
Emmanuel Macron a prononcé son discours devant le palais du Pharo, dont une partie sous la pluie.
AFP
"Envoie les sous !" Dans un reportage filmé de l'arrivée d'Emmanuel Macron à la cité Bassens, dans les quartiers Nord de Marseille, on entend clairement cette invective d'un adolescent du quartier. Dans une langue qui va droit au but, ce jeune Marseillais résume bien l'état d'esprit des habitants et des élus de la deuxième ville de France. La situation économique, sociale, éducative et sécuritaire est telle que le milliard et demi d'euros d'investissement de l'Etat annoncé par le président de la République est le bienvenu.
On retiendra qu'au sein de la généreuse enveloppe, les écoles et les transports sont les secteurs les mieux lotis. Un investissement d'inspiration très macronienne, dans la mobilité à tous les sens du terme, qu'elle soit géographique, pour désenclaver les quartiers, ou en faveur de l'éducation et sa promesse d'ascension sociale. Après des décennies d'investissement dans la rénovation urbaine, les pouvoirs publics ont réalisé, à Marseille comme ailleurs, qu'on pouvait changer la ville sans changer la vie. L'établissement public Euroméditerranée reconstruit au nord du Vieux-Port la ville depuis maintenant vingt-cinq ans. Ce vaste projet (tours de bureaux, écoquartiers, lieux culturels) a amélioré la physionomie de certains quartiers sans venir à bout des questions de ségrégation urbaine, dans cette ville souvent qualifiée de duale en raison de l'importance des écarts de niveaux de vie entre les populations.
L'investissement dans l'éducation a depuis remplacé le tout-urbain comme remède aux problèmes sociaux. Pour imparfaite qu'elle soit, la dynamique impulsée par Emmanuel Macron était nécessaire, tant l'état des établissements scolaires marseillais est indigne. Ce n'est pas tout : cette visite a l'avantage de remettre Marseille au premier plan, redonnant aux Marseillais cette fierté qu'ils sont si prompts à mettre en avant, comme si les occasions d'en ressentir se faisaient de plus en plus rares. "Ville des possibles" selon les termes du maire Benoît Payan, Marseille est trop souvent devenue celle des résignations et de la défiance interpersonnelle. Ce qu'on appelle pudiquement les incivilités est la forme que prend cette indifférence à l'autre, ce règne du chacun pour soi au détriment de l'intérêt collectif. Ce qui manque à la deuxième ville de France, au-delà des sous, c'est le sentiment de ses habitants d'être reliés par un projet et un destin communs.