Tout est fou dans cette campagne. Personne ne peut prévoir ni l'affiche finale ni dans quel monde nous vivrons au moment de l'échéance. D'un côté, les électeurs n'ont jamais eu autant de pouvoir : celui de désigner leurs principaux candidats. De l'autre, leur vote n'a jamais été si contraint : par le calendrier judiciaire, l'agenda terroriste ou le score annoncé du FN. Au milieu du tourbillon, il faut distinguer ce qui relève de notre conjoncture et de tendances plus lourdes. La plupart des pays connaissent une lame de fond démocratique, qui tourne paradoxalement à l'avantage des autoritaires. Ce que Jean-Luc Mélenchon a rebaptisé le « dégagisme » permet certes de « dégager » les tyrans et de renouveler la classe politique des démocraties encroûtées. Mais toute pièce a son revers. Comme le fond de l'air est frais, et même effrayant, ce vent souffle surtout dans les voiles de la colère, de la revanche, et mute parfois en violent désir d'ordre. Au choix, les islamistes ou les militaires pour l'après-printemps arabe. Quand l'Amérique ou l'Europe hésitent plutôt entre droite dure et droite extrême.

Article abonné
Crise de régime, entre "dégagisme" et egopolitik
Par
Caroline Fourest
Publié le