĂ©sente lâavenir, le dĂ©veloppement potentiel
du groupe, il est malléable et sans défense, on croit pouvoir le
formater. On peut aussi lâexploiter sans rĂ©el souci :
« Je ferai de vous
des esclaves heureux »,
disait Ron Hubbard.
ConsĂ©quences sur lâenfant de lâemprise sectaire
La troisiÚme raison qui motive le présent rapport est de
montrer les consĂ©quences importantes sur lâenfant de lâappartenance
sectaire de ses parents. Ce qui frappe, en premier lieu, est lâintense
souffrance de ces jeunes enfants soumis Ă des maltraitances affectives,
physiques ou psychologiques, ou Ă des ruptures familiales dans des
contextes difficiles. Les jugements, au civil comme au pénal, donnent
Ă entendre ces souffrances.
Mais il nây a pas que la souffrance. Ces enfants vivent parfois
avec des parents aliĂ©nĂ©s par lâemprise du gourou, câest-Ă -dire
incapables dâassumer leur rĂŽle parental. Les parents, par leur posture
dâadepte, sâinfantilisent et abandonnent le contrĂŽle de leur vie Ă un
autre. Lâenfant, naturellement soumis Ă leur autoritĂ© et objet de leurs
soins, nâentre pas dans ce schĂ©ma de rĂ©gression infantile. Il est en
trop : on sâen dĂ©fait donc, en le remettant au maĂźtre, ou Ă un adepte
chargĂ© pour le groupe de lâĂ©ducation. Lâimage mĂȘme des parents est
brouillĂ©e pour lâenfant, qui souvent voit trĂšs peu ses parents
biologiques.
Une femme tĂ©moigne des dix ans quâelle a passĂ©s, de 6 Ă 16
ans, dans la
Sea Org
, lâorgane central de lâ
Eglise de Scientologie
:
«
Mes parents ont rejoint la Sea Org en 1972 quand jâavais 6 ans .
[âŠ] Jâai Ă©tĂ© prise dans la Cadet Org et jâallais Ă lâĂ©cole publique.
AprĂšs lâĂ©cole, jâĂ©tais surveillĂ©e avec un groupe dâenfants. Je voyais
mes parents une fois par semaine. Je ne voyais jamais ni médecin ni
dentiste pour un contrĂŽle. Nos conditions de vie nâĂ©taient pas saines.
[âŠ] A 7 ou 8 ans, je devais offrir dâexĂ©cuter un travail manuel,
comme nettoyer les toilettes, frotter les parquets ou faire la vaisselle.
Je me souviens que ma mĂšre Ă©tait furieuse quâils fassent nettoyer les
toilettes par les enfants. Elle pensait que nous pourrions tomber
15
malades. Je me souviens quâune fois, quand jâavais 7 ans, ma mĂšre
avait demandĂ© lâautorisation de nous retirer de la Cadet Org pour
rendre visite Ă notre pĂšre qui rĂ©sidait ailleurs. Elle nâavait pas obtenu
la permission de nous emmener et elle sâĂ©tait assise trĂšs en colĂšre
dans la voiture, disant, sans sâadresser en particulier Ă quelquâun :
« Câest insensĂ© ! » Je lui demandai alors ce que « insensĂ© » voulait
dire. Elle nous emmena voir notre pĂšre bien quâelle nâait pas eu
lâautorisation. Quand nous sommes rentrĂ©es, nous avons dĂ» vivre
dans des conditions moindres, par sanction. Câest drĂŽle, un mĂŽme de
7 ans puni pour Trahison
(sic)
et mis Ă lâamende, câest-Ă -dire que
jâĂ©tais astreinte Ă encore plus dâheures de nettoyage des parquets.
Quelquâun a essayĂ© de mâexpliquer les sanctions et de mâaider Ă
franchir les diffĂ©rentes Ă©tapes des sanctions. Je ne savais mĂȘme pas ce
que ces mots signifiaient [âŠ]
11
».
Lâenfant peut mĂȘme ĂȘtre un instrument utilisĂ© par le groupe
contre ses parents. Les enfants scientologues sont soumis comme leurs
parents Ă des auditions. Celle qui sâintitule
Security check children
comporte une centaine de questions dont : -
« Quâest-ce que quelquâun
tâa dit de ne pas dire ?»,- « As-tu refusĂ© dâobĂ©ir Ă un ordre provenant
de quelquâun Ă qui tu aurais dĂ» obĂ©ir ?», - « As-tu un secret ?», -
« As-tu fait quelque chose dont tu as trÚs honte ?», - « Y a-t-il quelque
chose que tu devrais raconter Ă tes parents et que tu nâas jamais
raconté ?»
12
.
On fait pression sur eux, pour contrĂŽler leurs parents, ou
les scientologues qui les ont en charge.
Dans tous les groupes sectaires, les enfants vivent
lâenfermement, lâisolement. Dans une communautĂ© fermĂ©e, mĂȘme
lâĂ©cole est interne (
Tabithaâs Place
) ou faite par correspondance
(
FrÚres de Plymouth de la voie étroite
) : «
En Grande Bretagne, les
écoles gérées par
The Exclusive Brethren
("la fraternité exclusive")
interdisent à leurs 1.400 élÚves toute utilisation des ordinateurs ou de
l'Internet, de mĂȘme que tout recours aux journaux, Ă la radio, Ă la
télévision ou au téléphone. Les membres de cette secte n'ont pas le
droit d'avoir des amis hors du mouvement et, en général, ils
travaillent plus tard dans des entreprises gérées par la secte. Selon les
préceptes de ces écoles, les élÚves ne doivent pas aller à l'université
car celle-ci est trop
"cosmopolite" »
13
.
11
http://ocmb.xenu.net/ocmb/viewtopic.php?p=154876#154876
12
Hubbard communication Office (St Hill Manor)
Bulletin
du 27 septembre
1961.
13
AFP, 21 mars 2005
16
Dans lâenfermement, les doctrines sont ressassĂ©es Ă lâinfini
(
Soka GakkaĂŻ)
, y compris au moyen des livres de lecture de la secte
qui remplacent Ă la maison les livres de classe (
Témoins de Jéhovah
).
Chez ces derniers, la peur est entretenue constamment, sur fond
dâapocalypse. Le monde habituel est mauvais, peuplĂ© dâĂȘtres
infĂ©rieurs qui ne connaissent pas la vĂ©ritĂ© et qui ne cherchent quâĂ
nuire aux vrais croyants : «
NoĂ«l, câest avec Satan
.
Toi, tu es avec
Satan, et moi, je suis avec Jéhovah »,
a dit un petit garçon de 5 ans Ă
son pĂšre
14
. Le monde court Ă sa fin, et seule une poignĂ©e dâĂ©lus sera
sauvée. La famille non jéhoviste, les copains de classe sont
condamnés à une mort terrifiante et imminente. Si jamais les enfants,
ou les adolescents, tentent une incursion « dans le monde », celui-ci
apparaĂźt radicalement Ă©trange. Le conformisme sâimpose. Les enfants
qui rasent les murs, ne participent pas aux jeux, fuient les
anniversaires et les occasions de se réjouir, sont connus. Le monde
enseignant en connaßt la parfaite « sagesse ». Mais cette sagesse est
simplement due à cette volonté de se conformer à un monde dont on
ne connaĂźt pas les rĂšgles. Cela se traduit parfois par le clivage et ses
lourds passages Ă lâacte. Dans la plupart des cas, câest la maturation
psychologique qui est atteinte : lâincapacitĂ© de se projeter dans
lâavenir â puisquâil nây a pas dâavenir â les empĂȘche de devenir
pleinement adultes. Ainsi la Cour administrative dâappel de Douai,
siĂ©geant au contentieux, a rejetĂ© lâappel de parents de
Témoins de
Jéhovah,
le 3 mai 2001, pour un refus dâagrĂ©ment en vue dâadoption :
« En raison des risques dâisolement social et de marginalisation
auxquels ils exposeraient ainsi un enfant, le président du Conseil
général du Pas-de-Calais a estimé que les intéressés ne présentaient
pas des garanties suffisantes en ce qui concerne les conditions
dâaccueil quâils Ă©taient susceptibles dâoffrir Ă des enfants sur les plans
familial, Ă©ducatif et psychologique ; quâil nâa pas fait ainsi une
inexacte application des dispositions législatives et
réglementaires »
15
. La Cour dâappel de Douai ne faisait que reprendre
ce quâavait instituĂ© le Conseil dâEtat en 1992 :
« Il ressort des piÚces
du dossier que M. et Mme F. ont fait connaĂźtre sans ambiguĂŻtĂ© Ă
lâadministration, dans le recours gracieux quâils lui avaient adressĂ©,
quâils adhĂ©raient personnellement Ă la doctrine des
Témoins de
14
Le ProgrĂšs
, 25 dĂ©cembre 2005. Depuis, le pĂšre, divorcĂ©, tente dâobtenir
lâinterdiction pour son fils dâĂȘtre amenĂ© par sa mĂšre aux offices jĂ©hovistes.
15
Cour administrative dâappel de Douai statuant au contentieux N°98-
DA01397, lecture du 3 mai 2001.
17
Jéhovah
en matiĂšre de transfusion sanguine et quâils Ă©taient opposĂ©s Ă
lâusage de cette mĂ©thode thĂ©rapeutique ; que, par suite, en estimant
que les intéressés ne présentaient pas des garanties suffisantes en ce
qui concerne les conditions dâaccueil quâils Ă©taient susceptibles
dâoffrir Ă des enfants sur les plans familial, Ă©ducatif et psychologique,
le prĂ©sident du Conseil gĂ©nĂ©ral du Doubs nâa pas fait une inexacte
application des dispositions législatives et réglementaires »
16
.
Lâengagement
sectaire
des
parents entraĂźne aussi des
consĂ©quences Ă long terme pour lâenfant, notamment quand la
scolarisation est interrompue :
« Jâai quittĂ© lâĂ©cole en 6
Ăšme
. Je nâai plus
reçu aucun enseignement. Jâai rejoint le CMO Ă 12 ans. Je travaillais
de 8h30 Ă 23h, tous les jours de la semaine. [âŠ] Mais je me sentais
bien, jâĂ©tais en train de âsauver le mondeâ. JâĂ©tais traitĂ©e avec
respect par les adultes de la Sea Org qui pensaient que jâĂ©tais une
fille bien, parce jâĂ©tais Ă la Sea Org et que je travaillais pour le CMO.
[âŠ] Quand jâai quittĂ© la Sea Org, jâai dĂ» dormir dans la voiture de
mes parents. Ils Ă©taient toujours Ă la Sea Org. Je nâavais nulle part oĂč
aller, aucune possession matĂ©rielle, aucun diplĂŽme. JâĂ©tais restĂ©e dix
ans Ă la Sea Org. Jâavais 16 ans et besoin dâun job pour survivre »
17
.
Jean-Philippe Vergnon, aujourd'hui ùgé de 36 ans, a vécu son enfance
et son adolescence chez les
FrÚres de Plymouth de la voie étroite
:
« Il
y avait des réunions tous les soirs et le dimanche toute la journée.
Nous étions interdits de télévision, de radio et d'informatique et la
presse n'Ă©tait autorisĂ©e que sept minutes par jour debout et Ă
l'exclusion des pages sportives. A partir de la 6
Ăšme
, nos parents nous
retiraient de l'école et des cours nous étaient dispensés par un frÚre,
avec un programme du Centre national d'enseignement Ă distance
(CNED) revu et corrigé »
18
.
Quant aux
Témoins de Jéhovah
, on sait
que la plupart des jeunes « choisissent » des filiÚres courtes, pour
rapidement devenir des « professants » (membres actifs qui, par deux,
vont à la rencontre de leur prochain pour leur dispenser les écrits du
groupe).
Les conséquences sont encore plus lourdes lorsque les enfants
ont subi des mauvais traitements, comme Ă
La Citadelle
: ce groupe
aujourdâhui disparu a connu un regain dâactualitĂ© avec le procĂšs
16
Conseil dâEtat statuant au contentieux N° 110178, publiĂ© au Recueil Lebon
1/4 SSR, lecture du 24 avril 1992.
17
http://ocmb.xenu.net/ocmb/viewtopic.php?p=154876#154876
18
www.leprogrĂšs.fr
; 15 avril 2003
18
consĂ©cutifs Ă lâextradition dâIrlande dâun ex dirigeant de
la Citadelle
,
lors de lâarrestation dâAxel Schmidt, membre de ce groupe et
interpellĂ© sur mandat dâarrĂȘt pour des faits de violences commis en
1989, 1990 et 1991 Ă lâencontre de mineurs de 15 ans, sans incapacitĂ©
et de soustraction à obligation légale compromettant la santé, la
sĂ©curitĂ©, la moralitĂ© ou lâĂ©ducation des enfants.
19
Ces mauvais
traitements sont parfois justifiés par le gourou :
«Le petit ĂȘtre qui n'est
encore qu'une "larve" d'homme doit ĂȘtre, dans sa petite enfance,
habituĂ© Ă respecter la libertĂ© et la tranquillitĂ© des autres. Ătant donnĂ©
qu'il est trop petit pour comprendre et pour raisonner le chĂątiment
corporel doit ĂȘtre appliquĂ© avec rigueur par la personne qui Ă©lĂšve un
enfant, afin qu'il souffre lorsqu'il fait souffrir les autres, ou lorsqu'il
les gĂȘne en leur manquant de respect »
(Raël)
20
;
« Il est dit que vous
pouvez battre vos enfants jusquâĂ 5 ans pour le cas oĂč ils ne sont pas
gentils »
(Sri Matadji)
21
.
Les abus sexuels sur mineurs de 15 ans peuvent donner lieu Ă
des procédures judiciaires lorsque les faits ne sont pas couverts par la
prescription. Quelquefois, ils sont partie intégrante de la doctrine
édictée par le gourou. Ainsi Raël écrit :
[...] «L'éducation sexuelle est
trĂšs importante [...] mais elle n'apprend que le fonctionnement
technique des organes et leur utilité, tandis que l'éducation sensuelle
doit apprendre comment l'on peut avoir du plaisir par ses organes, en
ne recherchant que le plaisir [...]. Ne rien dire Ă ses enfants au sujet
du sexe, c'est mal, leur expliquer à quoi çà sert, c'est mieux mais ce
n'est pas encore suffisant : il faut leur expliquer comment ils peuvent
s'en servir pour en retirer du plaisir. [...] «Tu apprendras à tes
enfants Ă aimer leur corps comme on doit aimer chaque partie de la
création des Elohim, car en aimant leur création, c'est également eux
que l'on aime. Chacun de nos organes a été créé par nos pÚres, les
Elohim, pour que nous nous en servions sans avoir la moindre honte
mais en étant heureux de faire fonctionner ce qui a été fait pour
fonctionner»
22
. Il en est de mĂȘme dans le groupe
Orkhos
, dont le
gourou, fondateur de lâ
Instinctothérapie
, a été condamné par la Cour
19
Le 5 dĂ©cembre 2005, la Cour dâappel de Versailles a condamnĂ© lâintĂ©ressĂ©
Ă la peine de dix-huit mois dâemprisonnement avec sursis pour des faits de
violences volontaires sans incapacité de travail commis au Vésinet courant
1989 et 1990 sur deux mineurs de 15 ans. Par ailleurs, la Cour dâappel a
constatĂ© la prescription et a relaxĂ© pour les autres faits reprochĂ©s Ă lâintĂ©ressĂ©.
20
Les extra-terrestres m'ont emmené sur leur planÚte
, p. 100.
21
Sidney, 1983
22
Les extra-terrestres
, p. 103-105
19
dâassises de lâEssonne, le 4 juillet 2003, Ă la peine de quinze ans de
réclusion criminelle pour viols, viols aggravés et corruption de
mineurs. Son fils a été condamné pour agressions sexuelles imposées
Ă un mineur de 15 ans et corruption de mineurs, Ă la peine de quatre
ans dâemprisonnement par le Tribunal correctionnel de Melun, le 26
mars 2002. En fuite, lors du procĂšs, lâintĂ©ressĂ© fait lâobjet dâun mandat
dâarrĂȘt.
La privation de soins ou dâaliments peut aussi aboutir Ă la
mort comme dans le cas du jeune Kerywan, décédé à 16 mois. Lors de
sa mort, le poids de lâenfant Ă©tait Ă©quivalent Ă celui dâun nourrisson de
quatre mois. Ses parents, adhérents à la
kinésiologie
, ont été
condamnĂ©s par la Cour dâassises du FinistĂšre, Ă la peine de cinq ans
dâemprisonnement dont cinquante-deux mois avec sursis mise Ă
lâĂ©preuve pendant trois ans. Par ailleurs, trois mĂ©decins ont Ă©tĂ©
condamnĂ©s Ă la peine de 3000 euros dâamende pour non assistance Ă
personne en danger.
Situation en 2005
Le groupe
Horus
sâest reconstituĂ© autour de la gourelle ayant
purgé sa peine.
A
Tabithaâs Place
, plusieurs jeunes adultes ont quitté la
communauté à leur majorité et ont cherché des hébergements en
structure dâaccueil. Lâun dâentre eux poursuit des Ă©tudes
dâinformatique. Depuis, sa rĂ©ussite sert dâargument Ă la communautĂ©
pour justifier la « valeur » de son école de fait. Tous les arguments
sont bons dans les groupes sectaires.
Dans les milieux de la
kinésiologie
, on constate de nombreux
cas de ruptures familiales, de divorces conflictuels, dont les enfants
constituent un douloureux enjeu. Par ailleurs, lâ« Ă©du-kinĂ©siologie » se
rĂ©pand dans lâenseignement privĂ© confessionnel. Une mise en garde a
Ă©tĂ© envoyĂ©e par une orthophoniste Ă lâInspection acadĂ©mique
concernant un instituteur qui, aprÚs avoir signé un protocole avec
lâorthophoniste pour un enfant souffrant de troubles du langage, a
remis en cause ce protocole pour sâorienter vers lâĂ©du-kinĂ©siologie.
Lâorthophoniste dĂ©nonce alors le prosĂ©lytisme de la
kinésiologie
en
milieu scolaire et lâenfant est « mutĂ© » dans un autre Ă©tablissement
scolaire. Un établissement impose des séances de « relaxation » faite
20
par une édu-kinésiologue une fois par semaine. On constate que cette
infiltration de la
kinésiologie
existe aussi dans certains établissements
privés accueillant des handicapés.
Le 7 octobre 2005, la Cour dâassises de la Gironde a
condamné un ex-adepte Témoin de Jéhovah à la peine de douze ans de
réclusion criminelle pour viols sur mineure de 15 ans par ascendant
lĂ©gitime. LâintĂ©ressĂ© a fait appel
23
. Les
Témoins de Jéhovah
avaient
jugé le coupable en le traduisant devant le Conseil des Anciens, mais
en se gardant bien de saisir la « justice des hommes », câest-Ă -dire
celle de la République. Le Témoin de Jéhovah coupable avait été radié
de sa communautĂ©, mais les faits nâavaient pas Ă©tĂ© dĂ©noncĂ©s Ă la
justice.
Le parti
Solidarité et ProgrÚs
mĂšne une vaste campagne de
recrutement depuis le dĂ©but de lâannĂ©e 2004, installant des stands et
distribuant des tracts, des revues
Nouvelle Solidarité
24
à proximité ou
mĂȘme dans les campus des universitĂ©s, notamment Ă Paris (Sorbonne,
Saint-MichelâŠ.), Ă Rennes, Ă Nantes, Ă Lyon. Les Ă©tudiants
constituent une cible privilĂ©giĂ©e pour ce parti qui, sous lâapparence
dâune idĂ©ologie politique « anti-Bush » et avec une image alternative
aux mouvements politiques constitués, joue sur la fibre engagée et
idéaliste des étudiants.
Lâ
Ancien et Mystique Ordre de la Rose-Croix
(AMORC)
sâintĂ©resse de trĂšs prĂšs aux enfants.
«LâOrdre de la Rose-Croix
AMORC parraine depuis de nombreuses années un institut qui leur est
destinĂ©. Cet institut, connu sous le nom dâInstitut Culturel de
lâEnfance, donne Ă chaque enfant la possibilitĂ© de se familiariser avec
les lois de la vie avant mĂȘme quâil vienne au monde. Comment ? En
permettant Ă sa mĂšre de commencer son Ă©ducation alors quâelle est
enceinte de lui. Câest cette Ă©ducation prĂ©natale qui fait la grande
originalitĂ© de lâInstitut Culturel de lâEnfance. [âŠ] Notre Institut
apporte en plus une aide cosmique Ă la mĂšre tout au long de la
grossesse et au moment de lâaccouchement, aide quâil est le seul Ă
dispenser à travers le monde. Dans les centaines de cas ayant reçu
23
DĂ©pĂȘche AFP du 7 octobre 2005 : lâintĂ©ressĂ© avait comparu devant le
conseil des anciens, structure interne Ă lâorganisation des
Témoins de
Jéhovah
, laquelle lâa exclu pour les faits qui lui Ă©taient reprochĂ©s.
24
« Nouvelle Solidarité »
est la revue publiée par
Solidarité et ProgrÚs
, parti
politique du Français Jacques Cheminade, lui-mĂȘme liĂ© au Parti Ouvrier
Européen (POE) et à son leader américain Lyndon Larouche.
21
lâassistance mĂ©taphysique apportĂ©e par notre ComitĂ© dâEntraide
Spirituelle, des rapports et des lettres de parents confirment que la
naissance de lâenfant a Ă©tĂ© moins douloureuse et plus aisĂ©e. Il sâagit
de quelque chose que les médecins, les infirmiÚres, les savants et
autres sommitĂ©s, ne peuvent pas faire pour les mĂšres, parce quâil
sâagit dâune mĂ©thode trĂšs ancienne et secrĂšte connue seulement des
mystiques. [âŠ] Les anciens Grecs accomplirent une Ćuvre
merveilleuse dans ce sens, et ils utilisĂšrent les principes de lâinfluence
prénatale pour produire une race noble »
25
.
Lâ
AMORC
diffuse depuis
son ChĂąteau dâOmonville, siĂšge aussi de lâInstitut, des cours avant et
aprĂšs la naissance.
« Le cours post-natal de lâInstitut Culturel de
lâEnfance va de la naissance Ă 5 ans, Ăąge Ă partir duquel lâenfant peut
ĂȘtre inscrit Ă lâOrdre junior des Porte-Flambeaux »
26
.
Puis Ă 11 ans, il
deviendra «
Croisé
». Le jeune rosicrucien peut se faire
propagandiste
27
, et un jeune (de 5 Ă 11 ans !) peut devenir porte-
flambeau, mĂȘme si ses parents ne sont pas Ă lâ
AMORC
. Jusquâen
2005, il était accueilli au centre du Viginet à Saint Nectaire, avec
lâagrĂ©ment de lâĂducation nationale
28
.
[âŠ]
Il semblerait que ce centre
soit en vente.
Ecoovie
. En 2004, Joe Maltais, le gourou, prend la fuite au
Canada avec sa compagne de nationalité française et ses enfants. Il
prétend que ces enfants sont les siens. Un avis de recherche est alors
diffusé à travers le territoire canadien par la Direction de la protection
de la jeunesse. Mme V. a quitté le territoire national, en emmenant ses
deux enfants mineurs, sans lâautorisation du pĂšre des enfants et au
mĂ©pris dâune dĂ©cision de justice. Elle a Ă©tĂ© interpellĂ©e au Canada oĂč
elle séjournait avec des membres et le gourou de la secte. Les deux
enfants ont pu rejoindre le territoire national. Mme V. a été
condamnée par le Tribunal correctionnel de Bayonne, le 17 mai 2005,
Ă la peine de huit mois dâemprisonnement dont quatre avec sursis pour
atteinte Ă lâexercice de lâautoritĂ© parentale par soustraction de
mineurs, des mains de ceux qui exercent lâautoritĂ© parentale ou
auxquels ils ont été confiés ou chez qui ils ont leur résidence
habituelle avec deux circonstances aggravantes :
25
Fascicule interne de lâAMORC, intitulĂ©
« Quâest lâInstitut Culturel de
lâEnfance ?»
.
26
ibid.
27
Fascicule interne de lâAMORC, bande dessinĂ©e intitulĂ©e
« LâĂ©trange
histoire des Rose-Croix ».
28
agrĂ©ment qui ne porte que sur des contrĂŽles dâhygiĂšne et de sĂ©curitĂ©.
22
-
la soustraction sâest prolongĂ©e au-delĂ de cinq jours,
-
les enfants ont été retenus indûment hors du territoire national.
Sur signalement dâun proche de la famille dâun enfant atteint
dâune leucĂ©mie aigue, un couple dont la femme adhĂšre aux thĂšses
dâ
IVI
29
, a été renvoyé devant le Tribunal correctionnel de Versailles
pour non assistance à personne en péril sur la personne de leur fils
mineur, décédé. Il leur était notamment reproché un retard de six jours
entre la date de dĂ©tection de la maladie et le transport de lâenfant Ă
lâhĂŽpital, responsable de lĂ©sions neurologiques ayant altĂ©rĂ© les
conditions de survie de lâenfant. Le Tribunal correctionnel de
Versailles a relaxĂ© ce couple, lâĂ©lĂ©ment intentionnel de lâinfraction
nâĂ©tant pas rapportĂ©.
Dâautres groupes sont prĂ©occupants, comme par exemple
Kryeon
et les enfants
indigos
. Les premiers cas de déscolarisation sont
signalĂ©s par les inspections acadĂ©miques, au ministĂšre de lâEducation
nationale ou dans le cadre des cellules de vigilance départementales.
Education
La Cellule de prévention du phénomÚne sectaire (CPPS) du
ministĂšre de lâEducation nationale est toujours trĂšs active, en
particulier dans la formation des cadres administratifs de ce ministĂšre.
Des contrÎles sont effectués dans les établissements hors contrat, et
pour les enfants dont les parents choisissent de les instruire Ă domicile.
Il reste cependant un certain nombre de problĂšmes.
Les « écoles de fait »
Lorsquâun Ă©tablissement scolaire ne correspond pas aux
critÚres, pourtant bas, pour ouvrir une école hors contrat
30
, des
procĂ©dures sont enclenchĂ©es par lâInspection acadĂ©mique. Câest le cas
dans lâHĂ©rault pour une Ă©cole fondĂ©e par lâInstitut thĂ©ologique de
Nßmes, émanation de
Church of the Greater Grace.
A Sus dans les
Pyrénées-atlantiques (
Tabithaâs Place
ou
Les douze tribus),
les
29
Invitation Ă la Vie
30
Acceptation de la loi Falloux et nomination du directeur Ă la condition quâil
possÚde un baccalauréat, en application de la circulaire de 1851 toujours en
vigueur.
23
contrĂŽles demandĂ©s par lâinspection acadĂ©mique ne concernent que
neuf enfants sur la cinquantaine demeurant sur les lieux. En Alsace, le
mĂȘme groupe ne rĂ©pond pas Ă la demande de contrĂŽle dâun enfant
instruit Ă domicile, alors mĂȘme que lâinspecteur de lâEducation
nationale avait averti de la date Ă laquelle ce contrĂŽle Ă domicile aurait
lieu.
La situation est plus complexe dans le RhĂŽne avec le cas de la
Juniorâs School
, une école sous contrat. Un contrÎle exercé a mis en
lumiÚre le fait que la directrice ne possédait pas les titres requis, et
que, par ailleurs, lâassociation qui gĂ©rait lâĂ©cole semblait infiltrĂ©e par
au moins un membre de la scientologie. En attente de la nomination
de nouveaux cadres, aussi bien Ă la direction que dans lâassociation, le
contrat a Ă©tĂ© rompu par le ministĂšre de lâEducation nationale. On se
retrouve dans le cas dâune Ă©cole de fait.
Le cas suivant est encore plus compliquĂ©. Comme on lâa vu,
les FrÚres de Plymouth de la voie étroite
, émanation du darbysme
protestant, refusent lâĂ©ducation publique. Jusque lĂ , ils fonctionnaient
partiellement avec lâaccord de lâinspection acadĂ©mique, sur des cours
par correspondance du CNED
31
, avant les versions actualisées
dâ
Internet
. Depuis quelques années, ils travaillaient avec le cours par
correspondance
Le ChĂȘne
. Lâattention de lâInspection avait Ă©tĂ© attirĂ©e
par le fait que certaines matiĂšres, comme la biologie, ne semblaient
pas ĂȘtre enseignĂ©es. Depuis, les FrĂšres ont construit leur propre
école/collÚge à Chambon-sur-Lignon. On ignore à ce jour quel sera le
statut de cette école à son ouverture, imminente.
Lâenseignement par correspondance
Comme on lâa vu dans le cas prĂ©cĂ©dent, et telle que le
souligne le ministĂšre de lâEducation nationale
32
, le « contrÎle » des
cours par correspondance est impossible. Câest un marchĂ© ouvert et
juteux dans lequel sâengouffrent les parents dâĂ©lĂšves, inquiets du sort
de leurs enfants. Il faut ici rappeler que lâimpossibilitĂ© du contrĂŽle fait
quâil nây a aucune garantie en dehors du CNED, ni aucun agrĂ©ment.
31
Centre national dâenseignement Ă distance
32
Voir
infra
24
Soutien scolaire et organismes para-scolaires
Là encore, on est dans un marché libre et concurrentiel. Les
seuls contrĂŽles qui puissent ĂȘtre exercĂ©s sont ceux dâ« hygiĂšne et
sécurité ». Les organismes qui le souhaitent peuvent obtenir un
agrĂ©ment de lâEducation nationale.
Il rÚgne à ce jour une grande opacité dans laquelle se sont
engouffrés des groupes sectaires comme la scientologie, qui distribue
dans les banlieues des tracts pour des cours de soutien (au CollĂšge
Victor Hugo dâAulnay-sous-Bois, par exemple). Ce crĂ©neau du
soutien scolaire semble ĂȘtre une des nouvelles pistes de la
scientologie, puisquâon la voit dĂ©velopper ses Ă©coles de soutien en
BaviĂšre.
On constate aussi la floraison de conférences philosophiques
données par
la Nouvelle Acropole
, avec tractage aux alentours de
lycĂ©es, et stands dans lâenceinte des universitĂ©s. On voit aussi
distribuer des tracts pour lâ
Ăcole de thĂ©osophie
de la rue Keppler Ă
Paris, Ă destination des enfants.
Quelquefois, les groupes se dissimulent : ainsi, Ă lâuniversitĂ©
de Toulouse, seraient proposées des formations
Landmark-Education
sous couvert de cours de dessin.
Centres de loisirs et sĂ©jours de vacances pour mineurs en France et Ă
lâĂ©tranger
Le ministĂšre de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative
a en charge le contrÎle des séjours de vacances pour les mineurs. Mais
il ne peut exercer ce contrĂŽle pour les sĂ©jours Ă lâĂ©tranger. LĂ encore
seuls les organismes Ă©manant de lâEducation nationale ont - et peuvent
avoir - un agrément garantissant leur fiabilité.
Par ailleurs, seuls les lieux dâaccueil avec hĂ©bergement de
douze mineurs au plus et durant plus de cinq nuits sont soumis Ă
déclaration.
Enfin, dans le domaine des centres de loisirs, les organisateurs
accueillant entre huit et trois cent mineurs pendant plus de quinze
jours au cours dâune mĂȘme annĂ©e sont obligĂ©s de se dĂ©clarer auprĂšs
25
des services de la jeunesse et des sports et de fournir un projet
éducatif.
Câest pourquoi lâon constate des dĂ©rives sectaires dans les
courts séjours : ainsi à Millau,
Alterân Educ
reçoit pour des séjours de
six jours des enfants de 6 Ă 16 ans avec, au programme, des jeux de
rÎle, du yoga, des groupes de paroles, dispensés par des adeptes de
Krishna
. Pour les parents accompagnateurs, sont proposées des
conférences sur les médecines douce et la méthode Hamer
33
.
Internet
Il faut ici rappeler la dangerositĂ© de lâutilisation dâ
Internet
sans suivi parental. Lâan dernier, le rapport de la MIVILUDES
34
faisait état des techniques utilisées par les groupes se référant au
satanisme sur le Web.
Des projets de refonte de la loi de 1949 sur la protection de la
jeunesse en matiĂšre de publications (revues et livres) sont
réguliÚrement évoqués. Il serait certainement utile que le Parlement se
penche sur la possibilitĂ© dâinclure les problĂšmes liĂ©s aux dĂ©rives
constatĂ©es sur lâ
Internet
, si une rĂ©vision de cette loi se concrĂ©tisait Ă
brÚve échéance.
33
CondamnĂ© par la Cour dâappel de ChambĂ©ry, le 1
er
juillet 2004, Ă la peine
de trois ans dâemprisonnement pour escroqueries et complicitĂ© dâexercice
illĂ©gal de la mĂ©decine. Ryke Hamer a bĂ©nĂ©ficiĂ© dâune libĂ©ration
conditionnelle Ă compter du 15 fĂ©vrier 2006, par arrĂȘt de la Cour dâappel de
Paris, le 9 février 2006.
34
« Le Risque sectaire »
, Documentation française, 2005
26
1-2
RISQUES INDUITS PAR LES PRATIQUES
DE SOINS ET DE GUERISON DES
GROUPES A CARACTERES SECTAIRES
Profitant de lâattirance grandissante du public pour les
thérapies alternatives et les médecines douces, les groupes les plus
divers investissent, depuis plusieurs décennies mais plus encore
aujourdâhui dans des proportions inquiĂ©tantes, le domaine de la santĂ©
et du bien-ĂȘtre par une multitude dâoffres de soins et
dâaccompagnement au dĂ©veloppement personnel, assorties de
promesses de guĂ©rison et de vie harmonieuse ici-bas et mĂȘme au-delĂ .
Ce succĂšs gĂ©nĂšre des risques divers, depuis lâescroquerie pure
et simple jusquâĂ la dĂ©rive « thĂ©rapeutique », voire sectaire au sens
des critĂšres retenus par les pouvoirs publics et dans les rapports
parlementaires pour caractériser la situation des victimes. Il est le
corollaire dâaspirations profondes de nos contemporains dans leur
volontĂ© absolue Ă gĂ©rer le mal ĂȘtre des temps modernes, Ă rĂ©soudre
des pathologies lourdes et mortelles, à dénier le handicap en
sâaffranchissant des limites des savoirs et des pratiques scientifiques
au premier rang desquelles figure la médecine traditionnelle ou
allopathique, encore dĂ©signĂ©e sous le vocable « dâofficielle » et dont
les caractĂ©ristiques sont dâune part lâĂ©valuation scientifique des
pratiques et dâautre part la prise en charge financiĂšre, en totalitĂ© ou en
partie, par les caisses dâassurance maladie.
Ce phénomÚne se développe dans un contexte marqué, comme
le soulignait déjà le rapport 2004 de la MIVILUDES, par la
banalisation de lâĂ©sotĂ©risme et de lâoccultisme, consacrant le grand
retour de la pensée magique.
De dimension internationale, il est lâobjet dâun rapport de la
Commission des questions sociales, de la santé et de la famille du
Conseil de lâEurope, intitulĂ©
«
Une approche européenne des
médecines non conventionnelles »
qui au moment de sa publication
en juin 1999, décrivait le phénomÚne dans les termes suivants :
27
- « Les médecines alternatives sont devenues à présent de véritables
industries. DÚs lors, des abus et des dérives sont possibles, certains
Ă©tant toujours tentĂ©s, par goĂ»t du pouvoir ou esprit de lucre, dâutiliser
ces médecines à des fins détournées. Il existe donc des risques
certains de voir ces médecines exploitées par des charlatans, des
groupes sectaires etcâŠ, tous voyant en elles un profit immĂ©diat.
- Pour les sectes, la santĂ© est un thĂšme porteur : elles sâen servent
pour attirer de nouveaux adeptes, et sont tentĂ©es dâutiliser ces
médecines parallÚles pour couper les adeptes du monde médical
extĂ©rieur Ă la secte. Dans la mesure oĂč elles prĂŽnent lâinutilitĂ© de la
mĂ©decine traditionnelle et la nĂ©cessitĂ© dâarrĂȘter tout traitement, y
compris dans le cas de maladies graves comme le cancer et le SIDA,
les dangers sont considérables pour les individus. Les médias se sont
faits lâĂ©cho de plusieurs cas dâadeptes atteints de cancer et dĂ©cĂ©dĂ©s
aprÚs avoir abandonné toute thérapie. »
Si le phĂ©nomĂšne nâest pas nouveau, les constats qui sây
attachent, faits Ă la fois par la MIVILUDES et par ses partenaires
institutionnels et associatifs, attestent de son évolution préoccupante.
Ses contours multiples et changeants
caractérisent une offre
plĂ©thorique marquĂ©e par lâatomisation des prestations, la crĂ©ation aux
cÎtés de groupes traditionnels, de réseaux de thérapeutes dont certains
sont franchisĂ©s, la diffusion de pratiques allant de lâacceptable au pire,
la délivrance de formations diplÎmantes dénuées de reconnaissance
officielle et enfin le recours à des modalités commerciales
performantes.
La recherche dâune prĂ©vention des risques induits ainsi que les
enseignements déjà tirés des dérives sanctionnées par le juge ont
conduit la MIVILUDES Ă porter de maniĂšre prioritaire ses efforts sur
cet axe de travail au cours de lâannĂ©e 2005.
I â La dimension guĂ©risseuse de plus en plus prĂ©sente dans la
société française
Lâillustration de ce phĂ©nomĂšne est mise en lumiĂšre par les
observations collectées auprÚs des associations de terrain et des
acteurs de la vigilance institutionnelle.
28
A - Les associations de terrain
1 - Association Nationale de dĂ©fense des familles et de lâindividu
victimes de sectes (UNADFI) et son antenne parisienne (ADFI -
PARIS)
De statut à but non lucratif, les associations de défense des
famille et de lâindividu (ADFI) regroupĂ©es en Union nationale
(UNADFI) étudient, y compris dans leur dimension internationale,
«
les principes directeurs dâorganisations prĂ©sentant des risques de
dérives à caractÚre sectaire, informent et préviennent, enfin
conseillent et aident les familles désorientées et les adeptes sortant de
groupes »
. Les bilans annuels dâactivitĂ©s confirment Ă cet Ă©gard, dans
la sociĂ©tĂ© française, la multiplication dâoffres Ă visĂ©e curative et de
dĂ©veloppement personnel. Lors dâĂ©changes accordĂ©s en 2005 aux
mĂ©dias, Mme Catherine Picard, prĂ©sidente de lâUNADFI, indiquait
que lâensemble des vingt-six antennes locales signalait la progression
du nombre de ces groupes, multipliés par deux et demi environ en
quinze ans. La moitié des questionnements et inquiétudes exprimés
par les appelants, généralement pour un de leurs proches, pointent des
groupes de type thérapeutique, des méthodes de santé alternatives, et
lorsquâil sâagit de mouvements dont la vocation premiĂšre nâest pas de
proposer des prestations de santé, des communautés connues pour
poser en dogme le refus de soins ou pour organiser des campagnes
dâopposition active Ă certaines disciplines de la mĂ©decine
traditionnelle.
Les autres donnĂ©es prises en compte Ă©manent de lâADFI Paris
et concernent principalement la région Ile-de-France. La moitié de
cette activité concerne le champ des pratiques curatives. Sont plus
particuliÚrement dénoncées les psychothérapies et les médecines du
mieux ĂȘtre Ă dimension holistique comme le reiki, la
kinésiologie
, la
mouvance des faux souvenirs, certains mouvements orientalistes tels
le
Mahikari
mais également des méthodes émergentes comme la
psychophanie, lâhygiĂ©nisme et la mouvance de mĂ©decines
énergétiques. Les appelants dénoncent dans des proportions non
nĂ©gligeables, et au-delĂ dâune simple inquiĂ©tude pour un proche, des
changements radicaux de comportement manifestés par des
revendications dâindĂ©pendance familiale, matĂ©rielle et professionnelle
et parfois
la rupture totale avec lâenvironnement immĂ©diat.
29
LâadhĂ©sion dâun conjoint au reiki
35
ne serait pas étrangÚre à des
décisions de divorce ou à des séparations.
2 - Groupe dâĂ©tude des mouvements de pensĂ©e pour la protection de
lâindividu (GEMPPI) en rĂ©gion Provence-Alpes - CĂŽte dâAzur (PACA)
Les données fournies par le GEMPPI corroborent en
particulier pour le département des Bouches-du-RhÎne et la ville de
Marseille, les tendances identifiées précédemment au travers des
activitĂ©s de lâUNADFI avec une progression sensible entre 2003 et
2005.
Organisateur en 2005 dâun colloque national sur le thĂšme
« Le
refus de soins pour cause idéologique »,
le GEMPPI sâoriente sur les
questions de santé et il est, à ce titre, de plus en plus consulté par des
particuliers. La moitié des interrogations comptabilisées en 2005
concernent des enseignements et des pratiques présentant un risque
pour la santé, réparties sur une trentaine de groupes ou de méthodes
parmi lesquels figurent par ordre décroissant le reiki, la
kinésiologie
,
la psychogénéalogie,
EMF Balancing/Kryeon
, le chamanisme, la
communication facilitée ou la psychophanie, le zen macrobiotique,
FMS syndrome des faux souvenirs, la scientologie, la méthode Hamer,
lâanthroposophie,
Mahikari
, âŠ
3 - Le Centre de documentation, dâĂ©ducation et dâaction contre les
manipulations mentales (CCMM)
Le tĂ©moignage de terrain qui suit Ă©mane dâun mĂ©decin
responsable de lâunitĂ© des soins palliatifs au Centre hospitalier
régional et universitaire de Besançon. Au-delà de ses fonctions
hospitaliÚres et en sa qualité de membre régional du CCMM, ce
mĂ©decin a lancĂ©, au sein du comitĂ© dâĂ©thique de son Ă©tablissement,
une réflexion sur les dérives sectaires dans le champ de la santé :
«
Les situations les plus fréquentes pour lesquelles je suis
interpellé,
constate lâintĂ©ressĂ©,
concernent des malades atteints de
pathologies graves, potentiellement mortelles (cancer, sida, maladies
neurologiques Ă©volutivesâŠ) ou des maladies trĂšs Ă©voluĂ©es. Les
méthodes alternatives les plus fréquemment rencontrées sont les
méthodes excluant les approches médicales prouvées et des méthodes
se prĂ©sentant Ă lâorigine comme « mĂ©decines douces » mais Ă©voluant
35
Bulles
n°64 (bulletin dâinformation de lâUNADFI)
30
vers une pratique exclusive et excluante (méthodes Simonton,
BeljanskiâŠ) ».
Ce praticien signale également les sollicitations réguliÚres
dont le personnel hospitalier est lâobjet, pour des formations
accélérées à des techniques psychothérapeutiques ou guérisseuses
étrangÚres, en tout état de cause, aux techniques médicales des
Ă©tablissements de santĂ© ainsi que lâappartenance de bĂ©nĂ©voles
accompagnants et visiteurs de malades à des courants néo ou pseudo-
religieux dont les convictions, dĂšs lors quâelles sont mises en Ćuvre Ă
ce titre, perturbent lâorganisation des soins et peuvent gĂ©nĂ©rer des
dĂ©rives en lâabsence de vigilance des soignants.
B - Les acteurs de la vigilance institutionnelle
1 â La Police nationale
La
Police nationale constatait, dÚs 2001, la vitalité du marché
des thérapies alternatives par le recensement de quelque quatre-vingt
méthodes dont plusieurs présentaient une dangerosité au regard des
critĂšres dâidentification du risque de dĂ©rive. Elle relevait aussi Ă
lâĂ©poque, une trentaine de procĂ©dures judiciaires concernant certains
groupes ou praticiens pour exercice illégal de la médecine ou de la
pharmacie.
Quatre ans plus tard, câest Ă plus de deux cents que peut ĂȘtre
évalué le nombre de méthodes de médecines douces dont certaines,
pour les mĂȘmes raisons que prĂ©cĂ©demment, doivent faire lâobjet dâune
vigilance des pouvoirs publics.
2 - La Gendarmerie nationale
Les enquĂȘteurs de la gendarmerie nationale constatent
Ă©galement, dans les campagnes, la progression dâune offre de soins et
de guérison à risque promue par des micro-groupes ou des praticiens
exerçant en libéral dont une trentaine de cas justifient une vigilance
renforcée.
3 - Les cellules départementales de vigilance
LâĂ©volution du paysage de lâoffre de guĂ©rison au travers des
différentes sources précédemment évoquées, est consolidée par
31
lâanalyse des travaux des cellules dĂ©partementales de vigilance rĂ©unies
en 2005. Ces instances pointent sur le marché de la santé et du bien-
ĂȘtre, lâintrusion du « tout psychologique » par la prĂ©sence diffuse de
micro-structures dans la mouvance du
new age
et de promoteurs
alliant la plupart du temps plusieurs pratiques thérapeutiques et ou
psychothĂ©rapeutiques ou passant dâune mĂ©thode Ă lâautre pour mieux
capter leur clientĂšle et garantir des revenus substantiels. Ces petites
structures, dans la majorité des cas de statut libéral ou associatif,
développent des activités polyvalentes, allant du
coaching
Ă des
prestations à visée curative et proposent des formations diplÎmantes
non validĂ©es et de durĂ©e extrĂȘmement variable.
Ce phĂ©nomĂšne dont lâapprĂ©hension est malaisĂ©e, de lâavis des
services locaux, inquiÚte par sa dangerosité potentielle et réelle en
raison de condamnations pour exercice illégal de la médecine, de la
pharmacie, publicité irréguliÚre, importation de médicaments sans
autorisation de mise sur le marché, établissements de faux certificats
médicaux et soustraction à des obligations légales compromettant la
santĂ©. En tout Ă©tat de cause, il est le creuset de dĂ©rives qui avant dâĂȘtre
qualifiables de sectaires au sens des critĂšres convenus, sont, Ă tout le
moins, thérapeutiques pour cause de charlatanisme.
