HISTOIRE ET TRADITION DE L’INFANTERIE

Les combats de CAMERONE (Camaron)

Avertissement : Notice du lieutenant-colonel Philippe Guyot, conservateur du musée de l’artillerie, in La Légion étrangère, histoire et dictionnaire, sous la direction d’André–Paul Comor, éditions Robert Laffont, collection Bouquins, préface d’Etienne de Montéty, 1152 p, 2013.

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Camerone, village agricole des « Terres Chaudes » situé sur l’ancienne route royale de Vera-Cruz à Puebla, à 65 kilomètres de la côte du Golfe du Mexique. Composé d’un hameau indien et de l’ancienne hacienda de la Trinidad, il fut le théâtre d’un combat entre une compagnie de Légion et un détachement mexicain de près de 2000 hommes, le 30 avril 1863. Longtemps dénommé « Villa Tejeda », ce gros bourg a retrouvé depuis peu le nom de « Camaron de Tejeda » et abrite un mémorial dédié à ce fait d’armes.

Dans le cadre de l’intervention française au Mexique, le Régiment étranger (R.E.) faisait partie du troisième renfort de février 1863, envoyé pour donner au général Forey une brigade de réserve capable d’assurer la sécurité des lignes de communication pendant la reprise du siège de Puebla. Avec le 7e Régiment de ligne et un bataillon égyptien, la Légion assurait la protection des convois entre le port de Vera Cruz et la ville d’Orizaba. Le poste de commandement du R.E. était au Chiquihuite, avec le 1er Bataillon, tandis que le 2e Bataillon était à La Soledad. Les compagnies étaient réparties en 5 garnisons d’Ouest en Est : 4 compagnies au Chiquihuite, 2 au Paso del Macho, 4 à La Soledad, 2 à La Loma et 1 à La Tejeria. Dans la partie centrale du dispositif, entre Paso del Macho et La Soledad, une portion d’itinéraire de 25 kilomètres environ était particulièrement exposée aux attaques venant du Nord (région de La Joya), organisées par le Gouverneur de Huatusco avec des troupes régulières et des unités de partisans afin de perturber la chaine logistique française. Le colonel Jeanningros, chef de corps du R.E., conscient du danger qui pesait sur cette région, y organisa un système d’escortes mobiles au profit des convois, avant d’y installer en juin 1863 une garnison où séjournèrent en permanence une à deux compagnies, renforcées par l’unité de Contre-guérilla du colonel Dupin.

Fin avril 1863, la 3e Compagnie, unité de service de la place du Chiquihuite, est désignée pour effectuer une de ces missions d’escorte, pour un convoi en cours de formation à La Tejeria. En l’absence du capitaine Cazes, malade, elle est commandée par l’adjudant-major du 1er Bataillon, le capitaine Jean Danjou. Au cours du déplacement entre le Chiquihuite et La Soledad effectué dans la nuit du 29 au 30 avril pour limiter les effets de la chaleur, la 3e Compagnie rencontre des partisans mexicains sur le lieu-dit Palo Verde. Cherchant à préciser le renseignement sur cet ennemi, le capitaine Danjou le poursuit sur quelques kilomètres jusqu’au village en ruines de Camaron où il est attaqué par plusieurs unités de cavalerie. Dans le but de réduire l’avantage de mobilité de cette cavalerie et de fixer l’ennemi en attendant des renforts, il se fortifie dans la partie hôtellerie de l’hacienda de la Trinidad. Dans l’après-midi, l’arrivée des unités d’infanterie mexicaines fait basculer l’avantage et après un combat d’une dizaine d’heures, les trois derniers légionnaires survivants acceptent de se rendre en échange de soins pour leurs blessés et des honneurs militaires. Ce combat, connu de la Légion depuis son déroulement, est mis en valeur une première fois en 1907 sur la frontière de Chine au poste de Ta-Lung par le lieutenant François, avant d’être commémoré comme la fête annuelle majeure depuis1931. Par tradition, la Légion étrangère célèbre ce souvenir avec le texte officiel suivant :

« L’armée française assiégeait Puebla. La légion avait reçu pour mission d’assurer, sur 120 kilomètres, la circulation et la sécurité des convois. Le colonel Jeanningros, qui commandait, apprend le 29 avril 1863, qu’un gros convoi emportant trois millions en numéraire, du matériel de siège et des munitions était en route pour Puebla. Le capitaine Danjou, son adjudant-major, le décida à envoyer au devant du convoi une compagne. La 3e Compagnie du Régiment étranger fut désignée, mais elle n’avait pas d’officiers disponibles. Le capitaine Danjou en prend lui-même le commandement et les sous-lieutenants Maudet, porte-drapeau, et Vilain, payeur, se joignent à lui volontairement.

