A Bruxelles, mercredi, à l’issue d’une réunion, les dirigeants du G7 ont menacé Moscou de nouvelles sanctions en cas d’escalade du conflit en Ukraine dans leur communiqué final. Sans entrer cependant dans les détails :
Nous confirmons la décision des pays du G7 d’imposer des sanctions sur des personnes ou des entités qui ont soutenu activement ou participé à la violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine et qui menacent la paix, la sécurité et la stabilité en Ukraine. Nous menons une politique stricte de non-reconnaissance de la Crimée/Sébastopol en accord avec la résolution de l’assemblée générale de l’ONU 68/262. Nous sommes prêts à intensifier les sanctions ciblées et à mettre en oeuvre d’importantes nouvelles mesures restrictives pour faire payer un coût supplémentaire à la Russie si les événements le requéraient.
Comme le souligne Philippe Ricard, correspondant du Monde à Bruxelles, « rien de concret n’a été décidé et le sommet du G7 organisé pour la première fois à Bruxelles en l’absence de Vladimir Poutine a surtout une portée symbolique ».
Le président américain Barack Obama pousse les Européens à prendre des sanctions économiques, mais ces derniers temporisent.
Les Allemands ne veulent pas mettre en danger leur approvisionnement énergétiques, les Anglais cherchent à préserver leurs intérêts financiers, les Français leurs intérêts économiques. Plus largement, les Européens sont divisés sur la stratégie à adopter face à la Russie. Angela Merkel, la chancelière allemande, a jugé que le G7 a trouvé ces dernières semaines « le bon équilibre » entre menaces de sanctions et consultations avec la Russie.
Quelles sont les sanctions qui ont déjà été prises?
Sanctions militaires
Washington a annoncé le 3 mars la suspension de sa coopération militaire avec la Russie à la suite de l'intervention de Moscou en Crimée. Le 1er avril, les ministres des affaires étrangères des 28 pays membres de l'OTAN ont emboîté le pas aux Américains en gelant « la coopération civile et militaire avec la Russie », sans préciser l'ampleur de cette mesure.
Deux programmes essentiels sont exclus d'office. D'une part, les troupes de l'OTAN ne peuvent achever le retrait de leurs troupes d'Afghanistan sans la coopération de la Russie, par où transite une partie des hommes et du matériel. Les Etats-Unis doivent avoir achevé ce retrait à la fin de l'année. Par ailleurs, les accords sur la lutte contre le trafic de drogue, notamment entre l'Afghanistan et l'Europe, reste également inchangée.
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Sanctions financières et restrictions de visas
L'Europe est restée en retrait sur les sanctions financières, principal levier brandi par les Occidentaux contre la Russie. L'initiative est laissée aux Etats-Unis, moins exposés aux contrecoups économiques. L'Union européenne avait annoncé une première série de sanctions financières à l'encontre de responsables de second rang au lendemain du référendum entérinant l'annexion de la Crimée (le 16 mars), élargie depuis. Les Européens, hésitants et divisés, ont décidé le 14 avril d'ajouter encore quatre noms, qui restent à déterminer.
Le 12 mai, après l’annonce par Moscou de sa volonté de respecter l'expression de la volonté des Ukrainiens de l'Est lors des référendums, l'Union européenne a décidé d'élargir encore sa liste des sanctions ciblées en l'absence de désescalade en Ukraine.
Treize noms de personnalités russes ou prorusses ont été ajoutées à la liste des 48 personnes déjà visées par une interdiction de visa et un gel de leurs avoirs, de même que deux entreprises criméennes ayant tiré profit de l'annexion de la Crimée par la Russie.
Les Etats-Unis, eux, ont visé le premier cercle du régime russe le 21 mars. Les plus proches collaborateurs de M. Poutine et des oligarques de premier plan sont désormais interdits de séjour aux Etats-Unis, et leurs avoirs bloqués.
Une banque russe, la Rossia, 17e établissement du pays avec 10 milliards de dollars (7,2 milliards d'euros) d'avoirs, a été interdite d'activité aux Etats-Unis. Elle a été coupée des circuits Visa et Mastercard, et interdite de fait d'exercer des opérations internationales, étant donné la prééminence du dollar dans les flux financiers internationaux. Cette cible est perçue comme un exemple de ce que risque la Russie si les Etats-Unis s'attaquaient à une banque de plus grande importance.
Fin avril, Washington a ajouté dix-sept banques et autres sociétés où des proches du président russe, voire Vladimir Poutine lui-même, possèdent des intérêts, à la liste des avoirs touchés, en représailles aux « actes de provocation » en Ukraine.
En outre, sept nouvelles figures de l'oligarchie sont visées, notamment Igor Setchine, ancien conseiller du président russe et directeur du géant pétrolier Rosneft, ainsi que Sergueï Chemezov, directeur général de Rostec, conglomérat public opérant dans le domaine de la haute technologie. Les nouvelles sanctions ciblent en effet des proches de Vladimir Poutine, tels que Dmitri Nikolaïevitch Kozak, vice-premier ministre responsable notamment de la préparation des JO de Sotchi, ainsi que des acteurs des secteurs-clés de l'économie, notamment le magnat du pétrole Igor Setchine, à la tête de la major Rosneft.
Les avoirs de ces sociétés sont gelés aux Etats-Unis, et les Américains ont interdiction de commercer avec les entités ou individus en question, ces derniers se voyant refuser l'entrée du pays.
L'administration américaine avait aussi annoncé une révision des conditions d'exportation vers la Russie d'équipements de haute technologie pouvant avoir un usage militaire.
Le vice-ministre des affaires étrangères russe, Sergueï Riabkov, déplore des décisions qui frappent« nos entreprises et nos secteurs de hautes technologies » et marquent selon lui le renouveau de la « politique du rideau de fer ».
Sanctions diplomatiques
Pour protester contre le rattachement de la Crimée à la Russie, les dirigeants occidentaux avaient décidé, le 25 mars lors du sommet de La Haye, d'annuler le sommet du G8 prévu en juin à Sotchi (Russie). Ce G8 a été remplacé par un G7, sans la Russie, qui a eu lieu les 4 et 5 juin à Bruxelles.
Sanctions économiques
Les Européens ont accepté le 20 mars le principe d'adopter des sanctions économiques contre la Russie au cas où la situation viendrait à se détériorer en Ukraine par la faute de Moscou. Mais la décision devra être prise à l'unanimité par les dirigeants des 28 Etats de l'UE lors d'un sommet européen. La Commission européenne a été chargée de préparer des options et d'étudier leur impact sur les économies de l'UE. La décision dépend maintenant de la volonté politique des Etats. Tous les secteurs économiques sont concernés et cette perspective inquiète les industriels européens.
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