La présence de thérapeutes et de psychothérapeutes dont un
grand nombre sont autoproclamĂ©s, concerne lâensemble du territoire et
est particuliÚrement signalée dans les grandes villes et les zones
rurales du sud de la France. Les interrogations les plus fréquemment
formulées portent sur de possibles dérives de praticiens formés à la
psychogénéalogie et à la
kinésiologie
ainsi quâĂ la mĂ©decine
Ă©nergĂ©tique comme le reiki. Les groupes dâinspiration orientaliste
dĂ©veloppant des pratiques de soins et de bien ĂȘtre, alliant techniques
manuelles et dimension spiritualiste, sont Ă©galement lâobjet
dâinterrogations tout comme lâessor des groupes de priĂšre Ă vocation
guérisseuse au sein, notamment, des associations évangéliques.
- Parmi les courants en vogue, dans le sillage de la naturopathie, le
créneau des thérapies hygiénistes alliant jeûne et pratique sportive
intensive, semble se développer dans le sud-ouest.
- En Bretagne, on assiste Ă lâĂ©mergence de groupes alliant prĂ©tention
écologique, découverte de la nature et pratiques guérisseuses
empruntées à la tradition druidique.
- En Haute-Garonne, des formations aux médecines non
conventionnelles, et notamment la naturopathie, sont proposées à des
chÎmeurs et « rmistes ».
32
- Dans lâAin, un refus a Ă©tĂ© opposĂ© Ă une association spĂ©cialisĂ©e en
« naturo-réflexologie » qui sollicitait du FONGECIF
36
une subvention
pour aider une stagiaire Ă financer sa formation.
- En Loire-Atlantique, un institut prĂŽnant la mĂ©thode Silva sâest vu
opposĂ© un refus dâagrĂ©ment Ă la formation professionnelle.
- La technique
EMF Balancing
promue par le mouvement
Kryeon
se
développe en Meurthe-et-Moselle. Dans ce département, on note
également la forte présence de mouvements catéchumÚnes à vocation
guérisseuse.
- Le dĂ©partement de lâAriĂšge semble propice Ă la mouvance du
New
Age
avec la prĂ©sence dâune vingtaine de groupes dĂ©veloppant des
pratiques guĂ©risseuses et dâĂ©panouissement personnel alliant
chamanisme, méditation, réflexologie et soins énergétiques.
- Il convient dâĂȘtre plus particuliĂšrement vigilant sur un certain
nombre de mouvements en raison notamment de leur opposition Ă la
mĂ©decine conventionnelle allant jusquâau refus de soins. Sont citĂ©s
Lou Pitchoun
dans les Bouches-du-RhĂŽne,
Shy
(ex
Energie
Universelle
) dans les Landes, lâinstinctothĂ©rapie en Haute-Marne, le
Cercle des amis de Bruno Goering
en Dordogne, lâ
Eglise Universelle
du Royaume de Dieu
ou encore lâassociation
SA/SATHYA BABA
dont
lâun des relais serait le
Centre de méditation Vipassana
dans le
dĂ©partement de lâYonne.
C - Peu de plaintes déposées mais de nouvelles coordinations de
victimes
Dans ce contexte, au cours de ces derniÚres années, est
intervenue la création de sites web indépendants
(http://preventsectes.com, http://psyvig.com ou encore
http://membres.lycos.fr/ertonetecs
) entretenant des liens réguliers avec
les grandes associations.
La constitution de nouvelles associations ou de coordinations
de victimes souvent ciblées sur une méthode comme la
kinésiologie
ou
encore la psychogĂ©nĂ©alogie, dĂ©montre la nĂ©cessitĂ© de lieux dâĂ©coute et
dâaide face Ă des situations difficiles allant jusquâĂ la rupture. Il
ressort des enseignements tirés des témoignages que le sort des
enfants dans les couples sĂ©parĂ©s, et au sein desquels lâun des parents
adhĂšre Ă un groupe ou Ă une pratique dans la sphĂšre du bien-ĂȘtre et de
36
Fonds de gestion de congé individuel de formation
33
la santé, est particuliÚrement préoccupant
: climat de tensions
extrĂȘmes, fortes entraves voire refus de lâexercice du droit de visite au
parent nâassumant pas la «
garde
» du mineur, déplacement
géographique du jeune à des centaines de kilomÚtres, parfois dans un
pays étranger, adoption de rÚgles de vie compromettantes pour son
développement sur le plan moral ou physique et pour son insertion
dans la sociĂ©tĂ©, Ă©ventuellement dans certains cas extrĂȘmes, risques
vitaux.
De nouvelles associations sont apparues dans le paysage de la
défense des victimes, notamment la Coordination nationale de défense
des victimes de la
kinésiologie
, lâAssociation des victimes des
thérapies alternatives et de la psychogénéalogie, le Centre
dâinformation et de prĂ©vention sur les psychothĂ©rapies abusives et
déviantes (CIPPAD) créé en 2002 et consacré à la prévention des
dĂ©rives psychosectaires, lâassociation Alerte aux faux souvenirs
induits (AFSI) qui lutte prioritairement contre les abus liés aux
thérapies du faux souvenir.
Le peu de plaintes dĂ©posĂ©es rend difficile lâapprĂ©ciation de
lâĂ©tendue des dangers de ces pratiques sur un plan criminel. A la
frontiĂšre de lâescroquerie et du charlatanisme, il nâest pas toujours
facile de leur trouver une traduction juridique et lâautoritĂ© judiciaire se
trouve dĂ©sarmĂ©e. Pourtant le charlatanisme, en ce quâil correspond Ă
des pratiques et des médications invérifiables ou au recours à des
procĂ©dĂ©s illusoires, progresse en raison des offres dâun nombre
croissant de ces thérapeutes et psychothérapeutes en médecine
« nouvelle ».
II â Physionomie des dĂ©rives observĂ©es
Au-delà des récentes dérives qui ont marqué le secteur de la
santé, trois constantes marquent ce marché en plein essor.
A - Lâapproche « psy »
Au sein dâune offre plĂ©thorique oĂč le renouvellement des
labels est constant, le créneau « psychologique » se taille la part la
plus importante, quâil sâagisse de thĂ©rapeutes individuels auto-
34
proclamĂ©s, ou dâorganisations puissantes et structurĂ©es. Les thĂšses
dĂ©veloppĂ©es sâappuient sur trois postulats :
- la culpabilité du patient dans le développement de sa pathologie,
- lâangoisse de la maladie,
- la revendication dâun «
mieux ĂȘtre
» dans une société
dâindividualisme qui produit du dĂ©sarroi et oĂč le confort matĂ©riel ne
garantit plus le bonheur face au culte croissant de la réalisation
personnelle.
1 - Ryke Geerd Hamer, sa loi dâairain et ses thĂ©ories du traitement du
cancer
La confirmation en appel Ă lâĂ©tĂ© 2004, de la condamnation de
Ryke Geerd Hamer, pour escroquerie et complicitĂ© dâexercice illĂ©gal
de la mĂ©decine, rappelle la dangerositĂ© dâune mĂ©thode thĂ©rapeutique
qualifiée de « médecine douce » par son promoteur mais dont les
applications concrĂštes excluent le recours ou la poursuite de
traitements conventionnels dans toutes les pathologies, y compris dans
les affections lourdes. La premiÚre plainte déposée en France contre
ce mĂ©decin allemand frappĂ© dâinterdiction dâexercer dans son pays
depuis 1986, remonte à 1996. Elle fut déposée par un homme dont
lâĂ©pouse atteinte dâun cancer du sein, dĂ©cĂ©dait Ă la suite de refus de
traitements oncologiques et dâhospitalisation.
CaractĂ©ristique dâune approche psychologisante, cette
nouvelle médecine repose sur le postulat que toute maladie est la
rĂ©sultante dâun choc psychologique intense et dâun conflit intĂ©rieur
non résolu.
Partant de lâidĂ©e quâun stress important affaiblissait les
défenses immunitaires, voire provoquait une réaction somatique de
grande ampleur, Hamer a dérivé dans une démonstration de pseudo-
vérité dogmatique le conduisant à récuser les facteurs génétiques et
environnementaux Ă lâorigine de la maladie. Il affirme ainsi que la
culpabilitĂ© des fumeurs plus que lâingestion de tabac est cause de
cancer. Cette thĂ©orie devient pour lui universelle quâil sâagisse de
pathologies bénignes ou incurables. Ainsi naßt une méthode naturelle
de soins largement fondĂ©e sur les capacitĂ©s libĂ©rĂ©es dâauto-guĂ©rison
du malade Ă condition que nâinterfĂšrent pas dans ce processus, les
traitements conventionnels. Tout le monde peut guérir soit
spontanĂ©ment soit dans de rares cas avec le soutien dâun thĂ©rapeute.
35
2 - LâhĂ©ritage de Ryke Geerd Hamer
LâincarcĂ©ration de Geerd Ryke Hamer et sa condamnation Ă
trois ans de prison ferme par la Cour dâappel de ChambĂ©ry ont mis un
point dâarrĂȘt Ă ses activitĂ©s rĂ©prĂ©hensibles. Mais ses thĂ©ories
continuent dâessaimer en France, en Suisse et en Belgique Ă travers les
élÚves formés à son enseignement et sous des formes adaptées évitant
lâinvestissement du champ mĂ©dical. La remise en libertĂ© de Ryke
Hamer renforce les inquiétudes des pouvoirs publics.
Les héritiers de cette méthode qui se démarquent, prudence
oblige, des théories initiales de leur formateur, développent
aujourdâhui plutĂŽt des mĂ©thodes dâassistance personnelle empreintes
de promesses floues dâauto-guĂ©rison, et dâauto-libĂ©ration dĂ©coulant
de concepts nouveaux comme la « mémoire cellulaire , la biothérapie,
la bio-psychogénéalogie ou encore de décodage biologique ». Ces
concepts sont devenus autant de marques dĂ©posĂ©es dâun enseignement
souvent labellisé en nom propre pour assurer la notoriété de ses
initiateurs. Nourris des prĂ©ceptes dâHamer, les anciens Ă©lĂšves sont Ă
leur tour formateurs, dispensant stages et modules dâenseignement
privé coûteux, malgré une absence totale de validation scientifique. Le
second cercle des « hamĂ©ristes » comprendrait aujourdâhui dâaprĂšs les
observateurs de terrain comme lâUNADFI et le GEMPPI, une centaine
de praticiens en exercice. Parmi eux, on relÚve la présence de
mĂ©decins, parfois frappĂ©s dâinterdiction dâexercer ou mis hors
dâatteinte des sanctions de leurs instances ordinales en demandant leur
radiation, des dentistes formés au « décodage symbolique des dents »,
dâanciens adeptes dâorganisations connues comme la Scientologie et
des praticiens de techniques manuelles comme lâostĂ©opathie ou la
kinésiologie
.
Bien que reposant
a priori
sur des bases crĂ©dibles (lâĂ©tat
psychique du patient, à défaut de la provoquer, peut effectivement
jouer sur lâĂ©volution de sa maladie), ces diffĂ©rentes mĂ©thodes
dâaccompagnement inspirĂ©es de la doctrine hamĂ©riste posent
problĂšme dĂšs lors quâelles prĂ©tendent fournir, Ă la carte, des outils
auto-thérapeutiques permettant à chacun dans un temps court de
« dĂ©programmer la maladie » pour sâacheminer sur la voie de lâauto-
guĂ©rison, et ce, mĂȘme pour les pathologies graves voire incurables.
36
3 - De la mémoire du corps à la mémoire trans-générationnelle
LâidĂ©e quâil faut parfois remonter Ă lâhistoire de ses parents
pour libĂ©rer lâorigine de certains conflits ou mal ĂȘtre ne fait plus
véritablement débat. Nous sommes le produit des générations qui nous
précÚdent et la transmission inconsciente de certains non-dits ou
secrets de famille peut effectivement peser sur lâĂ©tat psychologique et
les choix de vie dâun individu. Mais il y a dĂ©rive dĂšs lors que ce
présupposé devient systématique pour certains tenants de la bio-
psychogénéalogie. Dans la lignée des préceptes haméristes, ils
prétendent que ces conflits non résolus naissent des « programmes de
survie biologiques » enclenchés par le cerveau, agissant directement
sur lâĂ©tat de nos cellules et provoquant des maladies. AdoptĂ©e comme
une rÚgle implicite et infaillible, cette théorie remet au goût du jour
une forme de déterminisme qui inspire là encore la plus grande
rĂ©serve. Dans le mĂȘme esprit, sous la proposition
« comment guérir de
cette famille qui vit en vous »
, certains groupes dits de
« constellations
familiales »
entendent apporter une solution définitive à des
problĂšmes de tous ordres, physiques ou psychologiques. Ces groupes
posent problĂšme dĂšs lors quâils se prĂ©sentent comme
« des outils de
guĂ©rison dâune maladie hĂ©ritĂ©e des ancĂȘtres, transcription biologique
dâun conflit psychologique non rĂ©solu par les gĂ©nĂ©rations
précédentes ».
B - Une approche déclinable suivant les publics visés
Lâapproche psychologisante se dĂ©veloppe au cĆur des
prestations de santĂ©. Le principe selon lequel, le sujet atteint dâune
pathologie oĂč ses ascendants directs seraient responsables de la
maladie développée, indépendamment des facteurs génétiques ou
environnementaux, se décline désormais en autant de solutions
thérapeutiques que de publics à toucher et donc de marchés potentiels
à conquérir.
Nombre de ces thérapies ne visent pas la mise sous sujétion
« dâadeptes » privĂ©s de leur discernement. Mais lâintrusion du « tout
psychologisant
» dans le champ des thérapies alternatives, en
prĂ©tendant donner une cause autre quâorganique Ă dâĂ©ventuelles
pathologies, peut favoriser les dérives individuelles et faciliter des
situations dâemprise dommageables du thĂ©rapeute sur son patient. A
la question,
« Pourquoi moi et pas un autre ? »
, il apporte une réponse
37
toute faite
« Tu tâes fabriquĂ© ta maladie »,
Ă laquelle il se propose
dâapporter des solutions clefs en main qui peuvent aller de la
prescription médicamenteuse à la condamnation de la médecine
classique.
Du traitement des maladies incurables, Ă la prise en charge des
personnes handicapées, puis du soulagement des souffrances
physiques Ă celui des souffrances psychiques, des doctrines et des
méthodes pédagogiques ont été déclinées à la carte en fonction de la
spĂ©cialitĂ© dâorigine de lâinitiateur et de son public cible.
Devant la profusion des offres thérapeutiques
psychologisantes, à la validité non éprouvée mais souvent à forte
rentabilitĂ©, la vigilance reste plus que jamais de mise comme lâatteste
lâexemple de la communication facilitĂ©e sur laquelle lâOrdre national
des mĂ©decins a, dans le courant de lâannĂ©e 2004, Ă©mis les plus grandes
réserves.
1 - La communication facilitée ou la psychophanie
Introduite en France par lâorthophoniste Anne-Marguerite
Vexiau, la méthode dite de « communication facilitée » est un procédé
qui permettrait aux personnes privées de paroles (autistes,
polyhandicapĂ©s, trisomiques, traumatisĂ©s crĂąniensâŠ) de sâexprimer en
tapant Ă la machine avec un doigt. Un partenaire leur soutient la main
ce qui favorise les Ă©changes inconscients dâinformation entre les deux.
Le patient se brancherait sur le cerveau de son partenaire et utiliserait
son Ă©quipement moteur, sensoriel, et mĂȘme psychique pour exprimer
sa propre pensée. Les handicapés mentaux sévÚres, les non voyants de
naissance, les sourds profonds, les patients en phase de réveil de
coma, les enfants présentant des troubles psychosomatiques seraient
Ă©ligibles Ă cette pratique. Elle est aujourdâhui lâobjet dâune
controverse faute de validation scientifique et en raison des publics
extrĂȘmement fragilisĂ©s auxquels elle sâadresse. A dĂ©faut de pouvoir la
qualifier de « sectaire » en lâĂ©tat actuel des investigations menĂ©es Ă
son sujet, de fortes présomptions de risque de déviances
thérapeutiques sont émises par un grand nombre de professionnels
quâil sâagisse des institutions reprĂ©sentatives de la profession mĂ©dicale
comme lâOrdre national des mĂ©decins et des syndicats professionnels
des soins de suite et de rĂ©adaptation. Certains propos dâAnne-
Marguerite Vexiau nourrissent les craintes de ces professionnels : «
Je
nâavais jamais pensĂ© que les morts puissent guĂ©rir les vivants
». Ces
38
propos paraissent en effet typiques des dĂ©rives induites par lâessor des
thérapies « trans-générationnelles » au nom desquelles des praticiens
aux cursus plus ou moins sérieux développent des prestations
invérifiées, voire invérifiables sur le plan médical. A cet égard, cette
technique ouvre incontestablement la porte Ă de possibles
manipulations et Ă lâexploitation du dĂ©sarroi des proches de la
personne handicapée quand les paroles retranscrites visent de surcroßt
à les culpabiliser comme dans cette assertion attribuée à un enfant
handicapé dont la mÚre avait avorté : «
Jâai Ă©vitĂ© mort en choisissant
maladie
».
Courant 2004, deux membres du Conseil national de lâOrdre
des mĂ©decins Ă©mettaient les plus grandes rĂ©serves sur lâintĂ©rĂȘt
scientifique de celle-ci, regrettant
« que cette technique soit effectuée
sur des patients en grande souffrance mentale » ;
le Groupe dâĂ©tude et
de recherche sur lâinfirmitĂ© motrice dâorigine cĂ©rĂ©brale (GERIMOC),
regroupant environ cent quarante médecins ou chirurgiens de diverses
spĂ©cialitĂ©s, alertait du dĂ©veloppement de cette mĂ©thode dans lâouest de
la France et en région lyonnaise.
Enfin, dans un courrier au ministre de la Santé à la fin de
2004, un mĂ©decin mettait lâaccent sur les derniers dĂ©veloppements de
la méthode qui promeut des formations trÚs onéreuses de « facilitant »
Ă destination des parents de personnes handicapĂ©es et sâouvre
désormais aux dépressifs ou personnes atteintes de troubles mineurs
dans une optique de soin psychologique, sous le label de
« psychophanie ».
2 - Le syndrome du faux souvenir, une forme de psychanalyse déviante
Lâadoption de la lĂ©gislation sur les psychothĂ©rapies va
permettre de mieux contrÎler le secteur des psychothérapies dÚs
lâadoption de ses dĂ©crets dâapplication. Cela pourrait, cependant,
nâĂȘtre pas totalement efficace pour juguler les dĂ©rives individuelles
dans un secteur pléthorique et difficile à contrÎler en raison de son
caractĂšre atomisĂ© et du secret de la relation qui se joue dans lâintimitĂ©
des cabinets de consultation. Ici, le dérapage éventuel se manifeste
dâabord dans une relation liant une seule personne - le thĂ©rapeute
incriminĂ© - Ă lâun de ses patients. « La thĂ©orie des faux souvenirs
induits » particuliÚrement en vogue outre-atlantique et en Angleterre
aurait dâores et dĂ©jĂ touchĂ© huit cents victimes dans ces pays. Des
thĂ©rapeutes sont ainsi accusĂ©s dâuser de leur pouvoir de suggestion
39
pour induire, via plusieurs techniques de manipulation tels le
rebirth
ou les thĂ©rapies du rĂȘve Ă©veillĂ©, de faux souvenirs dâinceste chez leurs
patients, entraĂźnant des ruptures avec le milieu familial. En France, on
recense suffisamment de cas de dérives avérées pour que plusieurs
associations aient vu le jour, par exemple lâassociation de vigilance
contre les faux souvenirs AVFS, le groupe France-Fausse mémoire et
faux souvenirs
37
et, plus récemment, une Coordination des victimes de
la thĂ©orie des faux souvenirs, fondĂ©e sous lâĂ©gide du GEMPPI.
C â La prĂ©vention et le dĂ©tournement du principe de prĂ©caution
investis par les médecines de guérison
Lâengouement actuel pour la mĂ©decine holistique reflĂšte
lâexigence lĂ©gitime du patient de ne pas ĂȘtre rĂ©duit par les
représentants du corps médical à sa seule pathologie et de bénéficier
dans sa prise en charge dâune approche thĂ©rapeutique Ă visage plus
humain. La médecine holistique en effet prÎne une prise en charge
globale du sujet qui dépasse largement le traitement du seul symptÎme
pour apprĂ©hender lâindividu dans toutes ses dimensions, mettant
lâaccent sur le lien existant entre sa pathologie et les aspects
émotionnels, sociaux, physiques et spirituels qui le constituent, et qui
ayant une influence sur son état, peuvent donc stimuler un processus
naturel de guérison ou au contraire illustrer un déséquilibre
dâharmonie nocif pour sa santĂ©.
Sous lâĂ©tiquette gĂ©nĂ©rique de « mĂ©decine holistique », on
trouve ainsi les prestations de soins les plus diverses. Si elles sâavĂšrent
le plus souvent sans danger pour lâintĂ©gritĂ© de la personne, certaines,
sâabritant derriĂšre le label en vogue dâune thĂ©rapie « douce », peuvent
conduire à des dérives de type sectaire caractérisées essentiellement
par le rejet de la médecine et des traitements conventionnels en cas de
pathologie avĂ©rĂ©e. Dans une sociĂ©tĂ© oĂč le culte du « risque zĂ©ro »
rÚgne en maßtre, certains groupes cultivent ainsi la peur légitime des
individus face au risque de la maladie, et développent des méthodes
empiriques de diagnostic et de repérage des zones ou facteurs de
risques, constituant des pratiques proches de lâexercice illĂ©gal de la
médecine.
37
Site
www.francefms.com
40
« Naßtre sans tare, vivre plus vieux, mourir mieux »,
telle
pourrait ĂȘtre rĂ©sumĂ©e la grande illusion induite par la promesse des
groupes à caractéristiques sectaires qui investissent actuellement le
secteur de la santé.
La prévention maximale du risque couru, en matiÚre de santé
comme dans tous les domaines du quotidien, devient une
revendication citoyenne et une aspiration majeure des individus. Les
mouvements et des praticiens indĂ©pendants lâont bien compris : sous
couvert de prévention, ils développent des propositions
thérapeutiques aberrantes et contraignantes, au nom du principe de
précaution : «
mieux vaut prévenir que guérir »
.
Plusieurs méthodes de guérison holistique par imposition des
mains se présentent ainsi comme des « techniques de contrÎle mental
visant Ă renforcer le systĂšme immunitaire ». Lâune dâentre elles en
particulier, connue pour les stages quâelle organise dans le monde
entier, proposerait en fin de cursus initiatique Ă lâĂ©lĂšve arrivĂ© Ă un
degré supérieur de formation, de percer les secrets de la
programmation de «
lâeau spĂ©ciale Ă©nergisĂ©e
» aux vertus
thérapeutiques proclamées (« méthode Silva »). Dans la mouvance des
praticiens adeptes de la doctrine Hamer, on discerne également un
discours de prĂ©vention habilement repris Ă des fins commerciales Ă
lâinstar de la mĂ©thode thĂ©rapeutique
be happy
qui sâadresse non
seulement aux personnes atteintes de pathologies graves ou
chroniques mais aussi aux « futurs malades ». A noter que la méthode
en question sert de relais à la vente de médicaments commercialisés
sous le nom de « microzymas ».
1 - LâhygiĂ©nisme
Des « thĂ©rapeutes », soucieux dâĂ©tendre leur emprise sur des
particuliers, vont ériger le déséquilibre alimentaire en dogme, la
privation imposée pouvant conduire à la mort dans les cas les plus
graves.
Câest le cas de lâaffaire de lâassociation
Joie et Loisirs en
Morvan
dont la fondatrice est incarcérée pour des pratiques relevant
de lâexercice illĂ©gal de la mĂ©decine Ă la suite de la mort de trois
enfants, dont un bébé, dans une communauté.
41
Dâautres dĂ©rives avĂ©rĂ©es reposent sur lâidĂ©e aberrante que le
jeĂ»ne serait en lui-mĂȘme un facteur de prĂ©vention de toutes formes de
maladies, voire en cas de pathologie, une forme dâaction thĂ©rapeutique
efficace. Portée par la vague écologiste et la mouvance
new age
, celle-
ci a connu ces derniÚres années un regain de faveur, continuant à faire
des adeptes, et parfois des victimes. LâinstinctothĂ©rapie (ou la
consommation exclusive dâaliments crus sĂ©lectionnĂ©s sur leur odeur)
est ainsi encore pratiquée dans notre pays au sein de petits groupes
épars malgré la condamnation du gourou Guy Claude Burger à quinze
ans de réclusion criminelle le 4 juillet 2003 pour viols sur mineur de
15 ans.
Les derniÚres tendances observées dans ce sillage prÎnant
lâhygiĂ©nisme reposent sur la constitution de groupes alliant une
pratique sportive intensive (trekking, randonnées) et un jeûne poussé
parfois Ă lâextrĂȘme (nourriture frugale et exercice physique intense).
Les associations de prĂ©vention font ainsi Ă©tat dâappels adressĂ©s par des
proches dâadolescents frĂ©quentant assidĂ»ment le mouvement
« Jeûne
et randonnée »
et présentant des changements notables dans leur
comportement. Pour lâheure, malgrĂ© ces signalements prĂ©occupants,
aucune plainte nâa Ă©tĂ© enregistrĂ©e illustrant une dĂ©rive avĂ©rĂ©e de cette
mouvance en plein essor. Lâincitation des adolescents au jeĂ»ne pose
problĂšme en ce quâelle affecte leur dĂ©veloppement et leur Ă©quilibre
psychique. Egalement prĂ©occupante est lâĂ©mergence dâune tendance
visant à promouvoir le jeûne thérapeutique à vocation écologique. A
titre dâexemple, lâassociation OM-VIE, « harmonisation Ă©nergĂ©tique
par la nutrition consciente » organisait dÚs 1995, stages et conférences
sur le thÚme « alimentation et pollution, se « nourrir en conscience »
et proposait des randonnĂ©es pĂ©destres dans la forĂȘt de BrocĂ©liande.
Parmi les cas avérés de dérive hygiéniste sanctionnée par la
loi, sont cités :
- la condamnation, fin 2001, Ă douze ans de rĂ©clusion criminelle, dâun
couple de parents adeptes de lâ
Ordre apostolique Tabithasâs Place
pour avoir volontairement privĂ© dâaliments et de soins leurs enfants au
point de compromettre la santé de leur fils, ùgé de moins de 15 ans ;
- la condamnation de deux parents kinésiologues qui ont dû répondre
devant la justice en 2004 et 2005, de la mort de leur enfant de 19 mois
sur les mĂȘmes chefs dâaccusation. Leur procĂšs, exemplaire des
dommages induits par lâapplication stricte de prĂ©ceptes alimentaires
aberrants dans le cas dâune femme allaitant son enfant de quelques
mois, a Ă©tĂ© lâoccasion de soulever publiquement, dans lâopinion et les
42
mĂ©dias, la question de la dangerositĂ© potentielle dâune mouvance, la
kinésiologie
.
Les associations de terrain pointent réguliÚrement les dérives,
faisant état de plusieurs témoignages de victimes décrivant des
situations dâemprise avĂ©rĂ©es : ruptures de liens familiaux (divorces,
séparations), ainsi que des changements de comportements inquiétants
de la part des personnes formĂ©es Ă ces techniques (arrĂȘt dâune activitĂ©
professionnelle sous lâinfluence dâun praticien en
kinésiologie
pour
suivre une formation exclusive dans la discipline ou adoption dâun
discours ésotérique). Si ces divers témoignages ne sont pas pour
lâheure suivis de plaintes et dâactions en justice, le verdict rendu dans
le cas de Quimper (cinq ans dâemprisonnement dont cinquante-deux
mois avec sursis mise Ă lâĂ©preuve pendant trois ans et trois mois
fermes pour les parents) illustre un premier cas de dérive individuelle
sanctionné par les tribunaux.
2 - Le respirianisme
Cette mĂ©thode consiste Ă se nourrir dâair et de lumiĂšre pour
accĂ©der à « ânotreâ ĂȘtre divin ». Elle repose sur une dangereuse
pratique de jeĂ»ne total acquise Ă lâissue dâun « processus sacrĂ© de 21
jours » au cours duquel le corps se libÚre progressivement du besoin
de manger et de boire.
La «
prĂȘtresse
» de ce mouvement est australienne
:
Jashmuheen â de son vrai nom Ellen Greve â prĂ©tend ne plus se
nourrir depuis 1993. A la tĂȘte dâun vĂ©ritable business reposant sur la
vente de livres, de vidĂ©os et sur lâorganisation de confĂ©rences et de
retraites, elle revendique quelques dizaines de milliers dâadeptes dans
le monde, y compris en France. Elle fédÚre un réseau international
nommé MAPS (en français « Mouvement pour une société éveillée et
positive
») et semble rallier divers thérapeutes à la cause du
« processus des 21 jours ».
Sa mĂ©thode dangereuse pour la santĂ© dâautrui est dĂ©veloppĂ©e
dans un ouvrage aux propos édifiants intitulé «
Vivre de lumiĂšre/5 ans
sans nourriture matérielle
».
A la moindre critique, Jashmuheen oppose le systĂšme de
défense commun à tout gourou de secte rejetant la responsabilité de
43
lâĂ©chec sur lâadepte qui nâaura pas suivi les prĂ©ceptes Ă©dictĂ©s par le
Maßtre ou qui aura été distrait par des interférences néfastes.
Câest ce quâelle sous-entend en Ă©voquant dans son livre la
mort de plusieurs de ses disciples il y a quelques années en Australie,
en Allemagne et en Ecosse.
Lors dâune confĂ©rence, Ă une participante pratiquant le jeĂ»ne
qui se plaignait de ressentir dâimportants troubles de la vision, de la
mĂ©moire et de lâĂ©quilibre, Jashmuheen expliquait que ces troubles
Ă©taient normaux parce que le stade de la puretĂ© nâĂ©tait pas encore
atteint.
A ses dĂ©tracteurs, elle nâhĂ©site pas Ă affirmer, non sans
cynisme, que sa méthode apporte aussi une solution au problÚme de la
faim dans le monde.
Le risque avĂ©rĂ© dâune telle pratique pour la santĂ© dâautrui a
conduit la MIVILUDES Ă alerter la prĂ©fecture de lâArdĂšche en
novembre 2005 alors que Jashmuheen devait animer une « retraite
spirituelle » dâune semaine dans ce dĂ©partement
38
. Les vérifications
nĂ©cessaires ont eu lieu pour sâassurer que les participants seraient
nourris pendant la durée du séminaire, ce qui était le cas, le stage
nâĂ©tant quâun prĂ©lude au processus de jeĂ»ne. LâentrĂ©e sur le lieu du
stage a Ă©tĂ© refusĂ©e Ă un adulte parce quâil Ă©tait accompagnĂ© dâun
mineur. Enfin il a Ă©tĂ© demandĂ© quâun des participants, visiblement en
état de fragilité, puisse regagner son hÎtel chaque soir. Aucune dérive,
autre que celles liĂ©es Ă lâenseignement contenu dans le livre prĂ©citĂ©,
nâa Ă©tĂ© observĂ©e durant cette rĂ©union.
La MIVILUDES vient dâĂȘtre informĂ©e de lâanimation
prochaine de conférences à Paris par un « thérapeute énergéticien »
disciple du respirianisme. Bien quâaucune plainte mettant en cause le
respirianisme nâait Ă©tĂ© dĂ©posĂ©e Ă ce jour en France et quâaucun
accident nâait Ă©tĂ© constatĂ© en ArdĂšche, la MIVILUDES maintiendra
toutefois la vigilance requise Ă lâĂ©gard des initiatives dâun mouvement
qui présente un grand nombre de caractéristiques sectaires parmi
lesquelles on peut citer lâexistence dâun gourou dĂ©tenteur dâune vĂ©ritĂ©
38
Le Parisien
, 20 novembre 2005
44
unique, lâaffaiblissement physique et lâisolement des adeptes ainsi que
des pressions financiÚres (vente de livres, vidéos, participation à des
stages, etc.).
3 - Le mythe de lâenfant parfait
Dans son rapport 2001, la MILS relevait déjà que «
la
grossesse, la naissance, la petite enfance attirent des convoitises
sectaires
». La MIVILUDES quant à elle, soulignait dans son rapport
2003 que «
la pĂ©rinatalitĂ© est lâobjet de programmes de formation
dont certains acteurs sont manifestement nourris dâidĂ©ologies Ă forte
résonance sectaire »
, Ă©voquant notamment le cas dâune sage-femme
refusant de pratiquer les examens de suivi de la grossesse au nom du
rejet des pratiques conventionnelles. Lâobservation attentive des offres
de prestations dĂ©veloppĂ©es Ă lâattention du grand public sur le
« créneau » de la périnatalité tend à conforter cette tendance, qui se
manifeste désormais en priorité à travers des propositions
thérapeutiques à visée préventive, dont les dérives peuvent aller
jusquâĂ remettre au goĂ»t du jour le mythe de « lâenfant parfait »
auprĂšs des futures mĂšres, Ă partir dâune approche psychologisante
visant Ă les culpabiliser : lâenfant doit ĂȘtre « pris en charge » dĂšs sa
période foetale sous peine de le voir développer ultérieurement des
pathologies dues Ă la nĂ©gligence et au manque dâĂ©coute de sa mĂšre.
Selon un avis du CIAOSN
39
, il convient dâĂȘtre
particuliĂšrement vigilant sur le mouvement
Spiritual Human Yoga
(SHY) Ă la tradition guĂ©risseuse avĂ©rĂ©e, qui sâengouffre dĂ©sormais lui
aussi sur ce segment de marché porteur en proposant des séances
dâharmonisation pour agir sur le foetus et prĂ©venir dâĂ©ventuelles
malformations. Certaines approches psychocorporelles, en majorité
importĂ©es dâAmĂ©rique du Nord arrivent Ă©galement en France, et
prĂ©tendent, elles aussi, garantir le bon dĂ©veloppement de lâenfant Ă
naĂźtre, Ă lâimage du « massage mĂ©tamorphique » qui se targue de faire
de la « prĂ©natothĂ©rapie » mais sâadresse aussi aux enfants en bas Ăąge,
voire aux adultes : la technique, dans ce cas, permettrait de faire
remonter le « vĂ©cu fĆtal » du patient.
39
Centre dâinformation et dâavis sur les organisations sectaires nuisibles,
Bruxelles.
45
Au-delĂ de lâaccompagnement Ă la naissance Ă proprement
parler, certaines méthodes thérapeutiques controversées multiplient les
rĂ©fĂ©rences Ă la vie intra-utĂ©rine pour expliquer ou trouver lâorigine des
dĂ©sordres pathologiques ou psychologiques quâelles prĂ©tendent
soigner.
Câest une autre façon dâexploiter le mythe de lâenfant parfait,
dans son versus nĂ©gatif, puisque lâon part du postulat que la
pathologie fut provoquée par un traumatisme antérieur à la naissance.
La vigilance reste enfin de mise Ă lâĂ©gard du phĂ©nomĂšne Ă la
mode des « maisons de naissance » qui tend à se développer en
Belgique et dans une moindre mesure en France (sud-est, sud-ouest et
région lyonnaise). A cet égard, le plan périnatalité 2005-2007 évoqué
dans le rapport 2004 de la MIVILUDES devrait présenter un gage de
sĂ©curitĂ© pour que ces lieux dâexpĂ©rimentation fonctionnant avec des
sages-femmes libérales et/ou hospitaliÚres garantissent une prise en
charge sĂ©rieuse de la mĂšre et de lâenfant Ă naĂźtre par des
professionnels non suspects dâexercice illĂ©gal de la mĂ©decine par
conviction dâune doctrine alternative.
D - Vers le « mieux ĂȘtre »
La mode du dĂ©veloppement personnel, de lâintrospection,
dâun certain retour Ă la spiritualitĂ© se conjugue actuellement avec une
exigence forte de retour Ă ses racines, de vie saine en communion avec
la nature, et de respect des traditions. Cette tendance portée par la
mouvance
new age
favorise le néo-chamanisme occidental, mouvance
au sein de laquelle les pratiques de soins et les rituels de guérison se
vivent comme une vĂ©ritable quĂȘte initiatique et oĂč lâusage de
substances hallucinogÚnes, souvent officiellement classées dans notre
pays comme produits stupéfiants entraßnent des états modifiés de
conscience associĂ©s Ă des risques vitaux et Ă dâĂ©ventuelles
modifications de la personnalitĂ©. LĂ encore, dâĂ©ventuelles dĂ©rives Ă
caractĂšre sectaire peuvent survenir au sein des micro-groupes adoptant
ces pratiques et qui tendent aujourdâhui Ă se multiplier en empruntant
quelquefois des visages inattendus opérant une sorte de syncrétisme
entre les pratiques chamaniques et les traditions locales héritées par
exemple du druidisme celtique.
46
1 - Le regain du chamanisme
Dans un article de référence consacré au néochamanisme
40
, la
sociologue québécoise Catherine Laflamme rappelle que selon la
définition proposée par Pierre Couliano et Mircea Eliade : «
le
chamanisme est un ensemble de méthodes extatiques et thérapeutiques
dont le but est dâobtenir le contact avec lâunivers parallĂšle mais
invisible des esprits et lâappui de ces derniers dans la gestion des
affaires humaines
». Pour communiquer avec les esprits, le chaman
passe par des états modifiés de conscience (transes) auxquels il accÚde
grĂące au recours Ă des substances hallucinogĂšnes et Ă divers moyens
annexes (mortification du corps, jeûne, sons du tambour, etc...). Le
néochamanisme, lui, est un mouvement de réappropriation par les
occidentaux des traditions chamaniques dans lequel, le rĂŽle du chaman
est réduit la fonction de guérisseur. Dans le néochamanisme, les
rituels de guĂ©rison, conformĂ©ment Ă lâadage holistique selon lequel la
guĂ©rison physique passe dâabord par la guĂ©rison de lâesprit, peuvent
dĂ©sormais sâenseigner, se transmettre, voire faire lâobjet dâun
commerce lucratif (stages et sessions de développement personnel)
comme câest dĂ©jĂ le cas en AmĂ©rique du Nord.
2- De la mĂ©decine du corps Ă la mĂ©decine de lâĂąme
Les mĂ©dias se sont rĂ©cemment fait lâĂ©cho des dĂ©mĂȘlĂ©s
judiciaires du fondateur du centre Takiwasi, centre de traitement des
toxicomanies à base de méthodes chamaniques crée en 1992 au Pérou
par un mĂ©decin français, le Docteur Jacques Mabit. Ce dernier nâa
jamais été condamné ce qui ne met pas fin à de sérieuses inquiétudes
au sujet de ces pratiques.
La violence des méthodes utilisées pour le sevrage des
toxicomanes interroge également par les risques courus par ces
patients trÚs vulnérables.
Aujourdâhui seule lâassociation lyonnaise, la
« Maison qui
chante »
semble encore en activité et servir de relais promotionnel aux
activités thérapeutiques du centre Takiwasi qui recrute ses clients en
France comme Ă lâĂ©tranger. Outre lâutilisation de drogues
40
Catherine Laflamme,
« Les stratégies sociales des groupes néochamistes
occidentaux »
, in
Revue religiologique, 2000
.
47
hallucinogĂšnes (lâayahuasca, classĂ©e depuis le 20 avril 2005 dans la
liste des stupĂ©fiants par arrĂȘtĂ© du ministĂšre de la SantĂ©), Takawasi
promeut des sĂ©ances dâinitiation rituelle menĂ©e par des guĂ©risseurs
locaux, les ayahuasceros. Ce traitement qui combine purges
corporelles, jeĂ»ne et transes chamaniques, fut conçu Ă lâorigine pour
accompagner le sevrage de jeunes toxicomanes. Il est déjà à cet égard
trĂšs controversĂ©, aucune statistique fiable nâĂ©tant disponible sur le
taux de réussite effectif de la thérapie proposée en la matiÚre. Le Dr.
Jacques Mabit affirme quant Ă lui que lâinitiation rituelle proposĂ©e au
toxicomane lui permettrait de «
rejeter les mémoires négatives
»
accumulées dans le corps, les «
engrammations accumulées dans
lâorganisme
» et revendique un taux de réussite sur environ un tiers
des patients. Au-delĂ mĂȘme de la question de lâefficacitĂ© de la
thĂ©rapie proposĂ©e Ă lâĂ©gard des toxicomanes accueillis Ă demeure pour
des sessions de prĂšs dâun an pour certains, le principal problĂšme posĂ©
aujourdâhui par le centre Takiwasi rĂ©side dans sa propension Ă Ă©largir
sa clientĂšle tous azimuts en se positionnant de plus en plus comme un
centre de mĂ©decine de lâĂąme autant quâen un lieu de sevrage
toxicomaniaque.
Ces derniĂšres annĂ©es, il semble en effet sâouvrir Ă dâautres
publics, notamment des malades de cancer déclarés incurables, et des
adultes ne souffrant dâaucune addiction particuliĂšre mais cherchant
remĂšde Ă leur trouble existentiel.
Au-delĂ du cas particulier de Takiwasi, des pratiques
chamaniques à la validité thérapeutique également contestable
semblent progresser dans notre pays sous couvert de développement
personnel. Cela nâest pas sans poser problĂšme dĂšs lors quâelles
conjuguent risque dâescroquerie et danger rĂ©el pour la santĂ© physique
et mentale de ceux qui sây prĂȘtent.
3 â La promotion des techniques de dĂ©veloppement personnel
Au PĂ©rou, des sĂ©ances de dĂ©couverte de lâayahuasca sont
désormais intégrés dans les circuits proposés par les tours opérateurs
(200 dollars la séance), simples expériences de prise de substances
hallucinogĂšnes dans lequel lâhabillage folklorique tient lieu de rite
pour des touristes étrangers en mal de sensations fortes. En France,
ces derniers temps, le créneau du « chamanisme commercial » semble
aussi se développer via quelques initiatives personnelles de
48
thĂ©rapeutes chamans recrutant leur clientĂšle sur la foi dâune double
promesse « consommateur » alliant le thÚme de la guérison à celui de
la connaissance de soi. En liaison avec un centre de naturopathie
amazonien, des sessions et séminaires de prises de substance
hallucinogÚne seraient ainsi périodiquement organisés sur le territoire
français, par un thérapeute franco-espagnol résidant au Pérou depuis
treize ans, et qui semble entretenir des liens avec le gourou dâun
mouvement dâ« harmonie/thĂ©rapeutes » fortement suspectĂ© de dĂ©rives
sectaires.
TrÚs récemment en ArdÚche, un séminaire de découverte de
lâiboga, plante hallucinogĂšne, et dont les effets peuvent ĂȘtre trĂšs
dangereux pour la santĂ© en cas dâabsence de contrĂŽle mĂ©dical lors des
séances de prise (risques de convulsions, paralysie ou mort) a été
montĂ© Ă lâinitiative dâune association culturelle dont la vocation
affichĂ©e est de promouvoir les propriĂ©tĂ©s de lâiboga dans le traitement
des toxicomanes.
Avec un certain pragmatisme, certains néochamanistes
conjuguent modernité et tradition en organisant séminaires, cycle de
formation de longue durée (deux ans) aux «
thérapies vibratoires, aux
techniques et applications des sciences de la conscience
» et se
proposent de jeter un pont entre la «
physique quantique et lâensemble
des phĂ©nomĂšnes liĂ©s aux traditions de lâhumanitĂ©
». Dâautres habillent
leur prestation dâune coloration plus traditionnelle et locale. En
Bretagne, notamment, on voit fleurir dans le sillage de la mouvance
druidique toujours active, quelques cas de chamans guĂ©risseurs Ă
lâimage de ce «
déo
» (druide guérisseur) qui se «
connecte Ă ses
mémoires celtes pour devenir soof-ta celui qui connaßt et mange la
terre
» et se propose dans une petite annonce dâinitier ses Ă©lĂšves à «
la
transmission de ses pouvoirs chamaniques
. « De la simple escroquerie
commerciale à la dérive à caractÚre sectaire, le risque est grand de voir
un certain nombre de ces chamans thérapeutes engagés sur le créneau
du développement personnel déraper lors de leurs initiations vers des
pratiques thérapeutiques douteuses, voire dangereuses sur le plan
physique et mental pour des clients crĂ©dules ou influençables. LĂ
encore, la vigilance sâimpose comme lâillustrent les premiers cas de
dérives recensés sur le créneau, en pleine expansion du
néochamanisme.
49
4 - Nature et tradition, un cocktail Ă risque
Inspiré des rites et de la tradition amérindienne, des
cérémonies en pleine nature sont organisées, notamment dans le sud et
de centre de la France avec la pratique des huttes de sudation. Ces
mĂ©thodes inquiĂštent. Elles auraient Ă©tĂ© responsables dâun dĂ©cĂšs
accidentel aux Etats-Unis.
E â LâIrrationnel et pratiques thĂ©rapeutiques
TroisiÚme grande tendance observée par les acteurs de la
prévention contre les risques sectaires, on assiste ces derniÚres années
au grand retour de la pensée magique avec son corollaire en matiÚre
de santé, la foi dans le miracle apte à guérir, voire à sauver dans les
cas les plus critiques.