Le 30 avril, à 1 heure du matin, la 3e Compagnie, forte de 3 officiers et 62 hommes, se met en route. Elle avait parcouru environ 20 kms, quand, à 7 heures du matin, elle s’arrête à Palo Verde pour faire le café. A ce moment, l’ennemi se dévoile et le combat s’engage aussitôt. Le capitaine Danjou fait former le carré et, tout en battant en retraite, repousse victorieusement plusieurs charges de cavalerie en infligeant à l’ennemi des premières pertes sévères.

Arrivé à hauteur de l’auberge de Camerone, vaste bâtisse comportant une cour entourée d’un mur de 3 mètres de haut, il décide de s’y retrancher pour fixer l’ennemi et retarder ainsi le plus possible le moment où celui-ci pourra attaquer le convoi. Pendant que les hommes organisent à la hâte la défense de cette auberge, un officier mexicain, faisant valoir la forte supériorité du nombre, somme le capitaine Danjou de se rendre. Celui-ci fait répondre : « Nous avons des cartouches et ne nous rendrons pas. » Puis, levant la main, il jura de se défendre jusqu’ la mort et fit prêter à ses hommes le même serment. Il était 10 heures. Jusqu’à 6 heures du soir, ces 60 hommes, qui n’avaient pas mangé, ni bu depuis la veille, malgré l’extrême chaleur, la faim, la soif, résistent à 2000 mexicains : 800 cavaliers, 1200 fantassins.

A midi, le capitaine Danjou est tué d’une balle en pleine poitrine. A 2 heures, le sous-lieutenant Vilain tombe, frappé d’une balle au front. A ce moment, le colonel mexicain réussit à mettre le feu à l’auberge.

Malgré la chaleur et la fumée qui viennent augmente leurs souffrances, les légionnaires tiennent bon, mais beaucoup d’entre eux sont frappés. A 5 heures, autour du sous-lieutenant Maudet, ne restent que 12 hommes en état de combattre. A ce moment, le colonel mexicain rassemble ses hommes et leur dit de quelle honte ils vont se couvrir s’ils n’arrivent pas à abattre cette poignée de braves. (Un légionnaire qui comprend l’espagnol traduit au fur et à mesure ses paroles.) Les Mexicains vont donner l’assaut général parles brèches qu’ils ont réussi à ouvrir, mais auparavant le colonel Milan adresse encore une sommation au sous-lieutenant Maudet ; celui-ci la repousse avec mépris.

L’assaut final est donné. Bientôt, il ne reste autour du sous-lieutenant Maudet que 5 hommes : le caporal Maine, les légionnaires Catteau, Wensel, Constantin Léonard. Chacun garde une cartouche : ils ont la baïonnette au canon et, réfugiés dans un coin de la cour, le dos au mur, ils font face ; à un signal, ils déchargent leurs fusils çà bout portant sur l’ennemi et se précipitent sur lu à la baïonnette. Le sous-lieutenant Maudet et deux légionnaires tombent, touchés à mort. Maine et ses deux camarades vont être massacrés quand un officier mexicain se précipite sur eux et les sauve ; il leur crie : « rendez vous ! ». « Nous nous rendrons si vous nous promettez de relever et de soigner nos blessés et si vous nous laissez nos armes ». Leurs baïonnettes restent menaçantes. « On ne refuse rien à des hommes tels que vous ! » répond l’officier.

Les 60 hommes du capitaine Danjou ont tenu jusqu’au bout leur serment ; pendant 11 heures, ils ont résisté à 2000 mexicains, en ont tué 300 et blessé autant. Ils ont, par leur sacrifice, en sauvant le convoi, rempli la mission qui leur avait été confiée.

L’Empereur Napoléon III décida que le nom de Camerone serait inscrit sur le drapeau du Régiment étranger et que, de plus, les noms de Danjou, Vilain et Maudet seraient gravés en lettres d’or sur les murs de Invalides à Paris. En outre, un monument fut élevé en 1892 sur l’emplacement du combat. Il porte la citation suivante :

Ils furent ici moins de soixante opposés à toute une armée. Sa masse les écrasa. La vie plutôt que le courage abandonna ces soldats français, le 30 avril 1863. 

A leur mémoire, la Patrie éleva ce monument. Depuis lors, lorsque les troupes mexicaines passent devant le monument, elles présentent les armes. »

 Histoire du fusil Chassepot

Antoine Alphonse Chassepot est né le 4 mars 1833 à Mutzig.
À 18 ans, il entre à la Manufacture de Chatellerault et, en 1856, devient ouvrier à la manufacture d’armes de Saint-Etienne où il propose un système de culasse dont l’étanchéité est assurée par un joint en caoutchouc.

Chassepot met au point le fusil qui portera son nom et sera adopté par l’armée française en 1866 sous l’appellation de fusil d’infanterie Ile 1866. Il est le premier système d’arme à culasse mobile, rompant avec le chargement par la bouche et améliorant considérablement la cadence de tir. Le bataillon de Chasseurs à pied de la Garde en sera le premier doté.

Drapeaux des régiments d’infanterie de Louis XV