1 â Le recours au miraculeux
Anne-Marie Hamel, dont les abus furent sanctionnés par la
loi, sâĂ©tait ainsi autoproclamĂ©e « thĂ©rapeute spirituel » et se disait
inspirĂ©e par les pouvoirs dâun guĂ©risseur philippin dĂ©cĂ©dĂ© dans les
annĂ©es 80. Cette ancienne femme de mĂ©nage sâattribuait des dons
miraculeux permettant de guérir toutes les maladies définies, selon
elle, comme des « déconstructions celluliques ». En 2001, elle fut
condamnée par le Tribunal de grande instance de Coutances à trois
ans de prison dont trente mois avec sursis pour homicides
involontaires, exercice illégal de la médecine et travail clandestin, à la
suite de deux décÚs survenus en 1996 et 1997.
Traditionnellement incarnĂ©e par lâaura du gourou guĂ©risseur
quâon croit dotĂ© de pouvoirs extraordinaires, la croyance selon
laquelle le miracle pourrait ĂȘtre une alternative possible Ă des
méthodes thérapeutiques conventionnelles jugées peu efficaces semble
se développer dans le public. Elle prend désormais des formes
dâexpression diffĂ©rentes, illustration des grandes Ă©volutions en cours
de nos sociétés modernes. Aux excÚs de quelques communautés
religieuses qui, sous lâĂ©gide dâun guide spirituel trop exaltĂ©
entretiennent en leur sein la foi dans le miracle et le recours Ă la priĂšre
comme pratique thérapeutique exclusive, viennent désormais se
greffer les promesses de santĂ© teintĂ©es dâirrationalitĂ© dâun certain
nombre de groupes prĂŽnant lâauto-guĂ©rison par la maĂźtrise dâun savoir
50
secret transmissible de maßtre à élÚve. Ces groupes, souvent
dâinspiration orientaliste et revendiquant parfois le titre de thĂ©rapies
Ă©nergĂ©tiques entretiennent ainsi lâidĂ©e dâapparence plus pragmatique
selon laquelle chacun pourrait devenir son propre guérisseur, aprÚs
initiation. Mais la croyance selon laquelle il serait donné à chacun,
aprÚs formation accélérée, de transmettre ou de recevoir ce pouvoir de
canalisation dâune « Ă©nergie vitale universelle » promue force de
guérison, compose elle aussi une vision bien peu rationnelle de la
mĂ©decine ; parce quâelle repose sur un fondement dĂ©nuĂ© de toute
objectivitĂ© scientifique, elle peut dâautant plus facilement dĂ©boucher
sur des dĂ©rapages Ă©ventuels, ainsi quâen attestent certains tĂ©moignages
de pratiques de guérison à distance, voire par téléphone, actuellement,
développées par certains adeptes du Reiki.
2 - Les médecines énergétiques
Sur le grand marchĂ© des thĂ©rapies alternatives, oĂč lâon voit
que la dimension psy permet Ă un certain nombre de gourous en
puissance dâasseoir leur emprise sur une clientĂšle fragilisĂ©e, les
médecines dites « énergétiques » et leur processus de formation
accĂ©lĂ©rĂ©e (cursus dâinitiation vĂ©cus sous forme de week-end ou de
stages dâintĂ©gration au dĂ©roulement plus ou moins secret), paraissent
Ă©galement aujourdâhui particuliĂšrement permĂ©ables Ă des formes de
dĂ©rives individuelles : parce quâelles visent Ă rĂ©tablir lâharmonie de la
personne dans sa globalitĂ© (harmonie du corps et de lâesprit) en lien
direct avec lâenvironnement qui lâinfluence et selon elles, conditionne
la bonne gestion de son capital santĂ©, elles peuvent ainsi ĂȘtre
prĂ©textes Ă lâĂ©diction de prĂ©ceptes de vie trĂšs contraignants dans leur
application touchant les moindres aspects du quotidien (alimentation,
rĂšgles dâhygiĂšne et/ou dâĂ©ducation, sexualitĂ©, etc âŠ). Lorsquâelles
versent dans lâirrationnel, elles peuvent aussi se traduire par des actes
thĂ©rapeutiques aberrants comme lâactualitĂ© lâa dĂ©montrĂ© rĂ©cemment
avec la condamnation en mars 2005 dâun dentiste cannois adepte de la
dentisterie énergétique à dix-huit mois de prison avec sursis et à une
interdiction dâexercer pour sâĂȘtre livrĂ© à « lâarrachage barbare » de
dents dĂ©vitalisĂ©es. Ces dĂ©rives observĂ©es, si elles restent pour lâheure
marginales au sein dâune mouvance portĂ©e par la mode du bien-ĂȘtre et
du développement personnel, méritent incontestablement le
qualificatif de «
sectaires
» dĂšs lors quâelles aboutissent Ă des
situations de rupture familiales ou professionnelles, plus graves
encore Ă des dĂ©lits majeurs, passibles du pĂ©nal et quâelles sâinscrivent
dans une filiation reconnue à un corpus doctrinal à la dangerosité
51
avĂ©rĂ©e. Câest le cas, par exemple du mouvement
SHY
qui compterait
prÚs de 3000 adeptes dans une vingtaine de départements réunis dans
des associations aux noms divers. Ces derniÚres développeraient
stages dâinitiation vantant les pouvoirs de lâautoguĂ©rison et de la
guĂ©rison sur autrui. Le mouvement a vu lâun de ses adeptes
sanctionnés en 1999 pour exercice illégal de la médecine suite à un
décÚs survenu en 1996 et développait ces derniÚres années un fort
prosĂ©lytisme auprĂšs de malades du sida. En novembre 2002, suite Ă
une plainte dĂ©posĂ©e par une famille montpelliĂ©raine dont lâun des
membres avait stoppé le traitement médical, le gourou du mouvement
alors encore baptisé
HUE
(Energie universelle et humaine
) était
condamné par le Tribunal correctionnel de Montpellier à trois mois de
prison ferme pour exercice illégal de la médecine.
3 - Le reiki en question
Dans le champ des médecines énergétiques qui posent
question, dâautres mĂ©thodes de soins, appellent Ă la plus grande
prudence. Méthode thérapeutique promue et développée par le
japonais Mikao Usui (1865-1926) suite à une révélation mystique qui
lâaurait conduit Ă la fin du XIX
Ăšme
siÚcle à recevoir les « clefs de la
guérison
», le reiki connaßt un développement sans précédent
actuellement en France. Cette technique de guérison par imposition
des mains fait du praticien initié à la technique un simple médium ou
canal de lâĂ©nergie universelle qui sera transmise au patient pour
rĂ©tablir la force vitale garante de sa bonne santĂ©. Face Ă
lâaugmentation des demandes dâinformation et des tĂ©moignages Ă
charge recueillis par les associations de terrain sur cette mouvance en
particulier, celles-ci appellent les pouvoirs publics Ă se montrer
particuliĂšrement vigilants Ă lâĂ©gard des dĂ©rives que la pratique du reiki
pourrait engendrer. Agissant sur tous les plans, physique, psychique,
émotionnel et spirituel, la méthode serait simple à maßtriser : il est
possible de devenir maĂźtre reiki en trois ou quatre stages de formation
accélérée pendant les week-end, aux tarifs progressifs de 120 à 1500
euros, suivant le degrĂ© dâinitiation.
4 - La guérison par la priÚre
Lâune des aspirations les plus courantes exprimĂ©es par les
individus en quĂȘte de spiritualitĂ© sâavĂšre ĂȘtre aujourdâhui lâidĂ©al de
proximité que recherche chaque croyant, quelle que soit sa doctrine,
avec son ou ses dieux, au-delĂ mĂȘme des carcans dogmatiques
52
imposĂ©s par lâĂ©glise Ă laquelle il appartient. Cette nouvelle exigence
de vivre sa foi au plus prĂšs de soi explique en partie lâessor des
pratiques de soin et de guérison dans des mouvements religieux qui
prĂŽnent la relation directe entre lâadepte et son dieu : Ă cet Ă©gard, le
recours au miraculeux, la guérison par la priÚre viennent en
démonstration des effets tangibles et bénéfiques de la foi sur des
adeptes en quĂȘte dâespoir. Mais lorsque le recours au miraculeux se
combine à un refus de soin imposé en dogme comme cela a été signalé
en ces termes dans le rapport 2004 de la MIVILUDES, la dérive est
patente et mĂ©rite dâĂȘtre signalĂ©e : «
Dans le Val dâOise, un mouvement
pseudo-religieux affirme que le mal et la maladie ne sont quâillusion,
que la maladie et la mort nâont pu ĂȘtre créées par Dieu donc quelles
nâexistent pas et quâil faut fuir les mĂ©decins avec horreur
». Groupes
charismatiques et communautĂ©s pseudo-Ă©vangĂ©liques ne sont pas Ă
lâabri de telles dĂ©rives, notamment quand ils invitent leurs adeptes Ă
suivre des sĂ©ances de priĂšre collectives oĂč les guĂ©risons
«
miraculeuses
», sous lâĂ©gide dâun pasteur dotĂ© de pouvoirs
mĂ©diumniques « vecteur de lâesprit saint », affluent en des proportions
qui frĂŽlent souvent lâhystĂ©rie.
LâEglise universelle du Royaume de
Dieu
dĂ©velopperait ainsi auprĂšs de ses fidĂšles lâidĂ©e que le sida peut
guérir par la priÚre.
Enfin, le mouvement guĂ©risseur dâinspiration religieuse,
les
PĂšlerins dâArĂšs
, semble retrouver un regain dâactivitĂ© dans la capitale
via son siĂšge « lâEau bleue » oĂč se tiennent des confĂ©rences rĂ©guliĂšres
avec distribution de tracts promotionnels.
Parmi les cas de dérives avérées au sein de communautés
pratiquant des rites de guérison par la priÚre, les communautés qui
allient spiritualité et prétention thérapeutique pseudo scientifique sont
certainement les plus sujettes Ă caution Ă lâinstar des « groupes
médicaux-scientifiques » du
Cercle des amis de Bruno Gröning
qui
sont trĂšs puissants en Allemagne et interviennent en France surtout
auprÚs des personnes ùgées. Un autre mouvement, alliant cette fois
priĂšres et pratiques dâharmonisation, le mouvement
IVI
entend guérir
les maladies les plus graves par imposition des mains : cancer, sida,
sclĂ©rose en plaques. IVI compterait encore Ă lâheure actuelle prĂšs de
400 adeptes en France (ils étaient environ 2000 en 2002) malgré les
condamnations du Conseil national de lâOrdre des mĂ©decins.
53
III - Le « marketing » des groupes de médecine alternative
Pour élargir leur audience, adeptes de la «
médecine
nouvelle », praticiens en méthodes alternatives et groupes développant
des offres thĂ©rapeutiques parallĂšles, sâappuient sur deux cibles
complĂ©mentaires : dâune part le grand public, premier consommateur
de lâoffre de soin, dâautre part le milieu mĂ©dical et paramĂ©dical,
adeptes prescripteurs auxquels le prestige de la charge confĂšre une
aura particuliĂšre auprĂšs dâĂ©ventuels patients. Quelques mĂ©decins,
dentistes et pharmaciens constituent à ce titre un relais privilégié pour
des promoteurs de thĂ©rapies non validĂ©es, qui contournent lâabsence
de reconnaissance scientifique, inconvénient majeur en terme de
crĂ©dibilitĂ©, en sâabritant derriĂšre le statut rassurant « du » ou « des »
quelques professionnels acquis Ă leur cause.
A â Physionomie dâun marchĂ© en dĂ©veloppement
1 - La communication grand public
Nombre de thérapeutes praticiens en médecine holistique,
techniques Ă©nergĂ©tiques, adeptes de la mouvance Hamer sâaffichent
avec force propositions de formations via les petites annonces, les
encarts publicitaires et les articles publi-rédactionnels dans de
nombreuses revues de médecines douces, dont certaines sont éditées
en Belgique et disponibles sur abonnement. On peut y lire des
annonces qui entachent la crédibilité de certaines méthodes
thérapeutiques dites douces, au marketing des plus agressifs :
« le reiki
: mĂ©thode fabuleuse et simple qui consiste Ă canaliser lâĂ©nergie vitale
pour accroĂźtre les capacitĂ©s dâautoguĂ©rison physique et
psychoaffectives. Blocages, dépression, anxiété, échec. Enfants
adultes, PsychothĂ©rapeute sâappuyant dâune Ă©tude astrologique »
41
.
Lâengouement actuel pour le paranormal et les sciences
occultes fait aussi le bonheur de la presse spécialisée dans le créneau
des guérisseurs et médiums telles «
La revue de lâau-delĂ
» ou encore
« GuĂ©risseurs aujourdâhui »
dont les pages sont aussi largement
ouvertes aux promoteurs des médecines non conventionnelles. Mais
ces derniers sont également présents dans une moindre mesure dans
41
Extrait de la revue
Soleil levant,
juin 2005
54
les titres plus généralistes de la presse magazine et féminine via
notamment la rubrique du courrier des lecteurs.
Sur Internet, on trouve les « vitrines commerciales » des
thĂ©rapies non conventionnelles, certaines dâentre elles proposant
mĂȘme des modes de communication interactifs tels que des Ă©missions
de radio ou des vidéo promotionnelles à télécharger sur Internet.
La vente dâouvrages et de cassettes grand public est enfin lâun
des moyens de promotion favoris de ces groupes qui créent trÚs
souvent leur propre maison dâĂ©dition pour sâassurer de substantiels
revenus, le marchĂ© sâavĂ©rant trĂšs lucratif.
2 - Les médecines alternatives, un produit de luxe
Les mĂ©decines alternatives sâadressent en prioritĂ©
aux
catégories socio-professionnelles les plus élevées. Les femmes sont
souvent les premiÚres clientes des médecines énergétiques et
thérapeutes en techniques psychocorporelles qui fleurissent sur le
marché de la santé. Hommes ou femmes, les clients sont le plus
souvent abordés dans les salons grands publics.
La clientĂšle nâĂ©tant cependant pas extensible Ă lâinfini, lâun
des phénomÚnes les plus récents observés par les acteurs de la
prévention du risque sectaire se traduit sur le marché de la santé par la
constitution de réseaux de thérapeutes « amis », lesquels, une fois leur
patient formé à leur propre technique, envoient leur clients prolonger
leur cursus chez un collĂšgue praticien dâune autre mĂ©thode. On voit
ainsi des patients multiplier les stages de formation à des coûts
exorbitants pour se reconvertir au grĂ© dâune rĂ©orientation
professionnelle parfois étonnante en praticiens pluridisciplinaires
devenant Ă leur tour prescripteurs auprĂšs de nouveaux clients. Lorsque
cette « reconversion » professionnelle sâaccompagne dâun changement
radical de vie et dâune rupture avec lâenvironnement familial, il est
sans doute lĂ©gitime de se poser au moins la question dâune Ă©ventuelle
dĂ©rive Ă caractĂšre sectaire de la technique Ă laquelle il sâest formĂ©.
3 - Le commerce de médicaments vendus sans autorisation de mise
sur le marché
Qui dit « médecine alternative », dit aussi « commerce de
médicaments à la validité thérapeutique non éprouvée », qui pour
55
certains peuvent mĂȘme prĂ©senter des dangers pour la santĂ©. La vente
directe sur Internet semble se développer
via
les sites relais des
tenants de la médecine énergétique, hygiéniste, des thérapeutes affiliés
à la mouvance Hamer et des charlatans de la médecine miracle qui
proposent leurs Ă©lixirs et leurs antidotes au grand public. Lâaffaire
Beljanski
42
reste Ă cet Ă©gard lâun des cas les plus tristement cĂ©lĂšbres
de dérive observée en ce domaine. Dans le procÚs de ce chercheur
biologiste dĂ©cĂ©dĂ© en 1994 mais dont les produits continuent Ă ĂȘtre
fabriqués et distribués par des structures qui en vantent les effets
immunitaires contre les maladies les plus graves (cancers, sida), la
ligue nationale de lutte contre le cancer sâĂ©tait portĂ©e partie civile. La
tendance écologique qui favorise la profusion sur le marché des
« huiles essentielles » et autres onguents dits naturels dont certains
groupes se font une spĂ©cialitĂ© nâest pas non plus sans risque pour la
santé.
B - Lâinfiltration des professions mĂ©dicales et paramĂ©dicales
Il apparaßt, dans le domaine de la santé encore plus
quâailleurs, une vraie difficultĂ© Ă Ă©valuer dans les diffĂ©rents types de
dĂ©rives recensĂ©es, oĂč sâarrĂȘtent les cas de pur charlatanisme relevant
de la simple escroquerie individuelle et oĂč commencent ceux illustrant
une stratĂ©gie dĂ©libĂ©rĂ©e dâemprise sectaire. Ă cet Ă©gard, la constitution
dâun maillage de thĂ©rapeutes relais et/ou de mĂ©decins prescripteurs
visant Ă Ă©tendre lâinfluence doctrinale dâun mouvement contestĂ©,
véritable réseau de « franchisés » formés à des techniques inédites de
soins et se déployant sur un territoire de plus en plus large semble bien
ĂȘtre lâune des caractĂ©ristiques essentielles qui puisse en tĂ©moigner dĂšs
lors que cette politique commerciale agressive sâajoute aux critĂšres de
dangerosité couramment admis (notamment la rupture avec
lâenvironnement familial, lâaltĂ©ration de la personnalitĂ© du sujet,
lâembrigadement des enfants, lâinfiltration des pouvoirs publics).
Brochures publicitaires, entretiens personnalisés, démarchage de
groupes réputés sectaires auprÚs des médecins, des pharmaciens et des
chirurgiens dentistes pour proposer formations et collectes constituent
42
A la suite de la plainte du ministÚre de la Santé en 2001, une procédure de
six ans a été ouverte pour exercice illégal de la pharmacie, tromperie
aggravée, publicité mensongÚre et commerce de médicament sans
autorisation de mise sur le marché.
56
autant de techniques réguliÚrement dénoncées par les instances
ordinales de ces professions.
1 - Lâexemple de
Kryeon
Si la formation « dâagents recruteurs » au sein mĂȘme des
professions médicales et para-médicales (tels les kinésithérapeutes ou
les orthophonistes) constitue lâune des principales voies de
prosélytisme pour les organisations à risque de dérive oeuvrant dans le
secteur de la santé, cette technique devient dans le cas de certains
groupes, un vĂ©ritable systĂšme marketing Ă lâexemple du mouvement
kryeon
et de sa technique de
lâEMF balancing
proposée en formation
à de futurs praticiens en « énergie » appelés « énergéticiens » et aux
parents dont les enfants sont diagnostiqués hyperactifs ou décrétés
« enfants indigo »
. Malgré les retombées médiatiques des campagnes
dâinformation engagĂ©es pour prĂ©venir mĂ©decins et particuliers des
dangers de ce groupe prĂŽnant lâidĂ©ologie dâune race nouvelle Ă venir,
Kryeon
continue Ă promouvoir activement le thĂšme des enfants
indigo, enfants Ă lâADN diffĂ©rent qui doivent faire lâobjet dâune
Ă©ducation particuliĂšre et qui, pour certains dâentre eux, auraient mĂȘme
des pouvoirs de guérison : «
Il semble que des milliers dâenfants nĂ©s
de mÚre sidatique, arrivent non seulement à guérir de ce virus mais
aussi à développer un
systĂšme immunitaire des centaines de fois plus
rĂ©sistant aux maladies que lâadulte moyen
43
. Le groupe investit
actuellement aussi le créneau des femmes enceintes (idée de la
« génération
indigo
» en gestation) et propose une surenchÚre dans
lâexploitation du thĂšme des enfants
indigos
en passant actuellement au
concept de lâenfant « cristal », dĂ©crĂ©tĂ© encore plus extraordinaire que
les précédents
44
. Une littĂ©rature abondante circulerait actuellement Ă
ce sujet dans les librairies ésotériques de Marseille. En 2004, le réseau
des praticiens en
EMF balancing technique
comprenait environ
quarante personnes implantées dans de nombreuses régions (Paris, Ile
de France, Aquitaine, Midi-Pyrénées, RhÎne, Alpes, Bretagne, Pays
de la Loire, Centre, Auvergne, Languedoc-Roussillon, Lorraine). Lâun
des produits annexes commercialisés par le mouvement et lancé sur le
marchĂ© par un ancien naturopathe converti au travail de lâĂ©nergie est
« lâeau diamant », «
aide pratique pour déprogrammer et transformer
les mémoires cellulaires restrictives
». Ce produit serait actuellement
diffusé dans treize pays dont la France avec neuf vendeurs recensés.
43
44
Source GEMPPI
57
2 - Praticien plutÎt que médecin pour contourner la loi
Certains médecins reconvertis dans une thérapeutique non
conventionnelle nâhĂ©sitent pas, pour Ă©chapper aux sanctions
éventuelles des instances ordinales, à décrocher leur plaque
professionnelle ou Ă demander dâeux-mĂȘmes leur radiation de lâordre,
préférant se positionner face à leur clientÚle comme praticien, voire
guérisseur.
Mais quâils soient anciens mĂ©decins ou non, la qualitĂ© de
«
praticien
» que certains gourous des médecines alternatives
revendiquent nâempĂȘche pas les moins scrupuleux dâentre eux dâagir
en toute illégalité, en établissant des diagnostics voire en dressant de
pseudos ordonnances. La plupart du temps cependant, les promoteurs
de techniques thérapeutiques non validées se protÚgent des foudres de
la loi en affichant leurs bonnes intentions sur les premiĂšres pages de
leur site : «
notre technicité ne remplace pas le diagnostic médical fait
par un docteur en médecine, les traitements proposés chez nous
viennent en complément de la médecine
», des propos rassurants que
viennent généralement infirmer quelques pages plus loin des offres de
soins aux prétentions curatives, toujours assorties de précautions
dâusage.
C - Le « lobbying » opposé à la médecine conventionnelle
Si la mouvance anti-vaccination, incarnée notamment par
le
Syndicat Hippocrate
et étroitement liée pour certains de ses acteurs au
rĂ©seau hamĂ©riste de la mĂ©decine nouvelle, reste lâun des principaux
hérauts de la mobilisation contre la médecine conventionnelle, le refus
de soin devient aujourdâhui un nouveau support de promotion pour
des groupes soucieux dâĂ©tendre encore leur audience auprĂšs du grand
public comme des professions mĂ©dicales, sur la base dâun lobbying
censĂ© convaincre lâopinion publique des vertus de mĂ©thodes
thérapeutiques non violentes ou respectueuses de leurs convictions
religieuses strictes.
Lâ
Eglise de Scientologie
promeut lâusage de la niacine (lâun
des composés de la vitamine B) déclarée vitamine intelligente dans ses
programmes de « purification » à visées thérapeutiques accompagnés
de sĂ©ances intensives de sauna. AprĂšs lâassistance aux toxicomanes,
elle dĂ©veloppe dĂ©sormais des procĂ©dures dâurgence Ă appliquer aux
grands traumatisés ou comateux sur des lieux de catastrophes et est
58
ainsi devenue le fer de lance des abus présumés de la psychiatrie via
son «
collectif des médecins et citoyens contre les traitements
dégradants de la psychiatrie ». Les
Témoins de Jéhovah
, quant Ă eux,
poursuivent assidĂ»ment leur action au sein mĂȘme du milieu mĂ©dical
via leurs comités de liaison hospitaliers pour y faire valoir leur refus
des transmissions sanguines y compris en cas dâurgence vitale ; une
position contestée par les pouvoirs publics mais que pourrait
conforter la derniÚre recommandation du comité consultatif national
dâĂ©thique
45
. Ce dernier stipule en effet : «
le refus de traitement
clairement exprimé par une personne ayant encore le gouvernement
dâelle-mĂȘme ne peut-ĂȘtre que respectĂ©e, mĂȘme sâil doit aboutir Ă la
mort
». Au lobbying dâopposition sâajoute aujourdâhui un mouvement
de sensibilisation de lâopinion engagĂ© Ă travers la crĂ©ation de groupes
de rĂ©flexion et « dâĂ©thique » mĂ©dicale.
Ces derniĂšres dĂ©cennies, la crĂ©ation dâun droit des malades
prévoyant notamment la possibilité de rédiger des directives de fin de
vie Ă travers « un testament » ou la dĂ©signation dâune personne de
confiance, pourrait favoriser des refus de soins, par exemple de prise
en charge anti-douleurs pour des motifs autres que ceux voulues par le
législateur
46
.
La question reste posée de savoir à qui profitera, en définitive,
la constitution dâalliances ponctuelles entre divers partisans des
médecines alternatives que,
a priori,
rien ne rapproche. Reste Ă
démontrer également que cette tendance puisse perdurer.
Ce panorama relativement complet mais non exhaustif des
mouvements et pratiques ayant investi le champ de la santé, est
certainement préoccupant, car il fait peser de réelles menaces sur notre
sociĂ©tĂ© et sur les citoyens en quĂȘte de rĂ©ponse Ă leurs difficultĂ©s. Le
dynamisme de ce marchĂ© de lâillusion du mieux vivre et de la
guérison, au-delà des dispositifs réglementaires et judiciaires qui le
contrĂŽlent, exige que lâĂtat se donne les moyens de limiter les risques
et les drames humains surtout lorsquâils frappent les jeunes et les
individus fragilisés par la maladie ou le handicap. Au-delà des actions
administratives et ou judiciaires, la nĂ©cessitĂ© dâune information du
public sur les pratiques promues sâimpose car elle est seule de nature Ă
limiter leur nuisance, dans lâattente des rĂ©sultats dâune Ă©valuation
scientifique des méthodes proposées.
45
Avis rendu le 9 juin 2005
46
Code de la Santé publique, articles 1111-4 et -11
59
1-3
RISQUES SECTAIRES ET PRATIQUES
DâINTELLIGENCE ECONOMIQUE :
UN ENJEU DE SECURITE
Les milieux économiques et institutionnels se sont manifestés
Ă de nombreuses reprises au cours de lâannĂ©e 2005, intĂ©ressĂ©s par les
approches et les analyses du risque et de la menace sectaires menées
par la MIVILUDES. En effet, celle-ci a répondu à de nombreuses
sollicitations et situations qui témoignaient à la fois des
questionnements et des inquiétudes de ses interlocuteurs lors de
conférences à des directeurs des ressources humaines et des directeurs
chargés de la sécurité, lors de rencontres de travail avec des dirigeants
dâentreprises, de demandes dâinformations de syndicalistes, de cadres
en difficultĂ© ou dâassociations dâanciens Ă©lĂšves, lors dâĂ©changes avec
des professionnels oeuvrant sur des champs dâactivitĂ©s nouveaux ou
en profonde mutation.
Une méthodologie adaptée
La MIVILUDES a ainsi pris en charge un volume conséquent
de questions relatives aux possibles liens entre sociétés commerciales
et mouvements à caractÚre sectaire. Les méthodes et les outils de
lâintelligence Ă©conomique, modelĂ©s et adaptĂ©s Ă la nature et aux
formes dâexpression du risque sectaire dans des contextes
économiques et professionnels, sont à cet effet apparus trÚs utiles.
Pour faire face au risque sectaire, la Mission a mis au point des
mĂ©thodes dâanalyse et a dĂ©terminĂ© des instruments de veille et de
dĂ©tection du risque. Elle a Ă©laborĂ© un cadre dâaction visant Ă prĂ©venir
et Ă dissuader les tentatives dâintrusion ou de dĂ©stabilisation dans un
but dâinfluence, et a formulĂ© Ă maintes reprises conseils,
préconisations et mesures de sauvegarde.
Dans le contexte économique et professionnel, le point focal
de la menace sectaire porte sur la notion de personne. Mais la
fragilisation de la personne est particuliĂšre. Il sâagit non seulement des
individus mais lâentreprise doit ĂȘtre Ă©galement considĂ©rĂ©e dans sa
qualitĂ© mĂȘme de personne morale. Aussi lâanalyse du risque dans ce
milieu doit-elle ĂȘtre conduite indĂ©pendamment de lâapproche
classique de confrontation dâune personne Ă lâaction dâun mouvement
60
sectaire qui privilĂ©gie lâaction directe de mise en dĂ©pendance. Il sâagit
de distinguer les risques sectaires liés aux modalités de
fonctionnement et de management dâun cadre professionnel et ceux
qui peuvent avoir un impact sur les personnes comme salariés ou
dirigeants.
Des risques spécifiques
Le premier des risques est le risque financier. Les
mouvements sectaires tendent à se développer en structures et en
diversification dâactivitĂ©s. Lâentreprise est devenue une cible naturelle
car elle dispose de budgets destinĂ©s Ă lâachat de prestations
externalisées. De nombreux mouvements ont ainsi constitué ou établi
des liens avec des cabinets de formation professionnelle, de
recrutement, de conseils en gestion des ressources humaines, de
services informatiques. Mais le risque est double. Contracter avec un
organisme liĂ© Ă un mouvement sectaire revient dâune part Ă contribuer
indirectement Ă son enrichissement et Ă son dĂ©veloppement, Ă
favoriser dâautre part lâĂ©mergence dâune relation de complicitĂ© sous-
tendue par un abus de confiance.
Le second risque dĂ©coule du prĂ©cĂ©dent. Lâhabitude de
travailler avec un partenaire dont lâentreprise peut ignorer sa
dĂ©pendance juridique vis-Ă -vis de lâorganisme sectaire induit une
accoutumance.
Un troisiÚme risque consiste à considérer un lien contractuel
Ă©tabli comme preuve de la fiabilitĂ© dâune relation de partenariat alors
que le contexte dâexercice de son activitĂ© par un prestataire est
susceptible dâĂ©voluer avec le temps.
Les questions posées par les interlocuteurs de la MIVILUDES
portent réguliÚrement sur :
- le rattachement ou le lien juridique ou économique entre un
mouvement et une entité commerciale ;
- les consĂ©quences financiĂšres dâun partenariat avec une sociĂ©tĂ©
« sensible » ;
- lâorigine et lâimpact dâune pratique professionnelle ;
- les tenants et les aboutissant dâune mĂ©thode ou dâune technique
servant de supports à la prestation achetée ;
- les risques liĂ©s Ă lâusage de la sous-traitance ;
61
A la lumiÚre de ces interrogations, des études et des
investigations menĂ©es en vue dây rĂ©pondre, il est essentiel dâenvisager
lâanalyse des risques potentiels et les rĂ©ponses Ă apporter Ă partir du
schéma suivant :
- caractérisation du risque ;
- dĂ©termination de lâorigine du risque ;
- définition de moyens de détection : ces moyens tiennent compte de
la nature du risque identifié et des étapes de déroulement du processus
de contractualisation (avant la mise en cause de la prestation, en cours
de sa mise en Ćuvre, et une fois celle-ci achevĂ©e ou suspendue) ;
- mise en cohĂ©rence de mĂ©thodes dâĂ©valuation des risques et de
ciblage de dĂ©rives sectaires ou dâactes prĂ©judiciables ;
- prise en compte de la notion dâemprise sectaire dans le dĂ©roulement
dâun processus professionnel impliquant une entreprise, un prestataire
éventuel et des salariés.
La question de la caractérisation du risque est sans doute celle
qui pose le plus problĂšme aux entreprises, aux syndicats
professionnels et de salariĂ©s ainsi quâĂ certaines Ă©coles scientifiques
ou de commerce.
Une nouvelle typologie : des groupes aux réseaux
En 2005, la Mission interministérielle a eu à connaßtre
plusieurs tentatives dâapproches de grands groupes industriels par des
mouvements sectaires transnationaux, assez aisés à repérer.
Il en va diffĂ©remment du repĂ©rage et de la mesure de lâimpact
de professionnels agissant en relation avec des micro-structures
sectaires rattachables à des réseaux constitués sur le fondement de la
diffusion ou de la distribution dâun concept considĂ©rĂ© comme moteur
du fonctionnement sectaire.
Ce schĂ©ma est certainement lâun de ceux qui se dĂ©veloppent
actuellement avec le plus de rapidité et de succÚs en raison des
domaines porteurs que ces réseaux investissent
:
coaching
,
développement personnel, reconversion professionnelle, management
des équipes ou métiers nouveaux alliant compétences informatiques et
compétences juridiques.
62
La caractérisation du risque sectaire apparaßt alors comme la
premiĂšre Ă©tape obligĂ©e du processus dâanalyse. Elle passe tout dâabord
par lâusage de typologies faisant rĂ©fĂ©rence dâune part aux profils
Ă©laborĂ©s pour le compte des commissions dâenquĂȘtes parlementaires et
dâautre part aux modes opĂ©ratoires des groupes. Elle passe ensuite par
lâutilisation de deux ensembles de critĂšres dâapprĂ©ciation du risque,
lâun constituĂ© de critĂšres gĂ©nĂ©raux et lâautre Ă©tant composĂ© de critĂšres
Ă©tablis Ă partir dâune Ă©chelle de menaces de nature Ă©conomique.
Les profils de groupes constituent des instruments de
« qualification doctrinale » favorisant une approche typologique. Ils
ont peu changĂ© au cours des annĂ©es, et, tout en nâĂ©tant pas un repĂšre
suffisant, ils représentent un élément de méthode nécessaire. Les
groupes ou les réseaux se rattachent aux courants
new age
, alternatifs,
néo-religieux, apocalyptiques, néo païens, satanistes, guérisseurs,
orientalistes, occultistes, psychanalytiques, ufologiques et enfin,
syncrétiques à fondement religieux ou philosophique. Au regard des
enjeux dâintelligence Ă©conomique et stratĂ©gique, ils reprĂ©sentent une
menace de constitution de micro-groupes élitistes agissant hors
organigramme du milieu professionnel ciblé.
Les fonctionnements
ParallÚlement à cette approche typologique centrée sur les
profils doctrinaux, lâanalyse du risque conduite dans le cadre dâune
pratique de lâ«Intelligence Ă©conomique » requiert lâutilisation de
critÚres relatifs aux modes opératoires des structures juridiques à but
commercial rattachables Ă des mouvements sectaires.
Quatre types dâorganisation peuvent ĂȘtre distinguĂ©s :
- les organisations sectaires centralisées fondées sur une dépendance
hiérarchique de toutes les structures qui en découlent, dont les entités
économiques ;
- les organisations sectaires centralisées dont le mode de
fonctionnement est déterminé par des liens de dépendance
économique et juridique ;
- les organisations en réseau reposant sur un mode de fonctionnement
commercial ;
- les organisations en réseaux constituées de praticiens professionnels
indépendants ou exploitant une franchise.
63
La conséquence immédiate de cette approche typologique est
dâoffrir la possibilitĂ© dâutiliser conjointement le droit des affaires et le
droit du travail comme outils dâinvestigation. Cette mĂ©thodologie a
dĂ©jĂ produit ses premiers rĂ©sultats. Dâautres sont envisagĂ©s dans un
proche avenir.
Lâusage des critĂšres dâapprĂ©ciation du risque, tant gĂ©nĂ©raux
quâĂ contenu Ă©conomique, renforce la pertinence de lâapproche par
caractérisation des risques en procédant par association de
lâobservation typologique diffĂ©renciĂ©e et des analyses par critĂšres
généraux et économiques. Cette maniÚre de procéder convient à la fois
Ă la prise en compte dâune menace externe et au traitement dâun risque
interne.
CritĂšres dâapprĂ©ciation du risque
Comment apprĂ©hender les critĂšres gĂ©nĂ©raux dâĂ©valuation du
risque :
- rupture induite avec lâenvironnement dâorigine
: la relation de
changement de comportements de cadres dâentreprise par des DRH ou
la famille de ces cadres conduit Ă sâinterroger de temps Ă autres sur
lâĂ©mergence du risque sectaire ;
- atteinte Ă lâintĂ©gritĂ© physique
: ce critÚre représente actuellement peu
de pertinence au regard de lâenjeu « Intelligence Ă©conomique », mĂȘme
si de premiÚres inquiétudes apparaissent actuellement à la lumiÚre de
comportements suicidaires ;
- discours peu ou prou antisocial
: des relations dâexpĂ©riences de
sĂ©minaires typĂ©s indiquent quâil y a matiĂšre Ă vigilance quant Ă la
loyautĂ© dâun salariĂ© Ă lâĂ©gard de son employeur
- trouble Ă lâordre public
: ce critĂšre nâapparaĂźt pas comme pertinent
en ce domaine, la notion dâ« ordre public Ă©conomique » nâĂ©tant pas
validée.
- lâimportance des dĂ©mĂȘlĂ©s judiciaires ou administratifs
: lâanalyse du
risque sectaire en rĂ©fĂ©rence Ă la notion dâintelligence Ă©conomique
appelle un examen approfondi de lâenvironnement des
« prestataires/candidats ».
De
mĂȘme, lâapport des contrĂŽles
administratifs exercĂ©s notamment au titre de lâapplication du droit de
la formation professionnelle peut ĂȘtre dĂ©terminant pour la poursuite
dâune analyse pluridisciplinaire.
- Enfin, les deux critĂšres,
« éventuel détournement des mécanismes
économiques »
et
« tentatives dâinfiltration »
, doivent ĂȘtre considĂ©rĂ©s
64
avec la plus grande attention. Leur examen conduit à élaborer un
deuxiĂšme faisceau de critĂšres destinĂ©s Ă conforter lâutilisation du
premier, car en effet, câest par la juxtaposition ou la somme de critĂšres
considĂ©rĂ©s comme pertinents Ă lâĂ©gard dâun dossier concret quâil est
possible de caractériser un risque sectaire pour une cible
préalablement définie et circonscrite.
Les critĂšres Ă©conomiques dâapprĂ©ciation du risque peuvent se
décliner sous trois formes :
- les critÚres de dépendance juridique sensible :
. existence du lien entre prestataires ou fonctions au sein de
lâentreprise et autres entitĂ©s ayant un rapport Ă©loignĂ© ou artificiel avec
la vocation du prestataire ou la mission dâune fonction ;
. sensibilité de la provenance des outils méthodologiques utilisés sur
un site :
. existence dâun Ă©cart entre protocole et rĂ©alitĂ© de la prestation ;
.
- les critÚres liés à des comportements insistants :
. orientation vers des programmes et activités hors entreprise ;
. contribution aux choix dâune prise de dĂ©cision induite par un
prestataire ;
. formulation dâexigences financiĂšres sans relation avec la prestation
fournie ;
. confusion entre formalisation des intĂ©rĂȘts de lâentreprise et notions Ă
prĂ©tention spirituelle dâaide Ă la quĂȘte de sens et au bien-ĂȘtre ;
- les critÚres déterminés par le risque de fraudes :
. couverture dâune opĂ©ration frauduleuse par lâutilisation dâun cadre
juridique invoquant un objet social ou culturel ;
. rĂ©alisation dâun acte frauduleux au sein du lieu de travail par
plusieurs personnes dâun mĂȘme groupe ;
. financement dâun mouvement par le moyen dâactivitĂ©s Ă©conomiques
déviantes.
LâutilitĂ© des typologies, multiple et dâun apport essentiel, est
une aide à la perception de démarches irrationnelles, de pratiques
charlatanesques, de tentatives dâescroqueries, de tentatives ou de
comportements visant à influer sur une prise de décision et à rendre
celle-ci contraire aux intĂ©rĂȘts de lâentreprise.
65
Un seul repĂšre ne suffit pas. Le cumul de plusieurs dâentre
eux associĂ©s Ă dâautres clignotants peut susciter un besoin de
renforcement de vigilance et dâanalyse. Lâapport des typologies
sâapprĂ©cie aussi en ce quâil favorise lâutilisation de moyens dâĂ©tablir
des corrélations entre :
- un concept Ă la base de lâaction jugĂ©e sensible et une pratique
professionnelle non rigoureuse ;
- un discours groupal interne à un mouvement sectaire et une pensée
groupale dĂ©veloppĂ©e au sein dâun site professionnel ;
- une gouvernance et une stratĂ©gie dâun mouvement.
Câest franchir ainsi lâĂ©tape de la dĂ©finition des moyens de
dĂ©tection. Les corrĂ©lations ci-dessus, si elles sont Ă©tablies, sont Ă
prendre en compte à la lumiÚre des effets indésirables :
- dâactes prĂ©judiciables, soit Ă lâentreprise, soit aux personnels de
celles-ci,
- de modifications cumulatives des modes de gestion.
La dérive sectaire
En mettant en perspective, dans cette démarche à visée
opérationnelle, « risques », « dérives » et « emprise », la notion de
dĂ©rive se rĂ©vĂšlera ĂȘtre la consĂ©quence dâun mode de fonctionnement
dâune organisation Ă caractĂšre sectaire. La dĂ©rive apparaĂźtra alors pour
ce quâelle est vraiment : une accumulation dâactes similaires ou un
ensemble dâactes diffĂ©rents commis au nom de directives, dâune
logique décisionnelle interne ou de rÚgles de comportement du
mouvement, induites par un groupe à caractÚre sectaire. La dérive
sectaire sera alors constitutive dâactes prĂ©judiciables Ă la personne
physique ou morale. Ainsi, dans le prolongement de lâestimation du
risque et de la détermination des dérives restera-t-il à évaluer la portée
des actes au regard de la menace de mise en Ă©tat de sujĂ©tion et dâabus
frauduleux dâun Ă©tat de faiblesse ou de confiance.
La finalitĂ© des dĂ©rives sectaires, c'est-Ă -dire dâactes
préjudiciables commis au nom des principes définis ci-dessus est,
rĂ©pĂ©tons-le, la mise en situation de dĂ©pendance. Celle-ci peut ĂȘtre
constituĂ©e dâinfluences graves et rĂ©pĂ©tĂ©es sur la prise de dĂ©cision au
nom dâintĂ©rĂȘts alternatifs par le moyen dâactes Ă©conomiques et
financiers pouvant se révéler frauduleux.
66
La mise en Ćuvre dâactions induisant des dĂ©rives sectaires au
sein dâune entreprise ou dâune institution sâopĂ©rera notamment par la
contractualisation entre celles-ci et des prestataires externes, au niveau
de recrutement conseillés par des cabinets en lien avec des
mouvements, dans le cadre dâun accompagnement externe des
stratĂ©gies dâentreprise. Il en rĂ©sultera des situations dâintrusion. Il
reste Ă tenter de prĂ©ciser ce que peut ĂȘtre lâimpact dâune intrusion
sectaire consciemment organisée et éventuellement suivie de la
prĂ©sence durable dâune complicitĂ© humaine intĂ©grĂ©e dans
lâorganigramme de lâentreprise.
Lâimpact de lâintrusion sectaire pourrait ĂȘtre dĂ©fini
aujourdâhui comme un ensemble dâactes susceptibles de porter
préjudice à une personne physique et/ou morale, commis dans un
contexte de groupe ayant une stratĂ©gie et des intĂ©rĂȘts propres, dont les
principes de fonctionnement visent ou ont pour effet :
- la mise en Ćuvre dâinitiatives de sĂ©ductions dĂ©stabilisatrices,
- lâaccumulation de propositions de dĂ©velopper un autre mode de vie
ou des potentialitĂ©s enfouies afin dâen faire profiter son
environnement professionnel,
- un engagement personnel sur un chemin de rupture ou de
transformation radicale.
La menace ultime pour lâinstitution/employeur comme pour
ses salariĂ©s est par consĂ©quent lâemprise sectaire conçue comme un
phénomÚne conduisant à :
- une irréversibilité des comportements,
- un obscurcissement de la conscience,
- une altération de la personnalité,
- une focalisation sélective,
- lâacceptation de rĂ©fĂ©rences exclusives, alternatives et Ă©litistes.
RĂŽle de la MIVILUDES
Des situations de ce type ont pu ĂȘtre rencontrĂ©es en 2005 au
cours de lâexamen de certains dossiers dans lesquels des cadres
dâentreprises pouvaient apparaĂźtre fragilisĂ©s vis-Ă -vis de leur
entreprise Ă lâissue dâune prestation dont ils avaient Ă©tĂ© bĂ©nĂ©ficiaires
ou dont on leur avait confiĂ© lâaccompagnement ou la gestion.
67
Les milieux économiques et des administrations prennent en
compte ce risque graduellement, en étant attentifs aux droits des
personnes, au respect de la vie privée de leurs salariés et soucieux de
la protection de toute information les concernant au sein dâun cadre de
travail juridiquement déterminé. La Mission est sollicitée sur ce
problÚme spécifique de la prise en compte du risque sectaire dans la
conduite dâune stratĂ©gie dâintelligence Ă©conomique.
Lâanalyse ci-dessus a Ă©tĂ© Ă©laborĂ©e en fin dâannĂ©e 2005 pour
rĂ©pondre Ă des interrogations de plus en plus diffĂ©renciĂ©es. Lâexigence
dâune approche mĂ©thodique est apparue. Cette mĂ©thode dâanalyse
suscite dâores et dĂ©jĂ un intĂ©rĂȘt de la part dâinterlocuteurs
institutionnels Ă©conomiques et administratifs et conduit la Mission Ă
intervenir de façon croissante devant des auditoires de responsables de
ressources humaines et de la sécurité.
68
1 - 4
HUMANITAIRE DâURGENCE ET DERIVES
SECTAIRES
Les sectes sâinvitent rĂ©guliĂšrement au chevet des victimes de
catastrophes planétaires. «
Le mouvement humanitaire est de plus en
plus gangrené par des organisations non gouvernementales (ONG) re-
ligieuses qui lâutilisent pour tenter dâimposer leur vision du monde [âŠ]
La question quâelles posent est celle de leur prosĂ©lytisme militant
auprĂšs de populations en dĂ©sarroi. [âŠ]
»
Câest ainsi que sâexprimait en octobre 2005 Sylvie Brunel,
universitaire et ancienne dirigeante dâ
Action contre la faim
(ACF), Ă
lâoccasion des « 8
Ăšmes
Rendez-vous de lâHistoire » de Blois consacrĂ©s au
thĂšme
« Religion et politique »
, dénonçant le comportement de
certaines organisations dâinspiration protestante (Ă©vangĂ©liques) ou is-
lamique et citant lâ«
Eglise de Scientologie massivement présente
depuis le tsunami du 26 décembre 2004
».
Le 24 décembre 2005,
La Croix
titrait «
Mais pourquoi nous
avez-vous aidés
? ». Cette analyse reproduisait les interrogations des
indonĂ©siens musulmans de la province dâAceh, intriguĂ©s par ce que
pouvait cacher lâaide occidentale. Le quotidien Ă©voquait alors la rumeur
dâune gĂ©nĂ©rositĂ© intĂ©ressĂ©e des occidentaux : «
Serait-ce Ă cause des
excÚs de certains évangélistes américains qui distribuaient des livres
aux enfants et y glissaient la Bible en bande dessinée ? Ou à cause de
la secte de scientologie qui a ouvert des cabinets de ⊠massage. ââIl a
fallu expliquer aux pĂȘcheurs que les jĂ©suites donnaient sans attendre
de retourââ confie Azman, jeune musulman coordinateur de JRS
(Service Jésuite des réfugiés)
».
La solidaritĂ© est lâaffaire de tous et nul ne saurait bien
Ă©videmment contester Ă des organisations le droit dâaider leur prochain,
mais profiter du désarroi de populations en état de faiblesse et de vul-
nérabilité pour imposer une vision du monde constitue une hypocrisie
inacceptable et immorale. Câest bien ce quâa dĂ©noncĂ© publiquement,
pour la premiÚre fois, Sylvie Brunel, choquée par des comportements
observĂ©s sur le terrain de lâaide humanitaire par ailleurs rĂ©guliĂšrement
critiqués au titre des critÚres porteurs de dérives sectaires.
69
Dans son rapport 2001, la Mission interministérielle de lutte
contre les sectes (MILS), aprÚs les attentats terroristes ayant frappé le
World Trade Center et lâexplosion de lâusine AZF de Toulouse,
évoquait déjà «
les sectes [qui] nâhĂ©sitent pas Ă profiter des malheurs
du monde pour tenter dâimposer leurs solutions miracles et entraĂźner
des individus fragilisĂ©s dans un mĂ©canisme dâembrigadement »
. Le
phĂ©nomĂšne nâest donc pas nouveau, mais Ă lâheure oĂč dans le monde
entier se multiplient les besoins consécutifs à des catastrophes
naturelles ou Ă des conflits, une vigilance accrue sâimpose.
En France, mĂȘme si les cas recensĂ©s ne sont pas lĂ©gion, la
MIVILUDES, en charge dâune mission de prĂ©vention et dâincitation Ă
la vigilance, estime indispensable de rappeler lâexistence dâun risque
sectaire potentiel dans ce domaine. En effet, la présence dans les
banlieues françaises, aprĂšs les dĂ©sordres de lâautomne 2005, de
certaines organisations sectaires, revendiquant haut et fort les mérites
de leur action humanitaire en faveur des populations en difficulté, est
prĂ©occupante, surtout si lâon observe la similitude de discours
apparaissant entre les propos de ces organisations et la maniĂšre dont
lâactualitĂ© en question avait Ă©tĂ© traitĂ©e par quelques mĂ©dias
internationaux.
Il nâest pas du ressort de la MIVILUDES de se prononcer sur
la légitimité de certains groupes à intervenir, fussent-ils par ailleurs
susceptibles de dérives sectaires. Mais toute situation de détresse
consécutive à des catastrophes ou à des situations conflictuelles
suscitant la mobilisation massive â et indispensable â de bĂ©nĂ©voles de
tous horizons, il est de son devoir dâinformer le public et tous les
acteurs de la vĂ©ritable aide humanitaire de lâexistence dâun risque de
dérive sectaire dans ce domaine. Le désintéressement, le respect de la
dignité humaine et des libertés individuelles, valeurs fondatrices de la
démarche humanitaire, sont réguliÚrement bafoués par quelques
organisations sans scrupules dont il nâest pas inutile dâexaminer les
motivations.
Une aide intéressée
Recherche de respectabilité
Militer pour la paix mondiale ou en faveur des droits de
lâhomme, lutter contre les mĂ©faits de la drogue, oeuvrer sur le terrain
70
de lâaction humanitaire : voilĂ des engagements suscitant le respect et
conférant une notoriété certaine à ceux qui les pratiquent. Les sectes
lâont bien compris et si elles investissent aujourdâhui massivement ces
domaines, soit à visage découvert soit par le biais de diverses
officines, câest uniquement parce quâelles en attendent des retombĂ©es
positives en termes de recrutement ou dâimage.
Recrutement de nouveaux adeptes
La phase de sĂ©duction passe dans ce cas par lâaide matĂ©rielle
et psychologique. Les sinistrés sont vulnérables, souvent en état de
dĂ©tresse extrĂȘme et donc rĂ©ceptifs Ă toute attention particuliĂšre Ă leur
Ă©gard. Lâassistance mĂ©dicale ou psychologique devient un vecteur de
prosélytisme.
Sylvie Brunel évoque ces organisations «
qui mĂȘlent dans un
mĂȘme geste la conversion et lâaide
». En deçà du cas extrĂȘme dâune
aide durable conditionnée par la conversion de la victime, on observe
un prosĂ©lytisme plus subtil dans le cadre duquel lâaide apparemment
dĂ©sintĂ©ressĂ©e prĂ©cĂšde une phase de sĂ©duction â oĂč sâĂ©tablit un lien de
proximitĂ© avec la victime â puis dâinformation sur la doctrine ou
lâidĂ©ologie dont se rĂ©clame le volontaire, sur le terrain. On imagine
mal lâindividu dĂ©semparĂ© refusant dâĂ©couter son bon samaritain, voire
de le « remercier » par une attitude conciliante, allant parfois jusquâĂ
lâallĂ©geance. On se sent toujours redevable Ă lâĂ©gard de celui qui
attĂ©nue, ou marque lâintention dâattĂ©nuer, les souffrances auxquelles
on est confronté.
Les organisations sectaires se concurrencent parfois mais
dâune maniĂšre gĂ©nĂ©rale elles se partagent de fait le terrain. Le cas du
tsunami fut à ce titre exemplaire. On a vu les « ministres volontaires »
de la scientologie, dĂ©pĂȘchĂ©s Ă Banda Aceh, en IndonĂ©sie, et proposant
aux survivants une méthode « inédite » de traitement des traumatismes
appelée «
assist
» et qui consiste en fait en des massages. Ces envoyés
trÚs spéciaux ne cachaient pas, par ailleurs, leur objectif de former
ultérieurement les survivants à cette méthode ainsi que leur volonté de
diffuser le plus largement possible les thĂšses de Ron Hubbard
47
. De
son cÎté, la
Méditation transcendantale
dĂ©pĂȘchait ses « yogis » pour
enseigner la méditation aux victimes. Quant au
Centre de la Kabbale
,
47
AFP, 11 janvier 2005
71
il leur faisait parvenir des milliers de bouteilles « dâeau de la
Kabbale » pour les soulager.
Ce qui diffĂ©rencie, Ă ce stade, lâattitude du bĂ©nĂ©vole de lâaide
humanitaire traditionnelle de celle du « missionnaire sectaire », câest
que ce dernier ne sâen tient naturellement pas Ă lâacte dâassistance : il
lâassortit au minimum dâun discours sur lâidĂ©ologie du mouvement
quâil reprĂ©sente, quand il ne conditionne pas son aide Ă une adhĂ©sion.
Ainsi Ă chaque intervention, la scientologie distribue
massivement des milliers dâexemplaires du
Chemin du Bonheur
,
«
code moral non religieux
» écrit par le fondateur de la scientologie.
De leur cÎté, les
Témoins de Jéhovah
proposent des numéros de leur
publication
La Tour de Garde.
Lâune et lâautre publications sont
dâailleurs disponibles dans des dizaines de langues.
Chacun y va de son explication des causes de la catastrophe
ou de lâĂ©vĂšnement, explication Ă©rigĂ©e en vĂ©ritĂ© unique : signes avant-
coureurs de la fin du monde (sectes apocalyptiques) ou du retour dâun
prophÚte (évangélistes), mauvaise influence des psychiatres qui
mÚnent le monde et méfaits de la drogue (scientologie), vengeance de
Satan ou expression de la colĂšre de Dieu (fondamentalistes islamistes
ou chrétiens), insuffisance de méditation (
Méditation transcendantale
)
ou de priÚres (intégristes et fondamentalistes en général) ou pourquoi
pas, au contraire, excÚs de religion (Raël).
Bien Ă©videmment, ce discours nâa dâautre objet que de
conduire les personnes ciblées, à plus ou moins longue échéance, vers
lâantidote idĂ©al, lâapprobation ou la conversion Ă lâidĂ©ologie professĂ©e.
Il faudra alors se procurer les écrits du gourou, puis participer à des
formations (gratuitement dans un premier temps, Ă des tarifs
prohibitifs ensuite), donner de son temps Ă lâorganisation : en un mot
revĂȘtir progressivement la panoplie de lâadepte idĂ©al.
Perspective dâun pactole financier
La recherche du profit restant le moteur principal de ces
organisations, leur intervention « humanitaire », aprÚs leur avoir
confĂ©rĂ© un vernis de respectabilitĂ©, va devoir ĂȘtre rentabilisĂ©e. Câest
pourquoi elles tenteront souvent de monnayer leur nouvelle image en
appelant à la générosité du public, voire en sollicitant des subventions
publiques.
72
On pourrait croire quâil est absurde de penser sâenrichir sous
couvert dâaction humanitaire, car ce nâest bien sĂ»r pas lâobjectif des
organisations sérieuses, désintéressées et exemplaires qui redistribuent
tous les dons.
Mais quand les appels de fonds sont lancés par des stars,
adeptes de sectes, on sait quâils rapportent « gros » aux organisations
quâils reprĂ©sentent. Ces personnalitĂ©s payent parfois de leur personne
sur le terrain : on se rappellera Tom Cruise, scientologue, venant en
aide aux pompiers sur les décombres du World Trade Center, de John
Travolta, autre scientologue, apportant des vivres aux sinistrés du
cyclone Katrina ou de David Lynch aux cÎtés des yogis de la
Méditation transcendantale
pour soulager la société de tous ses maux
aprĂšs les catastrophes du 11 septembre 2001 ou du Tsunami de
décembre 2004.
Lâengagement des adeptes de base eux mĂȘmes dans une activitĂ©
humanitaire peut mĂȘme gĂ©nĂ©rer dâimportantes recettes. En 2001, il en
coûtait
1500 francs (228 euros) dâinscription au cours pour devenir min-
istre volontaire et
1026 francs (156 euros) pour recevoir un exemplaire
du « manuel de scientologie » ad hoc. Par ailleurs, le site dâune
branche de la scientologie dénommée
The way to happiness foundation
dit avoir reçu des « ministres volontaires » une commande d'un million
dâexemplaires de
The way to happiness
(
Le chemin du bonheur
)
destinĂ©s Ă ĂȘtre distribuĂ©s sur les lieux de catastrophes naturelles. Or ces
ouvrages sont vendus aux adeptes, avec un bénéfice substantiel pour le
mouvement, compte tenu de lâĂ©cart entre le prix de revient estimĂ© et le
prix de cession aux adeptes.
Les subventions publiques peuvent aussi constituer un apport
non négligeable, quand la vigilance des organismes publics est prise
en défaut, avec quelquefois un goût de scandale, lorsque, par exemple,
un financement de lâOffice humanitaire de la Commission europĂ©enne
(ECHO) aurait permis, par divers dĂ©tours, dâalimenter les caisses dâune
secte japonaise
48
.
Toujours au chapitre du dĂ©tournement de lâaide humanitaire
au profit de lâenrichissement de lâorganisation, le rapport de la
48 Parlement européen, question n°3269/98 du 30 octobre 1998 à la
Commission européenne.
73
Commission dâenquĂȘte parlementaire
Les sectes et lâargent
49
indique
que «
plusieurs sectes utilisent la puissance financiĂšre quâelles ont
acquise en France pour soutenir, sous un affichage humanitaire, leurs
implantations Ă lâĂ©tranger
». Il sâinterroge notamment sur lâexemple
des
Témoins de Jéhovah
en Afrique.
Le statut d'ONG auprĂšs dâinstitutions telles lâONU peut
procurer de grands avantages aux sectes qui parviennent Ă lâobtenir,
en leur conférant une importante notoriété. Fortes de ce label de
respectabilité international, il leur est ainsi plus aisé de faire appel à la
générosité du public ou, dans une moindre mesure, de bénéficier de
financements publics consentis soit par les institutions internationales
aux organisations quâelles ont reconnues, soit par dâautres collectivitĂ©s
publiques. Le rapport
Les sectes et lâargent
cite quelques exemples
dâorganismes bĂ©nĂ©ficiant du statut dâONG auprĂšs de lâONU : une
officine mooniste
50
, la
Soka Gakkai
ou encore lâ
Eglise Internationale
du Christ
et
Shri Chinmoy
.
Quand la communication prime sur lâaction : exemple des
« ministres volontaires de la scientologie »
Les membres de lâ
Eglise de la Scientologie
, de la
Nouvelle
Acropole
ou des
Témoins de Jéhovah
se déploient réguliÚrement sur le
terrain, en France comme Ă lâĂ©tranger. Ces derniers agissent sur le
territoire africain via
Aidafric
qui se présente comme une association
dâaide mĂ©dicale. Les organisations sectaires internationales
revendiquent toutes haut et fort un volet humanitaire Ă leur actif,
directement ou via des associations qui ne bénéficient pas toutes du
statut dâONG. Il convient de souligner que, nonobstant des
motivations non dĂ©nuĂ©es dâarriĂšre-pensĂ©es et qui nâont rien Ă voir
avec les valeurs humanitaires, certaines organisations apportent une
aide effective, parfois efficace sur le terrain. Il nâen reste pas moins
que le fonctionnement des « Ministres volontaires » mis en place en
par la scientologie peut laisser sceptique au regard de certains faits
relatĂ©s par le mouvement lui-mĂȘme ou par la presse.
49
Documentation française, 1999
50
Plusieurs organismes moonistes sont en fait accrédités, tous sur le terrain
du combat pour la paix mondiale
74
Le
« Corps des ministres volontaires »
de la scientologie sâest
organisé et manifesté au plan international dÚs 1995. Ses bénévoles
sont affectĂ©s Ă lâassistance de victimes de catastrophes naturelles,
dâattentats ou de violences urbaines, en « complĂ©ment » de lâaction
menée par les secours institutionnels. Ils utilisent exclusivement les
techniques dâassistance spirituelle Ă©laborĂ©es par Ron Hubbard et
distribuent massivement lâouvrage
Le Chemin du Bonheur
. Leurs
« exploits » sont rĂ©guliĂšrement narrĂ©s sur le site de lâorganisation.
Dans un article intitulé
« Rendre lâespoir aux victimes du tsunami »
, la
publication scientologue
Ethique et Liberté
51
rend compte de résultats
souvent qualifiés de « miraculeux » par les individus bénéficiant du
programme «
assist
» et de ses «
procĂ©dĂ©s dâassistance spirituelle
». Il
y est aussi question de plus de 88.000 bénéficiaires de cette technique
et de 44.500 dâentre eux formĂ©s pour les administrer. PratiquĂ© par des
non mĂ©decins, ce procĂ©dĂ© « miraculeux » dâassistance dont la finalitĂ©
thérapeutique est par ailleurs revendiquée par Ron Hubbard
52
laisse
dubitatif.
Mais la caractĂ©ristique majeure de lâintervention humanitaire
de la scientologie, câest quâelle sâaccompagne dâ
une communication
dĂ©mesurĂ©e relevant plus de la propagande que de lâinformation
. A
terme, elle parvient Ă crĂ©er lâillusion que la scientologie figure dans le
peloton de tĂȘte des ONG Ă caractĂšre humanitaire, au mĂȘme titre que la
Croix Rouge
ou
Médecins du Monde
. Câest le but recherchĂ©. Pour
toute action menĂ©e par lâorganisation, le principe reste le mĂȘme :
communiquer massivement pour obtenir des retombées médiatiques,
positives si possible. Et si lâon en juge par les nombreuses rĂ©fĂ©rences
â critiques ou non â Ă la prĂ©sence de bĂ©nĂ©voles scientologues sur les
sites du tsunami, y compris dans les médias français, elle remporte un
réel succÚs. Il est en outre évident que lorsque des stars internationales
comme Tom Cruise ou John Travolta viennent soutenir leurs troupes
sur le terrain, lâimpact mĂ©diatique mondial est garanti.
Il nâen reste pas moins que les pĂ©rĂ©grinations humanitaires
scientologues ne sont pas sans susciter
de sérieuses controverses
. Il
est ainsi question parfois de leur expulsion des sites sinistrés pour
cause dâinefficacitĂ© voire dâinterfĂ©rence avec les services de secours
51
Ethique et Liberté,
n°37.
52
Hubbard Ron,
ProcĂ©dĂ©s dâinstruction et de dĂ©monstration des assists
, New
Era Publications International, 1983.
75
officiels, comme Ă Chicago lors dâun incendie
53
, Ă Belsan en
Tchétchénie
54
ou Ă lâhĂŽpital de Vachira en ThaĂŻlande aprĂšs que des
patients se sont plaints de douleurs occasionnées par les «
assists
»
55
.
Le ministÚre de la Santé russe a fini par interdire en 1986 tout usage
des « procĂ©dures de purification » scientologues aprĂšs quâelles ont Ă©tĂ©
jugés inefficaces pour « soigner » des enfants irradiés lors de la
catastrophe nuclĂ©aire de Tchernobyl, ce qui nâempĂȘche pas la
scientologie de continuer Ă se vanter des rĂ©sultats quâelle prĂ©tend avoir
obtenus Ă cette occasion.
Lâaversion de la scientologie pour les psychiatres et les
psychologues, responsables selon eux â entre autres mĂ©faits â du
terrorisme et plus particuliĂšrement des attentats du 11 septembre
56
, est
telle quâil est rapportĂ© que certains ministres volontaires nâauraient eu
de cesse de les évincer du site du Ground Zero ou des secteurs
sinistrés par le tsunami afin de les y remplacer.
La scientologie, sur le front de lâhumanitaire, joue parfois sur
la confusion avec des organisations respectables dont elle se sert pour
engranger des dons
57
ou pour « récupérer » leur travail et leur
notoriété
58
. Pendant la guerre du Kosovo en 1999, elle avait
revendiqué un partenariat avec la
Croix-Rouge
auprÚs des réfugiés
dâun camp albanais, une information officiellement dĂ©mentie par le
Comité international de la célÚbre ONG. La publication suisse qui
relate lâaffaire
59
prĂ©cise que la scientologie nâen Ă©tait pas Ă sa premiĂšre
53
« Scientologyâs volunteers get frosty reception at fire scene
»,
Chicago
Sun
, 9 décembre 2004
54
« Scientologists sent packing from Beslan »
Moscow New,
22 octobre 2004
55
lâExpressen
, quotidien suédois, 7 janvier 2005
56
Voir la déclaration de Martin Weightman, directeur du Bureau européen
des droits de lâHomme de lâ
Eglise internationale de Scientologie
, dans son
communiqué de presse du 28 juillet 2004 ;
« An anatomy of todayâs
terrorism »
, par John Eatsgate, président de la Commission internationale des
citoyens pour les droits de lâhomme ; voir Ă©galement lâappel lancĂ© par David
Miscavige, président de la Scientologie, intitulé
« Wake-up Call »
,
RTC,
Bulletin n°44, 11 septembre 2001.
57
Voir lâaffaire de la National Mental Health association ; le rapport 2001 de
la Mils ;
« La scientologie recrute dans les décombres »
,
France Soir,
20
septembre 2001 ;
« Mental Health hotline a blind lead series »
,
St Persburg
Times,
15 septembre 2001.
58
« Scientology si attribuisce il merito dei soccorsi italiani »
,
Corriere della
Sera
, 18 janvier 2005.
59
LâHebdo
, 12 août 1999.
76
revendication abusive de proximité avec la
Croix Rouge
: et de citer
des exemples antĂ©rieurs en IndonĂ©sie ainsi quâĂ lâoccasion du
tremblement de terre de Los Angeles en 1994.
On est en prĂ©sence dâun bel exemple de pure « propagande »,
quand, aprÚs deux semaines de présence revendiquée à Aulnay-sous-
Bois, la scientologie nâest pas loin de sâattribuer les mĂ©rites du retour
au calme rapide dans la cité. Ainsi, dans un communiqué du 25
novembre 2005, elle écrit que le «
retour Ă la normale plus rapide que
dans dâautres citĂ©s
» serait liĂ© Ă la prĂ©sence de ses bĂ©nĂ©voles qui sây
sont relayés.
Les mises en garde institutionnelles
En 1999, le rapport parlementaire
Les sectes et lâargent
sâintĂ©ressait dĂ©jĂ Ă lâaction humanitaire des multinationales sectaires
principalement sous lâangle des transferts financiers. Mais câest Ă
lâoccasion des inondations dans le sud de la France, la mĂȘme annĂ©e,
puis de lâexplosion de lâusine dâAZF Ă Toulouse en 2001 que sâest
manifestée une réelle inquiétude quant aux risques sectaires potentiels
dans le secteur de lâaide humanitaire. Le rapport de la MILS sâen
faisait alors lâĂ©cho tout en apportant un Ă©clairage particulier sur la
mobilisation de grands mouvements sectaires lors des attentats de
New York du 11 septembre 2001.
Les pouvoirs publics réagissaient sans retard : le ministÚre de
la Santé mettait en garde contre le risque de pénétration des sectes sur
les lieux de catastrophes dans une brochure diffusée en 2003,
intitulée :
« Accidents collectifs, attentats, catastrophes naturelle :
conduite à tenir pour les professionnels de santé »
. En 2005, le
secrĂ©tariat dâĂtat aux victimes Ă©ditait un guide destinĂ© Ă faciliter les
premiÚres démarches des familles et amis de victimes françaises du
tsunami dans laquelle il était recommandé «
dâĂȘtre vigilant Ă lâĂ©gard
de toute personne susceptible dâexploiter leur [votre] souffrance Ă des
fins mercantiles ou sectaires
».
Mais lâaction isolĂ©e de la France en ce domaine nâest que
dâune portĂ©e limitĂ©e. La rĂ©sonance mĂ©diatique planĂ©taire de certaines
opérations humanitaires attire ceux pour qui tout individu en situation
de détresse est une proie idéale sujette à manipulation. Elle leur
confĂšre dans un mĂȘme temps le masque dâhonorabilitĂ© quâils
77
recherchent en permanence. Lâenjeu est donc international. Câest
pourquoi la commission dâenquĂȘte parlementaire sâintĂ©ressant Ă
lâargent des sectes avait suggĂ©rĂ© notamment que soit engagĂ©e «
une
action diplomatique au niveau du Conseil de lâEurope sur les dangers
du sectarisme et sur la prĂ©sence de sectes au sein dâorganisations non
gouvernementales affichant une vocation humanitaire
»
Cette
recommandation nâa malheureusement pas Ă©tĂ©, Ă ce jour, suivie
dâeffets.
78
2
Ăšme
PARTIE
ACTIVITES
79
2-1
BILAN DES PROPOSITIONS DU RAPPORT
2004
Le rapport de la MIVILUDES pour lâannĂ©e 2004 se
terminait, tout comme le précédent rapport, par dix propositions
dâaction visant Ă parfaire lâaction de la Mission dans le domaine de
sa compĂ©tence telle que fixĂ© lĂ©galement. Le prĂ©sent chapitre vise Ă
dĂ©terminer lâĂ©tat dâavancement de la mise en Ćuvre de ces
propositions au cours de lâannĂ©e 2005.
Si certaines propositions se sont rĂ©vĂ©lĂ©es non viables Ă
lâusage, ou prĂ©maturĂ©es, la grande majoritĂ© des propositions ont Ă©tĂ©
mises en Ćuvre. Le rapport 2004 mettait lâaccent sur les actions de
prĂ©ventions Ă lâĂ©gard des jeunes, cible favorite de certains
mouvements, et sur lâamĂ©lioration de lâaide aux victimes. Sur ces
deux aspects la MIVILUDES a mis en place une communication sur
son site
Internet
, et a développé des actions de formation pour
permettre notamment aux personnels de lâEducation nationale de
détecter des situations à risque de dérives sectaires ; les relations se
sont accentuées au cours du dernier trimestre avec les associations
de dĂ©fense des intĂ©rĂȘts des victimes de dĂ©rives sectaires.
La MIVILUDES a vu par ailleurs, au cours de la mĂȘme
période, les contacts directs avec les particuliers augmenter
considĂ©rablement par lâenvoi de courriels, de lettres et dâappels
téléphoniques. Des réponses ont été systématiquement apportées
pour les renseigner ou orienter leurs démarches.
Sur le plan de la sensibilisation des milieux économiques,
plusieurs expériences ont été menées dans le cadre de formations de
certains types dâacteurs de la vie Ă©conomique, et en particulier des
directeurs des ressources humaines et des directeurs de la sécurité de
diverses entreprises ayant sollicité notre intervention ; cette
sensibilisation sera poursuivie et dĂ©veloppĂ©e dans lâannĂ©e 2006 eu
égard aux contacts initiés par différents cercles de dirigeants
dâentreprises, des groupes industriels stratĂ©giques ainsi que des
reprĂ©sentants dâinstitutions Ă vocation Ă©conomique.
La MIVILUDES sâest Ă©galement attachĂ©e Ă pĂ©renniser et Ă
développer la réunion des cellules de vigilance préfectorales. En
80
effet, si le nombre de dĂ©partements rĂ©unissant cette instance nâest
pas encore satisfaisant, comme le montre la carte des prĂ©fectures oĂč
la vigilance est mise en place, un léger mieux a été constaté en
2004 ; il est Ă noter la prĂ©sence quasiment systĂ©matique dâun
membre de la Mission dans les cellules de vigilance pour apporter
un Ă©clairage global au phĂ©nomĂšne et pour sâinformer au plus prĂȘt
des dérives de mouvements locaux. Il est intéressant de constater
que dans certains départements, comme le RhÎne, des réunions de
travail trÚs réguliÚres ont été mises en places avec un état trÚs
avancé de la réflexion.
Sâagissant du contrĂŽle de lâaccueil Ă domicile des personnes
vulnĂ©rables, quâil sâagisse dâenfants ou dâadultes dĂ©pendants, par
des assistants agréés, un projet dâinstructions du ministĂšre de la
SantĂ© et des SolidaritĂ©s est en cours et doit ĂȘtre adressĂ© aux
administrations locales notamment les services dâaide sociale sous
la responsabilité des présidents des conseils généraux. Ce projet, par
référence au numéro de 1998 du Courrier juridique du ministÚre
consacrĂ© Ă lâagrĂ©ment requis pour lâaccueil des enfants, rappellera
en lâĂ©tendant Ă lâensemble des personnels sociaux concernĂ©s, les
dispositions jurisprudentielles et administratives Ă prendre en
compte dans les notifications ou les refus dâagrĂ©ment, la garantie
dâun environnement de qualitĂ© des personnes accueillies, le respect
des libertĂ©s fondamentales de croyances et dâappartenance Ă des
groupes religieux ou autres pour lâagrĂ©ment des professionnels
sociaux.
ParallĂšlement au ministĂšre de la Justice, le ministĂšre de
lâEducation nationale a portĂ© une attention toute particuliĂšre au
renforcement du contrĂŽle de lâobligation scolaire par des actions de
réflexion sur le thÚme du contrÎle des élÚves instruits dans les
familles et les écoles privées sous contrat.
Enfin, depuis le 27 mai 2005, une circulaire du Premier
ministre est venue uniformiser la lutte interministérielle contre les
dérives sectaires
60
.
60
Journal Officiel du 1
er
juin 2005
81
2-2
ACTIVITE ADMINISTRATIVE
MINISTERES
Intérieur, sécurité intérieure et libertés locales
Ăconomie, finances et industrie
Ăducation nationale, enseignement supĂ©rieur
Jeunesse, sports et vie associative
Emploi, travail et cohésion sociale
Solidarités, santé et famille
82
22-1
MINISTĂRE DE LA JUSTICE
Direction des affaires criminelles et des grĂąces
Direction des affaires civiles et du sceau
ACTIVITĂ DE LA MISSION SECTES
Suivi des dossiers dâaction publique
Nonobstant la participation du chargé de mission sur les
questions relatives aux sectes au sein du comité exécutif de pilotage
opérationnel de la MIVILUDES, la Mission sectes effectue un suivi
des dossiers dâaction publique mettant en cause les mouvements Ă
caractĂšre sectaire ayant portĂ© atteinte aux droits de lâhomme et aux
libertés fondamentales, par des agissements répréhensibles.
A cet effet, elle est en contact régulier avec les magistrats
dĂ©signĂ©s « correspondants sectes », au sein de chaque Cour dâappel.
Par ailleurs, le chargé de mission sectes entretient des
relations réguliÚres avec ses homologues des autres départements
ministĂ©riels, notamment, les ministĂšres de lâIntĂ©rieur, de la DĂ©fense
nationale et de la DĂ©lĂ©gation gĂ©nĂ©rale Ă lâemploi et Ă la formation
professionnelle.
Formation
La Mission sectes est intervenue Ă plusieurs reprises auprĂšs
dâadministrations et dâassociations dans le cadre de la formation sur le
phénomÚne sectaire.
A ce titre, pour la huitiĂšme annĂ©e consĂ©cutive, lâĂcole
nationale de la magistrature (ENM) a organisĂ© une session dâune
semaine, animée par le chargé de mission sectes, à destination de
magistrats, français et étrangers, et de fonctionnaires des
administrations concernées par ce phénomÚne.
83
Par ailleurs, et pour la premiĂšre fois, des auditeurs de justice
ont, dans le cadre dâune activitĂ© dâouverture et de recherche, choisi le
thÚme de la protection des mineurs face au phénomÚne sectaire.
Commission dâaccĂšs aux documents administratifs (CADA)
Comme les années précédentes, un mouvement a sollicité la
communication des documents élaborés pour la session « sectes » au
titre de la législation CADA.
Il nâest pas inutile de rappeler que la CADA a, le 2 fĂ©vrier
2004, émis un avis défavorable aux demandes tendant à la
communication des noms et qualités des intervenants, ainsi que celui
des participants aux formations de 1999 Ă 2003, de mĂȘme quâĂ la
demande tendant Ă lâobtention des courriers adressĂ©s aux participants
et aux intervenants par lâENM, pour la mĂȘme pĂ©riode, au motif que les
documents sollicités contenaient des éléments traduisant un
comportement dont la divulgation était susceptible de porter préjudice
aux personnes concernĂ©es, en application de lâarticle 6-II de la loi de
1978 modifiée.
La Mission sectes est réguliÚrement interpellée par diverses
associations pour obtenir communication des documents, en
application de la loi susvisée.
Ces requĂȘtes tendant Ă la communication de documents sont,
pour la plupart, Ă©tablies de maniĂšre identique, mais elles nâen
nécessitent pas moins un examen et un suivi régulier de la part de la
Mission sectes.
En outre, divers contentieux ont été initiés par un mouvement,
aux fins, notamment, dâannulation des deux circulaires du ministĂšre
de la Justice, en date du 29 décembre 1996 et du 1
er
février 1998,
relatives Ă la lutte contre les atteintes aux personnes et aux biens
commises dans le cadre de mouvements Ă caractĂšre sectaire.
Le Conseil dâĂtat a, par arrĂȘt du 18 mai 2005, rejetĂ© la requĂȘte
de lâassociation, considĂ©rant, dâune part :
- que la transmission en annexe de la liste des mouvements sectaires,
extraite du rapport de la Commission dâenquĂȘte parlementaire sur les
84
sectes en France «
ne revĂȘt quâun caractĂšre informatif
61
et ne traduit
pas une volontĂ© de se rĂ©approprier le contenu de cette listeâŠ. »
, que
lesdites circulaires ne contiennent aucune disposition Ă caractĂšre
législatif ou réglementaire ;
-
« quâeu Ă©gard aux risques que peuvent prĂ©senter les pratiques de
certains organismes communĂ©ment appelĂ©s sectes, alors mĂȘme, que
ces mouvements prétendent également poursuivre un but religieux, ces
associations ne sont pas fondées à soutenir que les circulaires
précitées méconnaßtraient le principe de la liberté religieuse⊠».
Cela Ă©tant, il doit ĂȘtre relevĂ© que, par circulaire du Premier
ministre du 27 mai 2005 relative à la lutte contre les dérives sectaires,
il a été demandé à chaque département ministériel de procéder à la
mise à jour des circulaires avant le 31 décembre 2005, notamment en
Ă©vitant le recours Ă ladite liste au profit de lâutilisation des faisceaux
de critÚres (tels que précisés dans la circulaire du 29 février 1996).
Par dĂ©pĂȘche circulaire du 22 novembre 2005, la circulaire du
Premier ministre a Ă©tĂ© diffusĂ©e Ă lâensemble des procureurs gĂ©nĂ©raux
et mise sur le site intranet Justice, rubrique DACG.
Activité juridictionnelle
En matiÚre pénale
Trois dĂ©cisions mĂ©ritent dâĂȘtre signalĂ©es dans le domaine de
la lutte contre les atteintes aux personnes et aux biens commises par
des mouvements Ă caractĂšre sectaire : il sâagit de lâaffaire dite
«
Néophare
», celle concernant « la
kinésiologie
», la troisiÚme dite de
la méthode «
Ryke Hamer
».
-
affaire dite « Néophare »
Nonobstant la premiĂšre condamnation dâun mouvement
sectaire en tant que personne morale
62
, il doit ĂȘtre rappelĂ© que, depuis
61
Le Conseil dâĂtat a rejetĂ©, le 6 octobre 1999, le recours de la
Communauté
de la Thébaïde
, Ă lâencontre de la circulaire du 29 fĂ©vrier 1996, au motif que
cette circulaire ne contenait aucune disposition à caractÚre réglementaire.
62
Le 28 septembre 2004, la cour de cassation a confirmé la condamnation
prononcĂ©e par la Cour dâappel de Paris, le 13 octobre 2003, Ă lâencontre de
85
la promulgation de la loi du 12 juin 2001 tendant Ă renforcer la
prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte
aux droits de lâhomme et aux libertĂ©s fondamentales, le Tribunal
correctionnel de Nantes a eu Ă connaĂźtre de lâapplication de lâarticle
223-15-2 du code pĂ©nal rĂ©primant le dĂ©lit dâabus de faiblesse.
M. Arnaud Mussy, responsable de la communauté
Néophare
a
Ă©tĂ© condamnĂ© par la juridiction nantaise Ă trois ans dâemprisonnement
avec sursis de ce chef. Sur appel de lâintĂ©ressĂ©, la Cour dâappel de
Rennes a confirmé, le 12 juillet 2005, le jugement y rajoutant, une
peine dâamende de 10.000 euros. Cette dĂ©cision est aujourdâhui
dĂ©finitive, en lâabsence de pourvoi
63
.
-
- affaire dite de « la kinésiologie »
Ce dossier est emblĂ©matique, en ce sens, quâil ne sâagit pas
dâun procĂšs concernant une structure sectaire, mais dâadhĂ©rents Ă une
doctrine thérapeutique non réglementée qui les ont conduits à priver
de soins un enfant de 16 mois, en ayant entraßné la mort.
Les parents de lâenfant ont Ă©tĂ© condamnĂ©s par la cour
dâassises du FinistĂšre, le 3 juin 2005, Ă la peine de cinq ans
dâemprisonnement, dont cinquante-deux mois avec sursis et mise Ă
lâĂ©preuve pendant trois ans. Par ailleurs, trois mĂ©decins ont Ă©tĂ©
condamnĂ©s Ă la peine de 3000 euros dâamende pour non-assistance Ă
personne en danger.
-
- affaire dite de « la méthode Ryke Hamer »
A titre liminaire, il doit ĂȘtre rappelĂ© en quoi consiste cette
théorie qui, malgré le décÚs de patients adhérant à cette thÚse, fait
lâ
Association spirituelle de lâĂglise de scientologie dâIle-de-France
, en tant
que personne morale, pour traitement dâinformations nominatives malgrĂ©
lâopposition lĂ©gitime de la personne
; le prĂ©sident de lâassociation a
Ă©galement Ă©tĂ© condamnĂ© de ce chef ainsi que dâentrave Ă lâaction de la
CNIL(commission nationale informatique et libertés).
63
Au 25 janvier 2006, il a pu ĂȘtre comptabilisĂ© seize procĂ©dures ouvertes du
chef dâabus de faiblesse et autres chefs dont la procĂ©dure
Néophare
. Sur ces
seize procĂ©dures, deux enquĂȘtes prĂ©liminaires ont Ă©tĂ© classĂ©es sans suite, un
non lieu partiel a Ă©tĂ© rendu du chef dâabus de faiblesse, une information
judiciaire a été clÎturée par une ordonnance de non-lieu, les onze autres
informations judiciaires sont en cours.
86
encore lâobjet dâun soutien inconditionnel de particuliers par des
pétitions en faveur de Ryke Hamer.
Cette méthode a été élaborée en 1981 par Ryke Hamer sous le
nom « loi dâAirain du cancer » Ă partir de son expĂ©rience personnelle,
lâintĂ©ressĂ© ayant lui-mĂȘme dĂ©veloppĂ© un cancer des testicules Ă la
suite du décÚs de son fils, Dirk, tué par balle en 1978.
Ryke Hamer, médecin en Allemagne, explique que le cancer
est dû à un choc psychologique, conflit dramatique vécu dans
lâisolement, appelĂ© « Dirk Hamer Syndrome » qui entraĂźne, au niveau
du cerveau, lâapparition du foyer dit de Hamer, dĂ©celable grĂące Ă un
scanner cérébral. La teneur du conflit détermine la localisation du
cancer ainsi que celle du foyer Hamer, lâentretien avec le malade
permet de dĂ©terminer la cause du conflit, de le rĂ©soudre et dâentraĂźner
la guĂ©rison, le foyer de Hamer sâentourant alors dâun ĆdĂšme de
guérison visible au scanner. Ryke Hamer écarte toute intervention
mĂ©dicale, chimiothĂ©rapie, radiothĂ©rapie et mĂȘme usage de la
morphine, seule la prise de cortisone étant préconisée.
Le 10 mai 1996, une information judiciaire a été ouverte, au
Tribunal de grande instance de Chambéry, sur plainte du Conseil
dĂ©partemental de lâOrdre des mĂ©decins, pour exercice illĂ©gal de la
médecine, non-assistance à personne en danger et escroquerie.
Lâinformation Ă©tablissait quâune association «
Stop au
cancer » avait été créée en France, afin de promouvoir la théorie
susvisĂ©e, dâorganiser des confĂ©rences et des comitĂ©s locaux. Il Ă©tait
par ailleurs dĂ©montrĂ© quâen 1996, 186 personnes avaient pris contact
avec lâassociation, une centaine avait eu un rendez-vous et une
centaine avait fourni un scanner. Pour certains, il était conseillé de
refuser les soins traditionnels et du Médrol leur avait été prescrit.
Si Ryke Hamer, interdit dâexercer en Allemagne depuis 1986,
bĂ©nĂ©ficiait dâune relaxe des chefs dâexercice illĂ©gal de la mĂ©decine, de
complicité de ce délit et de non-assistance à personne en danger par
lâun des membres de lâassociation, par dĂ©cision du tribunal
correctionnel du 17 mars 2000, il était condamné, par défaut, à la
peine de dix-huit mois dâemprisonnement, dont neuf mois avec sursis,
et Ă une amende de 50.000 francs, pour complicitĂ© dâexercice illĂ©gal
de la mĂ©decine commis par un autre membre de lâassociation et
escroquerie ; lâintĂ©ressĂ© ayant continuĂ© Ă avoir des contacts, jusquâen
87
1995, avec ce membre, donnait des conseils sur lâapplication de sa
thĂ©orie et sur lâinterprĂ©tation des scanners. Par ailleurs, et alors quâil
Ă©tait interdit dâexercer en Allemagne, quâil nâĂ©tait inscrit sur aucun
tableau en France, Ryke Hamer continuait à se prévaloir de sa qualité
de médecin pour diffuser sa théorie et convaincre les malades de
lâappliquer, percevant notamment par mandats internationaux la
somme de 200.000 francs, entre 1994 et 1996.
La Cour dâappel de ChambĂ©ry, par arrĂȘt rĂ©putĂ© contradictoire,
du 1
er
juillet 2004, condamnait Ryke Hamer pour escroquerie et
complicitĂ© dâexercice illĂ©gal de la mĂ©decine Ă la peine de trois ans
dâemprisonnement, eu Ă©gard Ă deux condamnations en Allemagne
pour des faits similaires, Ă la particuliĂšre gravitĂ© des faits Ă lâorigine
de drames familiaux épouvantables, de nombreuses personnes étant
dĂ©cĂ©dĂ©es dans dâatroces souffrances, laissant leurs proches dĂ©sespĂ©rĂ©s
et rĂ©voltĂ©s. La Cour dâappel dĂ©livrait un mandat dâarrĂȘt Ă lâencontre de
Ryke Hamer, ce dernier ayant toujours refusé de comparaßtre devant
les juridictions françaises, nâhĂ©sitant pas toutefois Ă se rĂ©pandre en
Ă©crits Ă caractĂšre anti-sĂ©mite, montrant ainsi le peu de cas quâil fait de
la personne humaine.
Le 31 mai 2005, la chambre criminelle de la Cour de cassation
a rejeté le pourvoi en cassation de Ryke Hamer.
Par arrĂȘt du 9 fĂ©vrier 2006, la Cour dâappel de Paris a admis
Ryke Hamer au bénéfice de la libération conditionnelle à compter du
15 février 2006.
En matiĂšre civile
Le contentieux civil étant abondant, notamment dans le cadre
du contentieux familial (divorce), lâarrĂȘt rendu par la Cour dâappel
dâAix-en-Provence, le 8 septembre 2005, a retenu lâattention de la
Mission sectes.
La Cour a estimĂ© quâil y avait lieu, dans lâintĂ©rĂȘt de lâenfant,
de faire droit Ă la demande du pĂšre tendant Ă lâinterdiction dâemmener
lâenfant sur les lieux du culte des
Témoins de Jéhovah,
en revanche, il
ne peut ĂȘtre interdit Ă la mĂšre de mettre lâenfant en prĂ©sence
dâadeptes, ceux-ci pouvant ĂȘtre Ă©galement des amis quâelle a droit de
fréquenter librement ; cette juridiction précise notamment que les
88
obligations et les interdictions imposées à un petit enfant de 5 ans ne
sont pas appropriées au développement psychologique de celui-ci qui
nâest pas en Ăąge de faire la part des choses. Elles lâamĂšnent Ă un rejet
des idées de son pÚre, qui ne sont pas conformes à celles de sa mÚre.
Par ailleurs, il est dommageable pour lâenfant de ne pas bĂ©nĂ©ficier,
comme ses camarades dâĂ©cole, des rĂ©jouissances des fĂȘtes de NoĂ«l et
de PĂąques qui ont, pour beaucoup, perdu leur caractĂšre religieux mais
sont souvent lâoccasion de rĂ©unions familiales qui participent Ă
lâĂ©panouissement de lâenfant et Ă son intĂ©gration dans la sociĂ©tĂ©.
ANALYSE DE LA MISSION SECTES
Les travaux de la Mission sectes ont porté essentiellement,
pour lâannĂ©e 2005, sur le suivi des mouvements pseudo-guĂ©risseurs,
ainsi que sur certains organismes de formation professionnelle. Ces
derniers reposent sur une démarche de développement personnel des
participants sans lâacquisition de compĂ©tences ou de qualifications
professionnelles reconnues, ou poursuivent des objectifs Ă caractĂšre
(psycho) thérapeutique, philosophique ou spirituel.
Les actions proposées dans ce cadre ne sont pas susceptibles
dâĂȘtre considĂ©rĂ©es comme entrant dans le champ lĂ©gal de la formation
professionnelle.
A cet Ă©gard, la Mission sectes et la DĂ©lĂ©gation gĂ©nĂ©rale Ă
lâemploi et Ă la formation professionnelle travaillent sur cette
problématique. Les procureurs de la République doivent veiller à ce
que les dispositions du code du travail (articles L. 920-6 et suivants)
soient strictement appliquées. En effet, le marché de la formation
professionnelle gĂ©nĂšre prĂšs de 22 milliards dâeuros de flux financiers,
et il est recensé prÚs de 45.000 organismes prestataires, ces derniers
pouvant par ailleurs bĂ©nĂ©ficier dâun rĂ©gime dâexonĂ©ration de TVA.
En outre, ainsi que lâobserve la MIVILUDES, des
groupuscules ont Ă©tĂ© dĂ©tectĂ©s, Ă lâoccasion dâagissements attentatoires
à la liberté individuelle. Cette émergence nécessite une vigilance
accrue des pouvoirs publics, notamment au sein des cellules de
vigilance départementales auxquelles participent les magistrats du
parquet et lors des réunions organisées par les correspondants sectes.
Il serait, à cet égard, opportun que ces réunions soient réactivées sur le
89
ressort de chaque Cour dâappel et fassent lâobjet de comptes-rendus Ă
la DACG.
Enfin, il doit ĂȘtre observĂ© quâil existe encore, malgrĂ© une prise
en compte par les pouvoirs publics du phénomÚne sectaire, des
rĂ©ticences de la part de lâautoritĂ© judiciaire Ă considĂ©rer les
dĂ©clarations des adeptes victimes, lesquels nâapportent pas de
tĂ©moignages suffisamment circonstanciĂ©s Ă lâappui de leurs plaintes.
LâĂ©change dâinformations avec les services dĂ©concentrĂ©s et les
associations de défense des victimes des sectes, tel que précisé dans la
circulaire du 1
er
fĂ©vrier 1998, doit ĂȘtre poursuivi, notamment
sâagissant du cas des enfants et des adolescents embrigadĂ©s dans les
mouvements sectaires, afin de leur assurer la protection qui leur est
due.
Direction de la Protection judiciaire de la jeunesse
Un partenariat interne au ministĂšre
En partenariat avec la Mission sectes de la Direction des
affaires criminelles et des grĂąces, la Direction de la protection
judiciaire de la jeunesse (DPJJ) a notamment effectué le suivi régulier
des dossiers dâassistance Ă©ducative relatifs Ă des mineurs suivis par les
juges des enfants et présentant un lien direct avec une problématique
sectaire. Au cours de lâannĂ©e 2005, une dizaine de « dossiers
vivants », concernant une centaine de mineurs, a ainsi fait lâobjet dâun
suivi et dâune rĂ©actualisation, sâaccompagnant dâune remise Ă jour de
la synthÚse des mineurs concernés. Parmi les pistes de travail
susceptibles dâĂȘtre empruntĂ©es au cours de lâannĂ©e 2006, semble
devoir ĂȘtre privilĂ©giĂ©e lâinstauration dâun correspondant sectes PJJ au
sein de chacune des Directions régionales de la protection judiciaire
de la jeunesse, en lien avec le correspondant des Cours dâappel.
Formation
Quelques agents de la protection judiciaire de la jeunesse ont
participĂ© au titre de lâannĂ©e 2005 Ă la session de formation « les
90
sectes » qui sâest dĂ©roulĂ©e Ă lâĂcole nationale de la magistrature Ă
Paris.
Une meilleure diffusion de lâinformation relative Ă cette
formation semble devoir ĂȘtre envisagĂ©e au sein de la DPJJ, le faible
nombre de participants sâexpliquant par la mĂ©connaissance, ou la
connaissance tardive, de lâexistence de cette formation.
91
22-2 MINISTĂRE DES AFFAIRES ĂTRANGĂRES
En 2005, le ministÚre des Affaires étrangÚres a poursuivi son
travail dâexplication et dâillustration de la politique française de lutte
contre les dérives sectaires. Ces actions ne sont souvent pas bien
comprises par beaucoup de nos interlocuteurs pour lesquels la notion
mĂȘme de « secte » est inconnue ; ceci est particuliĂšrement vrai dans le
monde anglo-saxon et en Scandinavie oĂč la multitude dâĂ©glises
dâobĂ©dience protestante brouille la vision quâont les pouvoirs publics
aussi bien que lâopinion des dĂ©rives sectaires.
Ce département ministériel et les services diplomatiques
français ont organisĂ© en 2005 deux missions de la MIVILUDES, lâune
Ă Londres, lâautre Ă Munich.
La mission effectuée à Londres
, le 11 février 2005, a permis
aux responsables de la MIVILUDES dâexposer aux responsables
britanniques lâaction des pouvoirs publics français en matiĂšre de lutte
contre les dérives sectaires et de prendre connaissance des modalités
de lâaction des autoritĂ©s britanniques dans ce domaine. La
« charity
commission »
64
sâassure du caractĂšre intĂšgre des Ćuvres et veille Ă
leur bonne gestion ; elle nâa pas le sentiment que le phĂ©nomĂšne
sectaire soit trÚs répandu au Royaume Uni. La direction du
Home
Office
chargée du dialogue avec toutes les religions
(« cohesion and
fair unit »)
ne suit les sectes que de maniĂšre marginale. Enfin
lâassociation
« Inform
» dépendant de la
London School of Economics
sâefforce de rĂ©unir des informations objectives sur les nouveaux
mouvements religieux et les
« cults »
, terme préféré à celui de
« sects »
. Ses informations proviennent des groupes eux-mĂȘmes ou de
ceux qui sâen estiment victimes.
« Inform »
ne porte pas de jugements
publics et ne conseille pas le gouvernement ; elle se contente de
signaler les cas qui lui paraissent pouvoir présenter un réel danger
(lorsque des enfants peuvent ĂȘtre victimes dâabus notamment). Son
approche ouverte et non dénonciatrice lui vaut des critiques de la part
de ceux qui soutiennent ces mouvements comme de la part de ceux
qui les combattent, mais son atout réside dans sa capacité à mobiliser
64
Organisme public indĂ©pendant chargĂ© de contrĂŽler lâactivitĂ© des
associations dâutilitĂ© publique, dont les organismes religieux.
92
une grande quantitĂ© dâinformations et une documentation variĂ©e
permettant dâavoir une vision prĂ©cise des phĂ©nomĂšnes sectaires.
La mission Ă Munich,
les 21 et 22 avril, a permis aux
responsables de la MIVILUDES de rencontrer les administrateurs
bavarois du ministĂšre de lâIntĂ©rieur et du ministĂšre de lâEducation et
des Cultes chargés de ces questions ainsi que des responsables de la
Ville de Munich et des Ăglises catholiques et luthĂ©riennes. Les
approches et les problÚmes rencontrés en France et en BaviÚre sont
trĂšs proches, avec des situations souvent comparables (effacement des
« grandes » sectes telles
Moon, Raël
ou
Hare Krishna
; apparition de
groupuscules beaucoup plus difficiles Ă cerner
; apparition de
groupuscules satanistes). Il a été convenu que les échanges
dâinformations devraient se poursuivre par une venue Ă Paris dâune
délégation bavaroise.
ParallĂšlement, le travail dâexplication de notre action au
niveau diplomatique sâest poursuivi en particulier dans les enceintes
internationales en marge de conférences consacrées à des thÚmes
pouvant concerner lâattitude Ă avoir envers les mouvements sectaires
(confĂ©rences organisĂ©es Ă Varsovie par le Conseil de lâEurope en mai,
et par lâOSCE Ă Cordoue en juin). La venue en France de
représentants des grandes organisations internationales est aussi mise
systématiquement à profit pour présenter et expliquer notre action. Ce
fut le cas en particulier lors de la visite de Mme Jahangir (18-29
septembre 2005), rapporteuse spéciale sur la liberté de conviction et
de religion de la Commission des droits de lâhomme des Nations-
Unies ainsi que lors de la venue de M. Gil RoblĂšs, commissaire aux
droits de lâhomme du Conseil de lâEurope (5-20 septembre 2005).
Une des actions les plus significatives au plan international a
Ă©tĂ© lâoctroi le 13 juillet par le Conseil de lâEurope, du statut
participatif à la Fédération européenne des centres de recherche et
dâinformation sur le sectarisme (FECRIS). Intervenant aprĂšs plus de
trois ans de blocages et de batailles de procĂ©dures exclusivement dus Ă
des manĆuvres probablement pilotĂ©es en sous-main par divers
mouvement sectaires, cette mesure marque un coup dâarrĂȘt bienvenu Ă
lâinterventionnisme de certains mouvements sectaires dans plusieurs
instances internationales. Elle a eu un grand retentissement dans les
milieux sectaires et dans ceux qui cherchent Ă contrer leur influence.
93
22-3
MINISTĂRE DE LâINTĂRIEUR ET DE
LâAMĂNAGEMENT DU TERRITOIRE
En raison du caractÚre protéiforme du phénomÚne sectaire et
de la dangerositĂ© de lâactivitĂ© de certains groupes, le ministĂšre de
lâIntĂ©rieur et de lâAmĂ©nagement du territoire exerce un suivi vigilant
de lâĂ©volution du paysage sectaire.
LâannĂ©e 2005 a confirmĂ© des tendances observĂ©es en 2004.
Câest le cas notamment du dĂ©veloppement des dĂ©viances guĂ©risseuses.
De fait, les groupes et les réseaux articulés autour de pratiques
thérapeutiques alternatives prolifÚrent. Certains diffusent des
préceptes de traitement de maladies particuliÚrement dangereux pour
la santé des individus, comme par exemple le recours exclusif à la
priĂšre.
Dâautres constantes peuvent ĂȘtre relevĂ©es, comme le
développement de la mouvance chamaniste, qui propage des méthodes
de développement personnel parfois trÚs dangereuses, telle le
« respirianisme » qui préconise de cesser toute alimentation solide.
La mouvance satano-gothique est également ancrée dans le
paysage sectaire. Le nombre de profanations satanistes dans les
cimetiÚres et dans les églises demeure important : 32 exactions ont
ainsi été relevées (29 en 2004). Le double suicide de deux
adolescentes imprégnées de culture gothique, à Ivry-sur-Seine (Val-
de-Marne) en septembre 2005, est également à déplorer.
De maniÚre générale, les actions de prosélytisme demeurent
dirigĂ©es vers les groupes dâindividus fragilisĂ©s. A cet Ă©gard, peut ĂȘtre
citĂ©e la poursuite dâopĂ©rations menĂ©es au nom de la lutte contre la
toxicomanie ou du soutien apporté aux personnes emprisonnées. Un
fait original a été constaté en 2005 puisque des jeunes des cités ont pu
faire lâobjet de tentatives dâapproche par certaines organisations aprĂšs
les violences urbaines du mois de novembre.
En complĂ©ment du travail de suivi et dâanalyse du phĂ©nomĂšne
des dérives sectaires, la Direction centrale des renseignements
gĂ©nĂ©raux (DCRG) continue Ă mener des actions dâinformation et de
94
formation destinĂ©es aux personnels de police et dâautres
administrations intéressées.
Outre des cycles réguliers de formation réservés aux policiers
mutés aux RG, une information est présentée dans quelques écoles de
gardiens de la paix, ainsi que â systĂ©matiquement â Ă lâEcole des
officiers. Des actions de sensibilisation aux dérives sectaires sont
Ă©galement menĂ©es en direction des personnels dâautres ministĂšres,
comme celui de la Justice pour les personnels duquel les
fonctionnaires des RG interviennent lors dâune session annuelle de
formation.
En 2006, pour une plus grande efficacité de la prévention et de
la lutte contre les dĂ©rives sectaires, le ministĂšre de lâIntĂ©rieur et de
lâAmĂ©nagement du territoire va continuer Ă adapter son dispositif Ă
lâĂ©volution du phĂ©nomĂšne sectaire, notamment en matiĂšre de recueil
et dâĂ©change des informations.
Au sein de la DCRG, un nouveau dispositif du suivi du
phĂ©nomĂšne sectaire va ĂȘtre mis en place afin, dâune part, dâamĂ©liorer
la dĂ©tection des dĂ©rives sectaires, et dâautre part, de permettre
lâĂ©laboration de donnĂ©es statistiques nationales affinĂ©es. Une
procédure de transmission accélérée par les départements de « fiches
dâalerte » signalant Ă la DCRG toute attitude individuelle, structure,
doctrine nouvelle qui intrigue ou inquiĂšte, sera ainsi mise en Ćuvre.
De plus, une évaluation du paysage sectaire sera effectuée tout au long
de lâannĂ©e Ă partir de lâanalyse des «
fiches de présentation
analytique
» des Directions départementales des renseignements
généraux qui enregistrent localement les dérives sectaires.
Par ailleurs, en 2006, dans le cadre du programme de
simplification de lâorganisation et du fonctionnement des
commissions administratives, la réorganisation du dispositif
partenarial mis en place localement pour lutter contre les dérives
sectaires sera menée à terme.
Une nouvelle instance, le «
conseil départemental de
prĂ©vention de la dĂ©linquance, dâaide aux victimes et de lutte contre la
drogue, les dérives sectaires et les violences faites aux femmes
», sera
mise en place. Elle sera chargĂ©e de dĂ©velopper lâĂ©change
dâinformations et de coordonner lâaction en matiĂšre de prĂ©vention et
de lutte contre les dérives sectaires. Afin de faciliter la détection de
95
cas de dérives sectaires, elle associera à ses travaux les services de
lâĂtat, ceux des collectivitĂ©s territoriales et les partenaires du milieu
associatif.
Un projet de décret fixant notamment les modalités de
composition, dâorganisation et de fonctionnement du conseil a Ă©tĂ©
prĂ©parĂ©, et devrait ĂȘtre soumis au Conseil dâĂtat au cours du premier
trimestre 2006.
96
22-4
MINISTĂRE DE LA DĂFENSE
Représentant le ministÚre de la Défense au sein de la
MIVILUDES, la gendarmerie nationale inscrit son action dans deux
domaines principaux :
-
le suivi et lâanalyse du phĂ©nomĂšne en apportant une attention
toute particuliĂšre Ă la protection des mineurs et aux
communautés qui adoptent un mode vie autarcique ;
-
la lutte contre les dĂ©rives constatĂ©es, dâinitiative ou sur saisine
de lâautoritĂ© judiciaire, en diligentant des enquĂȘtes relatives
aux violations de la loi et des rĂšglements ou aux atteintes Ă
lâordre public.
Evolution du phénomÚne
Le phénomÚne a continué au cours des derniers mois, à gagner
en nombre, en diversité et en complexité.
Les quelques grands mouvements bien connus demeurent trĂšs
présents et trÚs actifs, notamment dans les secteurs de la formation
professionnelle, du développement personnel ou du soutien scolaire,
mais la tendance générale, confirmée ces derniÚres années, est à la
multiplication de micro-structures. Ces derniĂšres sâorganisent de plus
en plus souvent de maniĂšre informelle et elles utilisent largement
lâ
Internet
comme vecteur de promotion, prouvant ainsi quâelles savent
sâadapter aux techniques modernes.
Un essor considérable des petites structures
Dans le seul domaine de la santĂ©, oĂč lâactivisme des
mouvements caractérisés par des dérives sectaires est le plus fort ces
derniÚres années, plusieurs milliers de nouvelles associations sont
déclarées annuellement au plan national. Toutes ne sont pas nocives
mais cet essaimage rend le contrĂŽle de plus en plus difficile : outre la
vĂ©rification de lâobjet dĂ©fini par les statuts, pour sâassurer quâil nâest
pas illicite, contraire aux lois, aux bonnes mĆurs ou ne porte pas
atteinte Ă lâintĂ©gritĂ© du territoire, une vigilance constante sâimpose
pour vĂ©rifier, si besoin est, que les agissements rĂ©els de lâassociation
97
ne diffĂšrent pas sensiblement des statuts et ne tombent pas sous le
coup dâune qualification pĂ©nale.
Une extraordinaire diversité des techniques et des méthodes proposées
On relĂšve que lâengouement pour les thĂ©rapies alternatives ne se
relùche pas. Dans ce cadre des « médecines parallÚles », la frontiÚre
entre méthodes tolérables ou inoffensives et pratiques nocives est
souvent difficile à établir avant que les dégùts ne soient commis. De
plus, de nombreuses pratiques proposées au public soulÚvent de
sérieuses interrogations.
-
une diversité au plan global, marquée néanmoins par des
tendances et un certain effet de mode : le
coaching
de
développement personnel, la popularité des massages sous
toutes les formes, lâutilisation de plantes hallucinogĂšnes,
notamment lâAyahuasca, ⊠La mise en oeuvre de ces
techniques a souvent révélé des dérives de type sectaire.
-
une diversité au plan individuel, les « thérapeutes » proposent
un panel de techniques de plus en plus large : Ă titre
dâexemples relevĂ©s sur lâ
Internet
, un animateur de stages
propose la méditation, le yoga, la voyance, les massages
tantriques, le
coaching
, lâaccompagnement psy (deuil,
rupture), la prĂ©paration et le suivi dâaccouchement, la gestion
du stress⊠Le sĂ©rieux dâhommes orchestres de cet acabit peut
naturellement ĂȘtre mis en doute, personne ne pouvant
prétendre maßtriser autant de domaines et en garantir
lâefficacitĂ©.
Des « thĂ©rapeutes ou praticiens » capables de sâadapter rapidement
aux techniques en vogue
La consultation des sites
Internet
et les signalements portĂ©s Ă
la connaissance des unités ne manquent pas de mettre en lumiÚre la
capacité de certains praticiens à rebondir rapidement et à se prévaloir
dâune grande expĂ©rience dans de nombreux domaines, la majoritĂ©
déclarant avoir longuement étudié et approfondi les thérapies
proposĂ©es, alors mĂȘme quâaucun systĂšme de validation nâexiste.
Cette tendance a de quoi inquiĂ©ter, notamment lorsque lâon
constate que certains organismes assurent des formations de praticiens
98
en quelques jours. On est alors en présence objective de pseudo-
thĂ©rapeutes autoproclamĂ©s susceptibles de sâorganiser en rĂ©seaux.
Des structures spécifiques en développement qui mettent en place
des échanges entre associations, conférenciers ou praticiens.
Quelques centres de formation sont devenus des fournisseurs
de moyens, assurant la promotion et lâorganisation des stages et des
conférences, mettant à disposition de praticiens connus pour leur
appartenance à des mouvements sectaires les locaux nécessaires à leur
activité et assurant la gestion financiÚre.
Inversement, il est signalé, dans quelques départements du
sud-ouest et du centre, que des thĂ©rapeutes sâappuient sur le rĂ©seau des
gĂźtes ruraux et des chambres dâhĂŽtes, pour proposer Ă la fois des
stages et un « tourisme vert », assortis le plus souvent de séances de
jeĂ»ne, dâeffort physique intense, puis de sĂ©ances rĂ©paratrices, au
double plan spirituel et physique.
LâInternet, support incontournable de propagande et de recrutement
Lâ
Internet
favorise des formes de prosélytisme multiples et il
permet surtout Ă leurs promoteurs une approche beaucoup plus
discrÚte. Les sites, les pages personnelles relatant les expériences et
les forums de discussion nâont cessĂ© de se multiplier ces derniĂšres
annĂ©es proposant dâinnombrables stages et confĂ©rences.
Lâ
Internet
facilite aussi les pratiques en réseaux constitués
dâindividus isolĂ©s au dĂ©part, mais qui se regroupent en fonction
dâaffinitĂ©s quant Ă leurs mĂ©thodes thĂ©rapeutiques ou
psychothérapeutiques.
Toutes ces derniĂšres tendances ont permis Ă de nombreux
groupuscules ou Ă des individus dâĂ©viter de se constituer en
association et dâavoir un siĂšge fixe. Cette maniĂšre dâagir
complique une nouvelle fois les contrÎles et constitue un réel
danger pour les « clients-patients » éventuels.
Principales dérives signalées ou observées
En 2005, alors que tout donne Ă penser que les risques se
multiplient, les signalements portés à la connaissance des unités de
99
gendarmerie par des particuliers ou par des Ă©lus restent, en nombre, Ă
peu prÚs équivalents aux années précédentes. Ils portent
essentiellement sur des atteintes aux biens (escroquerie) et des
atteintes aux personnes (abus de faiblesse, exercice illégal de la
médecine).
Dans le domaine de la santé
-
Lâattention des unitĂ©s a Ă©tĂ© une nouvelle fois appelĂ©e sur les
agissements de quelques associations ciblant notamment les drogués,
les personnes dĂ©pendantes de lâalcool. Ces structures proposent en
général des traitements palliatifs à base de plantes hallucinogÚnes,
sans aucun contrÎle médical, et sans aucune validation scientifique.
Il est à souligner que des investigations menées en 2004 et en
2005 avaient conduit Ă un classement de lâayahuasca (plante
hallucinogĂšne) comme produit stupĂ©fiant (arrĂȘtĂ© publiĂ© au journal
officiel du 3 mai 2005). La dangerosité réside dans le fait que des
distributeurs proposent des produits contrefaits dont les effets ne sont
pas déterminés.
-
Quelques associations, prÎnant notamment des régimes
hygiénistes, qui
a priori
ne posent pas de problĂšmes particuliers,
continuent dâaffirmer que le sida est une escroquerie mĂ©dicale et que
le virus nâest toujours pas dĂ©terminĂ©. Ils rĂ©futent de ce fait les
thérapies existantes et proposent aux malades des prises en charge non
conformes aux données de la science. Ces mouvements affirment
également que les traitements chimiques ne sont pas utiles pour
soigner un cancer ou une leucĂ©mie, sâappuyant sur des tĂ©moignages de
guérisons spectaculaires, témoignages parfois sincÚres mais
naturellement sans la moindre preuve ni la moindre validité
scientifique.
-
Des grands-parents ont dĂ©noncĂ© la situation dâun jeune enfant
dont les parents sont adeptes dâun mouvement prĂŽnant la mĂ©ditation
spirituelle : les parents soumettaient leur enfant à un régime végétarien
trĂšs strict et lâobligeait Ă pratiquer quotidiennement la mĂ©ditation
durant de longues heures, parfois les yeux bandés.
Dans le domaine de lâĂ©ducation des enfants
-
Des unités de gendarmerie ont été alertées sur la situation
dâenfants recevant une scolaritĂ© au sein dâune communautĂ© fermĂ©e et
100
qui Ă©taient soumis Ă des rĂšgles dâĂ©ducation trĂšs dures (coupure de la
famille, punitions corporelles).
Domaines divers
-
En région Auvergne, un magnétiseur-thérapeute a réussi au fil
des mois à fidéliser de nombreux adeptes (200 environ) et à les guider
vers des rencontres collectives trÚs coûteuses visant à les aider à faire
face à leurs difficultés de tous ordres. La plupart se sont endettés pour
suivre ces réunions et acheter des biens au « gourou ». Certains ont
perdu leur emploi et dâautres ont divorcĂ©.
-
Dans le sud-est, des élus et des familles se sont inquiétés des
agissements dâune association proposant une aide aux Ă©trangers
voulant établir un commerce ou une entreprise en France. AprÚs
quelques mois, les biens et les investissements dâun adepte ont Ă©tĂ©
dĂ©tournĂ©s au profit des dirigeants de lâassociation.
-
Les pratiques de quelques associations proposant des
randonnées dans le sud-ouest et le sud-est de la France soulÚvent des
interrogations du public. En effet, face Ă lâengouement suscitĂ© par ce
type dâactivitĂ© ces derniĂšres annĂ©es, quelques associations ou
ressortissants étrangers se sont emparés du créneau pour proposer des
séjours thématiques associant la randonnée à la méditation, au
jeĂ»ne,⊠Il est fait Ă©tat de quelques situations oĂč ces stages seraient
lâoccasion dâun prosĂ©lytisme actif ou dâune incitation Ă des Ă©changes Ă
caractĂšre sexuel.
-
Un pseudo-guérisseur avait réussi à fidéliser une poignée
dâadeptes, Ă les manipuler et Ă les guider vers des soirĂ©es privĂ©es puis
à les soumettre à sa volonté leur imposant ou leur faisant subir de
graves agressions sexuelles.
-
Les diverses catastrophes et les événements des banlieues en
novembre 2005 ont donnĂ© lâoccasion Ă quelques mouvements, y
compris parmi les plus structurĂ©s sur le plan international, dâinvestir
une nouvelle fois le champ humanitaire afin de soigner leur image et Ă
quelques petites associations de « surfer » sur lâactualitĂ© en participant
activement Ă des collectes de fonds dont lâutilisation reste dans un flou
total.
Ces situations témoignent une nouvelle fois de la diversité des
dĂ©rives auxquelles peuvent ĂȘtre confrontĂ©s les pouvoirs publics.
101
Bilan judiciaire
Si le nombre dâaffaires recensĂ©es nâa guĂšre Ă©voluĂ©, le suivi
judiciaire sâest en revanche sensiblement amĂ©liorĂ©. Ainsi, une
quarantaine dâenquĂȘtes judiciaires relatives Ă des mouvements
connaissant ou pouvant connaßtre des dérives sectaires ont-elles été
diligentĂ©es ou ont dĂ©butĂ© au cours de lâannĂ©e 2005 contre une
trentaine lâannĂ©e prĂ©cĂ©dente.
Ces enquĂȘtes, menĂ©es dâinitiative ou sur saisine de lâautoritĂ©
judiciaire, ont essentiellement porté sur des infractions de :
-
escroquerie et abus de faiblesse ;
-
exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie ;
-
agressions sexuelles.
Lâanalyse de la typologie des victimes, mĂȘme si elle porte sur
une population relativement peu nombreuse, permet de souligner que
les atteintes concernent trÚs majoritairement des personnes fragilisées
(dépressives, dépendantes, suicidaires), des personnes vivant seules,
plus de femmes que dâhommes, et un fort pourcentage de mineurs,
voire dâenfants handicapĂ©s, ce qui nâest pas sans mettre en relief la
distance entre le discours humanitaire et généreux de ces organisations
et la réalité de leurs pratiques.
Enfin, de nombreuses enquĂȘtes ont Ă©galement Ă©tĂ© diligentĂ©es
pour des faits de profanation et de dégradations de lieux de culte, faits
en nette augmentation en 2005 (208 actes en 2005 contre 130 en
2004).
De nombreux faits constituent des actes racistes et
xĂ©nophobes, dâautres sont imputables Ă des jeunes dĂ©sĆuvrĂ©s, nâayant
plus de repÚres moraux, agissant par haine envers la société, par
mimétisme ou sans explication solidement établie.
Pour autant, il ne semble pas exister actuellement, de structure
sataniste active caractérisée sur le territoire national. Cette mouvance
est surtout prĂ©sente sur lâ
Internet
et on recense ponctuellement des
petits groupes informels de mineurs ou de jeunes adultes qui justifient
leurs actes par un mĂ©lange confus dâidĂ©ologies gothique, sataniste et
néo-nazie.
102
22-5
MINISTERE
DE
LâECONOMIE,
DES FINANCES ET DE LâINDUSTRIE
Direction générale des impÎts
La Direction générale des impÎts (DGI) a récemment fait
procéder à un recensement des procédures de contrÎle fiscal intéressant
les personnes physiques ou morales susceptibles de relever du domaine
dâintervention de la MIVILUDES.
Une telle opération présente toutefois un caractÚre né-
cessairement alĂ©atoire dĂšs lors que les applications mises en Ćuvre par la
DGI pour lâexercice de ses missions dâassiette et de contrĂŽle ne
comportent, par hypothÚse, aucun élément de nature à permettre
ab initio
lâidentification de ces entitĂ©s.
Ainsi, compte tenu du champ de compétence et des modalités
dâintervention de la DGI, certains contrĂŽles visant des secteurs dâactivitĂ©
identifiés comme sensibles par la MIVILUDES (formation profession-
nelle, dĂ©veloppement personnel, guĂ©risseursâŠ) peuvent avoir portĂ© sur
des entités dont les éventuelles dérives sectaires sont demeurées
inconnues du service vérificateur.
Inversement, les vérifications dont certaines entités signalées
comme sectaires peuvent faire lâobjet sont susceptibles de conduire Ă
des rectifications mineures ou de nature essentiellement technique,
non rĂ©vĂ©latrices dâune volontĂ© de fraude. En effet, sujets Ă une exposition
mĂ©diatique rĂ©currente, ces mouvements peuvent ĂȘtre amenĂ©s Ă privilĂ©-
gier, sur le plan fiscal, un comportement
a priori
peu contestable.
Sous ces rĂ©serves, il apparaĂźt, Ă ce stade, quâune quarantaine de
contrĂŽles fiscaux portant sur des personnes ou organismes oeuvrant dans
des secteurs susceptibles de donner lieu à des dérives sectaires a été en-
gagée au cours des cinq derniÚres années, donnant lieu à des impositions
supplĂ©mentaires de toute nature dâun montant total de prĂšs de 3 milli
ons
dâeuros, assorties de 1,5 millions dâeuros de pĂ©nalitĂ©s.
103
Un examen approfondi des circonstances particuliĂšres Ă
chaque affaire sera prochainement entrepris par l'administration
centrale afin de tenter dâĂ©tablir une typologie des motifs d'engagement
de ces contrÎles, de la nature des rectifications et des pénalités
proposées, ainsi que des suites contentieuses de ces affaires.
Direction générale des douanes et des droits indirects
En 2005, lâaction de la douane dans le domaine de la lutte
contre les dérives sectaires s'est inscrite dans la continuité des actions
entreprises au cours des années précédentes.
En effet, comme il a été indiqué à l'occasion d'une question
écrite posée à l'Assemblée nationale, l'action de la Direction générale
des douanes et droits indirects (DGDDI) se manifeste pour l'essentiel
selon deux axes principaux :
- dâune part, par le recueil de renseignements relatifs aux
dérives sectaires,
- dâautre part, par lâinformation et la sensibilisation des
services douaniers opérationnels à ces phénomÚnes, à leurs
caractéristiques économiques et financiÚres ainsi qu'à leur dimension
transfrontaliĂšre.
Recueil du renseignement relatif aux dérives sectaires
Les diverses missions incombant Ă la douane ne lui permettent
que rarement d'appréhender directement le phénomÚne sectaire et de
constater des agissements répréhensibles pouvant s'apprécier comme
résultant de dérives sectaires.
Pourtant, chaque fois qu'Ă l'occasion de l'exercice de ses
missions classiques liées à la police des marchandises, au contrÎle des
aspects financiers des transactions commerciales et des flux physiques
de capitaux, la douane se trouve en situation dâobtenir des
renseignements relatifs Ă des faits susceptibles de constituer des
dérives de type sectaire, elle adresse, via la Direction nationale du
renseignement et des enquĂȘtes douaniĂšres (DNRED), des rapports
d'information Ă la MIVILUDES.
Plusieurs constatations ont ainsi fait l'objet d'un signalement Ă
la Mission au cours de l'année 2005.
104
Information et sensibilisation des personnels de la DGDDI dans le
domaine des dérives sectaires
La sensibilisation des services douaniers sur lâimportance de
leur rĂŽle en matiĂšre de collecte et de transmission dâinformations
relatives aux dérives sectaires s'est poursuivie en 2005.
Les contacts en ce sens entre la MIVILUDES et la DGDDI
sont maintenus et renforcés.
La documentation élaborée par la MIVILUDES est ainsi tenue
à la disposition des services opérationnels ; le
publié début janvier 2005 à la
Documentation française, est notamment accessible via l'Intranet du
ministĂšre des Finances.
105
22-6 MINISTĂRE DE LâĂDUCATION NATIONALE,
DE LâENSEIGNEMENT SUPĂRIEUR
ET DE LA RECHERCHE
Cellule chargée de la prévention des phénomÚnes sectaires
dans lâĂ©ducation
A la suite de la publication du rapport parlementaire « Gest-
Guyard » qui soulignait les faiblesses du dispositif de protection des
élÚves au sein du systÚme éducatif, une cellule spécialisée, la Cellule
chargée de la prévention des phénomÚnes sectaires (CPPS), a été créée
depuis le 1
er
septembre 1996, au sein de la Direction des affaires
juridiques du ministĂšre de lâĂducation nationale
65
.
Cette cellule est composée de trois personnes : un inspecteur
gĂ©nĂ©ral de lâĂducation nationale, un inspecteur de lâadministration de
lâĂducation nationale et de la recherche et une secrĂ©taire. Elle dispose
dâun rĂ©seau de correspondants acadĂ©miques nommĂ©s par leur recteur,
pour la plupart des inspecteurs pédagogiques régionaux chargés des
problĂšmes de vie scolaire, quelquefois des proviseurs en charge du
mĂȘme secteur. De plus, les inspecteurs dâacadĂ©mie (IA) sont trĂšs
sensibilisés au problÚme des phénomÚnes sectaires et disposent du
rĂ©seau des inspecteurs de lâEducation nationale (IEN) qui contrĂŽlent
lâenseignement du premier degrĂ©. Ainsi, lâIA de LozĂšre, le moins
peuplé des départements métropolitains, est entouré de trois IEN.
Tous les correspondants sont réunis une fois par an afin de
faire le point sur la situation et de préciser les modes et les conditions
dâintervention face aux diffĂ©rents problĂšmes. Ainsi, lâan dernier, un
rassemblement organisĂ© Ă lâEcole supĂ©rieure de lâĂducation nationale
(ESEN) a porté sur le thÚme du contrÎle des élÚves instruits dans les
familles et des écoles privées hors contrat.
La CPPS a particuliÚrement axé son effort en 2005 sur le
contrÎle des enfants instruits à domicile ou dans des établissements
65
La circulaire n°2002-120 du 29 mai 2002 précise les missions de la CPPS
et prĂ©sente le dispositif de lutte contre les dĂ©rives sectaires dans lâEducation
nationale
106
privés hors contrat (environ 10.000 au total). Plus de 1000 contrÎles
ont ainsi Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s par des personnels dâinspection (en application de
la loi du 18 décembre 1998 et du décret du 23 mars 1999 relatif aux
contenus des connaissances requis des enfants instruits dans la famille
ou dans des établissements privés hors contrat). Dans quelques cas
(rares), la famille a Ă©tĂ© amenĂ©e Ă inscrire lâĂ©lĂšve dans un Ă©tablissement
public ou privé sous contrat.
En avril 2005, la CPPS a organisĂ© Ă lâĂcole supĂ©rieure de
lâĂ©ducation nationale de Poitiers (ESEN) une formation destinĂ©e Ă
deux personnels dâinspection par acadĂ©mie (un pour le primaire, un
pour le secondaire) et aux correspondants académiques de la CPPS,
afin de mieux les préparer à ce type de contrÎles. Il convient de noter
que pour les établissements privés hors contrat, ce contrÎle ne vise
quâĂ vĂ©rifier les conditions de dĂ©roulement de lâenseignement et non Ă
en Ă©valuer la qualitĂ©. Lâarticle L.444-2 du code de lâĂ©ducation dispose
en effet que « le contrĂŽle de lâĂtat sur les Ă©tablissements privĂ©s qui ne
sont pas liĂ©s Ă lâĂtat par contrat se limite aux titres exigĂ©s des
directeurs et des maĂźtres, Ă lâobligation scolaire, Ă lâinstruction
obligatoire, au respect de lâordre public et des bonnes mĆurs, Ă la
prévention sanitaire et sociale ».
Les Ă©tablissements privĂ©s dâenseignement supĂ©rieur (Ă©coles de
commerce, Ă©coles dâingĂ©nieurs) ne posent pas vĂ©ritablement de
problĂšmes.
Par ailleurs, le ministĂšre de lâĂducation nationale a continuĂ©
les actions entreprises ces derniÚres années en matiÚre de prévention
des phénomÚnes sectaires. Les correspondants académiques ont
organisé des stages de formation à destination, le plus souvent des
personnels de direction ou de santé. Trois stages destinés aux
étudiants des IUFM et une sensibilisation dans le cadre de la
formation initiale des personnels dâinspection ont Ă©galement eu lieu en
2005.
Cette politique de formation entreprise depuis maintenant neuf
ans a fait la preuve de son efficacité, le signalement des dérives
sectaires en milieu scolaire ayant considérablement baissé ces
derniÚres années. La vigilance et la prévention ont porté leurs fruits.
De plus, la CPPS est toujours sollicitée par quelques parents
dâĂ©lĂšves qui sâinterrogent sur des associations organisant, dans les
107
quartiers, des sĂ©ances de soutien scolaire. Sâagissant dâactivitĂ©s post-
scolaires, de surcroßt organisées en dehors des locaux scolaires,
lâĂducation nationale ne dispose en lâoccurrence dâaucun moyen de
contrĂŽle.
Un chef dâĂ©tablissement a signalĂ© le dĂ©part de quelques Ă©lĂšves
dont les parents adhéraient aux théories des « enfants indigo » vers
lâenseignement privĂ© hors contrat. Ce phĂ©nomĂšne, Ă vĂ©rifier, semble
toutefois plus marginal que certains articles de presse ont pu le laisser
croire. La CPPS a cependant attirĂ© lâattention de ses correspondants
académiques sur le danger que font peser sur certains jeunes les
théories du mouvement
Kryeon
.
Par ailleurs, la CPPS travaille avec la Direction des affaires
juridiques et la Direction de lâenseignement scolaire Ă la modification
du décret du 6 novembre 1992 qui précise le cadre réglementaire des
relations quâentretient le service public dâĂ©ducation avec les
associations intervenant en milieu scolaire. Le systĂšme dâagrĂ©ment
pourrait ainsi ĂȘtre modifiĂ©. Lâobjectif poursuivi est bien entendu de
garantir la qualitĂ© de lâintervention de lâassociation et de prĂ©venir tout
prosélytisme sectaire.
Il sâagit lĂ dâun objectif de lâannĂ©e scolaire en cours. Lâeffort
réalisé pour améliorer le contrÎle des enfants échappant au systÚme
scolaire institutionnel sera prolongĂ© de mĂȘme que seront renforcĂ©es
les séances de sensibilisation proposées systématiquement aux
personnels de direction ou dâinspection.
ContrĂŽle de lâenseignement Ă domicile et des Ă©tablissements
privés hors contrat.
LâInstruction dans les familles
Lâarticle L 131-2 du code de lâĂ©ducation rappelle les deux
modes possibles dâinstruction : soit dans un Ă©tablissement, quâil soit
public ou privĂ©, soit dans la famille ou par le biais de lâenseignement Ă
distance.
Quel que soit le mode dâinstruction donnĂ© Ă lâenfant, il est
obligatoire que celui-ci reçoive une instruction contrĂŽlĂ©e par lâĂtat.
Ainsi, tout dĂ©faut de dĂ©claration de lâinstruction donnĂ©e dans la
108
famille est-il pénalement répréhensible, tout refus de contrÎle expose
les responsables lĂ©gaux de lâenfant Ă des sanctions, tout dĂ©faut
dâinstruction Ă©quivaut Ă une mise en danger de lâenfant et est
lourdement réprimé.
La loi du 18 décembre 1998 (surtout en son article 5
66
) et le
décret du 23 mars 1999 relatif au contenu des connaissances requis
des enfants instruits dans la famille ou dans des établissements privés
hors contrat ont renforcĂ© lâarsenal juridique dont dispose le ministĂšre
pour exercer son contrĂŽle.
1.
Lâobligation de dĂ©claration prĂ©alable vise Ă permettre ce
contrĂŽle de lâĂtat. Cette dĂ©claration doit ĂȘtre adressĂ©e au
maire de la commune de rĂ©sidence de la famille et Ă
lâinspecteur dâacadĂ©mie du dĂ©partement. Elle doit ĂȘtre
renouvelée chaque année.
2.
Les contrÎles : un contrÎle de nature sociale est exercé par le
maire (sur lâĂ©tat de santĂ© et les conditions de vie de la
famille). Le rĂ©sultat de lâenquĂȘte est adressĂ© Ă lâinspecteur
dâacadĂ©mie directeur des services dĂ©partementaux de
lâĂ©ducation nationale (IA-DSDEN).
Ce dernier exerce un contrÎle de nature pédagogique : à partir
du troisiĂšme mois suivant la dĂ©claration dâinstruction dans la famille,
lâIA vĂ©rifie que lâenseignement dispensĂ© est conforme au droit de
lâenfant Ă lâinstruction. Ce contrĂŽle annuel est effectuĂ© la plupart du
temps par les IEN, la grande majorité des enfants éduqués dans les
familles relevant de lâenseignement du premier degrĂ©, dans les autres
cas, par les inspecteurs pédagogiques régionaux (IPR). Ces
inspecteurs peuvent ĂȘtre Ă©ventuellement accompagnĂ©s par des
personnels qualifiĂ©s dĂ©signĂ©s par lâinspecteur dâacadĂ©mie (personnels
mĂ©dico-sociaux, conseillers dâorientation psychologues).
Ce contrĂŽle vĂ©rifie que lâenseignement dispensĂ© Ă lâenfant lui
permet dâacquĂ©rir les connaissances fixĂ©es par le dĂ©cret du 23 mars
1999. Outre les vérifications classiques portant sur le français et les
66
Lâarticle 5 de la loi de dĂ©cembre 1998 a introduit dans le code pĂ©nal un
article 227-17-1 et le dĂ©cret du 23 mars 1999 est aujourdâhui codifiĂ© dans la
partie rĂ©glementaire du code de lâĂ©ducation aux articles D.131-11 Ă D.131-
16.
109
mathĂ©matiques, lâarticle 4 dispose que «
lâenfant doit acquĂ©rir les
principes, notions et connaissances quâexige lâexercice de la
citoyenneté, dans le respect des droits de la personne humaine définis
dans le préambule de la Constitution de la République française, la
DĂ©claration universelles des droits de lâhomme et la Convention
internationale des droits de lâenfant, ce qui implique la formation du
jugement par lâexercice de lâesprit critique et la pratique de
lâargumentation
». Il est inutile de souligner que ce précieux article
permet de sanctionner toute dérive de nature douteuse.
La famille peut ĂȘtre informĂ©e de la date du contrĂŽle et du lieu
oĂč il se dĂ©roulera (domicile, mairie, inspection dâacadĂ©mie,
établissement scolaire). Le contrÎle peut avoir lieu en présence ou en
lâabsence des parents qui peuvent ĂȘtre entendus. Ce contrĂŽle est,
cependant, délicat
: il doit Ă©valuer si, Ă lâissue de la pĂ©riode
dâinstruction obligatoire, le niveau atteint par lâenfant est comparable
Ă celui des Ă©lĂšves scolarisĂ©s dans un Ă©tablissement dâenseignement. Se
pose donc le problĂšme, difficile, du rythme de progression de lâenfant,
compte tenu des choix éducatifs effectués.
Lorsque les résultats sont jugés insuffisants, les parents
responsables doivent fournir des explications. Si un second contrĂŽle
confirme les conclusions du rapport précédent, les parents sont mis en
demeure dâinscrire leur enfant, dans un dĂ©lai de quinze jours, dans un
Ă©tablissement dâenseignement public ou privĂ© sous contrat. En cas de
non respect de la mise en demeure, lâarticle 227-17 du code pĂ©nal
prĂ©voit une peine dâemprisonnement de deux ans et une amende de
30.000 euros. En outre, si un contrÎle révÚle une absence totale
dâinstruction, lâIA doit effectuer un signalement au parquet au titre de
lâenfance en danger.
Ces contrĂŽles, effectifs, font preuve dâune certaine efficacitĂ© :
mĂȘme sâils nâen sont probablement pas la seule cause, on constate une
forte diminution du nombre des enfants instruits à domicile, passé de
6000 en 1998 Ă 1000 en 2004.
Le contrÎle des établissements privés hors contrat
Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, la réunion
habituelle, dans une intention dâinstruction, dâenfants appartenant au
moins à deux familles différentes, constitue une école. En vertu du
principe de la libertĂ© dâenseignement, (article L.151-1 du code de
110
lâĂ©ducation), lâouverture dâune Ă©cole nâest subordonnĂ©e Ă aucune
autorisation administrative préalable mais est soumise à déclaration
dâouverture afin de permettre le contrĂŽle de lâĂtat. Lâinspecteur
dâacadĂ©mie peut sâopposer Ă lâouverture si les conditions dâhygiĂšne et
de sécurité ne sont pas suffisantes.
LâIA peut prescrire un contrĂŽle des classes afin de sâassurer
que les normes minimales de connaissance (article L. 122-1) sont
respectĂ©es et que lâenseignement est dispensĂ© selon une progression
cohérente et contrÎlée afin que les élÚves parviennent à un niveau de
connaissances et de compétences comparable à celui des élÚves
frĂ©quentant les Ă©tablissements dâenseignement. Si le contrĂŽle rĂ©vĂšle
des rĂ©sultats insuffisants, le directeur est mis en demeure dâamĂ©liorer
la situation. En cas de deuxiĂšme contrĂŽle nĂ©gatif, lâIA avise le
procureur de la RĂ©publique. Le directeur de lâĂ©tablissement encourt
des sanctions dĂ©lictuelles prĂ©vues Ă lâarticle 227.17.1 du code pĂ©nal
(six mois dâemprisonnement et 7.500 euros dâamende, ainsi que
lâinterdiction de diriger et dâenseigner). LâĂ©tablissement peut ĂȘtre
fermé.
Des contrĂŽles sont effectivement exercĂ©s. Ainsi, lâan dernier,
les deux inspections générales ont fait fermer un « cours », ou, plus
justement une « boßte à bachot », située dans un appartement exigu,
animĂ© par un couple dont le mari possĂ©dait une licence et lâĂ©pouse un
baccalauréat (ils étaient les seuls enseignants de ce « cours ») et dont
les tarifs étaient trÚs élevés.
Mais, bien entendu, les contrÎles ont prioritairement visé les
écoles qui relevaient de mouvements sectaires ou extrémistes.
Certaines écoles relevant de la premiÚre catégorie ont cessé leur
activité dÚs que ces contrÎles ont commencé. Une seule école de ce
type existe encore (treize enfants concernés en 2003), celle de la
communauté de Sus, dans les Pyrénées-atlantiques. Les parents se
sont engagĂ©s Ă accepter les contrĂŽles de lâĂducation nationale mais
continuent Ă refuser les vaccinations.
Quelques écoles catholiques « traditionalistes » existent. Une
récente inspection a montré que, dans ces écoles, le problÚme réside
dans les mĂ©thodes dâĂ©ducation que lâon peut estimer dâun autre Ăąge.
Mais ce sont justement ces méthodes qui déterminent le choix des
parents et, tant quâelles nâaboutissent pas Ă de mauvais traitements, on
ne peut que rester attentif.
111
Le cas particulier des Ă©tablissements privĂ©s dâenseignement supĂ©rieur
Ces établissements ne sont soumis à aucun contrÎle ni
évaluation. AprÚs déclaration, leur ouverture est soumise à des
conditions minimales : casier judiciaire, programmes dâenseignement,
adéquation des locaux. Certains établissements présentent cette
dĂ©claration comme un label afin dâattirer du public (certaines Ă©coles
de secrétariat préparant aux BTS ou aux DUT, par exemple).
Mais la plupart des établissements communément appelés
dâenseignement supĂ©rieur (bac + 3 ou + 5 et au-delĂ ) ne posent aucun
problĂšme, quâil sâagisse des facultĂ©s catholiques, des Ă©coles de
commerce ou des Ă©coles dâingĂ©nieurs. Pour ces derniĂšres, une
approche dâĂ©valuation peut exister dans la mesure oĂč, quand elles
organisent des concours communs dâentrĂ©e, le prĂ©sident du jury est un
universitaire.
A lâinverse, des dĂ©rives sont possibles, sinon certaines, dans
des établissements qui exercent leur activité dans le secteur de la santé
et plus particuliÚrement des psychothérapies. Toute amélioration de
lâoffre et de la qualitĂ© des formations, par exemple, par une
accréditation de ces formations ou la mise en place de diplÎmes
dâĂtat, dĂ©pendrait dâinitiatives prises par le ministĂšre de la SantĂ©,
Ă©ventuellement conjointement avec le ministĂšre de lâĂducation
nationale.
Le contrĂŽle des organismes dâenseignement Ă distance
Lâarticle L.444.2 du code de lâĂ©ducation prĂ©voit que la
crĂ©ation des organismes privĂ©s dâenseignement Ă distance est soumise
Ă dĂ©claration auprĂšs du recteur qui ne dispose dâaucun pouvoir
dâopposition. Il se borne Ă vĂ©rifier que la documentation fournie
comporte bien tous les documents prévus par la réglementation (les
diplĂŽmes du responsable, en particulier).
Un contrĂŽle
a priori
est exercé sur la publicité qui ne doit pas
induire le candidat en erreur sur la nature des études, leur durée et les
emplois auxquels elles préparent. Le recteur exerce un contrÎle
pédagogique
: conformité des programmes avec les documents
annexĂ©s Ă la dĂ©claration dâouverture. Il exerce Ă©galement un contrĂŽle
112
sur le recrutement des personnels de direction et dâenseignement
lorsquâils ne sont pas membres dâun Ătat de la communautĂ©
européenne.
Si lâon peut considĂ©rer que ces contrĂŽles sont insuffisants, la
situation est encore compliquĂ©e par le fait que lâouverture totale des
marchĂ©s intervenue depuis 1971 les rend inopĂ©rants dĂšs lors quâil
sâagit dâun Ă©tablissement situĂ© Ă lâĂ©tranger. Or, lâoffre de formation
sur
Internet
est multiforme et souvent marquée par la présence de
mouvements sectaires implantés aux USA et au Canada.
Si donc les possibilitĂ©s de contrĂŽle peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©es
comme satisfaisantes en ce qui concerne lâenseignement dans les
familles et les écoles privées hors contrat, elles sont limitées sinon
nulles en ce qui concerne lâenseignement Ă distance. Or, câest
probablement le secteur oĂč les dĂ©rives sectaires sont les plus
nombreuses. Faute dâun accord entre Ătats, difficilement envisageable
quand on connaĂźt les diffĂ©rences dâapproche du problĂšme, on voit mal
comment améliorer la qualité de ce contrÎle.
On peut se demander si lâinscription dâun enfant Ă un cours
par correspondance ne constitue pas en rĂ©alitĂ© une forme dâinstruction
dans la famille. Lâarticle L. 131-2 du code de lâĂ©ducation semble en
effet distinguer entre lâinstruction donnĂ©e « dans un Ă©tablissement »
(lâinscription Ă un service dâenseignement Ă distance ne peut
constituer au sens propre une instruction « dans » un établissement) et
lâinstruction donnĂ©e « dans la famille) (la circonstance que la famille
fasse appel Ă un service dâenseignement Ă distance ne change rien au
fait que lâenfant reçoit lâinstruction dans la famille). Si lâon retient
cette interprĂ©tation, lâinscription Ă un service dâenseignement Ă
distance ne soustrait pas lâenfant Ă la possibilitĂ© dâun contrĂŽle de
lâinstruction donnĂ©e dans la famille. Les directions compĂ©tentes du
ministĂšre Ă©tudient la possibilitĂ© dâune modification de la circulaire du
14 mai 1999 relative au contrĂŽle de lâobligation scolaire afin de
clarifier ce point.
113
22-7 MINISTĂRE DE LA JEUNESSE, DES SPORTS
ET DE LA VIE ASSOCIATIVE
Lâaction des services
Dans le domaine du sport
La Direction des sports, sensibilisée aux questions que
peuvent faire naĂźtre toutes formes dâimmersion des jeunes dans un
milieu spécifique tel que les « pÎles de préparation », a mené de
nombreuses actions dâinformation des personnels dans le cadre :
-
de lâaction de conseil et dâappui aux services dĂ©concentrĂ©s
dispensée au quotidien, sur les risques que sont susceptibles
dâencourir les sportifs au cours de leur carriĂšre. Sur ce volet, aucune
dĂ©rive particuliĂšre nâa Ă©tĂ© identifiĂ©e en 2005 ;
-
de la formation professionnelle continue des directeurs
techniques nationaux
, sur la maltraitance sous différentes formes ;
-
de la formation professionnelle continue
, au profit de deux
agents de la Direction des sports, qui ont suivi le stage organisé par
lâEcole nationale de la magistrture en octobre 2005. A lâissue de ce
stage, une demi-journĂ©e dâinformation a Ă©tĂ© organisĂ©e Ă lâattention des
personnels du Bureau de la protection du public, de la promotion de la
santé et de la lutte contre le dopage.
Dans le domaine de la jeunesse et de lâĂ©ducation populaire
La Direction de la jeunesse et de lâĂ©ducation populaire (DJEP)
a assuré une veille sur les dérives sectaires dans les centres de
vacances et les centres de loisirs. Les signalements reçus des services
déconcentrés (directions régionales et départementales), voire des
opérateurs, ont été analysés. Elle a également cherché à assurer un
service dâinformation auprĂšs des services dĂ©concentrĂ©s ou de
particuliers concernant des associations qui suscitent des
interrogations. La DJEP a eu Ă traiter un dossier en juillet 2005 dans le
cadre du Service Volontaire Européen concernant une jeune volontaire
accueillie dans un pays dâEurope orientale, dans le cadre dâun projet
relevant dâune agence humanitaire liĂ©e Ă la secte
Moon
.
114
Dans le domaine de lâemploi et de la formation
La Direction de la vie associative, de lâemploi et des
formations (DVAEF) a demandé aux services déconcentrés et aux
Ă©tablissements d'ĂȘtre attentifs et vigilants notamment pour l'agrĂ©ment
ou l'habilitation des formations ainsi que pour l'organisation des jurys
d'examen. Lâexamen des situations Ă risques sâappuie sur la
rĂ©glementation et sur lâapplication des cahiers des charges pour les
formations ; il est validé par des contrÎles sur site.
Dans le domaine de lâexpertise juridique
La Direction des ressources humaines, de lâadministration et
de la coordination gĂ©nĂ©rale (DRHACG) a assurĂ© un rĂŽle dâexpertise et
dâinformation juridique auprĂšs des directions et des services
déconcentrés. A ce titre, elle a assuré le pilotage des demandes de
communication de documents administratifs déposées par les
associations
« Ethique et liberté »
et
« Non à la drogue oui à la vie »
.
Le fonctionnement de la cellule ministérielle de vigilance
La cellule de vigilance du ministĂšre de la Jeunesse, des Sports
et de la Vie associative (MJSVA) a repris ses activités en septembre
2005. ConstituĂ©e de reprĂ©sentants des directions et de lâinspection,
elle sâest rĂ©unie pĂ©riodiquement et a auditionnĂ©, lors dâune sĂ©ance, le
prĂ©sident dâune association de lutte contre les dĂ©rives sectaires. La
cellule a assurĂ© une action de documentation et dâarchive, et diffusĂ© en
janvier 2005 au sein des services déconcentrés 1500 exemplaires du
« Guide de lâagent public face aux dĂ©rives sectaires »
.
La formation des agents du ministĂšre
Dans le cadre de la formation continue, treize agents du
MJSVA ont participĂ© au stage organisĂ© par lâEcole nationale de la
magistrature du 10 au 14 octobre 2005.
115
22-8
MINISTĂRE DE LâEMPLOI,
DE LA COHĂSION SOCIALE
ET DU LOGEMENT
et
MINISTĂRE DE LA SANTĂ
ET DES SOLIDARITĂS
I - UN DISPOSITIF COMMUN AUX DEUX MINISTERES
Le ministĂšre de lâEmploi, de la CohĂ©sion sociale et du
Logement et le ministÚre de la Santé et des Solidarités, en raison de la
transversalité des problÚmes posés par la prévention et le traitement
des dĂ©rives sectaires, disposent dâun dispositif commun pour le
traitement de ces sujets
67
.
Les agissements des sectes dans les champs de ces
dĂ©partements ministĂ©riels sont prĂ©occupants, lâaction de ces groupes
visant principalement des personnes fragiles, en difficultés,
marginalisĂ©es ou Ă protĂ©ger, et Ă cet Ă©gard, la protection de lâenfance
qui concerne plusieurs dizaines de milliers dâenfants est prioritaire.
Les questions touchant à la santé, au domaine médico-social et à la
formation professionnelle apparaissent centrales. On assiste
notamment au développement massif des organisations sectaires dans
le domaine de la santĂ©. De plus, les pratiques dĂ©veloppĂ©es Ă lâĂ©gard
des adeptes posent des questions de santé. Le problÚme des dérives
sectaires se pose donc ici principalement en termes de santé publique.
Un développement considérable des offres en matiÚre de soins
Dans ce contexte, il est à noter le développement considérable
de lâoffre de soins par des personnes ou des micro-structures, dont les
pratiques, les modes d'intervention, le langage s'apparentent Ă ceux
67
cf. Circulaire de la Direction gĂ©nĂ©rale de lâaction sociale (DGAS)
n°2000/501 du 3 octobre 2000
116
que l'on retrouve dans les organisations sectaires traditionnelles. Cette
situation trouve son assise dans le dĂ©veloppement, sur ce mĂȘme
champ, dâoffres de formation. Cependant ces similitudes avec les
organisations sectaires, nâimpliquent pas que toutes ces pratiques
puissent ĂȘtre qualifiĂ©es de dĂ©rives sectaires ou y conduisent. Reste
aussi que leurs dĂ©veloppements sâinscrivent dans le «
terreau
»
dâactions des organisations sectaires traditionnelles. Lâimportance de
ces offres relativement nouvelles à caractÚre « thérapeutique » ne
devrait pas conduire Ă nĂ©gliger lâaction des organisations sectaires
traditionnelles notamment dans le champ du soin, la santé étant
devenue un thÚme de prédilection pour celles-ci. A cet égard, le relevé
des questions médicales et médico-sociales traitées dans les
publications des
Témoins de Jéhovah
68
en apporte la preuve patente.
Lâaction des organisations sectaires Ă lâencontre de lâĂ©tat sanitaire
Si jusquâĂ maintenant lâaction des organisations sectaires
posait problÚme eu égard à ses incidences sur la protection des
personnes, on assiste aujourdâhui au dĂ©veloppement de leur action
dans le domaine sanitaire. Deux exemples en attestent.
- La diffusion en fĂ©vrier 2005 dâun DVD sur « les alternatives Ă la
transfusion sanguine » par les Comités de liaison hospitaliers des
Témoins de Jéhovah.
Ce document a nécessité des moyens pour :
-
connaĂźtre et suivre les Ă©volutions en matiĂšre dâalternatives Ă la
transfusion sanguine sur lâensemble des champs mĂ©dicaux ;
-
suivre le travail des équipes pratiquant ces alternatives ;
-
repĂ©rer parmi celles-ci les praticiens susceptibles de sâassocier Ă la
production de ce DVD.
68
Parmi les sujets, sont évoqués le diabÚte, la sclérose en plaque, le
glaucome, la dĂ©pression post-natale, le stress, les troubles de lâhumeur, le
manque de sommeil, la drogue, les mÚres adolescentes, les enfants adoptés.
On retrouve aussi des articles se rapportant aux médecins, à leur avenir
professionnel, au stress du médecin, etc. Des sujets portent aussi sur ceux
pouvant avoir un impact en termes de santé psychique : les familles
monoparentales, lâabsence des pĂšres, les supports de la violence des jeunes,
etc.
117
La mise en Ćuvre de ces moyens implique que ce groupe
dispose dâun important dispositif propre Ă connaĂźtre et Ă pĂ©nĂ©trer le
champ de la santé.
De plus, la diffusion de ce DVD Ă 10.000 exemplaires, selon
la presse, auprĂšs des mĂ©decins des hĂŽpitaux publics français, peut ĂȘtre
considérée comme une véritable contre-campagne de santé publique.
- Le guide pour visites dâun hĂŽpital psychiatrique
La Commission des citoyens pour les droits de lâhomme
(CCDH), « satellite » de lâ
Eglise de Scientologie
, se référant
notamment au drame de Pau, adressait début janvier 2005 aux
DDASS.
« Un guide pour visites dâun hĂŽpital psychiatrique »
. La
CCDH proposait mĂȘme aux services du ministĂšre de la SantĂ© et des
Solidarités de les « accompagner » dans leurs missions. Rappelons
que, par ailleurs, lâAssociation
« Ethique et Liberté
», proche elle
aussi de lâ
Eglise de Scientologie
, avait obtenu communication de
lâensemble des rapports annuels, pour la pĂ©riode de 1990 Ă 2000, de
lâensemble des 100 commissions dĂ©partementales des hospitalisations
psychiatriques. Elle en avait assurĂ© lâexploitation sous la forme dâun
rapport produit durant lâannĂ©e 2004, rapport voulant laisser croire
quâil Ă©manerait dâun grand corps de lâĂtat. Enfin, en juillet 2005, la
CCDH demandait communication dâune copie du registre recensant
les visites des reprĂ©sentants de lâautoritĂ© publique des Ă©tablissements
accueillant des malades atteints de troubles mentaux (article L. 3222-4
du Code de santĂ© publique). Se faisant, lâ
Eglise de Scientologie
se
livre Ă des pratiques relevant normalement de fonctions
traditionnellement dĂ©volues Ă lâĂtat, et elle tente par ce biais de
sâinfiltrer dans le dispositif public de santĂ© mentale.
Le renforcement du dispositif de traitement et de prévention des
dérives sectaires
Pour le ministĂšre de lâEmploi, de la CohĂ©sion sociale et du
Logement et le ministĂšre de la SantĂ© et des SolidaritĂ©s, lâannĂ©e 2005
aura été largement consacrée au renforcement de son dispositif de
traitement et de prévention des dérives sectaires.
118
-
Le cadre juridique de lâaction de ces ministĂšres sur le champ
des dérives sectaires a été réexaminé. En particulier, les rÚgles qui
encadrent lâaction de lâadministration dans ses relations avec les
usagers ont Ă©tĂ© prĂ©cisĂ©es. Il a ainsi Ă©tĂ© rappelĂ© que lâĂtat doit Ă nos
concitoyens la garantie de la sĂ»retĂ© considĂ©rĂ©e par lâarticle 2 de la
DĂ©claration des droits de lâhomme et du citoyen comme un droit
naturel et imprescriptible. Ce rĂŽle de la puissance publique est lâun des
plus anciens et lâun de ceux quâelle ne peut pas dĂ©lĂ©guer. LâĂtat ne
peut donc pas rester indifférent aux dérives sectaires et il est de son
devoir dâintervenir pour les prĂ©venir et y remĂ©dier. Lâintervention des
services sociaux, qui ont en charge les personnes les plus vulnérables,
est apparue à cet égard essentielle.
Si la répression est confiée aux autorités judiciaires, les
autoritĂ©s administratives doivent, elles, prendre en charge lâaspect
prĂ©ventif de lâaction. Dans certains domaines, elles peuvent
également prendre des mesures qui sanctionnent les manquements
quâelles ont pu constater, câest notamment le cas pour des activitĂ©s qui
nĂ©cessitent la dĂ©livrance dâun agrĂ©ment administratif ou dâune
autorisation, et qui pourront, le cas échéant, se traduire par un retrait
dâagrĂ©ment. Il ne fait donc aucun doute que les autoritĂ©s
administratives quelles quâelles soient ont pour mission de participer Ă
la lutte contre les dérives sectaires, chacune dans son domaine et à la
mesure des pouvoirs dont elle est dotée. Il va également de soi que
cette action doit ĂȘtre rĂ©alisĂ©e de maniĂšre coordonnĂ©e en liaison avec
les services de la police administrative (en raison des informations
quâils dĂ©tiennent), les services de police judiciaire et les parquets (en
charge de la mise en Ćuvre de la rĂ©pression) et enfin les magistrats
chargés des personnes vulnérables (juges des enfants, juges des
tutelles, etcâŠ)
-
Lors des réunions des représentants des Missions régionales et
interdĂ©partementales dâinspection, contrĂŽle et Ă©valuation (MRIICE)
des Directions régionales des affaires sanitaires et sociales qui se sont
tenues en 2004 et 2005, la Mission dâanimation des fonctions
dâinspection des services dĂ©concentrĂ©s (MAFI) de lâInspection
générale des affaires sociales (IGAS) a programmé une sensibilisation
aux risques de dérives sectaires, présentée par le chargé de la
coordination des actions liées au traitement des dérives sectaires à la
Direction gĂ©nĂ©rale de lâaction sociale.
119
Trois réunions ont rassemblé en 2005 des représentants des
MRIICE, correspondants régionaux sur les risques de dérives
sectaires, de la DĂ©lĂ©gation gĂ©nĂ©rale Ă lâemploi et la formation
professionnelle (DGEFP), dâune Direction rĂ©gionale du travail, de
lâemploi et de la formation professionnelle (DRTEFP) et de lâEcole
nationale de la santé publique. Ces réunions ont permis aux secteurs
travail et santé/solidarité de définir le profil des correspondants
locaux, dâidentifier les besoins des inspecteurs en matiĂšre dâoutils
dâinspection et de rapprocher les correspondants des deux secteurs
pour un meilleur Ă©change dâinformations et Ă©ventuellement pour
programmer des inspections conjointes.
LâĂ©chelon rĂ©gional a Ă©tĂ© identifiĂ© comme pertinent pour les
deux secteurs, tant pour les correspondants que pour la programmation
de futures inspections qui pourraient ĂȘtre incluses dans les
programmes rĂ©gionaux et interdĂ©partementaux dâinspection arrĂȘtĂ©s en
comités techniques régionaux et interdépartementaux (CTRI).
-
Enfin, lâensemble des correspondants en charge de ces
questions tant au sein des directions de lâadministration centrale que
des directions régionales ont été nommés dans ces fonctions. Des
outils de communication nécessaires à ces missions ont été mis en
place et leur dĂ©veloppement continuera Ă ĂȘtre assurĂ© en 2006. Des
actions de sensibilisation et de formation ont par ailleurs continuĂ© Ă
ĂȘtre dĂ©veloppĂ©es au sein mĂȘme du ministĂšre de lâEmploi, de la
Cohésion sociale et du Logement et du ministÚre de la Santé et des
SolidaritĂ©s. A titre dâexemple, on trouvera ci-dessous, celle du Service
des droits des femmes et de lâĂ©galitĂ©
La mobilisation du Service des droits des femmes et de
lâĂ©galitĂ© (SDFE) sâest traduite par la dĂ©signation, en 2005, dâune
correspondante chargĂ©e dâassurer lâinterface, sur ce sujet, avec le
chargĂ© de mission Ă la Direction gĂ©nĂ©rale de lâaction sociale, lui-
mĂȘme responsable de lâanimation et de la coordination de lâensemble
des actions liées à cette problématique. A cet égard, elle participe au
groupe de travail rĂ©unissant, sous lâĂ©gide du chargĂ© de mission prĂ©citĂ©,
les reprĂ©sentants des autres directions de lâadministration centrale
ainsi quâun membre de la MIVILUDES, afin de suivre la question des
dérives sectaires relevant des champs formation, emploi, sanitaire et
social. Par lâentremise de cette correspondante, des actions de
sensibilisation axées sur la prévention du phénomÚne sectaire ont été
120
amorcées via le réseau local, dont le SDFE dispose en propre,
composé de déléguées régionales et de chargées de mission
dĂ©partementales couvrant lâensemble du territoire national. Câest
dâailleurs dans cette optique quâelle a Ă©galement assurĂ© la diffusion
auprÚs du réseau déconcentré du
« Guide de lâagent public face aux
dérives sectaires »
, téléchargeable sur le site de la MIVILUDES, outil
prĂ©cieux dâinformation et de formation des fonctionnaires susceptibles
dâĂȘtre un jour confrontĂ©s Ă ce sujet.
II - BILAN RĂALISĂ PAR QUATRE DIRECTIONS
Il serait fastidieux de donner la liste de toutes les actions
menĂ©es par lâensemble des directions, des dĂ©lĂ©gations, des services et
des missions des deux ministĂšres. On trouvera cependant ci-dessous le
bilan réalisé par quatre directions
69
, précédé de celui de la Mission
interministérielle de lutte contre les drogues et la toxicomaine
(MILDT).
Lâaction de la MILDT
-
Sur proposition de la Commission nationale des stupéfiants et
des psychotropes, le Ministre des Solidarités, de la Santé et de la
Famille a classĂ©, par arrĂȘtĂ© du 20 avril 2005, comme stupĂ©fiants une
série de produits : le banisteriopsis caapi, le peganum harmala, le
psychotria viridis, le diplopterys cabrerana, le mimosa hostilis, le
banisteriopsis rusbyana, le harmine, le harmaline, le
tétrahydroharmine (THH), le harmol, le harmalol, c'est-à -dire des
substances rentrant dans la prĂ©paration de ce que lâon nomme
généralement «
ayahuasca
». En dehors des motifs purement
pharmacologiques qui ont conduit les membres de la Commission Ă
proposer ce classement, le fait que cette substance soit essentiellement
prise lors des cĂ©rĂ©monies rituelles de lâ
Eglise du Santo daime
nâa pu
ĂȘtre ignorĂ©.
-
La mise en place par la Mission interministérielle de lutte
contre les drogues et la toxicomanie (MILDT) dâun appel dâoffres
69
Il sâagit de la Direction gĂ©nĂ©rale Ă lâaction sociale (DGAS), la Direction
gĂ©nĂ©rale de la santĂ© (DGS), la Direction Ă lâhospitalisation et Ă lâorganisation
des soins (DHOS) et la Direction gĂ©nĂ©rale de lâemploi et de la formation
professionnelle (DGEFP)
121
concernant la création de communautés thérapeutiques prévue par le
plan gouvernemental 2004-2008 de lutte contre les drogues illicites, le
tabac et lâalcool a conduit Ă rĂ©diger un cahier des charges se rĂ©fĂ©rant Ă
lâarrĂȘtĂ© du 8 septembre 2003, du ministĂšre de la SantĂ©, de la Famille et
des Personnes handicapées qui, dans son annexe, a établi une charte
des droits et libertés de la personne accueillie.
-
Une attention soutenue de lâensemble des personnels de la
MILDT, aux demandes de subventions diverses en provenance du
secteur associatif, lui permet de prendre en compte les risques
éventuels de dérives sectaires.
ACTIVITĂ DE LA DGAS
Conformément à la circulaire n°2000/501 du 3 octobre 2000
relative aux dérives sectaires, un chargé de mission à la Direction
gĂ©nĂ©rale de lâaction sociale (DGAS) assure les liaisons nĂ©cessaires
avec la MIVILUDES et les principaux ministÚres concernés.
Au-delĂ de lâanimation du dispositif
ad hoc
, de la construction
de ses outils spĂ©cifiques et de lâaction de vigilance quâil conduit, le
chargé de mission continue à sensibiliser les bureaux de la DGAS en
charge des populations les plus vulnérables (enfance, personnes
handicapées, etc). Par ailleurs, des réunions de travail ont été tenues
avec le dispositif de formation des travailleurs sociaux sur la question
du traitement des dérives sectaires.
LâannĂ©e 2005 a Ă©tĂ© essentiellement consacrĂ©e aux questions
relatives au champ de la protection de lâenfance. Ce travail se
poursuivra en 2006. Il se traduit notamment par une rĂ©flexion visant Ă
la construction dâun outil mĂ©thodologique destinĂ© aux professionnels
de la protection de lâenfance. Une information sur ces questions a Ă©tĂ©
conduite auprĂšs des professionnels en charge des questions de
maltraitance (Colloque de lâAssociation française dâinformation et de
recherche sur lâenfance maltraitĂ©e, etc.).
Le travail ainsi mené permet déjà de situer les effets sur les
enfants de ce type dâappartenance. Il se rĂ©vĂšle indispensable dans la
mesure oĂč les enfants sont vraiment en danger au sein des
organisations sectaires. En effet, il faut dâabord souligner que les
parents nâoccupent plus dans ce contexte leurs rĂŽles parentaux. Ils ne
122
sont que les relais du groupe ou du gourou auprĂšs de leurs enfants. Il y
a donc ici une forme de dĂ©lĂ©gation de lâautoritĂ© parentale qui
sâeffectue au profit du groupe. Cette situation se traduit le plus
souvent par la suppression de toute relation affective avec lâenfant.
Lâessentiel des problĂšmes de lâappartenance tient aux dĂ©gĂąts
psychologiques qu'elle provoque. Les enfants nés et/ou élevés dans
des organisations Ă caractĂšre sectaire sont vouĂ©s Ă nâĂȘtre que des
adeptes. Ils grandissent Ă lâopposĂ© des enfants faisant lâapprentissage
de la vie, de lâautonomie et dâun dĂ©veloppement propre Ă en faire des
citoyens et des adultes. De ce point de vue, le fonctionnement des
groupes Ă caractĂšre sectaire est Ă lâorigine des pertes de capacitĂ©s de
dĂ©veloppement et dâautonomie des enfants, sortes dâattaques qui font
de ceux-ci de réels « morts vivants ». Cette situation, il faut le
souligner, est commune Ă lâensemble de ces groupes, y compris pour
ceux qui paraissent les plus « paisibles ». Il nây a pas dâorganisations
sectaires moins « dangereuses », toutes sont à redouter au regard du
devenir de lâenfant.
La « fermeture » du groupe sur lui-mĂȘme, le refus de la loi
commune, sâavĂšrent ĂȘtre les supports de toutes les formes de
transgression. Celles-ci sont dâabord sexuelles : les situations les plus
communes, et toujours prĂ©sentes, portant sur des passages Ă lâacte sur
mineurs. Cependant, certains groupes vont plus loin, allant jusquâĂ
prĂŽner lâinceste ou inciter Ă des formes de prostitution des mineurs.
Peuvent aussi s'y rencontrer des pratiques de « mauvais traitements »
que des parents sâautorisent Ă dĂ©velopper pour la « bonne Ă©ducation »
de leurs enfants ou « pour « mieux » accepter la « vérité » détenue par
le groupe. Reste Ă noter la frĂ©quence de ces faits, mĂȘme si les
signalements restent peu nombreux.
Il faut souligner lâimportance du temps consacrĂ© aux
« activitĂ©s spirituelles », qui sâajoutant au temps de la scolaritĂ©
obligatoire, font de ces enfants des ĂȘtres Ă©puisĂ©s par leur journĂ©e. On
peut ainsi rappeler que chez les dévots de
Krishna
, les enfants sont
soumis Ă un emploi du temps harassant comprenant de nombreuses
séances de priÚres obligatoires (lever à 3h30 et coucher à 20h30 pour
les 10-15 ans).
Certains groupes, peu nombreux, sâaffranchissent pour leurs
enfants de la scolarisation, du suivi médical et des vaccinations
obligatoires.
123
ACTIVITĂ DE LA DGS ET DE LA DHOS
Exercice médical
Liens entre la notion de dérive sectaire et la notion de "dérive
thérapeutique"
Fin juillet 2005, la direction générale de la santé (DGS) a
diffusé auprÚs de l'ensemble de ses services et de ses agents un
document de travail destiné à proposer un rapprochement entre la
notion de dérive sectaire et la notion de "dérive thérapeutique", plus
spécifique aux missions du ministÚre chargé de la santé.
Des infractions au droit, telles lâexercice illĂ©gal de la
mĂ©decine et/ou de la pharmacie, la publicitĂ© mensongĂšre, lâusurpation
de titre, etc., qui accompagnent souvent les pratiques thérapeutiques
non éprouvées, sont des dérives fréquentes dans les mouvements
sectaires, mais elles ne leur sont pas exclusives.
Du fait de leur prolifération et des dangers qu'elles peuvent
présenter pour les personnes, les dérives thérapeutiques constituent un
enjeu de santé publique. Ainsi, la veille sur les dérives thérapeutiques,
de mĂȘme que les actions menĂ©es Ă leur encontre, fondĂ©es sur le droit
commun, constituent pour le ministÚre chargé de la santé un objectif
opérationnel important dans sa contribution à la lutte contre les
dérives sectaires.
Ces deux objectifs restent cependant bien distincts dans la
mesure oĂč la lutte contre les dĂ©rives sectaires vise essentiellement des
processus dâemprise sur les personnes, la lutte contre les dĂ©rives
thérapeutiques concernant des pratiques effectivement ou
potentiellement dangereuses pour la santé des personnes.
Refus de soins et de transfusion sanguine
Une fiche technique destinée à apporter, aux médecins
susceptibles dâĂȘtre confrontĂ©s Ă un refus de traitement ou de
transfusion sanguine, une aide sur les conduites Ă tenir, notamment en
fonction de circonstances particuliÚres, a été achevée en 2005,
incluant les nouvelles dispositions de la loi n°2005-370 du 22 avril
2005 relative aux droits des malades et Ă la fin de vie. Ce document,
124
qui sera diffusĂ© en 2006, sâattache Ă rappeler le droit, la jurisprudence
et les devoirs du mĂ©decin, notamment celui de tout mettre en Ćuvre
pour convaincre le patient dâaccepter de recevoir les soins adĂ©quats,
tout en respectant son droit, inscrit dans la loi, de refuser des soins,
pour autant quâil soit en capacitĂ© dâexprimer une volontĂ© libre et
éclairée.
Ainsi que cela a été écrit précédemment, les Comités de
liaison hospitaliers des
Témoins de Jéhovah
ont largement diffusĂ©, Ă
partir du dĂ©but de l'annĂ©e 2005, un dossier en faveur des alternatives Ă
la transfusion sanguine comportant, notamment, un DVD intitulé
Stratégies alternatives à la transfusion - Simples, sûres, efficaces.
Fin
mai 2005, la DGS et la DHOS ont adressé aux Directions
départementales et régionales des affaires sanitaires et sociales
(DDASS et DRASS) une note commune de mise en garde quant Ă ce
dossier, aprÚs y avoir relevé des imprécisions et des omissions. Cette
note indiquait qu'une expertise plus prĂ©cise de ce document allait ĂȘtre
mise en Ćuvre. Les rĂ©sultats de cette expertise seront connus et
diffusés en 2006.
Commission de déontologie pour la fonction publique hospitaliÚre
Le rapport d'activité de la Commission de déontologie pour la
fonction publique hospitaliĂšre, mise en place dans le cadre de la loi du
29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la
transparence de la vie économique et des procédures publiques, a été
mis en ligne en 2005 sur le site
INTERNET
du ministĂšre.
Ce rapport évoque les cas, de plus en plus fréquents,
d'activités émergentes (naturopathie,
kinésiologie
, thérapie
transactionnelle, sophrologie, etc.) parmi les activités privées et
libérales exercées par des agents quittant temporairement ou
définitivement le secteur public. Ces activités, qui ne sont pas
réglementées, pourraient donner lieu à des dérives sectaires. En vue,
notamment de prévenir ces dérives, la Commission apporte une
attention particuliĂšre aux cursus suivis par lâagent
(noms des
organismes formateurs, durée des formations suivies, copie des
diplĂŽmes obtenus, etc.), et demande Ă©galement, dans certains cas, Ă
entendre les agents.
125
Santé mentale
Usage du titre de psychothérapeute (loi du 9 août 2004, article 52)
En rĂ©ponse Ă lâabsence dâencadrement des pratiques de
psychothĂ©rapie qui avait Ă©tĂ© pointĂ©e en 2003, lâarticle 52 de la loi
n°2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique
remédie à la situation de vide juridique que connaissait la France. Il va
dans le sens attendu par le public dâune meilleure information sur les
professionnels et dâune protection face Ă lâexistence de pratiques
douteuses ou effectuées par des professionnels non formés.
L'article 52 de cette loi prévoit que tout psychothérapeute
devra attester dâune formation minimale en psychopathologie clinique.
Le dĂ©cret en Conseil dâĂtat relatif Ă lâapplication de cet article est en
cours dâĂ©laboration. Un premier projet a Ă©tĂ© soumis dĂ©but 2006 Ă la
concertation des professionnels
.
Commission des citoyens pour les droits de l'homme (CCDH) -
Collectif des médecins et des citoyens contre les traitements
dégradants de la psychiatrie
La CCDH et le Collectif des médecins et des citoyens contre
les traitements dégradants de la psychiatrie, émanations de l'
Eglise de
Scientologie
, conduisent depuis longtemps des actions caractérisées
par une virulente opposition à l'égard des psychiatres et de la
psychiatrie et par une dénonciation de ce qu'ils considÚrent comme
une «
dérive des internements psychiatriques sous contrainte
»
70
.
En 2005, la CCDH a poursuivi, comme les années précédentes,
ses demandes de communication des rapports des Commissions
départementales des hospitalisations psychiatriques et des rapports de
visite dâĂ©tablissements psychiatriques. En fĂ©vrier 2005, la DGS a de
nouveau alertĂ© les DDASS sur lâintervention de la CCDH au regard des
visites dâĂ©tablissements et leur a rappelĂ© la position de lâadministration
sur ce sujet.
Deux notes d'information donnent des indications sur les
conduites Ă tenir au regard des interventions de la CCDH : celle du 27
mai 1997 porte sur lâintervention de certaines organisations dans le
70
Cf. notamment, le rapport CCDH de janvier 2004.
126
domaine de la psychiatrie (en ligne sur le site intranet du ministĂšre), et
celle du 16 octobre 2000 traite des réponses à apporter à la mise en
cause de lâĂ©lectro-convulsivothĂ©rapie.
En octobre 2005, la DGS a demandĂ© aux DDASS dâalerter les
médias de leur région ou de leur département en leur signalant le fait que
la CCDH est une Ă©manation de lâĂglise de Scientologie.
Formation continue des professionnels de santé
Vigilance en matiĂšre d'achat de formations
La circulaire dâorientation annuelle de la DHOS relative aux
axes prioritaires de formation continue, destinée aux professionnels de
santĂ© hospitaliers, a appelĂ© lâattention des Ă©tablissements publics de
santĂ© concernĂ©s sur la nĂ©cessitĂ© dâaccorder une vigilance particuliĂšre Ă
lâachat de formation, notamment sâagissant dâorganismes liĂ©s ou
susceptibles dâĂȘtre liĂ©s Ă des mouvements sectaires.
Lien avec l'Association nationale pour la formation permanente du
personnel hospitalier (ANFH)
En 2005, la DHOS et la DGS ont apporté leur concours au
travail préparatoire mené par la cellule de veille sur les dérives
sectaires de l'ANFH, aux actions de sensibilisation que celle-ci
conduira à partir de 2006 en direction des établissements de santé. Ces
actions porteront sur la nĂ©cessitĂ© dâaccorder une vigilance particuliĂšre
Ă lâachat de formation, notamment sâagissant dâorganismes liĂ©s ou
susceptibles dâĂȘtre liĂ©s Ă des mouvements sectaires.
Périnatalité
Au cours de l'année 2005 le bureau chargé de la périnatalité a
maintenu sa détermination à prévenir d'éventuelles dérives sectaires
dans le domaine de la naissance. En particulier, trois actions ont
indirectement contribué à renforcer les moyens de vigilance au regard
d'un risque d'entrisme sectaire sur les terrains de la préparation à la
naissance et des maisons de naissance.
127
Préparation à la naissance
Suite à une demande de la DGS, la Haute autorité de santé
(HAS) a produit en 2005 des recommandations professionnelles sur la
préparation à la naissance. Ces recommandations paraßtront début
2006 sur le site de la HAS.
Entretien individuel ou en couple au 4Ăšme mois
Dans le cadre du plan périnatalité 2005-2007, un entretien
supplémentaire au 4
Ăšme
mois de la grossesse, destiné à dépister les
vulnérabilités psychologiques des futures mÚres, a été instauré. Afin
de guider lâexercice des professionnels (mĂ©decins ou sages-femmes)
chargĂ©s de rĂ©aliser cet entretien, lâĂ©laboration dâun rĂ©fĂ©rentiel de
formation a été demandée par la DGS à la Société française de
médecine périnatale. Ce référentiel paraßtra courant 2006.
Maisons de naissance
Dans le cadre du plan périnatalité 2005-2007, un groupe de
travail composé de représentants des sociétés savantes et des
professionnels hospitaliers a été constitué fin 2005 pour établir le
cahier des charges du fonctionnement des maisons de naissance Ă titre
expérimental. Cette expérimentation vise à offrir des garanties en
terme de sécurité de la mÚre et de l'enfant. La fin de ces travaux est
prévue en juin 2006.
ACTIVITĂ DE LA DGEFP
LâintĂ©rĂȘt que portent certains groupes ou organisations pour la
sphÚre économique et sociale se manifeste dans les domaines de
lâemploi et de la formation, secteurs qui gĂ©nĂšrent des flux financiers
importants. Outre cet intĂ©rĂȘt financier, ces groupes y recherchent
également une forme de légitimité ou de reconnaissance. Cela leur
permet dâentrer directement en contact avec les demandeurs dâemploi,
les salariés et les entreprises (congé individuel de formation, droit
individuel Ă la formation, plan de formation) mais souvent, aussi, avec
des personnes physiques qui entreprennent dans un deuxiĂšme temps
une formation Ă titre individuel et Ă leurs frais.
128
La confrontation aux finalités et aux rÚgles encadrant la
formation continue
Ces groupes proposent une offre de prestations séduisantes
toujours plus abondante et diversifiée. Les « formations » proposées
sont parfois trÚs éloignées des finalités légales assignées à la
formation professionnelle continue que sont lâinsertion ou la
rĂ©insertion professionnelle, le maintien dans lâemploi en lien avec son
Ă©volution, le dĂ©veloppement de compĂ©tences et lâaccĂšs aux diffĂ©rents
niveaux de la qualification professionnelle.
Ils
méconnaissent
également fréquemment les exigences
lĂ©gales et rĂ©glementaires en termes dâorganisation de lâactivitĂ© de
formation professionnelle (publicité, obligations comptables, remise
préalable de documents légaux, perception de frais ou paiement des
prestations, contractualisationâŠ).
Respect des finalités assignées à la formation professionnelle continue
Les actions proposĂ©es nâont souvent pas pour but lâacquisition
de compétences professionnelles bien identifiées et ne comportent pas
une rĂ©elle valeur formative Ă©troitement liĂ©e Ă lâactivitĂ© professionnelle
du public visĂ©. Par exemple, Ă lâappui dâune demande
dâenregistrement comme dispensateur de formation, les services de
lâĂtat considĂšrent quâune convention de formation ayant pour objet
une dĂ©marche de dĂ©veloppement personnel et visant lâĂ©panouissement
personnel de lâindividu ou relevant de la thĂ©rapie, ne constitue pas une
action de formation professionnelle continue au sens des dispositions
de lâarticle L. 900-2 du code du travail.
« Considérant que les programmes joints à la demande
(cours par journées de séminaires organisées le week-end ou lors des
vacances) font rĂ©fĂ©rence entre autres Ă : « lâiridologie, au travail sur
les chakras, aux Ă©lixirs floraux (Bach et autres), Ă leur fabrication, Ă
la géobiologie, au magnétisme, à la cristallothérapie, au corps
spirituel relié au cosmos, aux techniques énergétiques de
rĂ©harmonistation du corps et de lâesprit, aux exercices de relaxation
en sophrologie, de techniques yogiques, de pratiques spirituelles, de
thĂ©rapie par les aimants, techniques vitales, Ă lâaura, aux corps
subtils et biomagnétiques, bilans de santé par les ongles,
oligothérapie, organothérapie, gemmothérapie, bains de siÚge, effet
Kirlian⊠» [âŠ] quâil est en outre de jurisprudence constante que ces
129
actions dâinitiation Ă des techniques ou Ă leur utilisation liĂ©es au
karma, Ă la perception des chakras, aux perceptions Ă©nergĂ©tiques [âŠ]
ne sauraient ĂȘtre comptĂ©es parmi les actions de formation entrant
dans le champ de la formation professionnelle continue (âŠ) »
71
.
De mĂȘme, lorsque les actions ne sont pas conduites
conformément à un programme écrit et exécutées dans le respect
dâobjectifs professionnels prĂ©alablement dĂ©terminĂ©s et selon des
modalitĂ©s de dĂ©roulement et dâĂ©valuation prĂ©cises, elles ne sauraient
valablement ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme des actions de formation
professionnelle continue. Ces prĂ©cisions sont essentielles et dâautant
plus importantes que les rapports qui sâĂ©tablissent entre le
« formateur » et le bénéficiaire (parfois en situation précaire ou
fragile), sont inégaux.
Certains organismes prestataires de ces actions tendent, de
surcroßt, à induire en erreur les bénéficiaires de celles-ci par le
caractÚre mirobolant de certaines « certifications », « qualifications »,
« titres et diplÎmes », le plus souvent non reconnus par les instances
administratives ou professionnelles.
«[âŠ] Les formations dispensĂ©es [âŠ] consistaient en
:
« praticien de santé naturopathe » (PSN), en « PSN réflexologue » ou
« kynésiologue », en « hygiéniste naturopathe
», en «
hygiéniste
naturopathe iridologue », en « perfectionnement réflexologie », en
formation « découverte » ou en « PSN réflexologue iridologue bio
Ă©nerg. » ; que ces activitĂ©s [âŠ] ne correspondent Ă aucune activitĂ©
professionnelle suffisamment identifiable, nonobstant les attestations
produites et la liste des « métiers de la santé naturelle », exclusifs ou
en complĂ©ment de professions, prĂ©sentĂ©e par la SARL X, dâailleurs
simplement dĂ©clarĂ©e et non agréée [âŠ], quâun certain nombre de
stagiaires souhaitaient « prendre en charge leur santé » par ce biais
et poursuivaient, par conséquent, un but personnel et non
professionnel ; quâen outre, la SARL X dĂ©livre sans autorisation des
« diplÎmes » en particulier de « praticiens de santé naturopathe »,
fussent-ils qualifiés de privés, et propose de passer des « clinicats »,
contribuant à entretenir une confusion avec les professions de santé ;
que de telles actions ne peuvent ĂȘtre regardĂ©es, notamment comme
71
Extrait dâune dĂ©cision du ministre de lâEmploi, de la CohĂ©sion sociale et
du Logement suite Ă recours hiĂ©rarchique sur la nature dâune action de
formation.
130
des actions dâacquisition, dâentretien ou de perfectionnement des
connaissances visĂ©es Ă lâarticle L. 900-2 6 du code du travail »
72
.
Les individus et les entreprises sont ainsi confrontés à des
offres imprécises incluant à la fois le champ professionnel et
personnel et à des prestations diverses qui leurs sont associées
(conférences, séminaires, voyages, ouvrages, stages, tests,
amélioration des performances,
coaching
, audit, conseilâŠ).
Respect des rĂšgles dâorganisation de lâactivitĂ© de formation
professionnelle continue
Les obligations incombant aux organismes de formation sont
lâobjet du titre II du livre IX du code du travail rĂ©cemment modifiĂ© par
lâordonnance n°2005-731 du 30 juin 2005 relative Ă la simplification
et Ă lâadaptation du droit dans les domaines de la formation
professionnelle et de lâemploi.
DĂ©claration dâactivitĂ©
LâĂtat ne procĂšde quâĂ lâenregistrement de la dĂ©claration
dâactivitĂ© des organismes de formation au vu de la rĂ©alisation de
prestations de formation professionnelle continue par le biais de la
conclusion dâune premiĂšre convention ou dâun premier contrat de
formation professionnelle.
LâautoritĂ© administrative chargĂ©e de la formation
professionnelle ne délivre aucun agrément au titre de la formation
continue (cf. décision précitée).
Or, certains groupes ou personnes valorisent cet
enregistrement comme la dĂ©livrance dâun agrĂ©ment qui peut abuser les
bénéficiaires et les acheteurs de formation sur sa nature. Ils entendent
ainsi se prĂ©valoir dâune forme de reconnaissance leur permettant de
sâinsĂ©rer et de se dĂ©velopper plus aisĂ©ment sur ce marchĂ©, voire de
légitimer un mouvement prosélyte.
72
Extrait de décision du Tribunal administratif de Poitiers (SARL X, février
2005).
131
Dispositions pénales
Les prestataires dâactions de formation (ou dĂ©clarĂ©s comme
tels) sâexposent Ă des sanctions pĂ©nales en contrevenant aux rĂšgles
relatives à la publicité, aux obligations comptables, à la remise
préalable de documents légaux, à la perception de frais ou au paiement
des prestations et Ă la contractualisation.
Ces dispositions complĂštent et renforcent lâarsenal juridique
des agents de contrĂŽle et peuvent utilement ĂȘtre mobilisĂ©es Ă
lâencontre de groupes Ă risques
73
.
Les principaux risques de dérives charlatanesques ou sectaires
Les principaux risques de dérives charlatanesques ou sectaires
sont liés à la confusion (parfois entretenue par les prestataires eux-
mĂȘmes) entre des objectifs Ă caractĂšre professionnel et des dĂ©marches
Ă caractĂšre personnel et/ou spirituel. Ils se manifestent notamment par
des pratiques influant de maniÚre préjudiciable sur les bénéficiaires
des actions conduites pouvant aboutir Ă un phĂ©nomĂšne de sujĂ©tion Ă
lâencontre de ces personnes.
La croissance du nombre de stages ou dâactions ayant trait aux
domaines de la santĂ© physique et mentale (bien-ĂȘtre inclus), du
développement personnel (transformation, amélioration des
performancesâŠ), Ă vocation psychothĂ©rapeutique ou guĂ©risseuse
reposant sur des eschatologies exclusives, et sur des techniques ou
méthodes dites, par exemple, « énergétiques », induit un risque de
développement du charlatanisme.
« [âŠ] La formation dispensĂ©e par la SARL Y consiste en
stages destinés à « renforcer la conscience individuelle, qui une fois
consolidĂ©e, harmonisĂ©e, physiquement et mentalement, offrira Ă
lâindividu des rĂ©sultats encourageants dans le domaine de la santĂ©
[âŠ], en prophylaxie [âŠ], en pĂ©dagogie [âŠ], dans le domaine du
sport » ; que, selon les termes de la publicité émise par la société, ces
stages consistent, dâune part en « cure thĂ©rapeutique [âŠ] destinĂ©e
aux personnes en dysharmonie temporaire et voulant retrouver leur
73
Cf. les jugements des Tribunaux correctionnels de Saintes et de Rochefort-
sur-Mer de juin et octobre 2005
132
Ă©quilibre », et, dâautre part, en « stages spĂ©cifiques » fondĂ©s sur la
dynagogie ; que selon cette mĂȘme publicitĂ©, « la dynagogie conçoit
lâĂȘtre humain comme un tout indivisible et original [âŠ]. La
mobilisation de lâĂ©nergie primordiale de lâĂȘtre Ă travers des exercices
spécifiques, la prise de conscience de ses circuits, le contrÎle de ses
manifestations et la maĂźtrise de sa transformation en Force de
Conscience, lui permettent de développer ses potentialités de
concentration, de captation de donnĂ©es, dâintĂ©gration, de
programmation positive du Futur et de relativisation du Passé » ; que
ces formations, qui tendent uniquement au développement de la
personne, ne peuvent ĂȘtre regardĂ©es comme entrant dans le champ
dâapplication [de] la formation professionnelle continue »
74
.
En outre, le risque financier pour les personnes est dâautant
plus sensible que les coĂ»ts peuvent ĂȘtre trĂšs Ă©levĂ©s et les prestations
multipliées dans la durée.
Enfin, la nature de certaines prestations peut prédisposer toute
personne les réalisant à se livrer à des actes de diagnostic, de
prévention ou de traitement, ce qui la rendrait passible de poursuites
pour exercice illégal de la médecine
sans préjudice des autres
dispositions concernant lâexercice illĂ©gal de la pharmacie ou de
professions réglementées.
Il appartient donc aux acteurs de lâemploi, de la formation et
de lâaccompagnement des salariĂ©s ou des demandeurs dâemploi (Ătat,
collectivités locales, partenaires sociaux, ANPE, ASSEDIC,
employeurs, comitĂ©s dâentreprisesâŠ) dâĂȘtre vigilants pour prĂ©venir
ces risques de dérives. Une attention renforcée doit notamment
sâexercer dans les Ă©tablissements de santĂ© lors de lâachat de formation.
La nĂ©cessitĂ© dâune vigilance qui doit ĂȘtre renforcĂ©e
Outre le sens critique quâil convient de mobiliser lorsque lâon
entreprend une démarche de formation professionnelle, il est
indispensable de sâassurer que le but poursuivi sâinscrit bien dans le
respect des objectifs assignés à la formation continue (articles L.900-
1-2°, L. 900-2 et L. 900-3 du code du travail). Cette vigilance doit
Ă©galement sâexercer sur le respect des modalitĂ©s de rĂ©alisation et de
74
Décision du Tribunal administratif de Poitiers (SARL Y, juillet 2005).
133
contractualisation des actions de formation professionnelle telles que
définies aux articles L. 920-1 et L. 920-13 du code du travail (articles
modifiĂ©s par lâordonnance 2005-731 du 30 juin 2005 prĂ©citĂ©e).
Lâattention doit aussi ĂȘtre appelĂ©e sur des stages ouverts Ă tous
(organisĂ©s le week-end ou Ă lâoccasion de sĂ©jours estivaux, voire de
loisirs) ne requérant aucun pré-requis et qui ne font pas partie
intĂ©grante dâune action de formation Ă destination dâun public de
professionnels auxquels elle peut apporter un véritable développement
de compĂ©tences ou permettre lâaccĂšs Ă une qualification reconnue. Il
est aussi à noter le caractÚre trÚs imprécis ou ésotérique des objectifs,
des programmes ou des contenus de formation sâadressant Ă tous
publics, et souvent, en inadéquation avec la complexité des matiÚres
évoquées.
De plus, les services de contrĂŽle de la formation
professionnelle restent confrontĂ©s Ă lâapparition de prestataires
individuels se présentant comme formateurs indépendants mais qui, en
rĂ©alitĂ©, sâintĂšgrent, dans une organisation en rĂ©seau (
Internet
) par le
biais de « certification », ou « dâassistance Ă la crĂ©ation de cabinets »,
fondant leur activité sur un concept, une méthode phare dont ils se
rĂ©vĂšlent ĂȘtre des « diffuseurs » et qui proposent, Ă leur tour, souvent Ă
des personnes en situation de recherche dâemploi, dâen devenir
lâĂ©pigone.
« Il ressort des piÚces du dossier
[âŠ] q
ue la formation
dispensée par Mr. Z consiste en stages de « formation à la pratique de
la relation dâaide », de « somato-relaxologie », de « rĂ©flexologie,
digitopuncture, shiatsu », dâ « orthokinĂ©siologie », de « sophrologie,
sophro-pédagogie, sophrothérapie », que selon les termes de la lettre
du requérant
[âŠ]
, il sâagit de techniques superficielles, non
médicales, utilisées dans un objectif de détente, de confort et de
mieux-ĂȘtre
[âŠ]
que les attestations dâanciens stagiaires
[âŠ]
Ă©tablissent, pour partie, que la formation suivie ne prĂ©sente quâun
caractÚre privé de développement personnel, en dehors de tout
objectif professionnel que, pour ce qui concerne les attestations
évoquant les suites professionnelles données aux formations
dispensĂ©es par Mr. Z, elles consistent, pour lâessentiel, en attestations
dâinscriptions Ă lâURSSAF de travailleurs indĂ©pendants ayant dĂ©cider
dâouvrir, rĂ©cemment, des cabinets en « somato-relaxologie » ; que
Mr. Z nâĂ©tablit pas, Ă supposer mĂȘme que ces cabinets aient une
quelconque viabilité économique, que cette activité entre dans le
134
champ des dispositions ⊠de lâarticle L. 900-3 du code du travail ;
que par suite, ces formations ne peuvent ĂȘtre regardĂ©es comme
entrant dans le champ dâapplication des dispositions relatives Ă la
formation professionnelle continue, au sens des dispositions
[âŠ]
, des
articles L. 900-2 et L. 900-3 du code du travail »
75
.
Ce mode de fonctionnement peut aussi, dans certains cas, se
rapprocher dâun systĂšme pyramidal dans lequel les nouveaux arrivants
sont, en pratique, tenus dâinvestir leur temps et leur argent dans la
structure : multiplication des stages, autres prestations, parcours et
durĂ©es indĂ©terminĂ©s⊠DâaprĂšs quelques tĂ©moignages, issus de
lâentourage des personnes concernĂ©es, ce surinvestissement
sâaccompagne de brusques changements de comportement et de
lâadoption dâun discours ou dâun vocabulaire souvent hermĂ©tique et
ésotérique pouvant les éloigner de leurs proches.
Les actions dâappui, de sensibilisation et de formation
Les efforts se sont poursuivis en 2005 par :
-
lâappui technique et juridique apportĂ© aux services, le traitement
de demandes individuelles, lâinformation et la sensibilisation faites
aux entreprises, aux administrations et Ă la presse ;
-
la formation initiale des inspecteurs-élÚves du travail et des
contrĂŽleurs du travail stagiaires ;
-
la formation continue des agents chargés du contrÎle de la
formation professionnelle, notamment dans une action conjointe avec
la MIVILUDES ;
-
la rĂ©union de lâensemble des correspondants rĂ©gionaux (affaires
sociales, travail, emploi et formation professionnelle) ;
-
la sensibilisation de chargés de mission interdépartementaux
dâinspection, de contrĂŽle et dâĂ©valuation sous lâautoritĂ© de lâInspection
générale des affaires sociales (IGAS) ;
-
une journĂ©e dâĂ©tudes organisĂ©e par lâAssemblĂ©e nationale (Groupe
dâĂ©tudes sur les sectes) ;
-
une conférence proposée par une association de défense des
individus et des familles victimes des sectes (ADFI) ;
75
Décision du Tribunal administratif de Poitiers (Mr. Z juillet 2005)
135
-
une journée de formation organisée par la cellule de vigilance et
de lutte contre les dĂ©rives sectaires Ă lâintention des cadres des
directions de la Ville de Paris et des mairies dâarrondissement ;
-
des interventions Ă lâoccasion de sessions de formation organisĂ©es
par des Ă©coles de service public telles que lâĂcole nationale de la
magistrature (ENM), lâĂcole nationale dâapplication des cadres
territoriaux (ENACT) et lâInstitut national du travail, de lâemploi et de
la formation professionnelle (INTEFP) et lâĂ©laboration dâun
programme de formation (2006-2007) avec lâAssociation nationale
pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH).
Ces actions sont lâoccasion dâĂ©voquer le risque sectaire dans
le champ de la formation continue mais il convient aussi de prendre en
considération toutes les prestations proposées aux directions des
personnels souvent externalisées par les entreprises ou insuffisamment
contrĂŽlĂ©e. A ce titre, la sensibilisation Ă lâintelligence Ă©conomique,
face Ă ces nouveaux risques, telle quâelle est engagĂ©e au sein de la
MIVILUDES, mĂ©rite dâĂȘtre encouragĂ©e et dĂ©veloppĂ©e.
136
23
ACTIVITE ADMINISTRATIVE
DES SERVICES DECONCENTRES DE LâETAT
LES CELLULES DEPARTEMENTALES DE VIGILANCE
ET DE LUTTE CONTRE LES DERIVES SECTAIRES
La connaissance du phénomÚne sectaire requiert une action
soutenue et permanente de recueil dâinformations, de dĂ©tection de
nouvelles rĂ©alitĂ©s, dâanalyse et dâamĂ©lioration du dispositif de
vigilance et de lutte contre les dérives.
Cet ambitieux programme a conduit les pouvoirs publics dĂšs
1999 à solliciter les préfets et les services déconcentrés afin de
procéder au diagnostic le plus précis possible des manifestations et des
faits imputables aux mouvements Ă caractĂšre sectaire.
Cette mission « diagnostic » a été conçue dÚs la création de
lâObservatoire interministĂ©riel sur le phĂ©nomĂšne sectaire comme un
engagement conjoint de lâensemble des services de lâĂtat.
Cela résultait du constat que le sujet est complexe, évolutif,
peu visible et que les dommages induits par les modes de
fonctionnement des mouvements sectaires et la réalité de leurs actes
appelaient la mise en Ćuvre dâun dispositif administratif fondĂ© sur le
recueil de lâinformation, lâanalyse du renseignement, la formation des
agents publics, la mise en place de méthodes de travail et
dâinvestigation de plus en plus Ă©laborĂ©es, et la valorisation dâun travail
dâĂ©change dâanalyses et de mise en Ćuvre dâactions conjointes ou
communes Ă plusieurs administrations.
Câest ainsi que la notion de cellule dĂ©partementale de
vigilance sur les agissements répréhensibles des mouvements sectaires
(CDV) a pris corps.
Le ministĂšre de lâIntĂ©rieur a par trois fois souhaitĂ© mettre
lâaccent sur le rĂŽle du prĂ©fet au plan dĂ©partemental alors que la
dimension interministĂ©rielle de lâengagement de lâĂtat est clairement
affichée.
137
Les raisons de ce positionnement sont multiples :
- les prĂ©fets peuvent ĂȘtre amenĂ©s Ă rĂ©pondre aux questionnements
dâassociations qui constituent une caractĂ©risation sectaire comme le
précise la circulaire du 20 décembre 1999 à laquelle il est fait
référence dans celle du 22 mai 2003 ;
- ils sont compĂ©tents en matiĂšre dâenregistrement dâassociations
cultuelles ;
- lâaction des services de lâĂtat en matiĂšre de lutte contre les
agissements répréhensibles des mouvements à caractÚre sectaire doit
ĂȘtre conduite selon certains principes dâaction dĂ©finis dans la
circulaire ministérielle du 7 novembre 1997 et reprise en référence
dans celle de 1999 ;
- la cellule est un lieu privilégié de collecte et de diffusion de
lâinformation auprĂšs de lâensemble des services de lâĂtat ;
- elle a pour mission de sensibiliser la population aux dérives
sectaires ;
- la mutualisation de lâinformation rend nĂ©cessaire la participation de
la MIVILUDES aux réunions des cellules départementales de
vigilance.
Ce constat a conduit la Direction des libertés publiques et des
affaires juridiques du ministĂšre de lâIntĂ©rieur Ă prĂ©ciser que la Mission
interministĂ©rielle devait ĂȘtre associĂ©e systĂ©matiquement aux rĂ©unions
programmées par les préfets. Ceux-ci ont de ce fait les moyens de
faire profiter la totalitĂ© des services dĂ©concentrĂ©s associĂ©s Ă lâaction de
vigilance et de lutte contre les agissements répréhensibles des
mouvements de lâensemble des donnĂ©es disponibles au plan national
et au plan local sur chacun des dossiers ouverts.
La premiĂšre prĂ©occupation est dâamĂ©liorer en permanence la
mise en commun des informations relatives au phénomÚne sectaire.
Au-delĂ , il sâagit bien de mettre en Ćuvre au plan national une
vĂ©ritable coordination de lâaction prĂ©ventive et rĂ©pressive des
pouvoirs publics Ă lâencontre des agissements des mouvements visĂ©s,
agissements qui pourraient ĂȘtre :
- attentatoires aux droits de lâhomme et aux libertĂ©s fondamentales,
- constitutifs de menaces Ă lâordre public,
- contraires aux lois et rĂšglements
138
La circulaire du Premier ministre du 27 mai 2005 relative Ă la
lutte contre les dĂ©rives sectaires doit ĂȘtre analysĂ©e Ă la lumiĂšre de
dispositions ci-dessus. Celles-ci ont eu dĂšs lâorigine pour objet de
fixer un cadre de travail cohérent et offrant toute garantie de droit en
matiĂšre dâaction rĂ©pressive face aux agissements de mouvements
caractĂ©risables. Câest ainsi, que prĂ©cisant la doctrine en la matiĂšre,
cette circulaire dĂ©termine plusieurs principes dâaction impliquant une
consolidation des relations de travail entre la Mission
interministérielle, les administrations centrales, les services
opérationnels à compétence nationale et les services déconcentrés.
Ces principes sont les suivants :
- exercer une vigilance particuliĂšre sur toute organisation qui parait
exercer une emprise dangereuse pour la liberté individuelle de ses
membres,
- ĂȘtre prĂȘt Ă identifier et Ă rĂ©primer tout agissement susceptible de
recevoir une qualification pénale ou plus généralement semblant
contraire aux lois et rĂšglements,
- rechercher et identifier dans le pĂ©rimĂštre dâattributions de chaque
administration concernĂ©e toute activitĂ©, quâelle que soit sa forme,
susceptible de revĂȘtir un caractĂšre sectaire,
- apprĂ©cier le caractĂšre sectaire dâune activitĂ© au regard du fait que
celle-ci place les personnes qui y participent dans une situation de
sujĂ©tion ou dâemprise.
Ainsi, la circulaire engage-t-elle les fonctionnaires et les
agents publics à conduire une véritable action de terrain. Elle pose
dâemblĂ©e la question de lâadĂ©quation entre les principes dâaction
dĂ©terminĂ©s par le gouvernement et les moyens mis en Ćuvre pour une
véritable vigilance et une lutte optimale contre les dérives sectaires.
Câest en observant la rĂ©alitĂ© du terrain, la vie des cellules de
vigilance, lâimplication de chacun des services au cours des rĂ©unions
dans le cadre des échanges entre administrations et sur le plan
opĂ©rationnel quâil est possible dâapprĂ©cier la progression dans le
temps de lâaction de vigilance et de lutte des cellules dĂ©partementales
et des services, chacun pour ce qui le concerne.
Le ministre de lâIntĂ©rieur, dans sa circulaire du 22 mai 2003
relative au dispositif de lutte contre les agissements répréhensibles des
mouvements sectaires rappelle quâil convient dâinsister sur
139
« lâimportance de lâinstallation et du fonctionnement rĂ©gulier des
cellules de vigilance dans votre département »
76
.
La carte et le tableau ci dessous donnent un premier ensemble
dâindications sur le niveau et les caractĂ©ristiques de leur activitĂ© en
2005. Ils favorisent lâexamen des conditions dans lesquelles ont Ă©tĂ©
réunies les cellules départementales et permettent de tirer de
nombreux enseignements qui devraient faciliter lâĂ©laboration dĂšs 2006
dâune grille dâanalyse de la vitalitĂ© des cellules dĂ©partementales de
vigilance fondée sur :
- lâĂ©tude de leur organisation et de leur fonctionnement,
- lâexamen de leur capacitĂ© de dĂ©tection et de prise en compte des
signalements,
- lâobservation des conditions de prise en charge dâun risque sectaire
par les administrations hors « activité de renseignement ».
France métropolitaine
1 ou plusieurs réunions (33)
pas de réunion
(63)
cellules de vigilance
réunions 2005
76
Circulaire du ministĂšre de lâIntĂ©rieur, 20 dĂ©cembre 1999
140
Niveau dâactivitĂ© des cellules de vigilance en 2005
Nombre de cellules départementales de vigilance et de lutte
réunies
34
Nombre de réunions tenues 37
Départements disposant de groupes de travail thématiques 1
Régions dont un département a réuni une CDV 9
RĂ©gions dont plus dâun dĂ©partement ont rĂ©uni une CDV 10
Départements ayant constitué des pÎles opérationnels inter-
administrations
1
Régions ayant bùti un projet de sensibilisation 2
A cet effet, la MIVILUDES dispose de trois ensembles
dâinstruments :
1 â Les instruments de dĂ©termination du profil des cellules
- délai entre deux réunions,
- nombre dâadministrations reprĂ©sentĂ©es,
- disponibilité des dispositifs internes de contrÎle pour la prise en
charge de la mission « lutte contre les dérives sectaires »,
- participation des autorités judiciaires et indication de la nature et du
niveau de représentation,
- représentation des collectivités territoriales,
- contribution des associations de défense.
2 â Les instruments dâĂ©valuation des modalitĂ©s de prise en charge des
dossiers et de programmation de contrĂŽles ou dâinvestigations
- capacitĂ© de prendre en compte lâinfluence des activitĂ©s de
mouvements implantés dans les départements limitrophes ou dans un
pays voisin,
- constitution de faisceaux de critÚres adaptés aux missions et aux
méthodes de contrÎle de chaque administration,
- capacité de détection de phénomÚnes nouveaux connus ou non au
niveau national,
- rapiditĂ© de dĂ©tection dâun phĂ©nomĂšne et rĂ©activitĂ© de la CDV,
- traitements adaptés aux personnes morales et aux personnes
physiques.
3 â Les instruments dâĂ©valuation des mĂ©thodes de travail
- crĂ©ation dâinstruments dâĂ©valuation du risque par groupes de mĂ©tiers,
nature des structures juridiques, capacitĂ© dâintervention conjointe des
administrations,
141
- création de pÎles de compétence destinés à favoriser le traitement
opérationnel de risques préalablement déterminés, à dominante sociale
ou économique, et atteintes à la dignité des personnes.
Cette grille dâanalyse de lâactivitĂ© de chaque cellule, Ă©laborĂ©e
Ă partir de lâobservation globale de lâactivitĂ© sur plusieurs annĂ©es,
donne ainsi une cartographie aussi précise que possible du niveau
dâaction auquel chaque dĂ©partement sâest Ă©levĂ© au delĂ de la capacitĂ©
qui est la sienne à décrire la réalité du phénomÚne dans ses
composants quantitatives et qualitatives.
La MIVILUDES a accompagnĂ© le travail de plusieurs dâentre
elles depuis 2003. Tout en bĂ©nĂ©ficiant de lâapport consĂ©quent en
termes dâinformations nouvelles et analysĂ©es tant par les services dont
la vocation est le renseignement que par ceux qui exercent diverses
missions de contrĂŽle et dâinspection, la Mission a pu apporter une
contribution majeure Ă leurs travaux, en termes dâanalyse et
dâenrichissement des mĂ©thodes dâinvestigation et de traitement des
risques.
La durĂ©e de vie du dispositif diffĂšre considĂ©rablement dâun
dĂ©partement Ă lâautre. Il est essentiel de rappeler le caractĂšre
déterminant de plusieurs facteurs :
â
les cellules ayant une dynamique propre, une capacité de
formation autonome des services et une rentabilité mesurable sont
celles qui se rĂ©unissent au moins deux fois dans lâannĂ©e,
â
la détection de la montée en puissance du nombre de cas à traiter
des nouveaux groupes présentant un risque potentiel devenant plus
aisĂ©e, cela conduit Ă imaginer un renforcement des modes dâapproche
et dâexamen en rĂ©union de cellule dĂ©partementale et, dans le
prolongement de celle-ci, en « groupe de travail opérationnel ».
â
la motivation dâaction des administrations de contrĂŽle, de
recherche et dâinspection Ă©tant plus aisĂ©ment mesurable dans les
départements ayant une activité de vigilance à la fois coordonnée et
soutenue, il apparaßt nécessaire de susciter des initiatives de formation
des fonctionnaires en relation directe avec les participants aux travaux
des cellules. Lâobjectif est de profiter de lâexpĂ©rience acquise en
cellule de vigilance pour former des agents de contrĂŽle et
dâinspection.
Cette expérience, conduite avec succÚs en 2005 par la
MIVILUDES, Ă la fois sur le plan national et au plan
142
interdĂ©partemental, a rencontrĂ© un vif intĂ©rĂȘt auprĂšs des publics
concernés.
LâannĂ©e 2005, par ses contrastes, les questionnements
multiples de nombreux interlocuteurs institutionnels, la consolidation
du dispositif dans certains départements, la remise à plat ou les
hĂ©sitations dans dâautres, a rĂ©vĂ©lĂ© de fortes potentialitĂ©s du dispositif
patiemment mis en Ćuvre au cours des derniĂšres annĂ©es.
Les leçons apprises de cette analyse
in vivo
du travail
accompli par les cellules départementales permettent de concevoir les
prioritĂ©s dâaction des prochains mois tant en termes, de consolidation
de lâexistant que de dĂ©multiplication des expĂ©riences rĂ©alisĂ©es.
La MIVILUDES sâemploiera, en relation avec le Cabinet du
Premier ministre, a poursuivre la mise en Ćuvre dâun schĂ©ma cohĂ©rent
dâintervention des pouvoirs publics, Ă dĂ©velopper le recueil et
lâanalyse de renseignements dans un contexte qui requiert de plus en
plus de technicité et à instaurer dans chacun des départements des
modes dâaction adaptĂ©s Ă des formes dâexpression du risque sectaire
diversifiées et innovantes.
Les méthodes de travail se sont enrichies sur de nombreux
domaines au cours de lâannĂ©e Ă©coulĂ©e. Leur emploi systĂ©matique en
2006 permettra dâĂ©laborer des tableaux de bord afin de mesurer, au
niveau de chaque rĂ©gion et de chaque dĂ©partement, pendant lâannĂ©e,
lâimpact des actions engagĂ©es en matiĂšre de vigilance et de lutte
contre les dérives des mouvements à caractÚres sectaires.
143
24
ACTIVITE DâINFORMATION ET DE FORMATION
1 - LES OFFICIERS DE POLICE JUDICIAIRE FACE AUX
DERIVES SECTAIRES
Les officiers de police judiciaire (gendarmes et policiers) ont
parfois le sentiment dâĂȘtre dĂ©sarmĂ©s face Ă des cas de dĂ©rives sectaires
mĂȘlant religiositĂ©, structures internationales et pratiques attentatoires
aux droits de lâhomme et aux libertĂ©s fondamentales ou constituant
une menace Ă lâordre public. La MIVILUDES sâest ainsi engagĂ©e
auprĂšs de ces fonctionnaires afin de leur apporter une formation solide
sur ces questions mettant en jeu la sĂ©curitĂ© de lâindividu et de la
société, et de susciter une synergie entre les services de police et
gendarmerie propre Ă un fonctionnement plus efficace de cette double
mission de vigilance et de lutte.
Formation et sensibilisation des services de police
à la problématique sectaire
La MIVILUDES, dans le cadre de ses attributions, met en
oeuvre des sessions de formation destinées aux officiers de police
judiciaire français et étrangers afin de les sensibiliser à la
problématique sectaire et de leur exposer la vision française en la
matiĂšre.
La formation des officiers de police judiciaire français
Les sessions de formation délivrées aux officiers de police et
de gendarmerie français sâarticulent autour de la logique suivante.
Dans un premier temps, est évoqué un ensemble de généralités
propres au phénomÚne des dérives sectaires : définition, historique,
caractéristiques globales (en insistant sur la notion de dangerosité),
présentation typologique du paysage sectaire français et européen
mettant lâaccent sur les thĂšmes principaux abordĂ©s par les groupes en
question, les diffĂ©rents types dâorganisation, les diverses formes
dâinfiltration (tant au niveau Ă©conomique que dans le secteur mĂ©dical),
présentation du portrait type du « gourou » ainsi que son approche
psychologique vis-Ă -vis des adeptes, dissĂ©mination des mouvements Ă
144
caractĂšre sectaire sur
Internet
et lâusage parfois nuisible de cet outil
par de tels groupes. Cette premiÚre approche se conclut généralement
par une présentation de la grille de détection des groupes à risque,
établie par la Direction centrale des renseignements généraux français.
La séance de travail se poursuit par une discussion sur les
conseils concrets relatifs Ă la rĂ©alisation dâune enquĂȘte en milieu
sectaire. Un certain nombre de points sont ainsi développés sur les
prĂ©cautions Ă prendre pour rĂ©aliser une audition dâadeptes ou de
responsables de groupes. Les policiers et gendarmes sont, par
exemple, sensibilisĂ©s au fait quâil existe un langage spĂ©cifique
employĂ© par chacun des groupes ; langage quâil est nĂ©cessaire de
connaĂźtre afin de mieux saisir la juste mesure des propos des
interlocuteurs. Un point est Ă©galement fait concernant lâaccueil Ă offrir
aux personnes victimes de dérives, notamment en raison des
sentiments de peur et de culpabilitĂ© que les adeptes peuvent ĂȘtre
amenés à ressentir au moment de quitter le groupe. Ces exposés sont
illustrĂ©s au moyen de cas rĂ©els et dâaffaires mĂ©diatisĂ©es, lâaccent Ă©tant
mis sur les différents cas de suicide collectif à travers le monde, qui
représentent, pour les hommes de terrain, le paroxysme de la dérive
sectaire.
La formation se conclut par un rappel du rÎle joué par les
différents acteurs engagés dans cette politique de lutte contre les
sectes, et en particulier celui de la Justice qui seule peut qualifier les
faits et donner Ă lâindividu toutes les garanties de protection de ses
droits (droits de la défense, parole du mis en cause). Sont ainsi
largement Ă©voquĂ©s, lâimportance du tissu associatif, lâarticulation
existant entre les diffĂ©rents services chargĂ©s de la lutte et de lâanalyse
des mouvements à caractÚre sectaire, ou encore, le rÎle clef joué dans
ce dispositif par la MIVILUDES.
La formation dispensĂ©e Ă lâĂ©tranger
Au cours de ces sessions de formation, initiées par la
MIVILUDES et organisées en coopération avec les ambassades
françaises à Prague et Belgrade, les représentants de la Mission se sont
attachĂ©s Ă dĂ©livrer le mĂȘme enseignement que celui offert aux officiers
français, tout en développant un riche dialogue sur les diverses formes
de vigilance et de lutte dans ce domaine.
145
Au début du mois de mai 2005, un représentant de la
MIVILUDES, assistĂ© dâun officier des Renseignements gĂ©nĂ©raux, a
ainsi animé un séminaire de formation en Serbie Monténégro. De
nombreux thÚmes, portant sur les dérives sectaires dans les domaines
de la santĂ©, de lâĂ©conomie, ou encore de lâĂ©ducation et de lâenfance,
ont Ă©tĂ© abordĂ©s auprĂšs dâun public composĂ© dâofficiers de police
serbes sensibles Ă ces questions.
La politique de la France sur cette question a fait lâobjet
dâĂ©loges de la part des interlocuteurs serbes. Dâune façon gĂ©nĂ©rale,
lâapproche de la MIVILUDES - en termes de dĂ©rive et non de doctrine
- bĂ©nĂ©ficie dâune trĂšs bonne image, dâautant plus que la loi About-
Picard du 12 juin 2001, renforçant la lutte contre de tels actes, jouit
Ă©galement dâune bonne presse. La Serbie MontĂ©nĂ©gro semble ainsi se
placer sur la mĂȘme ligne que dâautres pays europĂ©ens (comme la
Belgique, lâAllemagne ou lâAutriche). Lâapproche de ces problĂšmes
par la France fait dâailleurs actuellement lâobjet dâune Ă©tude prĂ©cise de
la part des autorités de Belgrade.
Le dispositif actuellement en vigueur en Serbie repose sur un
systĂšme de rĂ©unions publiques dâinformation sur la dangerositĂ© des
mouvements à caractÚre sectaire, réunions auxquelles participe
dâailleurs, en temps quâacteur Ă part entiĂšre, lâEglise Orthodoxe. Sur
les 200 groupes à caractÚre sectaire répertoriés et définis
juridiquement comme des « associations humanitaires », résultant de
la signature dâun document par un minimum de dix personnes
attestant du caractÚre «
non politique, non religieux et non lucratif
»
de lâassociation, seul un nombre restreint semble reprĂ©senter une
dangerosité spécifique.
La République TchÚque, née de la partition de la
TchĂ©coslovaquie en 1993, et aujourdâhui membre de lâUnion
européenne, a également organisé un séminaire en novembre 2005 sur
la problématique sectaire, réservé à trente-cinq fonctionnaires
tchĂšques appartenant aux ministĂšres de lâIntĂ©rieur, de la DĂ©fense, et de
la Culture. La MIVILUDES y était invitée.
Les autorités tchÚques ont signalé un nombre assez significatif
de mouvements sectaires sur leur territoire mais ont également
reconnu avoir pris en compte assez tardivement la juste mesure de ce
phénomÚne. Dans un premier temps, seuls les mouvements
extrĂ©mistes avaient fait lâobjet dâune attention particuliĂšre
146
(mouvements néo-nazis, hooligans, anarcho-autonomistes, néo-
bolcheviques et écologistes radicaux). Mais les critÚres traditionnels
de dangerositĂ© mis en place pour apprĂ©hender lâunivers de
lâextrĂ©misme tchĂšque sâaccommodaient mal de la rĂ©alitĂ© complexe et
protéiforme du phénomÚne sectaire.
La prĂ©sentation de lâorganisation et du rĂŽle de la
MIVILUDES a Ă©veillĂ© un trĂšs vif intĂ©rĂȘt, lâapproche française
semblant en effet répondre à une attente de la part des fonctionnaires
et responsables tchÚques, notamment sur les questions de coopération
interministérielle.
Les finalités de ces sessions de formation
Lâobjectif premier de la Mission interministĂ©rielle Ă travers
ces formations destinées aux officiers français de police judiciaire,
consiste Ă sensibiliser policiers et gendarmes Ă lâaspect essentiel que
revĂȘt la vigilance dans le cadre de la lutte contre les dĂ©rives sectaires.
Au cours des différentes sessions, la MIVILUDES insiste ainsi sur le
fait que les problÚmes relatifs au phénomÚne sectaire ne sont ni
anodins ni Ă©trangers Ă lâactivitĂ© des officiers de police judiciaire : ils
relĂšvent de façon directe de leur compĂ©tence. DĂšs lors quâil est bien
entendu quâil ne sâagit de porter aucun jugement de valeur sur le
contenu des doctrines ou la forme des rites, seul ce qui est susceptible
de constituer une ou plusieurs infractions au regard de la loi
rĂ©publicaine doit ĂȘtre recherchĂ© et soumis Ă lâapprĂ©ciation souveraine
des tribunaux.
Dans un certain nombre dâaffaires, le dialogue entre lâadepte
dâun mouvement Ă caractĂšre sectaire et un fonctionnaire dâĂtat peut
trĂšs vite se bloquer si les clefs dâune approche pour un dialogue ouvert
nâont pas Ă©tĂ© donnĂ©es Ă lâoccasion dâune formation spĂ©cifique. Or, Ă
ce jour, seuls les fonctionnaires des Renseignements généraux
bĂ©nĂ©ficient de ce type de formation. DâoĂč la volontĂ© dâĂ©largir celle-ci,
dÚs à présent, aux personnels dont les affectations les amÚnent à traiter
ce type de questions.
Câest pourquoi lâaccent est mis sur lâimportance de lâĂ©coute
offerte aux victimes de dérives. Le travail sur le terrain démontre en
effet que, plus le public est reçu dans un climat de confiance et de
compréhension, plus les signalements de dérives sont importants et
exploitables sur un plan judiciaire. De mĂȘme, le caractĂšre serein et
147
professionnel de la prise en compte des plaintes et des signalements
permet dâobtenir de meilleurs rĂ©sultats et dâĂ©tablir, par lĂ mĂȘme, des
procédures judiciaires fondées sur des faits et des constatations précis
et détaillés.
A travers ces formations, la MIVILUDES cherche également
à éclairer le policier et le gendarme sur certains volets du phénomÚne
sectaire, qui peuvent dérouter au premier abord. Ainsi, la question de
lâemprise sectaire, parfois mĂ©connue, est dĂ©veloppĂ©e en parallĂšle avec
le phĂ©nomĂšne de lâaddiction aux stupĂ©fiants. La question de la
dépendance sectaire pouvant en effet se comparer, en termes de
dommages familiaux et individuels, à celle des stupéfiants. La relation
adepte/gourou est prĂ©sentĂ©e comme Ă©tant du mĂȘme ordre que la
dépendance tissée entre le consommateur de drogues et son
dealer
.
La question du poids de lâimpact psychologique et de la vision
du monde du « gourou », à la fois pÚre, conseiller et ami, est
également évoquée car souvent sous-estimée. Il est nécessaire, pour
les policiers et les gendarmes, dans le cadre de leurs enquĂȘtes, de
posséder des connaissances spécifiques sur le fonctionnement, la
philosophie et la hiérarchie du mouvement, ainsi que des éléments
relatifs au langage propre au groupe en question : la qualité du travail
en amont garantissant de meilleurs résultats en aval.
En ce qui concerne les formations dispensées aux
fonctionnaires Ă©trangers, celles-ci revĂȘtent plusieurs finalitĂ©s. A
travers ces deux séminaires, organisés en République tchÚque et en
Serbie Monténégro, la MIVILUDES a en effet cherché à sensibiliser
des officiers européens sur la dangerosité que recÚle un certain
nombre de mouvements sectaires, et Ă les informer sur lâĂ©tat actuel de
leur développement sur le territoire français, avec leurs extensions
possibles dans les pays concernés.
Ces premiers Ă©changes ont permis Ă la MIVILUDES dâaffiner
lâĂ©tude du systĂšme dâimplantation de certains mouvements en Europe.
Cette Ă©tude revĂȘt un caractĂšre essentiel dans le sens oĂč elle permet de
mettre en lumiÚre la nature du réseau mis en place ainsi que les
finalités recherchées par certains de ces groupes. Les représentants de
la Mission ont ainsi remarquĂ© la pratique dâune politique offensive en
direction des pays de lâex-bloc soviĂ©tique (Ă lâexemple de la Serbie et
de la République TchÚque) de la part de certains de ces mouvements,
politique qui semble dâailleurs se dĂ©cliner Ă©galement sur dâautres
148
continents (Afrique et Amérique du Sud notamment). Ces formations
au bénéfice de policiers européens représentent un temps privilégié
pour affiner la compréhension du développement du phénomÚne
sectaire Ă travers lâEurope
A long terme, lâobjectif essentiel de ces formations communes
entre les polices françaises et étrangÚres, est de créer les conditions
dâune harmonisation de lâapproche de la problĂ©matique sectaire, et ce,
notamment au niveau européen, afin de pouvoir disposer, en cas de
difficultĂ©s sĂ©vĂšres, dâun outil rĂ©actif fondĂ© sur des critĂšres communs.
Rapprochement et collaboration entre les services de police et de
gendarmerie et la MIVILUDES
La MIVILUDES cherche Ă rapprocher ses divers
interlocuteurs issus des services de police et de gendarmerie et Ă leur
offrir des outils toujours plus efficaces dans leur lutte contre les
dérives sectaires. La Mission réfléchit par ailleurs à la possibilité de
proposer la crĂ©ation dâun groupe opĂ©rationnel spĂ©cialisĂ© dans le
domaine des dérives sectaires au sein de la Direction générale de la
police nationale.
Echanges fructueux entre la MIVILUDES et les services de police et
gendarmerie spécialisés sur les questions de dérives sectaires
LâannĂ©e 2005, notamment dans ses derniers mois, a Ă©tĂ© riche
en échanges avec les différents services de la police et la gendarmerie
nationales concernés par le phénomÚne sectaire
77
. Ces diverses
rencontres ont permis de promouvoir le rĂŽle de la MIVILUDES sur
les objectifs de sa mission et de développer un systÚme de remontées
de lâinformation, du terrain jusquâaux plus hauts sommets de lâĂtat,
permettant, par lĂ mĂȘme, une meilleure rĂ©activitĂ© de tous les services
concernés.
Cette collaboration confiante entre les divers services se
poursuivra grĂące Ă la mise en place, Ă lâinitiative de la MIVILUDES,
77
Il sâagit de la Direction centrale des renseignements gĂ©nĂ©raux, la Direction
centrale de la police judiciaire, la Direction générale de la gendarmerie
nationale, la Direction de la surveillance du territoire, la Direction de la
formation de la police nationale, les services de la Préfecture de police de
Paris, le Service de coopération technique international de la police
149
dâune rencontre biannuelle de ces reprĂ©sentants, dans lâoptique de
favoriser la rapiditĂ© dâaction et dâanalyse du phĂ©nomĂšne sectaire.
Un guide pratique des symboles et formules sataniques Ă lâusage des
gendarmes et policiers de terrain
Dans la continuitĂ© du prĂ©cĂ©dent rapport et afin de rĂ©pondre, Ă
la fois Ă une actualitĂ© de plus en plus mĂ©diastisĂ©e, ainsi quâĂ
lâaccroissement des saisines des services de police et de gendarmerie
sur des questions liées à la problématique sataniste (suicides et
profanations diverses), la MIVILUDES se propose de rédiger, en
partenariat avec divers spĂ©cialistes, un guide pratique Ă lâattention des
enquĂȘteurs.
Ce livret synthĂ©tique offrira aux enquĂȘteurs la possibilitĂ©
dâapprofondir leurs connaissances de lâunivers sataniste en insistant
sur la signification et lâinterprĂ©tation des divers signes, symboles et
formules propres au langage sataniste. Lâobjectif est d'accompagner
policiers et gendarmes confrontés à ces diverses manifestations, dans
le but de rĂ©aliser une enquĂȘte approfondie, offrant ainsi au Parquet
compétent, des faits et des constatations de qualité incontestable.
Vers la crĂ©ation dâun groupe opĂ©rationnel spĂ©cialisĂ© dans la
surveillance et la lutte contre les dérives sectaires
LâactualitĂ© rĂ©cente, ainsi que lâinquiĂ©tude croissante du public
Ă lâĂ©gard des risques de dĂ©rives, illustrĂ©e par les nombreux courriers
reçus par la MIVILUDES, amĂšne la Mission Ă sâinterroger sur la
possibilitĂ© de promouvoir la crĂ©ation dâun groupe dâenquĂȘteurs
regroupĂ©s au sein dâune cellule opĂ©rationnelle. Celle-ci pourrait ainsi
ĂȘtre activĂ©e dans le cadre dâune urgence ou du traitement dâune
information sensible, voire dans le but de faire échouer les possibilités
de rĂ©alisation de scĂ©narios catastrophes Ă lâimage des drames de lâ
OTS
ou dâ
Aum
au Japon.
Un autre volet de lâactivitĂ© de cette cellule pourrait concerner
la vigilance Ă lâencontre des risques dâutilisation des structures Ă
caractĂšre sectaire par des groupes mafieux ou terroristes, et ce,
notamment, au niveau international. Ce type de structures préétablies
pourrait en effet faciliter la mise en Ćuvre dâobjectifs et de pratiques
juridiquement répréhensibles dans un but de déstabilisation de la
démocratie.
150
La MIVILUDES doit «
contribuer Ă lâinformation et Ă la
formation des agents publics dans ce domaine
»
78
. A ce titre, elle se
doit de seconder les officiers de police judiciaire confrontés à des cas
de dĂ©rives sectaires. Pour cela, la Mission a mis en Ćuvre une
politique de formation, tant au niveau national quâinternational, des
policiers et gendarmes confrontés à ces difficultés.
Elle a en outre cherché à instituer un rapprochement efficace
de lâensemble des services de police et de gendarmerie territoriaux
afin de développer une synergie propice à une vigilance accrue. Ce
rapprochement des services opĂ©rationnels a Ă©tĂ© lâoccasion dâattirer
leur attention sur le rÎle fondamental joué par la Mission dans le
dispositif de lutte et dâanalyse des dĂ©rives sectaires.
Ces prioritĂ©s, qui ont permis la relance dâune nouvelle
dynamique sur ces questions, visent Ă rĂ©pondre Ă lâinquiĂ©tude et Ă
lâintĂ©rĂȘt croissants du public face Ă la dangerositĂ© et au dĂ©veloppement
des mouvements dont les pratiques sont attentatoires aux droits de
lâhomme et aux libertĂ©s fondamentales.
78
Décret n°2002-1392 du 28 novembre 2002, article 1
er
, 4
Ăšme
alinéa.
151
2 - LE SITE INTERNET DE LA MIVILUDES
LâannĂ©e 2005 est la premiĂšre annĂ©e complĂšte de
fonctionnement du site
Internet
de la Mission. Selon lâoutil dâanalyse
dâaudience Urchin, 133.144 personnes ont consultĂ© le site ; un second
outil dâanalyse (Xiti) dĂ©nombre 45.383 visiteurs sur cette mĂȘme
période. On constate ainsi une fidélisation des internautes qui ont
visionné plus de 740.000 pages. Le temps moyen de consultation pour
cette pĂ©riode est dâenviron 14 minutes par visiteur. Plus de 26,40
gigabits de documents ont été téléchargées.
Site Internet Miviludes
Répartition mensuelle des visiteurs
Lâaugmentation du trafic du mois de mars 2005
est liée à la parution du rapport MIVILUDES 2004
Les rubriques les plus consultées sont les suivantes :
le Guide
de lâagent public face aux dĂ©rives sectaires
, les rapports 2004 et 2003
de la MIVILUDES, le séminaire
Sectes et Laïcité
de 2003, la
prĂ©sentation de la Mission et lâhistorique du phĂ©nomĂšne sectaire
contemporain.
Le dernier trimestre de lâannĂ©e a vu la mise en ligne de
documents dâinformation concernant les diffĂ©rentes interventions du
prĂ©sident ainsi quâune revue de presse et diverses questions
parlementaires sur le sujet. La mise en ligne des rapports officiels
â
en français, anglais et allemand
â
depuis la création de la Mission,
0
1000
2000
3000
4000
5000
6000
7000
8000
juin
avril mai
août
janvierfévrier
juillet
mars
septembre
octobre
novembre
décembre
152
ainsi quâun ensemble dâarticles et de discours, sont venus complĂ©ter la
rubrique « Documents et archives ».
Pour lâannĂ©e 2006, lâĂ©quipe de la MIVILUDES rĂ©flĂ©chit Ă
plusieurs projets. Sont prĂ©vus, outre lâalimentation habituelle des
rubriques actuelles et la mise en ligne du présent rapport :
â
la crĂ©ation dâune rubrique dâ
information pour les jeunes
, dĂ©jĂ
annoncĂ©e dans le prĂ©cĂ©dent rapport, qui nâa pas pu ĂȘtre mise
en place, faute dâun intervenant Ă plein temps pour le site
Internet ;
â
des
guides adaptés à chaque administration
précisant et
complétant le «
Guide de lâagent public face aux dĂ©rives
sectaires »
déjà publié ;
â
la mise en ligne mensuelle de lâ
état des réunions des cellules
de vigilance départementales sous forme de carte
;
â
des
fiches dâinformations
mettant en garde le public dans les
diffĂ©rents domaines oĂč risquent de sâexercer des problĂšmes de
dérives sectaires ;
â
enfin
un projet de rĂ©novation de lâaspect visuel du site
est Ă
lâĂ©tude.
Ce systĂšme de communication paraĂźt ĂȘtre bien reçu et
constitue par lĂ mĂȘme un outil supplĂ©mentaire dâinformation et de
prĂ©vention du phĂ©nomĂšne sectaire. Ce site officiel sâinsĂšre dĂ©sormais
dans le paysage du Web, en montrant la prĂ©occupation de lâĂtat dans
ce domaine. Il complĂšte ainsi lâinformation qui nâĂ©tait jusquâĂ ce jour
relayée que par des sites
Internet
dâassociations. Câest pourquoi, dans
le but dâaccroĂźtre lâefficacitĂ© du site de la MIVILUDES, il devra ĂȘtre
désormais systématiquement référencé dans les sites des différents
ministĂšres.
153
25 â ACTUALITE ASSOCIATIVE
1 - LâUNADFI
« LâUnion nationale des associations pour la dĂ©fense des
familles et de lâindividu » regroupant quelques vingt-cinq associations
et prĂšs dâune vingtaine dâantennes, a organisĂ© diverses manifestations
et Ă©vĂ©nement tout au long de lâannĂ©e 2005 pour marquĂ© le trentenaire
de sa création.
Le 22 novembre 2005, le ministre de lâIntĂ©rieur prenait un
arrĂȘtĂ© approuvant les modifications apportĂ©es aux statuts et au titre de
lâassociation ayant dĂ©sormais pour titre « Union nationale des
associations pour la dĂ©fense des familles et de lâindividu, victimes de
sectes » (UNADFI)
79
.
2 - PĂRĂGRINATIONS DU DOSSIER POUR LâOCTROI A
LA FECRIS
80
DU STATUT PARTICIPATIF AUPRĂS DU
CONSEIL DE LâEUROPE :
Le 13 juillet 2005, aprĂšs trois ans de blocages et de batailles
de procĂ©dures, le Conseil de lâEurope octroyait Ă la FECRIS le statut
participatif. Cette affaire est emblématique des méthodes utilisées par
un cĂ©lĂšbre mouvement sectaire Ă lâencontre de ses « adversaires ».
- Le lobbying de « faux-nez »
Les actions de lobbying sont souvent le fait de personnes ou
dâassociations proches dâune seule et mĂȘme organisation. Celles-ci
dĂ©ploient peu ou prou les mĂȘmes arguments pour dĂ©nigrer leur cible.
Ce fut le cas dans ce dossier, de la part dâorganisations de nationalitĂ©s
diverses : française, serbe, bulgare, autrichienne, américaine, etc.
79
Journal officiel
, 7 décembre 2005
80
FĂ©dĂ©ration europĂ©enne des centres de recherche et dâinformation sur le
sectarisme
154
- Le retardement de la procédure
Les artifices de procédure sont un moyen idéal pour ralentir le
cheminement dâun dossier. Ils furent ici tous utilisĂ©s, pour la premiĂšre
fois depuis que le statut dâorganisation non gouvernementale existe au
Conseil de lâEurope. Le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du Conseil de lâEurope
avait donné un avis favorable à la demande de la FECRIS. Et ce qui
nâaurait dĂ» ĂȘtre alors quâune simple « formalitĂ© » bouclĂ©e en quelques
mois, Ă savoir lâapprobation tacite par lâAssemblĂ©e parlementaire et le
Comité des ministres, a en fait duré prÚs de trois ans aprÚs que trois
parlementaires se sont opposĂ©s Ă lâoctroi de ce statut.
- Le harcĂšlement
Une vaste campagne de dénigrement de la FECRIS a été
organisĂ©e Ă coup de centaines dâemails et de courriers, dâappels
téléphoniques, parfois au domicile des correspondants, de pétitions
sur
Internet
, le tout destinĂ© aux parlementaires ainsi quâĂ diffĂ©rents
services du Conseil de lâEurope.
- La « propagande noire »
Cette mĂ©thode vise Ă dĂ©stabiliser « lâadversaire » en diffusant
des informations diffamatoires sur des personnes : dans ce cas, le
prĂ©sident et des membres de la FECRIS, ainsi quâun des rapporteurs et
un fonctionnaire en charge du dossier en ont été les cibles.
- Lâinstrumentalisation de tierces personnes
Un des parlementaires du Conseil de lâEurope Ă lâorigine de
lâaffaire nâa jamais vraiment cachĂ© que le volumineux mĂ©moire Ă
charge contre la FECRIS lui avait été transmis par une tierce partie.
- Lâinfiltration
Outre la prĂ©sence de reprĂ©sentants dâun grand mouvement
sectaire dans les couloirs du Conseil de lâEurope, on a pu remarquer
celle dâun de leurs responsables europĂ©ens venu tout exprĂšs de
Bruxelles Ă lâoccasion dâune rĂ©union de la commission en charge du
dossier qui se tenait Ă Paris.
155
- La « disparition » de courrier
Le dossier argumentaire adressé par le président de la FECRIS
au Conseil de lâEurope nâest dans un premier temps jamais arrivĂ© Ă
son destinataire, alors mĂȘme quâun accusĂ© de rĂ©ception - dont la
signature Ă©tait illisible - attestait du contraire. On peut sâinterroger sur
un Ă©vĂ©nement qui ne peut ĂȘtre complĂštement le fait du hasard. Dans le
passĂ©, lors du dĂ©roulement dâune procĂ©dure judiciaire Ă lâencontre
dâun grand mouvement sectaire, la subtilisation de courrier dans les
boites aux lettres fut révélée comme une pratique de ce groupe. Si la
FECRIS nâavait pu, au final, renvoyer ce document de dĂ©fense dans
les dĂ©lais requis, il nâaurait probablement pas pu ĂȘtre pris en compte
par la commission chargĂ©e de son examen, et ceux qui sâopposaient Ă
lâattribution du statut consultatif auraient en dĂ©finitive gagnĂ© la
bataille.
156
CONCLUSION
En rendant compte de lâactivitĂ© des services de lâEtat,
quâil sâagisse des ministĂšres, des prĂ©fectures ou de la
MIVILUDES elle-mĂȘme, ce rapport montre quâau cours de
lâannĂ©e Ă©coulĂ©e le phĂ©nomĂšne sectaire nâa pas marquĂ© de pause
en France.
Le constat de lâensemble des acteurs, sans ĂȘtre alarmant,
reste préoccupant
: aucun secteur de notre territoire nâest
Ă©pargnĂ©, aucun type dâactivitĂ© nâest Ă lâabri du risque sectaire,
aucune entreprise, aucune famille ne peut avoir la certitude quâĂ
un moment donné, elle ne se trouvera exposée à des dérives
sectaires, avec leur cortÚge de conséquences dramatiques que
lâon connaĂźt trop bien.
On ne peut pas au nom de grands principes, lorsquâils
sont dévoyés, laisser prospérer des organisations ou des
personnes essentiellement mues par lâappĂąt du gain, par la
volontĂ© de puissance et par le souci dâune emprise toujours plus
forte, toujours plus contraignante.
LâEtat rĂ©publicain est pleinement dans son rĂŽle quand il
met en Ćuvre tous les moyens dont il dispose pour suivre
lâĂ©volution des phĂ©nomĂšnes et pour apporter les rĂ©ponses et les
solutions quâattendent les Français, le monde associatif et les
élus de la Nation qui sont encore plus que les administrations
centrales en prise directe avec les familles exprimant leur
douleur et témoignant des dommages, irrémédiablement subis
par les victimes.
Si ce document peut contribuer Ă une meilleure prise de
conscience du risque sectaire, sâil peut mieux faire connaĂźtre et
faire comprendre lâaction de lâEtat, uniquement soucieux de la
dĂ©fense des droits de lâhomme et des libertĂ©s publiques, alors il
aura atteint son but.
157
ANNEXES
1 â Exemples de signalements reçus par la MIVILUDES
2 â ActivitĂ© parlementaire â Questions Ă©crites
3 â Liens et adresses utiles
158
1
EXEMPLES DE SIGNALEMENTS REĂUS
(Extraits
81
)
Lettre dâun homme dont lâĂ©pouse et ses deux filles appartiennent
Ă lâassociation Amour et MisĂ©ricorde (17 septembre 2005)
Câest Ă propos de lâAssociation
Amour et Miséricorde
que je
mâautorise Ă reprendre contact avec vous, avant que la MIVILUDES
nâen arrive Ă faire son bilan annuel. Ce groupe, dont les dĂ©rives
sectaires sont évidentes (soumission à un (ou des) meneur(s), rupture
avec le milieu familial, social, professionnel et amical, langage
unique, refus du dialogue, prosĂ©lytisme, attrait du gain, etcâŠ), a
dâailleurs retenu lâattention de la MIVILUDES dans son rapport de
2003.
Le fait quâil nâait pas Ă©tĂ© mentionnĂ© dans le rapport de 2004
lui donne des arguments pour dĂ©crĂ©ter que rien ne peut lui ĂȘtre imputĂ©
en matiĂšre sectaire.
Et pourtant, au cours des mois, ce groupe nâa fait que se
radicaliser et se replier sur lui-mĂȘme autour dâune « voyante »
recevant tous les 15 du mois à 0h06 (minuit et 6 minutes) précisément,
(avec une rĂ©gularitĂ© de mĂ©tronome que ne vient mĂȘme pas perturber
les changements dâheure), des messages de la Vierge, des anges, et du
Seigneur lui-mĂȘme !
En juin 2004, le groupe sâest installĂ© dans une ancienne
auberge de standing située à Val Suzon (à 15 km de Dijon) achetée
par un membre de la communauté. En juin 2005, suite à des conflits
internes, le propriétaire a mis tout le monde à la porte et remis son
bien en vente. Le groupe emmené par la « voyante » est alors parti se
regrouper dans le camping « A lâorĂ©e du bois » aux portes de Dijon oĂč
il envisagerait de passer lâhiver.
Plusieurs familles sont concernées par ce phénomÚne et
souffrent profondément de la rupture avec leurs membres, sincÚres
mais abusés, qui refusent tout contact avec leurs proches. Il
appartiendra Ă chacune dâentre elles de prendre Ă©ventuellement
81
Lettres publiĂ©es de façon anonyme et avec lâaccord des rĂ©dacteurs.
159
contact avec vous. Les cheminements des uns et des autres peuvent
différer, mais les résultats sont identiques : refus du dialogue et
rupture totale avec ceux qui ne partagent pas leurs certitudes et leurs
égarements.
Pour mon cas personnel, mon Ă©pouse et mes filles nâont pas
donnĂ© de signe de vie direct depuis octobre 2002, ni des appels Ă
lâaide de nos deux fils, ni des faire-part de naissance de petits enfants,
ni lâannonce du dĂ©cĂšs de mon beau-pĂšre (aux obsĂšques duquel aucune
des trois nâa assistĂ© ni montrĂ© un signe de compassion), ni des
demandes de rencontre pour faire le point, etc ⊠nâont reçu de
rĂ©ponse. Jâai appris en outre, de maniĂšre indirecte que ma plus jeune
fille se serait mariée (civilement) sans en avertir ni moi, ni aucun
membre de notre famille.
(âŠ) Plusieurs familles se sont regroupĂ©es pour tenter, tant sur
le plan temporel que sur le plan spirituel de sortir de cette impasse.
Si ces travers génÚrent des tensions au sein des familles, la
« voyante » incite fermement les personnes sincÚres mais abusées à la
rejoindre Ă Dijon pour vivre directement sous son influence.
Ainsi, au moins cinq familles ont été confrontées à des
ruptures et si leurs membres ont pu avoir un cheminement différent,
les conséquences ont été similaires : rupture brutale et définitive avec
lâentourage (famille, parents, enfants, amis âŠ) qui ne rentre pas dans
leur dérive, abandon de professions stables pour rejoindre Dijon, refus
absolu de tout dialogue et de tout contact ⊠à moins dâune
reconnaissance et dâune soumission Ă la « voyante ».
Celle-ci a rĂ©ussi (avec lâaide de son acolyte), Ă regrouper
autour dâelle un groupe particuliĂšrement soumis quâelle fait vivre en
communauté dans des conditions précaires.
Il semble, en outre, que ce groupe mette toutes ses ressources
en commun pour faire vivre la communauté⊠sans que la « voyante »
participe aux dépenses.
Lettre dâune « mĂšre dont la fille est piĂ©gĂ©e par une secte »
(reçue à la MIVILUDES le 4 janvier 2006)
GrĂące
Ă
Internet,
jâai dĂ©couvert votre dĂ©termination de lutte
contre toutes les formes de dĂ©rives sectaires. Du fond du cĆur, je vous
en remercie. Mais les politiques doivent prendre leurs responsabilités.
160
Vous soulignez votre dĂ©sir dâaider les victimes Ă dĂ©noncer ce
quâelles ont subi. Mais faut-il quâelles en soient encore capables ! â
Ce dont je doute ! Lorsque, par ruse, jâai rĂ©ussi Ă rencontrer ma fille,
jâai constatĂ©, bien que lâintellect soit toujours intact, quâelle Ă©tait
devenue un robot, une sorte de zombi ! Quelle douleur pour une mĂšre.
Je sais quâelle est dans lâincapacitĂ© de faire cette dĂ©marche. Dâautre
part, par cette rencontre, je suis devenue « SP », et par voie de
conséquence, ma fille, une « PTS », donc, bonne pour un séjour dans
un de leur goulag. Copenhague ou Clearwater ?
Jâai la conviction quâelle y a dĂ©jĂ goĂ»tĂ©, je pense mĂȘme ĂȘtre
en mesure dâavoir une preuve. Malheureusement, je ne peux pas
déposer plainte à sa place. Elle est majeure. Nous avons tous le devoir
de sauver quelquâun qui se noie (mĂȘme majeur) mais nous ne pouvons
rien contre ces viols psychiques. Quelle hypocrisie.
Jâignore si ma fille, ancienne pensionnaire Ă la Villa MĂ©dicis,
exerce toujours comme professeur dâanalyse musicale au
Conservatoire national supérieur de musique. Il est inutile que je me
renseigne par moi-mĂȘme car de nombreuses barriĂšres existent. (âŠ) Si
vous avez la possibilité de le savoir, je vous serais infiniment
reconnaissante de me le faire savoir. Si vous lisez mon livre
« Lettres
Ă ma fille prisonniĂšre dâune secte »
82
, vous aurez la preuve de cette
descente en enfer.
On me déconseille de déposer plainte au nom de ma fille car
ces gens sont des procéduriers endurcis et riches. Pourtant, je pourrais
prouver quâĂ la suite de notre rencontre, elle a Ă©tĂ© dans lâobligation de
pratiquer une dĂ©connection, dâautre part, les accusĂ©s de rĂ©ception de
lettres recommandées que je lui adressais portaient de fausses
signatures, lâune dâentre elles portait mĂȘme lâimitation de sa signature.
Merci, Monsieur le PrĂ©sident, dâavoir lu cette lettre, si vous
pouvez faire quelque chose pour nous, je peux vous assurer dâune
infinie reconnaissance. Acceptez, Monsieur le Président, mes
sentiments respectueux. Mon souhait : Revoir ma fille avant de
mourir. Lui parler.
82
Livre Ă©ditĂ© Ă compte dâauteur, 2003
161
2 -
ACTIVITE PARLEMENTAIRE â QUESTIONS ECRITES
Une trentaine de questions écrites relatives à la problématique
sectaire ont Ă©tĂ© posĂ©es en 2005, principalement Ă lâinitiative de
députés. Comme chaque année, les ministÚres de la Justice et de la
Santé et des Solidarités furent parmi les plus sollicités. Suivent une
sélection de quelques questions dont les réponses apportent un
éclairage juridique ou rappellent la position des pouvoirs publics sera
un point précis.
Sur la lutte et la prévention
83
Depuis prÚs de deux ans, la mission interministérielle de
vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) alertait
le gouvernement au sujet des difficultés auxquelles de nombreux
médecins se heurtent afin de signaler aux autorités la situation de
victimes d'abus de faiblesse et de sujétion psychologique ou physique.
En effet, les personnes dépositaires, par état ou par profession,
d'informations à caractÚre secret ne peuvent les révéler sans s'exposer
Ă ĂȘtre poursuivies pour violation du secret professionnel. Dans
certains cas, la loi autorise ces personnes à témoigner, notamment en
cas de privations ou de sévices infligés à un mineur ou à une personne
qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son ùge ou de son
état physique ou psychologique ; ces dispositions ne semblent pas
permettre de signaler les abus frauduleux de la faiblesse de personnes
en situation de sujétion psychologique ou physique. Compte tenu de
cette situation complexe et problématique, Mme Chantal Robin-
Rodrigo, députée socialiste des Hautes-Pyrénées demande à M. le
Garde des sceaux, ministre de la Justice, de lui indiquer ses intentions
au sujet de ce dossier.
Texte de la réponse
Le Garde des sceaux, ministre de la Justice, fait connaĂźtre Ă
l'honorable parlementaire que les personnes victimes d'un abus
frauduleux en raison de leur état d'ignorance ou de faiblesse font
83
Question n°56683 publiée dans le Journal officiel (JO) du 1er février
2005 ; la réponse est parue le 2 août 2005.
162
partie de la catégorie des victimes visée par l'article 226-14 du code
pénal, lequel permet notamment à des professionnels de la santé de
dénoncer à l'autorité judiciaire des faits de mauvais traitements.
Toutefois, et malgré l'élargissement des cas de dénonciation prévus
par l'article 11 de la loi n° 2004-1 du 2 janvier 2004 relative à l'accueil
et à la protection de l'enfance, il n'apparaßt pas que les aliénations de
patrimoine, la signature d'engagements ruineux, voire la renonciation
Ă des droits dont peuvent ĂȘtre victimes ces personnes puissent ĂȘtre
compris comme étant des sévices ou privations constatés par le
professionnel. Le renforcement de la protection des victimes d'un abus
frauduleux de leur état d'ignorance ou de faiblesse pourrait justifier la
création d'une nouvelle possibilité de dérogation au secret auquel sont
astreints ces professionnels ; toutefois, une telle perspective devrait
faire l'objet d'une réflexion concertée avec les instances
professionnelles confrontées à cette difficulté.
Sur la kinésiologie, bilan et perspectives
84
M. Jean-Marc Roubaud, député UMP du Gard, appelle
l'attention de M. le ministre de la Santé et des Solidarités sur les
dérives de la
kinésiologie
. La
kinésiologie
dépasse désormais
largement son cadre d'origine, à savoir « rétablir un déséquilibre
Ă©nergĂ©tique ». Certains ouvrages vont mĂȘme jusqu'Ă prĂ©tendre qu'elle
peut avoir une influence directe sur le traitement du cancer. Or, les
notions sur lesquelles s'appuie la
kinésiologie
ne sont pas validées par
la médecine, ni par les scientifiques. En conséquence, il lui demande
s'il envisage de prendre des mesures afin que les kinésiologues ne
dépassent pas le cadre qui leur a été fixé.
Texte de la réponse
La
kinésiologie
est une pratique qui se qualifie de « thérapie
énergétique », apparue aux Etats-Unis dans les années soixante. Elle
s'est développée en France en recrutant notamment auprÚs de
professionnels de santé et d'adeptes de médecines parallÚles. Ces
derniers proposent des formations coûteuses, présentées comme
qualifiantes par leurs promoteurs, alors qu'elle n'est ni définie, ni
reconnue dans le code de la santé publique. Au contraire, la mission
interministérielle chargée de la vigilance et de la lutte contre les
84
Question n°68050 publiée dans le JO du 21 juin 2005 ; la réponse est
parue le 15 novembre 2005.
163
dérives sectaires, a appelé l'attention sur la
kinésiologie
, exercée
comme une pratique substitutive et exclusive. Ă ce titre, il importe de
souligner que toute personne qui prend part à l'établissement d'un
diagnostic ou au traitement de maladies réelles ou supposées, par des
actes personnels, consultations verbales ou écrites, ou par tout autre
procĂ©dĂ© quel qu'il soit, sans ĂȘtre titulaire d'un diplĂŽme exigĂ© pour
l'exercice de la profession de mĂ©decin ou sans ĂȘtre bĂ©nĂ©ficiaire des
dispositions relatives aux actes qui peuvent ĂȘtre pratiquĂ©s dans le
cadre des professions paramédicales, est passible de poursuites pour
exercice illégal de la médecine, aux termes de l'article L. 4161-1 du
code de la santé publique. En cas de constitution d'un tel délit,
s'agissant notamment de la mise en avant des vertus supposées de la
kinésiologie
pour traiter les cancers, le procureur de la République
doit ĂȘtre saisi d'une plainte. En outre, avant de reconnaĂźtre les bienfaits
d'une thérapie, il est indispensable de définir les pathologies
auxquelles celle-ci est destinée et d'en apprécier l'efficacité. En effet,
l'article R. 4127-19 du code de la santé publique précise que « les
médecins ne peuvent proposer aux malades ou à leur entourage
comme salutaire et sans danger un remÚde ou un procédé illusoire ou
insuffisamment éprouvé. Toute pratique de charlatanisme est interdite
». à ce jour, aucune étude validée scientifiquement n'ayant été réalisée
quant au respect de ces exigences dans le cadre de la
kinésiologie
,
cette activitĂ© ne saurait ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme une mĂ©thode
thérapeutique à promouvoir. Au contraire, il revient aux instances
disciplinaires ordinales d'infliger des sanctions aux médecins qui font
appel Ă la
kinésiologie
, non comme une thérapeutique éventuellement
d'accompagnement, mais de façon exclusive, en substitution aux
thérapeutiques éprouvées.
Sur la MIVILUDES, bilan et perspectives
85
M. Jean-Pierre Abelin, député UDF de la Vienne, appelle
l'attention de M. le Garde des sceaux, ministre de la Justice, sur les
conclusions du premier rapport de la mission interministérielle de
vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, remis le
26 janvier 2004. Ce rapport veut témoigner d'une approche plus
tranquille du phénomÚne sectaire en ne s'attaquant pas aux doctrines
professées par les mouvements mais aux actes délictueux et aux
85
Question n°33017 publiée dans le JO du 3 février 2004 ; la réponse est
parue le 15 février 2005.
164
menaces de dérives. Face aux nouvelles dérives sectaires qui
apparaissent, définies et recensées dans ce rapport, la justice est
parfois démunie. La loi dite About-Picard votée en juin 2001 connaßt
une application limitée et ne permet pas de dégager de jurisprudence.
Dans les conclusions du rapport, il est proposé d'allonger le délai de
prescription des infractions commises par des sectes. Il faudrait faire
dĂ©marrer le dĂ©lai Ă partir du jour oĂč les victimes sont
psychologiquement en état de porter plainte. L'autre proposition vise
à assouplir le secret professionnel, en permettant à un médecin de
signaler aux procureurs les faits de sujétion psychologique dont il
serait témoin. Par ailleurs, le rapport incite sur la nécessité de
contrĂŽler les offres de formation, secteur trĂšs investi par les sectes. La
MIVILUDES propose d'élaborer une convention de partenariat avec
le Centre national de la fonction publique territoriale ainsi que de
former les professions juridiques et les travailleurs sociaux aux
phénomÚnes sectaires. Dans le domaine de l'information, elle suggÚre
la diffusion d'un guide de bonnes pratiques des soins pour protéger
les malades. Pour finir, la mission interministérielle a constaté que la
moitié des départements n'étaient pas dotés de cellule de vigilance sur
les sectes et demande donc la généralisation de ce dispositif pour
cette année et souhaite désigner des correspondants MIVILUDES par
région. Il souhaiterait connaßtre son avis sur ces conclusions et les
mesures qu'il compte prendre afin de prendre en compte toutes les
analyses qui ont été faites et les propositions de ce premier rapport
afin d'améliorer l'efficience de la lutte contre les dérives sectaires.
Texte de la réponse
Le Garde des sceaux, ministre de la Justice rappelle Ă
l'honorable parlementaire que les propositions relevant du ministĂšre de
la Justice, émises par la MIVILUDES, dans son rapport annuel pour
l'année
2003, ont fait l'objet d'une réponse des services de la
chancellerie à cette instance interministérielle. S'agissant de
l'aménagement des rÚgles de prescription de l'action publique en
faveur des personnes victimes d'abus de faiblesse, il a été précisé, dans
un courrier du 23 février 2004, que, sans méconnaßtre l'importance de
cette problématique dans le cadre de procédures pénales mettant en
cause des mouvements à caractÚre sectaire, il paraissait prématuré
d'engager une étude restreinte à ce domaine particulier et qu'une
réflexion d'ensemble avec, notamment, les hautes autorités judiciaires,
devait ĂȘtre menĂ©e sur ce point. Par ailleurs, en l'Ă©tat de la lĂ©gislation
concernant l'application des dispositions de l'article 226-14 du code
pénal, aux personnes victimes d'abus de faiblesse, il n'apparaßt pas que
165
les aliénations de patrimoines, la signature d'engagements ruineux ou
la renonciation Ă des droits puissent ĂȘtre compris comme Ă©tant des
sévices ou privations constatés par le professionnel de la santé lui
permettant de dénoncer ces faits à l'autorité judiciaire. Une
modification de cet article, modifié dans un sens extensif par la
loi n°2004-1 du 2 janvier 2004 relative à l'accueil et à la protection de
l'enfance nécessite également une réflexion concertée avec les
instances professionnelles confrontées à cette difficulté. Plus
généralement, la chancellerie participe activement à l'élaboration de la
politique gouvernementale en matiĂšre de lutte contre les agissements
de mouvements à caractÚre sectaire, et ce afin d'améliorer l'efficacité
de cette lutte dans un domaine particuliĂšrement complexe.
Sur la protection des mineurs
86
M. Philippe Vuilque, député socialiste des Ardennes, appelle
l'attention de M. le Premier ministre sur les liens entre la mission
interministérielle de lutte contre les dérives sectaires et le défenseur
des enfants. De nombreux enfants sont victimes de dérives sectaires,
que ce soit dans le cadre familial, ou dans le cadre extra-scolaire,
voire scolaire. Dans ces conditions, il lui demande quel travail
commun ces deux institutions peuvent mener ensemble sur le sujet des
enfants victimes des dérives sectaires.
Texte de la réponse
Le droit français offre des ressources importantes pour assurer
aux enfants qui pourraient ĂȘtre victimes de dĂ©rives sectaires la
protection à laquelle ils ont droit. La protection générale de l'enfance
en danger est assurée par les mesures d'assistance éducative prévues
par les articles 375 et suivants du code civil quand la santé, la sécurité
ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger ou si les
conditions de son éducation sont gravement compromises. Des
mesures spĂ©ciales de protection de l'enfant peuvent ĂȘtre dĂ©cidĂ©es en
application du droit civil de la famille : retrait total ou partiel de
l'autorité parentale, attribution du droit de garde ou maintien des
relations familiales. Le droit pénal contient également de nombreux
dispositions propres Ă maintenir l'intĂ©gritĂ© physique des mineurs ou Ă
sanctionner les atteintes morales ou les carences affectives dont ils
86
Question n°64579 publiée dans le JO du 10 mai 2005 ; la réponse est parue
le 6 septembre 2005
166
pourraient faire l'objet. Les cas de maltraitance physique ou
psychologique de mineurs en relation avec l'appartenance d'un ou des
parents Ă un mouvement dit Ă caractĂšre sectaire sont exceptionnels.
Les dispositifs mis en place pour les prévenir et les réprimer
apparaissent suffisants. Le président de la MIVILUDES et la
défenseure des enfants se sont déjà rencontrés pour aborder un certain
nombre de sujets touchant Ă la protection de l'enfance et favoriser en
tant que de besoin et sur des cas concrets une collaboration utile.
Sur le respect de la laïcité
87
M. Jean-Claude Perez, dĂ©putĂ© socialiste de lâAude, appelle
l'attention de M.
le ministre de l'Education nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche sur l'application stricte du
principe de laïcité dans les établissements scolaires. En effet, la loi
n° 2204-228 du 15 mars 2004 qui encadre, en application du principe
de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une
appartenance religieuse dans les écoles, collÚges et lycées publics
reste incomplÚte sur les activités dispensées par les enseignants.
Ainsi, il est anormal que les parents appartenant aux Témoins de
Jéhovah refusent, pour leurs enfants, l'apprentissage de la musique,
du chant, de la chorale et des activités manuelles de Noël ou de
PĂąques. De mĂȘme, les activitĂ©s piscine doivent pouvoir ĂȘtre suivies
par tous et ce, quelles que soient la confession religieuse Ă laquelle
appartiennent les élÚves. Enfin, l'absentéisme constaté des catholiques
les lundis, lendemains de communion privée, ou des musulmans, le
jour de l'Aïd, peut également soulever de légitimes interrogations. En
conséquence, il souhaite savoir quel est son point de vue sur le sujet et
quelles mesures il entend prendre pour que le principe de laïcité
s'applique dans sa globalité et pas seulement sur le port de signes ou
de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles.
Texte de la réponse
La laïcité de l'enseignement public est un principe
constitutionnel. Toute manifestation allant Ă l'encontre de ce principe
est interdite à l'intérieur des écoles, collÚges et lycées publics. Les
dispositions de la loi n° 2004-228 du 15 mars 2004, qui ne portent que
sur l'interdiction du port par les élÚves de signes ou de tenues qui
87
Question n°59672 publiée dans le JO du 8 mars 2005 ; la réponse est parue
le 19 juillet 2005
167
manifestent ostensiblement une appartenance religieuse, n'ont pas
modifié ces rÚgles. C'est ce que rappelle la circulaire du 18 mai 2004,
prise en application de cette loi : « Les obligations qui découlent pour
les élÚves du respect du principe de laïcité, ne se résument pas à la
question des signes d'appartenance religieuse ». Ainsi, les convictions
religieuses ne sauraient ĂȘtre opposĂ©es Ă l'obligation d'assiduitĂ©, Ă
laquelle sont tenus tous les élÚves inscrits dans un établissement
scolaire, et justifier un absentéisme sélectif. Les élÚves doivent
assister à l'ensemble des cours prévus à leur emploi temps sans
pouvoir refuser les matiĂšres qui leur sembleraient contraires Ă leurs
convictions, qu'il s'agisse de l'apprentissage de la musique, des
activités manuelles ou des séances de piscine, organisés sur le temps
scolaire. En ce qui concerne les grandes fĂȘtes religieuses, et
notamment l'Aïd, dont les dates sont rappelées chaque année au
Bulletin officiel de l'éducation nationale, des autorisations d'absence
doivent pouvoir ĂȘtre accordĂ©es aux Ă©lĂšves si ces dates ne coĂŻncident
pas avec un jour de congĂ©. En revanche, les lendemains de fĂȘtes
religieuses ne donnent pas lieu Ă des autorisations d'absence
spécifiques.
Sur la scolarisation des enfants
88
M.
Jean-Marc Roubaud, député UMP du Gard, appelle
l'attention de M. le ministre de l'Intérieur, de la Sécurité intérieure et
des Libertés locales sur le problÚme des mouvements sectaires qui
touchent les jeunes dans notre pays. La Mission interministérielle de
vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES)
s'inquiĂšte dans son rapport annuel des mouvements sectaires, plus que
les grandes sectes déjà connues des autorités ; ce rapport
s'intĂ©ressant avant tout Ă la maniĂšre d'empĂȘcher les jeunes de se
laisser convaincre. La Mission considÚre que les dérives sectaires ont
été moins apparentes en 2004 mais qu'elles gagnent en diversité et
complexité avec le développement de nouvelles structures plus
diffuses. Elle observe notamment l'apparition de groupes comme le
satanisme, la nébuleuse new age, les thérapies alternatives, ou encore
les tentatives d'infiltration en direction des publics fragiles... Un
essaimage qui ne remet pas en cause les sectes plus anciennes et plus
connues comme les adeptes de Ron Hubbard ou de Moon. Le rapport
88
Question n°62382 publiée dans le JO du 12 avril 2005 ; la réponse est
parue le 9 août 2005
168
demande notamment le renforcement du contrĂŽle de l'obligation
scolaire, contrĂŽle de la situation des 1000 enfants environ qui, hors de
l'école, sont instruits dans leur famille, et contrÎle des 40.000 élÚves
fréquentant les établissements privés hors contrats, dont une infime
minorité sont des communautés fermées ou intégristes, ou des lieux de
pédagogie alternative qui mériteraient une attention renforcée. Le
plus souvent, en effet, ces établissements sans contrat avec l'éducation
nationale n'ont rien Ă voir avec les sectes, il s'agit de boĂźtes Ă bac (des
écoles de remise à niveau), d'écoles religieuses, ou de pédagogies
libertaires. La Mission demande aussi un contrĂŽle des enseignements
privés et indépendants en psychothérapie ; selon le rapport, ils se
multiplient, gourous et charlatans aussi. En conséquence, il lui
demande quelles mesures concrĂštes en phase avec ce rapport
le Gouvernement entend prendre afin de lutter efficacement contre les
mouvements sectaires en France et plus particuliĂšrement concernant
le renforcement du contrĂŽle de l'obligation scolaire ainsi que des
enseignements privés et indépendants en psychothérapie. - Question
transmise Ă M. le ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement
supérieur et de la Recherche.
Texte de la réponse
L'enseignement dispensé aux mineurs instruits dans les
familles ou dans les établissements privés hors contrat est
réguliÚrement contrÎlé par les personnels d'inspection de l'éducation
nationale, conformément aux articles L. 131-10, D. 131-11 à D. 131-
16 du code de l'éducation, et aux dispositions de la circulaire n° 99-
070 du 14
mai
1999, relative au renforcement du contrĂŽle de
l'obligation scolaire. Ce systÚme a été conçu plus spécifiquement pour
lutter contre les dérives sectaires qui peuvent affecter les enfants d'ùge
scolaire. Ainsi, pour ce qui concerne les enfants instruits dans leur
famille, aprĂšs une enquĂȘte du maire portant sur les conditions de
l'instruction, un contrÎle pédagogique est réguliÚrement exercé par
l'inspecteur d'académie pour vérifier que celle-ci est conforme aux
articles D. 131-11 à D. 131-16 du code de l'éducation, définissant le
contenu des connaissances requises des enfants instruits dans la
famille ou dans les établissements privés hors contrat. En cas
d'absence d'instruction, ou de difficultés familiales autres
qu'éducatives, les instances compétentes (procureur de la République,
aide sociale Ă l'enfance) doivent ĂȘtre saisies aussitĂŽt. Un contrĂŽle
comparable existe pour les établissements privés hors contrat. En cas
de constat de carences persistantes, les parents sont mis en demeure
d'inscrire leurs enfants dans un établissement d'enseignement ou, selon
169
le cas, dans un nouvel établissement. Des sanctions pénales sont
prévues en cas de refus d'obtempérer. Ainsi, dÚs qu'un enfant a fait
l'objet d'une déclaration d'instruction auprÚs du maire, soit par
l'établissement dans lequel il est inscrit, soit par la famille si celle-ci
assure son instruction, les contrÎles prévus peuvent s'exercer afin de
garantir que l'éducation à laquelle il a droit lui est dispensée dans des
conditions normales. C'est le cas de la quasi-totalité des enfants. En
revanche, les enfants non scolarisés qui ne font pas l'objet d'une
dĂ©claration d'instruction ne peuvent pas ĂȘtre contrĂŽlĂ©s et l'influence
éventuelle de sectes peut alors s'exercer jusqu'à ce qu'ils soient
repĂ©rĂ©s. Bien qu'en nombre infime, ces enfants sont malaisĂ©s Ă
dĂ©tecter. Avant mĂȘme la publication du rapport de la mission
interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires
(MIVILUDES), la cellule chargée de la prévention des phénomÚnes
sectaires dans l'éducation (CPPS) a organisé à Poitiers les 7 et
8 avril une session de formation destinée aux personnels d'inspection
(deux par académie), afin de les sensibiliser au contrÎle de l'obligation
scolaire et de mettre au point les protocoles d'inspection. La priorité de
la CPPS pour la prochaine année scolaire sera de s'assurer du suivi de
ce stage et de la bonne application des dispositions législatives en
vigueur.
Sur le prosélytisme, lutte et prévention
89
M. Philippe Vuilque, député socialiste des Ardennes, attire
l'attention de M. le ministre de la Santé et des Solidarités sur
l'utilisation abusive que la commission des citoyens pour les droits de
l'homme (CCDH) fait des événements tragiques survenus récemment
dans le secteur de la psychiatrie. La CCDH, affiliĂ©e notoirement Ă
l'Ăglise de scientologie, a encore publiĂ© une brochure luxueuse sur
Les Jeunes en danger, brochure qui a notamment été envoyée à tous
les parlementaires. Il lui demande quelles mesures il compte prendre
pour que la propagande de cette officine sectaire soit contrecarrée.
Texte de la réponse
La Commission des citoyens pour les droits de l'homme,
affiliĂ©e Ă l'Ăglise de scientologie, intervient activement et de façon
répétée depuis plusieurs années dans le champ de la psychiatrie sur
89
Question n°66909 publiée dans le JO du 14 juin 2005 ; la réponse est
parue le 18 octobre 2005.
170
différents thÚmes tels que les électrochocs, la consommation des
psychotropes, les « internements » psychiatriques présentés comme
abusifs. Elle édite de nombreux rapports et brochures, ces derniÚres
souvent luxueuses, cherchant à accréditer sa thÚse selon laquelle la
psychiatrie est une discipline dangereuse. Une note ministérielle
d'information du 27 mai 1997 - largement diffusée et souvent rappelée
depuis cette date - relative Ă l'intervention de certaines organisations
dans le domaine de la psychiatrie insiste sur le fait que la
dénomination de certaines de ces derniÚres peut porter à la confusion
et que la commission des citoyens pour les droits de l'homme
(CCDH), Ă©manation de l'Ăglise de scientologie, ne saurait ĂȘtre
confondue avec la Commission nationale consultative des droits de
l'homme placée auprÚs du Premier ministre. Une parfaite vigilance est,
par voie de conséquence, recommandée. Actuellement la CCDH, dans
ses interventions, met plus particuliĂšrement l'accent sur les jeunes.
C'est ainsi qu'elle a organisé à Pais le 22 juin 2005 un colloque dont le
thÚme était :
« Les jeunes en danger : les enfants européens, un
nouveau marché pour la psychiatrie »
(mise en garde contre le
dépistage systématique et le traitement médicamenteux des pseudo-
troubles mentaux des enfants). à cet égard, les services déconcentrés,
pour répondre aux accusations de l'
Ăglise de scientologie
d'abus de
prescription de ritaline chez les enfants hyperactifs, ont reçu comme
instruction de diffuser auprÚs des médecins généralistes et des
praticiens hospitaliers une information leur précisant les modalités
selon lesquelles la prescription de ritaline est encadrée en France. De
façon générale, le ministre, particuliÚrement attentif à la vulnérabilité
des personnes fragilisées du fait de troubles mentaux, est
particuliÚrement vigilant quant aux actes répréhensibles qui pourraient
ĂȘtre commis Ă leur Ă©gard et rĂ©agiront en consĂ©quence. Plusieurs notes
d'information ont été diffusées, du 27
mai
1997 précitée, du
3
octobre
2000 sur les dérives sectaires et une troisiÚme du
16 octobre 2000 relative aux réponses à apporter à la mise en cause du
recours à l'électroconvulsivothérapie. Une aide réguliÚre téléphonique
est apportée aux services déconcentrés. Un chargé de mission anime
les actions liées au traitement et à la prévention du phénomÚne
sectaire pour le compte des ministĂšres sociaux.
171
Sur le prosélytisme, lutte et prévention
90
M.
Philippe Vuilque, député socialiste des Ardennes,
s'inquiĂšte de l'organisation par l'Ăglise de scientologie d'une collecte
de jouets dans plusieurs arrondissements du Nord et de l'Est parisien.
Il craint que cette opération soit surtout destinée à identifier de
nouvelles cibles de recrutement au travers du listing des donateurs et
des receveurs contactés. Ce groupement, dont le caractÚre sectaire est
avĂ©rĂ© notamment depuis le procĂšs de l'Ăglise de scientologie de Lyon,
dĂ©ploie en effet une intense activitĂ© de prosĂ©lytisme, notamment Ă
l'égard des enfants. C'est pourquoi il interroge M. le Garde des
sceaux, ministre de la Justice, sur le résultat des éventuels contrÎles
de la CNIL sur les fichiers informatisés de ce mouvement sectaire,
ainsi que sur les poursuites qui pourraient ĂȘtre diligentĂ©es sur le
fondement de la loi du 12 juin 2001 réprimant la publicité pour les
mouvements sectaires Ă destination de la jeunesse.
Texte de la réponse
Le Garde des sceaux, ministre de la Justice, fait connaĂźtre Ă
l'honorable parlementaire que, s'agissant des contrĂŽles de la CNIL sur
les fichiers informatisés détenus par des mouvements sectaires, des
poursuites pénales ont été engagées à l'encontre d'une personne morale
et de son président pour traitement d'informations nominatives malgré
l'opposition légitime de la personne concernée et entrave à l'action de
la CNIL, suite Ă la plainte dĂ©posĂ©e par un particulier. Par arrĂȘt du
13 octobre 2003, la cour d'appel de Paris a condamné cette personne
morale Ă une peine d'amende de 5 000 euros avec sursis pour
traitement d'informations nominatives malgré l'opposition légitime de
la personne concernée et son président à une peine d'amende de 5 000
euros avec sursis de ce chef ainsi que d'entrave Ă l'action de la CNIL.
Cette décision est aujourd'hui définitive, suite au rejet du pourvoi des
prĂ©venus, par un arrĂȘt de la Cour de cassation du 28 septembre 2004.
Enfin, s'il n'y a pas eu, à ce jour, de poursuite pénale sur le fondement
de l'article 19 de la loi du 12 juin 2001 tendant Ă renforcer la
prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte
aux droits de l'homme et aux libertĂ©s fondamentales dans la mesure oĂč
cette nouvelle incrimination rĂ©primant toute forme de publicitĂ© Ă
destination de la jeunesse nécessite des condamnations pénales
définitives préalables de la personne morale ou de son dirigeant de
90
Question n°31921 publiée dans le JO du 20 janvier 2004 ; la réponse est
parue le 22 février 2005
172
droit ou de fait pour des infractions limitativement énumérées par
l'article susvisĂ© ; des poursuites pourraient ĂȘtre susceptibles d'ĂȘtre
engagées à l'encontre de ce mouvement, celui-ci se livrait à des actes
de prosélytisme à l'égard de la jeunesse.
Sur la lutte et la prévention contre les organisations sectaires
91
M. Philippe Vuilque, député socialiste des Ardennes, attire
l'attention de M. le ministre de l'Economie, des Finances et de
l'Industrie sur le rĂŽle des douanes en matiĂšre de lutte contre les
mouvements qualifiés de « sectes ». Il lui demande quels sont les
leviers sur lesquels les services douaniers peuvent agir pour lutter
avec efficacité contre les dérives sectaires.
Texte de la réponse
Dans le domaine de la lutte contre les dérives sectaires,
l'action de la direction générale des douanes et droits indirects se
manifeste pour l'essentiel selon deux axes principaux : le recueil du
renseignement, d'une part l'information et la sensibilisation des
services douaniers au phénomÚne, à ses caractéristiques économiques
et financiĂšres et Ă sa dimension transfrontaliĂšre, d'autre part. En ce qui
concerne le recueil du renseignement relatif aux dérives sectaires, les
diverses missions incombant Ă la douane ne lui permettent que
rarement d'appréhender directement le phénomÚne sectaire et de
constater des agissements répréhensibles pouvant s'apprécier comme
résultant de dérives sectaires. Néanmoins, à l'occasion de l'exercice de
ses missions classiques liées à la police des marchandises, au contrÎle
des aspects financiers des transactions commerciales et des flux
physiques de capitaux, la douane peut se trouver en situation d'obtenir
des renseignements relatifs Ă des faits susceptibles de constituer des
dérives de type sectaire. Cette mission de vigilance exercée par la
douane dans ce domaine trouve notamment Ă s'appliquer dans le cadre
des contrĂŽles Ă la circulation en vue de lutter contre les trafics illicites.
Les suites d'un contrÎle et certaines procédures contentieuses sont
susceptibles de révéler des éléments d'appréciation d'une possible
dérive sectaire. La direction générale des douanes et droits indirects ne
manque alors pas d'adresser des rapports d'information Ă la mission
interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires
91
Question n°68464 publiée dans le JO du 28 juin 2005 ; la réponse est
parue le 20 septembre 2005.
173
(MIVILUDES), placée auprÚs du Premier ministre. La direction
nationale du renseignement et des enquĂȘtes douaniĂšres (DNRED) a
vocation Ă ĂȘtre l'interlocuteur opĂ©rationnel douanier privilĂ©giĂ© de la
MIVILUDES : les informations collectĂ©es par les diffĂ©rents services Ă
l'occasion des contrÎles effectués sur le terrain sont centralisées par la
DNRED, qui les synthétise et les communique à son tour à la
MIVILUDES lorsqu'elles s'avĂšrent pertinentes. En ce qui concerne
l'information et la sensibilisation des personnels de la direction
générale des douanes et droits indirects dans le domaine des dérives
sectaires, une fiche documentaire Ă l'usage de l'ensemble des services
douaniers a été établie en liaison avec la MIVILUDES. Elle est
destinée à informer ces derniers sur les missions de la mission
interministĂ©rielle, ainsi que le rĂŽle que la douane peut ĂȘtre amenĂ©e Ă
jouer dans le domaine de la lutte contre les dérives sectaires
(présentation du phénomÚne des dérives sectaires appréhendé de
maniĂšre globale, mais aussi, sur un plan plus technique, information
des agents sur les différents critÚres à retenir à l'occasion de la mise en
oeuvre des contrÎles). Par ailleurs, la documentation élaborée et mise
Ă jour par la MIVILUDES est tenue Ă la disposition de l'ensemble des
services. A terme, la sensibilisation et la formation des services sur
l'importance du rĂŽle de la douane en matiĂšre de recueil, d'analyse et de
transmission de renseignements relatifs aux dérives sectaires devraient
permettre de renforcer la contribution de cette administration Ă cette
mission. Ces actions pourraient, le cas Ă©chĂ©ant, ĂȘtre conduites en
partenariat avec la MIVILUDES.
174
3
ADRESSES ET LIENS UTILES
Les adresses des sites présentés ci-dessous contiennent un
grand nombre de documents dâinformations utiles Ă consulter. La
MIVILUDES laisse à leurs auteurs la responsabilité de leur
contenu
92
:
- lâUnion nationale des associations pour la DĂ©fense de la famille et
de lâindividu victime des sectes (UNADFI) :
- le Centre de documentation, dâĂ©ducation et dâaction contre les
manipulations mentales (CCMM) :
- le Groupe dâEtude des mouvements de pensĂ©e pour la prĂ©vention de
lâIndividu (GEMPPI) :
http://www.ifrance.com/sectes-info-gemppi/
- lâAssociation Vie religieuse et Familles
- Psychothérapie Vigilance
- Autres adresses utiles :
http://www.sos-therapires.org/
92
Liste non limitative
175